Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I
Chapitre 9
Transferts thermiques
Introduction
Jusqu'à présent, nous n'avons considéré un flux de chaleur qu'au travers des effets qu'il
pouvait avoir sur l'énergie interne, l'enthalpie ou l’entropie d'un système thermodynamique.
Indépendamment de cet aspect qui est relatif aux bilans et aux principes de la
Thermodynamique, on peut étudier la façon dont s'établit un flux de chaleur et en déduire une
expression de ce dernier. C'est l'objectif de ce chapitre introductif aux Transferts thermiques.
On distingue classiquement trois modes de transport de l'énergie thermique :
la conduction ;
la convection ;
le rayonnement.
Nous n'étudions ici que les deux premiers modes de transfert.
1. La conduction
La conduction est un mode de transport qui se produit au sein de la matière immobile au
niveau macroscopique. Il s'agit d'un phénomène de propagation analogue à la conduction de
l'électricité. Il est donc plus facile d'envisager le phénomène de conduction dans le cas des
solides, cependant celle-ci se produit aussi dans les gaz et les liquides. Pour ces phases
fluides, la conduction est en général accompagnée de mouvements internes, appelés
convectifs, qui rendent l'étude du phénomène conductif plus difficile expérimentalement. Ces
mouvements sont dus aux différences de masse volumique engendrées par les différences de
températures : les portions de fluide chaud ont alors tendance à s'élever comme le fait une
Montgolfière, sous l'effet des forces d'Archimède.
1.1. Mise en contact de deux corps à températures différentes
Nous avons déjà considéré cette situation plusieurs fois. Lorsqu'on met en contact deux
corps isolés solides à températures différentes, on constate que ces dernières tendent à devenir
égales : c'est l'équilibre thermique.
Figure 9.1 : Mise en contact de deux solides en déséquilibre thermique.
U1, T1
U2, T2
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Le système étant globalement isolé, son énergie interne totale U1 + U2 reste constante au cours
du processus. Il y a simplement transfert d'énergie d'un corps vers l'autre, ce transfert cessant
lorsque l'équilibre est atteint. Si maintenant on souhaite aller plus loin dans la description et
calculer par exemple l'évolution temporelle des températures T1 et T2, la simple écriture du
bilan d'énergie U1 + U2 = cte ne suffit pas si on ne se donne pas une représentation
indépendante du flux de chaleur qui transite entre les deux corps.
1.2. Propagation de la chaleur dans une barre métallique
Si on met au contact d'une flamme à température élevée l'extrémité d'une barre
métallique (cf. figure 9.2), on constate que la température de l'autre extrémité s'élève aussi.
Figure 9.2 : Propagation de chaleur dans une barre métallique.
On peut en déduire que l'énergie thermique fournie par la flamme se propage le long de la
barre. On conçoit aussi, comme dans l'exemple précédent, que c'est parce que la température
de la flamme est plus élevée que celle de la barre que l'énergie thermique se propage ainsi.
1.3. La température : force motrice du transfert de chaleur
C'est bien parce que la température des milieux mis en contact sont différentes que naît
un flux de chaleur dont la tendance est de ramener les corps à l'équilibre thermique. On dit
que la température est la force motrice du transfert de chaleur. Inversement, tout transfert
cesse si la température dans un système est uniforme. L'idée vient alors de considérer que le
flux de chaleur est une fonction de la variation spatiale de la température : lorsque cette
variation spatiale est nulle, le flux est nul. La notion mathématique qui permet de rendre
compte de cette notion de variation spatiale est la notion de gradient. Nous allons introduire
progressivement cette notion dans le cas particulier du gradient de température.
1.4. Analyse de la situation dans le cas d'une seule dimension
1.4.1. Mise en évidence de la notion de gradient
Considérons un corps solide de forme allongée tel que la barre métallique représentée
figure 9.2. On peut en première approximation faire l'hypothèse que la température ne dépend
que de la variable d'espace x et le cas échéant du temps t.
Plaçons nous en un point donné x de la barre la température est
T x,t
( )
et considérons la
température d'un point très proche de x où la température est
T x + e,t
( )
(cf. figure 9.3). Ayant
admis que la température est la force motrice du transfert de chaleur, on conçoit que le flux de
chaleur qui existera au point x sera d'autant plus grand que la différence
T x + e,t
( )
-T x,t
( )
rapportée à la distance e sera grande.
x
t
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Figure 9.3 : Notion de gradient dans le cas monodimensionnel.
On est ainsi conduit à poser que
Fx
, le flux de chaleur dans la direction x, est proportionnel à
la quantité
T x + e,t
( )
-T x,t
( )
e
et que cette quantité sera d'autant plus représentative du flux
au point x que e est petit. On arrive alors naturellement à considérer que le flux de chaleur est
proportionnel à
lim T x + e,t
( )
-T x,t
( )
e=T
xx, t
( )
e Æ 0
qui n'est autre que la dérivée de T par
rapport à la variable d'espace x à un instant donné t : c'est par définition la dérivée partielle de
T par rapport à x. Par ailleurs, la chaleur se propageant dans le sens des températures
décroissantes, si
T x + e,t
( )
>T x, t
( )
, le flux de chaleur sera dirigé dans la direction des x
décroissants et inversement si
T x + e,t
( )
<T x, t
( )
. La direction du flux est donc opposée au
signe de la quantité
T
x
. Si
T
x>0
, la température a tendance à augmenter avec x et le flux
est dirigé dans le sens des x décroissants et inversement si
T
x<0
.
1.4.2. Expression du flux!dans le cas monodimensionnel : relation de Fourier
Fourier a posé que le flux de chaleur
Fx
dans la direction x est proportionnel à
T
x
selon la relation!:
Fx= -lAT
x
W
( )
(9.1)
où A est la section transversale de l’objet considéré (cf. figure 9.3). Le signe - permet de tenir
compte du fait que la chaleur se propage dans le sens des températures décroissantes alors
qu'on peut montrer que le vecteur gradient est orienté dans le sens opposé. Le coefficient de
proportionnalité l s'appelle la conductivité thermique du milieu considéré. C'est a priori une
quantité susceptible de varier avec la température, la pression, la composition et qui prend des
valeurs assez différentes dans les gaz, les liquides et les solides. Son unité dans le système
international est le W.m-1.K-1.
A partir de la relation (9.1), on peut définir le flux de chaleur par unité de surface ou densité
de flux
Jx
dans la direction x!:
Jx=-lT
x
W.m-2
( )
(9.2)
A titre indicatif, on donne quelques valeurs de l dans le tableau 9.1 ci-dessous. Il y a
grossièrement un facteur 10 entre la conductivité thermique des gaz et des liquides et un
facteur 100 entre celle des liquides et celle des solides. On observe cependant de grandes
variations de cette propriété en fonction de la nature du corps.
Fx
A
x+e
x
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Composé
Température (°C)
Conductivité thermique l
(W.m-1.K-1)
Cuivre (solide)
0
386,12
Cuivre (solide)
100
379,14
Fer (solide)
20
73,27
Eau liquide (1bar)
20
0,598
Eau liquide (1 bar)
100
0,682
Vapeur d'eau (1 bar)
100
0,0245
Vapeur d'eau (1 bar)
500
0,0673
Air
20
0,02512
Air
100
0,0307
Tableau 9.1 : Quelques valeurs de conductivités thermiques (Aide mémoire du Thermicien,
Editions Européennes Thermique et Industrie, 1982)
1.5. Généralisation au cas à trois dimensions
1.5.1. Expression de la densité de flux selon la relation de Fourier
On a implicitement admis précédemment que le flux est une variable caractérisée par
une valeur et une direction. C'est donc un vecteur. Par ailleurs, il apparaît assez naturel de
ramener ce flux à l'unité de surface dans la mesure où, toutes choses égales par ailleurs, il sera
d'autant plus élevé que la surface concernée est élevée : le vecteur flux par unité de surface,
qui sera noté
r
J
ici, est la densité de flux en W.m-2 dans le système international. Fourier a
posé que cette densité de flux est colinéaire à un vecteur qui généralise à l'espace à trois
dimensions la notion de variation spatiale de la température telle que nous l'avons introduite
dans le paragraphe précédent : ce vecteur est le gradient de température noté
grr
a d T
( )
dont les
coordonnées sont dans un système de coordonnées cartésiennes :
grr
a d T
( )
=
T
x
T
y
T
z
Ê
Ë
Á
Á
Á
Á
Á
Á
ˆ
¯
˜
˜
˜
˜
˜
˜
K.m-1
( )
(9.3)
La relation de Fourier est alors :
r
J =-lgrr
a d T
( )
(W.m-2 )
(9.4)
1.5.2. Expression du flux traversant une surface dA
Considérons un élément de surface dA en un point quelconque d'un système. Si le
vecteur densité de flux est
r
J
en ce point, on conçoit aisément que suivant l'orientation de la
surface dA, représentée par un vecteur unité
r
n
normal à cette surface, le flux qui la traverse
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est plus ou moins élevé. Ainsi, si la densité de flux est tangente à la surface dA, c'est à dire
perpendiculaire à
r
n
, le flux est nul.
Figure 9.4 : Flux traversant une surface dA caractérisée par sa normale.
Le flux de chaleur dFn qui traverse la surface dA est simplement donné par le produit
scalaire!:
dFn=
r
J
r
n dA (W)
(9.5)
qui est bien nul si
r
J
est perpendiculaire à
r
n
c'est à dire tangent à dA. Par ailleurs, le signe de
dFn indique la direction du flux. Si
dFn>0
, le flux est orienté suivant
r
n
et inversement si
dFn<0
.
1.6. Méthode générale d'établissement des équations permettant la résolution d'un
problème de transfert de chaleur par conduction
Il s’agit de rechercher l'évolution temporelle et spatiale de la température dans un
système immobile siège d'un transfert de chaleur. Nous avons jusqu'à présent mis en évidence
deux notions très importantes :
la notion générale de bilan d'énergie ;
dans le cas de la conduction, l'expression du flux de chaleur selon la relation de
Fourier.
En combinant ces deux outils, on peut traiter ce type de problème en établissant une équation
dont la température recherchée est solution.
Dans le cadre de ce cours introductif, il n'est question que de traiter des cas assez simples : en
particulier, nous nous restreindrons à l'analyse de systèmes en régime permanent et mono
dimensionnels, c’est à dire à une seule variable d’espace.
1.7. Exemples d'application de la méthode
1.7.1. Transfert de chaleur par conduction dans une plaque plane de grande dimension
On considère une plaque plane telle que représentée figure 9.5. Cette plaque peut par
exemple représenter le mur d'une maison. Elle a une épaisseur e et une surface latérale A.
Compte tenu de sa forme, on peut supposer, comme dans le cas d'une barre allongée, que la
température ne varie qu'avec x. On se place par ailleurs en régime permanent donc on ne
considère pas l'évolution temporelle de la température. L'objectif est de connaître l'évolution
de la température dans la plaque avec x ou profil de température
T x
( )
et de connaître le flux
de chaleur Fx qui traverse la plaque selon la direction x.
r
J
r
n
dA
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