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La reconnaissance des industries culturelles6 date bien sûr de quelques années, mais
l’analyse de leur structure et la mesure de leurs performances n’ont commencé à prendre forme
qu’assez récemment. On commence à comprendre plus précisément la contribution qu’apportent
les industries culturelles à la réalisation de plusieurs objectifs sociaux et économiques, notamment
la croissance du PIB, la création d’emplois, le développement régional, la revitalisation urbaine et
la cohésion sociale. Dès lors, on comprend que dans les pays développés comme dans les pays
en développement, un modèle d’industries culturelles permet de créer entre la culture et
l’économie des liens qui tiennent compte à la fois de l’importance économique des activités
créatives, de la valeur culturelle spécifique qui leur est inhérente et de celle qu’elles produisent.
Quelles sont les implications des industries culturelles dans la politique culturelle ? À un
certain niveau, il est possible de faire une distinction entre la situation des pays économiquement
avancés et celle des pays se trouvant à des stades de développement antérieurs. Dans les
premiers, les industries culturelles ont tendance à être dominées par de grands groupes - les
multinationales de l’édition ou de la musique, par exemple - ce qui tend à montrer l’existence d’une
forte orientation commerciale de la politique culturelle. Au contraire, le secteur culturel des pays en
développement sera généralement caractérisé par de petites et moyennes entreprises (PME), et la
politique principalement axée sur le développement culturel et économique local.
Pourtant, il s’agit le plus souvent d’une fausse dichotomie car, quel que soit leur stade de
développement, la plupart des pays sont intéressés par les industries culturelles à tous les
niveaux. Ainsi, dans les pays développés par exemple, même si ce sont de grandes entreprises
culturelles qui réalisent la part la plus importante de la contribution économique, le secteur culturel
est aussi susceptible qu’ailleurs de s’intéresser à l’activité culturelle basée sur la consommation et
la production artistiques locales. De même, l’attention des décideurs des pays en développement
ne reste pas uniquement centrée sur le développement culturel local et elle est susceptible de
s’élargir pour explorer aussi les possibilités d’un engagement accru sur le marché culturel mondial.
Ainsi, lorsqu’on considère l’importance des industries culturelles pour le développement
durable, il faut voir les choses d’une façon plus complète, qui soit suffisamment générale pour
prendre en compte les éléments communs aux processus de développement partout où ils sont à
l’œuvre et suffisamment souple pour s’adapter aux circonstances et exigences propres à chaque
pays. Cette approche est esquissée ci-dessous.
3. Vers une approche opérationnelle d’un développement culturellement durable
Compte tenu de la façon dont a évolué la compréhension du concept de durabilité et celle du
rôle de la culture dans le développement comme nous l’avons vu ci-dessus, nous proposons
maintenant un ensemble de principes pour un développement culturellement durable qui, de notre
point de vue, seront mieux mis en pratique si l’on donne des industries culturelles et de la place qui
pourrait être la leur dans le programme de développement d’un pays une définition plus large.
Commençons par observer les similitudes formelles qui existent entre le capital naturel
(ressources naturelles, biodiversité et écosystèmes naturels) et le capital culturel (atouts culturels,
diversité culturelle et « écosystèmes » ou réseaux culturels). Il est possible d’en déduire une série
de principes pour le développement qui peuvent être considérés comme culturellement durables
suivant les critères sur lesquels repose le concept de développement durable formulé d’un point de
vue écologique et environnemental. Voici un exemple d’ensemble de principes :
6 Donner une définition précise des industries culturelles ou créatives reste un problème délicat.
L’UNESCO les définit comme des industries combinant création, production et commercialisation de
contenus qui sont immatériels et culturels par nature et qui sont généralement protégés par le droit
d’auteur. La plupart des classifications d’industries culturelles comprennent au moins les catégories
suivantes : arts visuels et arts du spectacle ; musique ; industries audiovisuelles, y compris radio,
télévision et cinéma ; édition ; presse écrite ; nouveaux médias ; patrimoine culturel ; certains aspects du
design ; et certains services créatifs comme l’architecture.