“Mobilité des jeunes, sécurité alimentaire et réduction de la pauvreté

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obilité des jeunes, sécurité alimentaire et réduction de la pauvreté rurale
ETUDE/ENQUETE : MIGRATION RURALE EN TUNISIE (RuMiT)
LA MIGRATION DES JEUNES RURAUX EN TUNISIE : SES FACTEURS, SES
MODALITES ET SON IMPACT SUR LA SECURITE ALIMENTAIRE ET LES SOURCES
DE REVENU
Objectifs de l’étude
1) Développer et tester une méthodologie pour analyser l’exode rural des jeunes et les facteurs de la
migration et de la mobilité;
2) Examiner la diversité des profils migratoires et des types de mobilité des jeunes, et leurs impacts sur la
sécurité alimentaire, les sources de revenu des foyers et des individus, et les dynamiques du travail dans
les régions d’origine en Tunisie;
3) Recommander des mesures politiques en vue de stimuler les opportunités d’emploi des jeunes dans des
activités liées à l’agriculture, et d’offrir des alternatives aux migrations causées par la détresse.
Argumentaire
Des changements majeurs, économiques et politiques, affectent les moyens d’existence, les institutions et
l’organisation des territoires dans les régions méditerranéennes. La modification des systèmes agro-pastoraux
en cours dans ces régions depuis plusieurs décennies a eu des conséquences importantes sur la sécurité
alimentaire et sur les sources de revenu. Les problèmes liés à l’administration et à la gestion soutenable de ces
territoires sont à l’origine des crises socio-économiques et politiques qui affectent ces régions, notamment les
flux d’émigration et l’instabilité sociale.
Dans la plupart des pays en voie de développement, l’exode rural est une stratégie pour élargir, diversifier ou
protéger les ressources locales, et pour diminuer la vulnérabilité des foyers et des communautés, grâce à des
emplois et des revenus alternatifs (migration de main-d’œuvre). Les mécanismes de la migration sont
complexes, avec une large palette de facteurs d’attraction et de rejet, parmi lesquels les changements
climatiques et la dégradation des ressources naturelles sont autant de déclencheurs des mouvements de
population et des modifications des sources de revenu dans les zones rurales (migrations causées par la
détresse). Les dynamiques migratoires sont affectées par nombre de variables sociales, économiques,
culturelles et politiques. Leur analyse doit mobiliser différentes disciplines et expertises. Des facteurs aussi
variés que le chômage ou le sous-emploi rural, le niveau de revenu, la disponibilité d’eau et de terres, ou la
possibilité d’accéder aux services essentiels, contribuent à déterminer la migration rurale et ses modalités. Des
enquêtes récentes révélé le rôle d’autres variables, comme les réseaux des migrants et le niveau d’éducation,
qui jouent un rôle dans la décision de quitter les régions rurales ; ces variables agissent à plusieurs niveaux :
l’individu, le ménage et la communauté.
2
Le cas de la Tunisie
L’agriculture demeure un secteur important pour l’économie et la société tunisiennes : elle représente 9% du
PIB du pays, et constitue la principale source d’emploi pour 16% de la population (EuroStat, 2014). Plus de la
moitié de la production agricole étant pluviale, les investissements hydrauliques sont cruciaux. D’importantes
différences existent entre les 24 gouvernorats du pays, en termes de ressources environnementales, de
structures administratives, et de niveau d’investissements publics et privés : les gouvernorats du centre et du
sud disposent de moins d’eau inférieure et sont moins bien intégrés dans l’économie nationale. Ces régions
ont souffert d’une marginalisation au cours de toute leur histoire, et ont récemment subi les conséquences des
changements climatiques et des désordres civils et politiques dans les pays voisins (Libye, Algérie). Malgré
l’importance de son secteur primaire, la Tunisie est très dépendante des importations pour sa sécurité
alimentaire. Les niveaux de misère sont élevés dans les régions rurales, où habitent environ 75% des pauvres
du pays (WB-FAO-IFAD 2009, Improving Food Security in Arab Countries). Plus de 90% des ménages ruraux
comptent au moins un de leurs membres émigvers les zones urbaines. Les statistiques de l’INS (Annuaire
2011-2012) indiquent que chaque année 160,000 individus migrent à l’intérieur du pays ; 70% d’entre eux
sont des jeunes de 15-29 ans. D’après les estimations de lUNDESA, le nombre des migrants internationaux
provenant de la Tunisie est augmenté de plus de 9% entre 2010 et 2013.
Alors que l’économie du pays a enregistré des réussites remarquables au cours des dernières décennies, la
distribution des richesses n’a pas profité aux zones rurales. Au contraire, les communautés rurales ont connu
une dégradation de leurs conditions socio-économiques, avec des niveaux des revenus agricoles en baisse et
des taux de chômage en hausse. En même temps ces zones sont devenues plus vulnérables face aux crises
déterminées par les changements des marchés et du climat. L’affaiblissement des institutions sociales
traditionnelles qui en est résulté, affecte particulièrement les zones rurales. En règle générale, les politiques de
modernisation ont accentué les disparités internes à chaque région et exacerbé les inégalités structurelles entre
régions, avec pour effet d’accroître les écarts de développement économique et social. La crise économique a
encore accru la pression sur le secteur agricole. C’est un profond sens d’injustice, enraciné dans la
marginalisation des gouvernorats de l’intérieur et du sud de la Tunisie, qui est à l’origine de la révolte populaire
éclatée à Sidi Bouzid en décembre 2010, qui s’est ensuite propagée à Kasserine puis à Tunis et dans le reste
de la Tunisie, ainsi que d’autres pays arabes.
Avec la révolution, les sources de revenu dans les zones rurales se sont encore précarisées. Différents facteurs
ont joué : les troubles survenus dans les systèmes de production agricole (FAO GIEWS rapporte une hausse
moyenne de 15% dans les importations alimentaires des cinq dernières années) ; la forte baisse des revenus
liés au tourisme (-35% en 2015) ; enfin, le désengagement de l’État, avec d’importantes conséquences sur les
infrastructures productives et les programmes de protection sociale. Le chômage et la pauvreté dans l’intérieur
du pays incitent les jeunes à migrer vers les zones urbaines de la côte, qui offrent de meilleures opportunités
(GIZ, 2016). Pour ce qui concerne les systèmes agro-pastoraux, les désordres récents ont eu des effets
destructifs sur les systèmes de fourniture d’eau et multiplié les pratiques d’usage illégal de l’eau, engendrant
une réduction de sa disponibilité aussi bien pour les exploitations agricoles que pour les habitants. Cette
situation a encore abaissé la productivité, la qualité des récoltes, les revenus et le développement du secteur
agricole, assombrissant les perspectives économiques pour la population de ces régions.
Qui plus est, depuis 2011, la perte de contrôle par l’État de ses régions frontalières y a permis l’expansion dans
d’autres activités informelles, voire illégales. La part de l’emploi informel dans l’économie tunisienne est ainsi
passée de 30% en 2010 à 38% en 2013. Environ 72% des travailleurs du secteur informel se trouvent dans les
régions rurales, ils sont pour la plupart employés comme journaliers, agricoles occasionnels. Ce phénomène
se serait qu’un aspect d’un processus plus large en cours au niveau régional, la polarisation du
développement rural a déterminé l’abandon progressif de vastes territoires marginaux délaissés par l’Etat, qui,
faute d’investissement et de modernisation, connaissent désormais un vide socio-institutionnel. Ce défi est
particulièrement difficile pour les populations rurales des régions de frontière et marginalisées.
3
Plan de recherche
La recherche, combinant des méthodes quantitatives et qualitatives, comporte quatre étapes.
Analyse au niveau macro
1) Revue de la littérature et cartographie statistique. Cette étape prévoit : une revue de la littérature
récente sur les questions principales abordées dans le cadre de cette recherche : déterminants de la
migration des jeunes ruraux et ses conséquences pour la sécurité alimentaire et les sources de revenu dans
les régions d’origine en Tunisie ; cartographie statistique d’une série de variables liées aux questions de
recherche, disponibles au niveau des gouvernorats, afin de décrire le contexte jeunesse, migration et
sécurité alimentaire interagissent.
2) Analyse statistique des corrélats de la migration rurale. Dans un premier temps, les indices migratoires
calculés à partir des données des recensements seront analysés comme variables dépendants d’une large
série de variables indépendantes. Dans un second temps, les variables liées à la sécurité alimentaire et aux
sources de revenu seront analysées comme variables dépendantes dans le cadre d’un modèle
l’émigration et les facteurs liés à l’émigration sont les variables indépendantes. Cette analyse statistique,
permettra une première évaluation des déterminants de l’exode rural et son impact sur les régions
d’origine. Une série de cartes sera aussi produite pour montrer les variations géographiques des causes et
des conséquences de l’émigration rurale.
Analyse au niveau micro
3) Recherche qualitative. En parallèle à l’enquête macro, sur la base des questions clés identifiées au cours
des étapes 1 et 2, une série d’entretiens directifs seront menés avec des informateurs stratégiques et un des
groupes de discussion seront organisés dans chacune des communautés retenues pour l’enquête (celles
ciblées par l’enquête macro). Des techniques d’évaluation rurale participative seront appliquées.
4) Enquête sur l’émigration rurale. Une enquête quantitative ad hoc sur la migration aura pour but de
décrire et d’interpréter les caractéristiques des individus et des ménages qui sous-tendent la décision
d’émigrer, ainsi que l’impact produit de l’émigration des jeunes ruraux vers les villes sur la sécurité
alimentaire et les sources de revenu des individus et des ménages, et sur les dynamiques du travail dans
les régions d’origine. La population ciblée par cette enquête est composée de migrants (individus et
foyers), et de non-migrants (individus et foyers) utilisés comme groupe de contrôle. Par conséquent
l’enquête sera menée aussi bien dans les lieux de destination (foyers avec migrants) que dans les lieux
d’origine (foyers avec ou sans migrants).
Deux séminaires. Afin d’identifier les questions clés et de développer le questionnaire d’enquête, deux
séminaires seront organisés à Tunis et dans l’un des chefs-lieux de gouvernorat. A ces rencontres
participeront les équipes du Migration Policy Centre (MPC) et du FAOSNE, des experts nationaux et
locaux, d’autres spécialistes et acteurs (organisations internationales, gouvernement national, ONG et
associations de migrants, employeurs et associations d’exploitants).
Le questionnaire prévoit de collecter les données suivantes:
a) Données de base sur les profils démographiques et socio-économiques des individus (sexe, âge, niveau
d’éducation, emploi, secteur d’activité, conditions de travail, etc.) et des ménages (revenu, niveau de pauvreté,
type d’habitation, composition du foyer, activité économique principale, etc.) ;
b) Variables relatives à la migration : lieu de naissance, citoyenneté, parcours migratoire, raisons de la migration,
opportunités d’emploi perçues et réelles, remises de fonds et leurs modalités;
c) Variables relatives au contexte qui ne sont pas renseignées par l’enquête macro.
Pour ce qui concerne la méthode d’échantillonnage, sont visées les aires connues pour être des lieux
d’origine et de destination des migrants ruraux (par opposition à un échantillon probabiliste). Plus
précisément, sera visée la série suivante de communautés d’origine et de destination : 3 communautés
rurales d’origine en Tunisie dans les régions nord-ouest (gouvernorats de Kef, Beja, Siliana et Jendouba)
et sud-est (gouvernorats de Medenine, Tataouine et Gabes) représentant les différents types de
communauté rurale identifiés au cours des étapes 1 et 2); 2 communautés de destination en Tunisie (Tunis
et le chef-lieu d’un gouvernorat essentiellement rural); et 1 communauté de destination en Europe (France,
ville à établir). Pour chacune de ces communautés seront menés environ 200 entretiens (1,200 au total).
L’échantillonnage débutera par des ménages indiqués par les informateurs clés et les groupes de discussion
prévus par la recherche qualitative, puis il sera progressivement élargi par la méthode « boule de neige ».
L’enquête sera menée par des partenaires nationaux (un pour la Tunisie, un pour la France).
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Équipe de recherche
Prof. Philippe Fargues, Directeur du Migration Policy Centre
Prof. Iván Martín, Coordinateur du projet, Migration Policy Centre
Dr. Michele Nori, Marie Curie Fellow auprès du Migration Policy Centre, chargé de l’enquête qualitative
Dr. Anna Di Bartolomeo, Research Fellow auprès du Migration Policy Centre, chargée du traitement et de la
cartographie statistique
Dr. Alessia Bacchi, Research Associate, Migration Policy Centre
Nadia Touihri, expert national pour lenquête (Tunisie)
Amri Chafik, expert national pour la recherche qualitative (Tunisie)
Partenaire pour le mise en œuvré de lenquête :
Applied Social Science Forum (ASSP). Coordinateur de lenquête : Prof. Abdelwahab Ben Hafaiedh
Partenaire institutionnel : Observatoire Nationale de la Jeunesse
Plan de travail
Sep-Oct 2016
Nov-Déc 2016
Jan-Fév
2017
Mars-Avril
2017
Mai-Juin
2017
Rapport de démarrage
X
Revue de la littérature et
traitement et cartographie
statistique
X
X
Identification des
questions clés et du
questionnaire (première
version des outils de
recherche)
X
X
Recherche qualitative
X
X
Enquête pilote et
formation
X
Mise en œuvre de
l’enquête
X
X
Production des séries des
données
X
Rapport final et séries des
données
X
Cette étude fait partie du projet de la FAO : GCP/INT/240/ITA
Ce projet est financé par:
*
©FAO, 2016
I6330FR/1/11.16
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