Le Japon sur des oeufs
Au Japon, Haruhiko Kuroda le nouveau gouverneur de la Banque du Japon, a annoncé qu’il
voulait doubler la taille du bilan de sa banque. Elle devrait atteindre 60% du PIB fin 2014, contre
30% à la fin de 2012 ! Cette décision souhaitée par Shinzo Abe le nouveau Premier ministre, dans
le cadre de son plan, surnommé par les investisseurs « Abenomics » a immédiatement été saluée
par la hausse des actions japonaises, qui se sont littéralement envolées cette semaine. Elle est
néanmoins une stratégie risquée, si cela n’arrête pas la déflation mortifère qui touche l’économie
japonaise depuis vingt ans et surtout si cela ne fait pas repartir la croissance. Ce qui est probable,
car quand le rendement de l’obligation d’Etat 10 ans est à 0,32%, il n’y a plus beaucoup de marge
de manœuvre pour baisser les taux qui donneront envie aux entreprises d’emprunter. En tout cas,
George Soros, le légendaire gérant de hedge fund estimant que cette stratégie était dangereuse
s’est mis à vendre le yen à découvert pour profiter de la baisse de la devise japonaise.
Pour bien prendre la mesure de l’importance de cette révolution monétaire, il faut la comparer
avec celle de la Federal Reserve américaine qui avec plus de 3000 Md$ de dette rachetée dans
les marchés depuis le début de la crise, n’en est actuellement qu’à 20% du PIB. Mohamed el-Rian
de Pimco a d’ailleurs redit une fois de plus, que les stratégies d’expansion de bilan de la banque
centrale étaient des stratégies expérimentales qui avaient beaucoup de chances de se terminer
dans les larmes.
Le dévoiement monétaire d’une banque centrale se termine en général, à son dernier stade
par l’achat d’obligations directement émises par l’Etat et non plus sur le marché secondaire. Les
exemples de ce type dans l’histoire sont la République de Weimar qui s’est terminée dans l’hyper
l’hyperinflation, le développement du populisme et l’arrivée au pouvoir de Hitler. En 1923, un
dollar valait 4 milliards de deutschemark. Dans le Zimbabwe de Monsieur Mugabe, l’hyper
inflation a atteint en 2008 des sommets avec un taux annuel de 231 millions pour cent.
Concrètement, cela signifiait que le prix moyen des biens en juillet cette année était 231 millions
de fois plus chers qu’une année auparavant. La situation économique du pays était simplement
apocalyptique. Dans l’ancien grenier à céréales de l’Afrique (=la Rhodésie), un pain coûtait entre
7 000 et 10 000 dollars zimbabwéens soit entre 27 et 43 euros.
Les économistes sont en retard dans l’analyse de la
complexité du monde
Sur les effets des politiques monétaires non conventionnelles qui ont été menée par les
Etats-Unis, la Grande-Bretagne et dans une moindre mesure par l’Europe, les économistes ne
sont pas en mesure de répondre de façon claire à des questions aussi simples que : 1/ en période
de récession faut il réduire le déficit budgétaire ou l’augmenter ? 2/ l’Etat providence doit-il
augmenter ses prestations ou les réduire pour inciter les chômeurs à chercher activement un
emploi. 3/ est-ce que les inégalités de revenus sont de nature à encourager l’activité
économique ?
Anatole Kaleytsky de GaveKal Londres a assisté à la conférence du Institute For New Economic
Thinking à Hong Kong. Cette fondation dotée de 150M$ a pour mission de trouver des solutions à
ces questions en dehors des réponses convenues sur le retour à l’équilibre, l’efficience du marché
et la foi aveugle dans les statistiques.
Anatole Kaletsky estime que le monde est trop complexe et incertain pour être analysé
avec des modèles. L’influence des marchés peut aboutir à des erreurs désastreuses. L’économie
mondiale doit être gérée de façon flexible en ne fixant pas des objectifs irréalistes en matière
d’inflation, d’endettement, de chômage. On voit bien, dit-il, que les normes adoptées par le Traité
de Maastricht (=déficit de 3% du PIB et une dette de 60% du PIB sont les critères maximum
tolérés) sont en train de détruire l’euro.
Et pendant ce temps la France continue d’emprunter à
1,75% à 10 ans
En France, l’affaire Cahuzac a fait l’objet de suffisamment de commentaires pour ne pas en
rajouter dans le cadre de cette chronique. Il faut absolument lire le papier de Charles Gave de
GaveKal sur « Tartuffe patron des socialistes ». Le vrai sujet est maintenant de savoir quand le
gouvernement prendra enfin conscience que l’on ne peut relancer une économie en dépensant
toujours plus et faire fonctionner une économie insérée dans la mondialisation sans capital et
sans investisseurs…
Pierre Moscovici, ministre de l’Economie, pendant que tous les journaux et télévisions
commentaient l’affaire Cahuzac en boucle, en a profité pour admettre qu’il n’y aurait pas de
croissance en 2013 et très peu en 2014. En fait on peut s’attendre à ce que d’ici six mois le PIB se
contracte au rythme de 1% et le PIB marchand (=le secteur privé seul créateur d’emplois
durables) au rythme de 3%.
Tout cela, curieusement n’empêche toujours pas la France d’émettre des obligations à dix ans
rémunérées à 1,75%. C’est une stratégie qui soumet les épargnants à une double peine. L’Etat
pratique la « répression financière » pour orienter l’épargne vers le financement de sa dette et
ensuite par la pression fiscale et l’inflation le rendement devient négatif.
Dans la rubrique des mauvais signe, la troisième faillite d’Heuliez SAS (emboutissage et
carrosserie) soutenue en 2010 par la présidente de la région Poitou Charente n’est pas une bonne
nouvelle. La société a perdu 5M€ pour un chiffre d’affaires de 35M€. Quant à l’activité voiture
électrique reprise par Mia Electric elle ne décolle toujours pas (1500 voitures vendues en 2012
au lieu des 12 000 escomptés !). L’exercice du métier de banquier peu compatible avec les
contraintes politiques ne va pas être facile pour Nicolas Dufourcq directeur général de la BPI.
Entre Jean-Pierre Jouyet, président et « meilleur ami du président » et Ségolène Royal vice-
présidente de la BPI et « ex-compagne du président » la marge de manœuvre va être plutôt
faible.
L’Europe à bout de souffle attend les élections
allemandes
Le sauvetage de Chypre peut avoir des conséquences très négatives. On pourrait voir des
retraits importants dans des banques considérées comme faibles. Le premier endroit où cela se
produira sera Chypre. Dans le cadre du dispositif Emergency Liquidity Assistance (ELA) Bank of
Cyprus et Laiki Bank peuvent tirer jusqu’à 15Md€. A Ce jour 13Md€ ont été déjà tirés ! La gestion
de cette crise a été catastrophique.
En Italie, cinq mois après les élections il n’ y a toujours pas de gouvernement. Les banques
italiennes ont baissé de 30% depuis leur plus haut de janvier. En Espagne, où l’on assiste à une
forte baisse de l’encours de crédit à l’économie, la situation n’est pas meilleure avec un recul des
banques ibériques de 20% sur la même période. Au Portugal, la rigueur imposée par l’Europe ne
fait plus l’unanimité. On assiste à la fin de l’entente entre le premier ministre de centre droit
Pedro Passos Coello et le parti socialiste.
La situation en Europe est d’autant plus compliquée que l’on approche des élections allemandes
qui auront leu en septembre et que les problèmes de la France vont malheureusement devenir
ceux de l’Europe entière.
En Europe, on a eu un recul de la production industrielle. Mario Draghi le président de la BCE
s’est montré plutôt pessimiste sur les perspectives économiques.
Les actifs européens auront des performances décevantes tant que les sujets politiques n’auront
pas été tranchés.
Aux Etats-Unis, les derniers indices ISM laissent présager une croissance de 2% au T2 après
+3% au T1. Les dernières statistiques de l’emploi pour le mois de mars ont été divisées par trois.
Ce qui n’est finalement pas si mal. Le rebond surprise des commandes de biens durables est une
bonne nouvelle mais plusieurs sociétés ont prévenu que leurs résultats ne seraient pas à la
hauteur des attentes du marché : ce sontFedEx, Oracle, Adobe Systems, Apple
Matières premières : cuivre et or en baisse
Le cours du cuivre devrait encore baisser car l’offre de métal va augmenter avec le
développement de Escondida la plus grande mine de cuivre du monde située au Chili. Par rapport
au plus haut de 2011, la baisse du cuivre atteint déjà 28%. Les valeurs concernées par cette
évolution : BHP Billiton (Australie UK), Anglo American (UK/Afrique du Sud), Freeport
McMoran (US), Antofagasta (Chili), Codelco (Chili),Aurubis (Allemagne/raffinerie).
L’or est passé de 1 690$ l’once à la mi-janvier à 1 570$. Didier saint Georges le stratégiste de
Carmignac a annoncé que les fonds gérés par Carmignac avaient réduit significativement leur
exposition or. Parmi les valeurs qui se trouvaient au début de l’année dans le portefeuille de
Carmignac Investissement on note : Newmont Mining, Detour Gold, Franco Nevada Corp,
Kinross Gold Corp et Eldorado Gold Corp.
Secteurs : Télécommunications en Europe et Raffinage
aux Etats-Unis affectés
Le secteur des télécommunications a souffert cette semaine sur des perspectives de
ralentissement de chiffre d’affaire. La société qui ont le plus baissé étant TeliaSonera (Suède)
et Telecom Italia (-5,4%) en Europe à la baisse. Parmi les autres valeurs susceptibles d’être
affectées il y a : France Telecom, Bouygues, Vivendi, Vodafone (UK), Deutsche Telekom.
Le secteur du raffinage aux Etats-Unis a baissé cette semaine de 10% après avoir doublé en
un an. Les deux éléments qui expliquent ce mouvement sont le ralentissement de la demande en
Europe et en Asie ainsi que l’instauration de normes environnementales plus strictes. Les valeurs
qui ont le plus souffert sont les raffineurs indépendants notamment : Valero Energy, Marathon
Petroleum, Tesoro Corp
Dans le cloud computing, F5 Networks une des valeurs vedette du secteur a reculé de 19%
après l’annonce de résultats T2 un peu en dessous des estimations des analystes… A suivre.
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