Étude des charges, décharges et migrations de particules

Discipline : Génie Électrique
Étude des charges, décharges et migrations de particules dans un flux gazeux.
Application à la modélisation d'un procédé de précipitation électrostatique.
Doctorant : Sylvain GAYCHET
Directeur de thèse : M. Jean PAILLOL
Laboratoire d’accueil : Laboratoire de Génie Électrique – Équipe DEM
Résumé :
Ce travail de thèse porte sur l'étude des décharges couronnes négatives dans l'air à
pression atmosphérique intervenant dans un procédé d'électrofiltration développé par le CEA.
L'objectif est de comprendre dans quelle mesure, et comment, les phénomènes extérieurs
inhérents à l'électrofiltration, en particulier l'alimentation spécifique utilisée, la température et
la présence des particules polluantes dans l'intervalle ou sous forme de dépôts sur les
électrodes, modifient la décharge afin d'améliorer les procédés d'électrofiltration. Ce travail
est basé sur une étude expérimentale fondamentale de la décharge négative ainsi que sur des
simulations numériques de la décharge dans des conditions proches du fonctionnement de
l'électrofiltre pilote du CEA.
1 Introduction :
La filtration électrostatique offre de nombreux avantages du point de vue du
traitement des déchets nucléaires. En effet, elle permet de filtrer des particules d’une taille
inférieure au micron, en n'engendrant ni déchets secondaires (absence de média filtrant), ni
pertes de charge dans le circuit de traitement. L'électrofiltre auquel nous nous intéressons
utilise une cathode formée de plusieurs pointes réparties de façon hélicoïdale sur une tige-
support. Chacune de ces pointes est en regard de la paroi de la cheminée métallique
(cylindrique). Des travaux antérieurs ont montré la pertinence d'une alimentation électrique
continue superposée à des impulsions de tensions qui permettent d'augmenter la charge des
poussières, sans passer à l'arc. En première approximation, on peut considérer que l'on est en
présence d'une multitude de couples d'électrodes pointe-plan découplées. Pour simplifier nous
avons réduit l'étude du procédé de filtration à une décharge couronne négative dans un
système pointe-plan.
L'objectif du travail de thèse est la compréhension des paramètres dynamiques de
l'électrofiltration, en particulier l'alimentation pulsée, l'épaisseur du dépôt de poussières sur
les électrodes et la température qui modifient de façon très importante le régime de décharge
couronne. Le but est d'améliorer le rendement du procédé d'électrofiltration en tenant compte
de la variation dynamique de ces paramètres externes. Le travail de thèse porte donc, d'une
part, sur une étude fondamentale des processus d'initiation et de développement des décharges
couronnes négatives dans l'air à la pression atmosphérique et d'autre part sur le rôle des
paramètres externes dynamiques sur le rendement. Ce travail est basé sur des simulations
numériques et des résultats expérimentaux fondamentaux.
Une partie de l'étude expérimentale est dédiée aux phénomènes d'électrofiltration avec la
conception d'une maquette permettant de simuler des écoulements similaires à ceux du pilote
semi-industriel du CEA mais dont l'environnement est contrô (température, hygrométrie,
vitesse et débit d'écoulement des effluents). Une étude expérimentale plus fondamentale
basée sur la spectroscopie par corrélation croisée de la décharge couronne négative a été
effectuée à l'I.N.P. (Greisfwald, Allemagne). En parallèle un code de calcul 2D à maillage
structuré déformé a été développé pour prendre en compte une électrode émissive en forme
de pointe. Les poussières sont intégrées au code de calcul permettant ainsi de modéliser les
phénomènes de charges, et d'étudier leur influence sur l'initiation et la propagation de la
décharge sur différentes échelles de temps.
2 Résultats expérimentaux :
Une première série d'expériences a été effectuée afin de déterminer l'influence des
poussières sur les tensions de transition des régimes de décharge négative, dans l'air ambiant
avec un espace inter-électrodes d'un centimètre.
De façon naturelle, lorsque la tension appliquée au système augmente continuement, trois
régimes différents en courant se succèdent : impulsions de courant erratiques, impulsions de
courant régulières superposées à un courant continu faible, et courant continu seul de forte
valeur (quelques mA) (cf. Figure 1).
Figure 1 : Courants d'une décharge couronne négative
L'injection de poussières dans l'intervalle abaisse de 100V les tensions de transition des
régimes présentés sur la Figure 1. Le rôle des poussières est cependant plus important
lorsqu'elles constituent un film régulier sur l'électrode émissive (cathode) : la tension
d'amorçage se trouve réhaussée de quelques centaines de Volts tandis que la tension
d'apparition du fond continu est abaissée d'au moins 2kV, et sur l'électrode collectrice
(Anode) semble apparaître une activité importante de décharge pouvant participer à la
filtration. Ces premiers résultats expérimentaux ont donné lieu à la participation à un congrès
(Colloquium on Plasma Processes, juin 2009, Marseille [1]).
Spa
rk
No
activit
y
Eratics
pulses DC
current
Periodic mode, DC
current appears
15 kV
8 kV 12 kV
~18
kV
1 2 3
Transition Voltages
Figure 2 : Évolution temporelle du courant de décharge (a). Évolution spatio-temporelle du premier système
négatif -FNS- (b) et du second système positif -SPS- (c).
a.
b.
c.
En parallèle, une première campagne de mesures vouée à l'étude fondamentale de la décharge
couronne négative par Spectroscopie à Corrélation Croisée (Cross Correlation Spectroscopy -
CCS) a été effectuée en collaboration avec l'I.N.P. de Greifswald Allemagne (séjour de 2
mois, du 15 avril au 15 juin 2009). Cette technique [2] permet de mesurer l'intensité
lumineuse d'une décharge à partir d'une méthode de comptage de photons (single photon
counting). L'évolution spatio-temporelle de l'émission du premier système négatif
(λ=391,5nm - ) et du second système
positif (λ=337,1nm - ) de l'azote d'une
décharge couronne négative a ainsi pu être mesurée (Figure 2 (b) et (c)). Ces deux réactions,
les plus lumineuses lors de la décharge, correspondent à 2 niveaux différents d'excitation, à
fort et faible champ électrique.
L'évolution spatio-temporelle des intensités lumineuses du premier système positif et du
second système négatif peut être, en première approximation, interprétée comme l'évolution
de la densité électronique et du champ électrique respectivement et permet ainsi une
description qualitative du développement de la décharge au cours du temps. Ces premières
mesures associées à la mesure du courant de décharge (Figure 2 (a)) permettent de valider les
hypothèses émises sur les phases d'initiation et de propagation de la décharge couronne
négative obtenues en simulation numérique :
la décharge s'amorce dans l'espace inter-électrodes à proximité de la cathode,
une onde d'ionisation se propage vers chacune des électrodes, le maximum
d'ionisation se produisant à la cathode. Ce maximum coïncide avec le maximum du
courant de décharge.
3 Simulation numérique :
La modélisation des décharges repose sur la résolution des équations de continuité du
plasma de décharge, couplées à la résolution de l’équation de Poisson :
N
t∇ 
W N =S , ∇ rV=q.Nt
0
, E =−∇ V
N représente la densité de particules (électrons (Ne), ions positifs (Np) ou ions négatifs
(Nn)), W leurs vitesses de dérive respectives, V le potentiel électrique, E le champ électrique,
Nt la densité nette de charge, q la charge électronique élémentaire, εr la permittivité relative et
ε0 la permittivité du vide. S, terme source de l’équation de continuité, correspond à la création
et la disparition de particules chargées dans l'intervalle. Les coefficients de ce terme ainsi que
les vitesses des particules dépendent de façon non linéaire du champ électrique E.
La simulation numérique d'une décharge couronne nécessite un code de calcul 2D
axisymétrique. De plus, la présence d'électrodes de géométries complexes impose un
traitement particulier. Un code de calcul 2D axisymétrique a été développé utilisant un
maillage structuré déformé [3] et permettant ainsi la prise en compte de système d'électrodes
pointe-plan (cf. Figure 3).
Les particules polluantes (ou poussières) ont été intégrées au code de calcul en considérant,
d'une part, une densité de poussières dans l'espace inter-électrode afin de modéliser leurs
phénomènes de charge et leur influence sur l'initiation et la propagation de la décharge.
D'autre part, le dépôt formé par les poussières sur l'électrode collectrice (anode/plan) a été
modélisé, en première approximation, par la présence d'un diélectrique parfait ou comprenant
une cavité sur l'électrode considérée.
L'exemple de simulation présenté est effectuée dans l'air à pression atmosphérique sur
un espace inter-électrodes de 1 cm et une tension appliquée de 25kV. Les poussières, dont les
caractéristiques (densité, diamètre moyen et constante diélectrique) sont spécifiques des
poussières filtrées par l'électrofiltre du CEA, sont prises en compte par l'introduction d'une
densité homogène dans l'intervalle inter-électrodes. A noter que sur la base de temps
considérée, les poussières sont immobiles.
Les figures 4 et 5 représentent, respectivement, l'évolution spatio-temporelle de la densité
électronique et du champ électrique lors de la propagation d'une décharge négative, ou
« streamer négatif » de la pointe/cathode vers le plan/anode et l'évolution de ces grandeurs
après l'arrivée du streamer à l'anode (phase de post-décharge). Cette dernière phase est
marquée par une diminution significative de la densité d'électrons dans l'intervalle, dont la
vitesse de dérive est 100 fois supérieure à celle des ions.
Figure 3 : Maillage structuré déformé, exemple de système d'électrodes pointe-plan
Figure 4 : Contours de densité électronique [cm-3] et de champ électrique axial [V.cm-1] d'un streamer
négatif après 1ns (à gauche) et 5ns , avant l'impact du streamer sur l'anode droite).
Figure 5 : Contours de densité électronique [cm-3] et de champ électrique axial [V.cm-1] d'un streamer
négatif durant la post-décharge après 10ns (à gauche) et 450ns (à droite).
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