Céline Loubières
2004
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L'équipe qui prend en charge les patients au sein de cette association est constituée d'un
médecin psychotérapeute et anthropologue, de médecins, d'interprètes ou encore de
travailleurs sociaux, tous d'origines diverses: ivoirienne, marocaine ou française.
L'objectif des consultations est de permettre aux malades d'exprimer leur souffrance avec la
particularité, d'une part d'amener les soignants à prendre conscience de leurs propres modèles
de pensée, ceci pour mieux aider les patients, et d'autre part de prendre en compte la culture
de référence ainsi que de le parcours migratoire de ces patients.
La méthode employée dans le cadre de ces consultations est une méthode de soins dite
complémentariste; autrement dit, le comportement du malade est perçu dans un premier temps
au travers de la psychologie et de la psychanalyse, pour une approche thérapeutique, puis au
travers de l'anthropologie pour une approche complémentaire.
Dans ce contexte, la problématique des soins est organisée autour des conditions d'insertion
dans la société d'accueil, ou encore des problèmes psychopathologiques liés à la
transplantation.
Les différents patients qui se trouvent pris en charge par ces consultations sont envoyés suite à
des demandes émanant de médecins des hôpitaux et de centre médico-sociaux de la
communauté urbaine de Bordeaux, ainsi que de médecins généralistes ou d'associations d'aide
sociale.
Les demandes de ces acteurs sont pour la plupart motivées par une surdétermination
culturelle, un échec des traitements médicaux ou sociaux, ou encore par une admiration de la
culture de l'autre.
Ces consultations sont donc portées sur la culture d'origine du patient et pour montrer que
parfois la culture ne suffit pas pour une bonne prise en charge, l'auteur décrit le parcours
migratoire et l'itinéraire thérapeutique d'un patient.
Le cas de ce patient, du fait de sa forte résistance à la consultation, a permit à l'auteur de
signifier qu'il ne faut pas, sous prétexte que l'on reconnaît l'impact des données culturelles
dans le processus de soin, omettre de prendre en compte « l'interrelation » entre les divers
ordres de facteurs (sociaux, politiques, économiques, culturels) qui influent sur la santé.
Atteint d'un infarctus du myocarde ce patient originaire de Tunisie a été envoyé à la
consultation par un psychiatre qui se trouvait dans une impasse pour soulager sa douleur.
Dès le début de la prise en charge ce patient est réticent à la démarche de la consultation qui
tente de prendre en compte la dimension sociale de son existence ainsi que de faire des
allusions à sa culture d'origine. Selon lui, cette démarche lui est proposée en raison des échecs
de la biomédecine et ne fait que s'éloigner de la maladie dont-il souffre.
Ainsi, dès que le groupe qui le prend en charge tente d'établir un lien entre sa maladie et la
manière dont cette souffrance peut être interprétée dans son pays, ce patient renvoie les
thérapeutes au problème organique qui le préoccupe et estime que ces éléments d’ordre
culturels ne l'aideront en rien.
Malgré ses réticences, ce patient continu à se rendre aux consultations et justifie sa
participation en expliquant que malgré tout, cela peut l'aider à long terme et ce n'est qu'après
plusieurs séances qu'il se racontera non pas au travers de ses origines culturelles mais au
travers de son parcours migratoire et de son appartenance sociale.
Dés lors, dans ce cas particulier, il apparaît pour le groupe que la référence culturelle au
Maghreb n'apporte rien à la résolution des troubles.