Cours M2-ICE 2007 Roy-Barman : Traceurs chimiques 5
Figure 1 : Comportement du Fer et du Plomb dissous dans un
estuaire. Dès l’arrivée de l’eau douce dans l’estuaire, Pb est
éliminé par adsorption sur des particules qui sédimentent. Au
contraire, du Fer est remis en solution par la dissolution de
minéraux transportés par la rivière ou de sédiments remis en
suspension par les courants de marée. D’après [Braungardt, 2003
#836].
L’atmosphère
Le vent transporte sur de grandes distances des particules arrachées à la
surface des continents ou formées dans l’atmosphère. Au contact avec l’eau de mer,
ces particules se dissolvent partiellement libérant des éléments chimiques. L’impact
de ces apports est globalement faible par rapport à celui des rivières. Cependant, il
peut être significatif pour les métaux insolubles qui sont efficacement stoppés par les
estuaires (voir chapitre particules marines). Des quantités non négligeables de
phosphates et de nitrates peuvent être également dissoutes à partir de particules
transportées par le vent depuis les continents vers l’océan ouvert.
L’atmosphère échange des quantités importantes de gaz avec l’océan. Ces
flux seront discutés plus loin. Ces gaz (à l’exception notable de CO2) ne rentrent pas
en compte dans l’estimation de la salinité qui ne concerne que des espèces non
volatiles.
Le volcanisme et l’hydrothermalisme
Les bassins océaniques sont parcourus par des chaînes de montagnes sous
marines hautes de 2 à 3 km qui sont le siège d’un volcanisme intense (lequel est une
des manifestations de la tectonique des plaques). Parmi les gaz émis lors des
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éruptions, on trouve Cl2 qui est à long terme la principale source d’ions Cl- de l’océan
(si les rivières apportent des ions Cl-, ces derniers proviennent essentiellement des
embruns marins transporté par le vent et de l’érosion des roches salines d’origine …
marine ; ceci n’enrichit donc pas l’eau de mer en Cl par rapport à Na).
Le volcanisme sous-marin est à l’origine d’une autre source d’éléments pour
l’océan : les fluides hydrothermaux. A l’origine de ces fluides, on trouve de l’eau de
mer qui s’infiltre et qui circule dans la croûte océanique. A l’approche des zones
volcaniques, elle s’échauffe, réagit avec les roches environnantes pour former les
fluides hydrothermaux. Ces fluides ressortent à des températures allant jusqu’à 350°C
par des cheminées appelées « fumeurs noirs » car les panaches qu’elles éjectent sont
rendus noirs par la précipitation d’hydroxydes et de sulfures de fer. Durant leur
parcours dans la croûte océanique, la composition chimique des fluides évolue
fortement :
- Quand ils sont encore froids, ils perdent une partie de leurs cations par
réaction avec la croûte: Li, Ba, Rb, K, Ca2+, UO3,… et en particulier Mg2+ dont la
concentration est virtuellement nulle dans les fluides hydrothermaux « purs » (non
mélangés avec de l’eau de mer).
- Au fur et à mesure que les fluides percolent, ils s’échauffent et
deviennent acides et réducteurs. Ils dissolvent alors de nombreux éléments chimiques
tels que Li, Ba, Rb, K, Sr et de nombreux métaux.
Au total, les apports hydrothermaux sont significatifs par rapport aux rivières
dans le cas des éléments les plus solubles (Li, Sr, Mn). Les métaux (Cu, Ni, Co…)
sont rapidement précipités lors du mélange des fluides hydrothermaux avec l’eau de
mer froide et oxydante créant ainsi des dépôts métallières au voisinage des fumeurs
noirs. Fe et Mn, dont l’oxydation est un peu plus lente, sont transportés sur des
distances plus grandes et ils précipitent pour former des croûtes de Fe et de Mn dans
des zones de faible sédimentation.
L’élimination des éléments chimiques
La composition chimique de l’eau de mer dépend non seulement des apports
mais aussi de la vitesse à laquelle chaque élément est éliminé de l’océan. Nous avons
déjà vu que certains éléments dissous sont perdus lors de la circulation de l’eau de
mer dans la croûte océanique. D’autres éléments sont incorporés dans des composés
volatiles et perdus par diffusion dans l’atmosphère. C’est le cas, par exemple, des
composés azotés qui peuvent être transformés par les bactéries en N2 volatile. C’est
également le cas du dimétyl-sulfate qui est produit par le plancton qui l’utilise comme
antigel et qui est volatile : dans l’atmosphère, il s’oxyde et forme des gouttelettes
microscopiques d’acide sulfurique qui contrôle la formation des nuages. Cependant, le
principal puits d’éléments chimique est la sédimentation de matière particulaire au
fond de l’océan. Les ions sont incorporés à ces particules sous l’effet de l’activité
biologique (synthèse de matière organique, formation de squelettes et de coquilles
pour le calcium et la silice par exemple, formation d’oxydes de Mn par des
bactéries…) ou par des réactions chimiques abiotiques (absorption d’éléments
chimiques sur des oxydes de fer ou de Mn, sur des argiles…). Enfin, d’autres
éléments sont piégés directement dans les sédiments (sulfates, pyrite) où à leur surface
dans de nodules de Mn. Le rôle des particules marines et des sédiments sera détaillé