SCPD : un guide pour les médecins de famille

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Chapitre 7
SCPD : La psychose dans la démence
Dr Ken Le Clair
Dre Marie-France Rivard
SCPD – Médecins de famille
SCPD – Médecins de famille
Table des matières
Introduction........................................................................................... 1
Partie A : La psychose comme enjeu principal..................................... 3
Définition de la psychose ....................................................................................3
Le diagnostic différentiel (P.I.E.C.E.S.) ...............................................................3
Qu’est-ce qui rend un diagnostic différentiel plus complexe chez les personnes
atteintes de démence? ........................................................................................3
Exemples de psychoses dues aux changements du cerveau .............................4
Études de cas : Dilemme à l’égard d’un diagnostic différential ............ 5
Application de la démarche U.R.A.F. à l’étude de cas ........................................5
Partie B : Psychose secondaire à une maladie mentale comorbide ou
connexe.............................................................................................. 10
Les enjeux et la pertinence ...............................................................................10
Études de cas..................................................................................... 10
Cas 1.................................................................................................................10
Cas 2.................................................................................................................10
Application de la démarche U.R.A.F. aux études de cas ..................................10
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SCPD – Médecins de famille
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Introduction
Les médecins de famille qui travaillent dans des établissements de soins de longue durée
doivent souvent évaluer des patients âgés manifestant des symptômes psychotiques, tels que
comportements paranoïdes et hallucinations visuelles. Des symptômes psychotiques peuvent
également apparaître pour la première fois chez des patients âgés qui habitent dans leur propre
foyer; les médecins de famille qui travaillent dans tous les types de pratiques doivent parfois
évaluer ces symptômes pénibles. La psychose se manifeste :
•
•
•
au sein de la communauté, chez plus de 4% des personnes de plus de 65 ans
(Christenson 1984)
dans les établissements de soins de longue durée, chez environ 50% des résidents
(Wragg/Jeste)
chez 1/3 des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer modérée
Facteurs de risque pour la psychose à un âge avancé
Les facteurs de risque pour la psychose à un âge avancé incluent :
Déficience cognitive, particulièrement la démence si la psychose est chronique, et le
délire si la psychose est aiguë
• Déficience sensorielle
• Événement traumatisant à un jeune âge
• Sexe féminin
• Isolation sociale
•
L’évaluation et le traitement cliniques de la psychose, sans doute plus que tout autre état,
souligne l’importance d’un diagnostic différentiel, en recherchant des causes physiques,
intellectuelles et émotives (c.-à-d., psychiatriques) pour la psychose et les troubles
comportementaux reliés. Souvent, comme c’est le cas pour de nombreux individus avec des
besoins complexes, de multiples causes sont responsables de la psychose et/ou peuvent
contribuer à l’impact de la psychose sur le comportement, le risque pour soi-même et pour les
autres et le bien-être de la personne. Il est donc utilise de faire appel à la démarche
P.I.E.C.E.S., en l’utilisant à titre de liste de contrôle pour l’évaluation et le traitement, c’.-à-d.,
quelles sont les causes Physiques, Intellectuelles, Émotives (psychiatriques), Capacités
(fonctionnelles), Environnementales, et facteurs Sociaux, qui causent la psychose ou qui
contribuent à son impact et/ou à l’apparition de problèmes comportementaux.
Le défi que présente le diagnostic de la psychose en présence de SCPD donne un exemple de
l’importance des éléments suivants :
1. une démarche collaborative avec différents partenaires dans les soins
2. le besoin de comprendre comment la psychose et ses causes répandues peuvent
varier dans différents milieux et à différentes étapes de la maladie, par exemple :
• la psychose due à des causes médicales est répandue dans les hôpitaux et les
établissements de soins de longue durée
• la psychose due à des « causes intellectuelles », c’.-à-d., due à des changements au
cerveau, est plus répandue en présence de démence modérée
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3. Une sélection soignée d’interventions non-pharmacologiques et
psychopharmacologiques afin de traiter les symptômes cibles et leur impact sur le
comportement.
4. Contrôle partagé de la réaction et des effets secondaires.
Le présent chapitre propose une démarche dans le but de comprendre et de traiter la psychose,
en examinant un diagnostic différentiel, en incluant la psychose due à des causes médicales,
c.-à-d. le délire (voir chapitre 4 ) et due à des changements au cerveau résultant directement de
la démence, qui modifient la façon dont une personne comprend, perçoit et interprète le monde
autour d’elle (voir chapitre 5).
Le chapitre est divisé en deux sections mettant l’accent sur :
A. Diagnostic différentiel de problèmes physiques/médicaux/intellectuels avec
symptômes psychotiques et leur traitement pharmacologique et non-pharmacologique
B. Troubles psychiatriques co-morbides ou récurrents qui précipitent la psychose chez
une personne atteinte de démence, c.-à-d., troubles de l’humeur et les syndromes
ressemblant à la schizophrénie.
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Partie A : La psychose comme enjeu principal
Définition de la psychose
La psychose est un terme utilisé par différents individus et fournisseurs de soins de santé
afin de définir une série de phénomènes. Aux fins du présent chapitre, la psychose est
définie comme étant « une perception erronée par l’individu qui ne correspond pas à la
réalité et/ou qui est incompatible avec les croyances et la culture de cette personne. » Il
s’agit donc d’un symptôme ou d’un phénomène pouvant être :
a) une hallucination visuelle ou auditive, c’.-à-d. un trouble de la perception qui n’est pas
déclenché par un stimulus dans l’environnement
b) une illusion, c.-à-d., une fausse interprétation d’un élément déclencheur
environnemental, tel que chez un patient délirant atteint de démence qui perçoit un
rideau comme étant un serpent
c) autres perceptions erronées de modalités, c.-à-d., perceptions erronées olfactives ou
tactiles/sensorielles, telles que des insectes rampant sous la peau
d) une idée délirante ou une fausse croyance fixe qui ne peut être dissipée par le
raisonnement.
Le diagnostic différentiel (P.I.E.C.E.S.)
La psychose (idées délirantes ou hallucinations) chez des personnes âgées atteintes de
démence peut être causée ou influencée par :
Cause physique
Une idée délirante causée par un problème médical tel que l’hypothyroïdie, la toxicité
d’un médicament ou le sevrage (p. ex., dose augmentée de Sinemet ou cessation rapide
de la benzodiazépine), un changement sensoriel important (p. ex., perte de la vision
menant à des hallucinations visuelles sans détresse du syndrome Charles Bonnet) ou
un « traumatisme » crânien aigu dû à un accident vasculaire ou à de l’hypoxie.
Changement intellectuel
Une idée délirante reliée à la démence; psychose due au trouble cérébral causant des
problèmes d’interprétation et de compréhension de l’environnement.
Trouble émotif
Les idées délirantes psychiatriques (psychose), reliées à des troubles psychiatriques
majeurs ou des perturbations telles que la dépression psychotique, le trouble délirant ou
le trouble bipolaire.
La gravité de l’idée délirante et/ou de la psychose et de son impact peut varier ou être
modifiée par la correspondance entre les contraintes et les Capacités de la personne et
l’Environnement et les soutiens Sociaux (C.E.S.).
Qu’est-ce qui rend un diagnostic différentiel plus complexe chez les
personnes atteintes de démence?
De nouveaux problèmes physiques ou des problèmes aigus, et la récurrence d’états
psychiatriques déjà diagnostiqués sont souvent considérés chez les patients non atteints de
démence. Cependant, les changements au cerveau dus à la démence rendent l’évaluation et le
traitement de la psychose plus complexes.
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Les éléments de la démence décrits au chapitre 2 peuvent affecter la capacité d’un individu à
interpréter le monde autour de lui, menant ainsi à des symptômes psychotiques apparents. Par
exemple, l’agnosie peut mener à l’idée délirante que le conjoint est un imposteur, et l’amnésie
peut mener à des accusations paranoïdes de vol. Il peut être préférable de considérer ces «
psychoses » comme une psychose intellectuelle, c.-à-d. due à la démence elle-même. (Voir les
exemples au Tableau I).
Ce type de psychose survient à tous les stades mais a tendance à être plus prévalente dans la
phase modérée de la démence.
Certains symptômes psychotiques sont plus répandus dans différentes phases de la maladie,
c’.-à-d. des idées délirantes de vol peuvent être un signe précurseur de démence et un signal
d’alarme de déficience cognitive. Des idées délirantes à l’effet qu’un individu est en fait un
imposteur, ou l’interprétation erronée qu’un individu est quelqu’un d’autre ayant joué un rôle
important dans le passé du patient ont tendance à être plus répandues dans les stades
modérés de la démence, ou lorsque des dommages spécifiques surviennent, c’.-à-d., une
accident vasculaire dans le lobe pariétal. Lorsque la démence progresse au point d’affecter les
activités de la vie quotidienne (AVQ) et qu’elle est modérément avancée, la fréquence des
symptômes psychotiques secondaires aux changements du cerveau augmente. Il n’est donc
pas surprenant de découvrir ce type de psychose, plus particulièrement dans les
établissements de soins de longue durée où la démence modéré à sévère est plus prévalente.
Tableau 1
Exemples de psychoses dues aux changements du cerveau
•
Un homme de 82 ans qui ne se souvient pas où il a placé un objet accuse sa femme de
l’avoir volé (amnésie).
•
Une femme de 78 ans, une survivante de l’holocauste, crie lorsqu’une personne vêtue
d’un blouson de cuir s’approche d’elle (idées délirantes reliées à l’alignement temporel,
c.-à-d., la patiente vit dans le présent mais ses « termes de référence » sont dans le
passé).
•
Un homme de 85 ans se regarde dans le miroir de la salle de bains et accuse sa femme
de le tromper avec un autre homme (agnosie, c’.-à-d., il ne se reconnaît pas dans
l’homme reflété dans le miroir).
•
Une femme de 82 ans s’imagine que les émissions télévisées sont réelles, que les
personnages se trouvent dans la pièce avec elle et lui parlent (profondeur
altérée/perception visuospatiale)
•
Un homme de 78 ans essaie de se glisser dans le lit de sa fille de 52 ans (agnosie + vit
dans la réalité du passé – il s’imagine que sa fille, dont la physionomie ressemble à celle
de sa femme il y a plusieurs années, est en fait sa femme, étant donné qu’il s’imagine
être dans la cinquantaine lui aussi).
•
Un homme de 82 ans crie qu’il y a du sang sur son lit le matin.
(perception altérée – sa femme a récemment acheté un nouveau couvre-lit décoré d’un
motif de roses rouges.)
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Étude de cas : Dilemne à l’égard d’un diagnostic différentiel
Vous traitez un homme de 83 ans atteint de la maladie de Parkinson et de démence depuis
plusieurs années. Il a également des antécédents de cancer du sein et d’insuffisance
cardiaque congestive. Sa famille vous appelle afin de vous aviser qu’il se plaint de faire des
rêves d’apparence réelle et il souffre de troubles du sommeil depuis 3 semaines. Il a
maintenant pris l’habitude de verrouiller sa porte à double tour et il est très inquiet de se faire
attaquer. Sa femme indique qu’il s’imagine voir des petits animaux qui ne sont pas réels.
En examinant son dossier, vous déterminez qu’il prend du Sinemet et il y a deux semaines vous
lui avez prescrit du Paxil car il manifeste des symptômes dépressifs.
Sa femme a également identifié pour la première fois qu’il semble souffrir d’incontinence
urinaire le soir.
Application de la démarche U.R.A.F. à l’étude de cas
Compréhension (Understanding) (Qu’est-ce que je dois savoir?)
Le principal point en termes d’évaluation de la psychose chez les personnes âgées atteintes
de démence consiste à obtenir une appréciation des causes exactes, en répondant aux
questions suivantes lors d’un entretien avec l’individu et/ou son soignant.
1. Quelles sont les principales préoccupations et qu’est-ce qui a changé?
2. Quels sont les risques?
La psychose peut présenter des risques de blessures à soi-même ou aux autres.
L’acronyme anglais RISKS peut guider une évaluation complète des risques. On doit
tenir compte de ce qui suit :
• Qui est à risque?
• Blessures à soi-même?
Errance
(Roaming)
Plusieurs personnes atteintes de démence donnent suite à leurs symptômes
psychotiques; dans ce cas-ci, il verrouille la porte à double tour. Il pourrait également
quitter les lieux en s’imaginant qu’il pourrait être blessé s’il reste, ou en espérant trouver
l’individu qui lui cause des problèmes ou une personne qu’il s’imagine avoir entendue
appeler à l’aide.
Danger physique imminent (Imminent Physical Danger)
Lorsqu’une psychose survient suite à un problème médical/physique, il s’ensuit souvent
une agitation accrue. Suite à cette agitation, l’individu peut être moins prudent lorsqu’il
marche et tomber, ou lorsqu’il fume, ce qui augmente le risque d’incendies. Réagissant
aux symptômes psychotiques, un individu peut également utiliser des armes à feu qui
sont disponibles (par exemple, afin d’éloigner les « intrus »). On doit toujours s’informer
au sujet de la disponibilité d’armes à feu et assurer qu’ils sont hors de la portée du
patient.
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Suicide
Une dépression psychotique ou sévère peut survenir au cours de la démence. Les
personnes qui, dans le cadre de leur dépression psychotique, estiment qu’elles «
méritent d’être punies pour des erreurs passées » sont à risque élevé de suicide (idée
délirante congruente à l’humeur). Les individus qui, dans le cadre de leur dépression,
sentent qu’ils se trouvent dans une situation insupportable et désespérée, sont
également à risque de blessure volontaire. Ceux qui vivent une dépression agitée sont
également à risque de blessure volontaire impulsive même s’ils nient avoir des
intentions suicidaires, s’ils estiment ne plus pouvoir endurer cette terrible agitation.
Parenté et blessures à autrui (Kinship and harm to others)
Afin d’évaluer le risque pour les autres, on doit identifier si les idées délirantes sont «
axées » sur une personne en particulier, et si la personne atteinte de psychose a déjà
posé des gestes en rapport avec des idées délirantes par le passé (p. ex., afin d’aborder
une persécution perçue).
Abus de substances et conduite sécuritaire (Substance Misuse and Safe
Driving)
L’abus de substances et d’alcool peut causer ou aggraver les symptômes psychotiques,
en plus d’accroître d’autres risques reliés à la psychose.
Les personnes en psychose, plus particulièrement dans le contexte de la démence,
peuvent être plus susceptibles d’avoir des problèmes d’attention et de concentration et
présentent donc un risque plus élevé en matière de conduite sécuritaire.
3. Quels sont les facteurs contributifs possibles dans ce cas?
Pensez à la liste de contrôle P.I.E.C.E.S. et vérifiez les causes dans les domaines
physique, intellectuel, émotif, fonctionnel, environnemental et social.
Dans l’étude de cas A, la psychose est apparue récemment et devrait déclencher une
recherche de causes médicales, c.-à-d., le délire. Les quatre causes principales d’un
déclin médical et/ou délire sont :
1. Médicament s (dans ce cas-ci, Sinemet, Paxil)
2. Infections microbiennes (une infection urinaire pourrait-elle expliquer une
incontinence récente?)
3. Maladies myocardiques ou respiratoires et autres maladies uniques à l’individu
4. Changements métaboliques (faible taux de sodium secondaire au Paxil,
hypoglycémie, hypothyroïdisme, hypo ou hypercalcémie)
Dans cette situation, et dans toute présentation psychotique, on doit également tenir
compte d’une déficience sensorielle et de la possibilité de crises épileptiques partielles.
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Réflexion (Reflection) (Comment puis-je expliquer ce qui se passe?)
1. Quelle est l’explication la plus plausible?
•
•
•
Une psychose médicale;
Une psychose intellectuelle, c’.-à-d., due à une association avec la démence ellemême; ou
Une psychose psychiatrique.
Dans ce cas, on soupçonne une psychose médicale, mais il est possible que les 3 types
se manifestent en même temps.
2. Trouver un terrain d’entente au sujet de la psychose, les résultats désirés et le
rôle/soutien du médecin de famille, de la personne, de la famille et des professionnels
de la santé.
Interventions (Actions) (Qu’est-ce qui doit être fait?)
1. Qu’est-ce qui doit être fait dès maintenant?
Dans ce cas, vous devez vous concentrer sur les risques pour le patient et les autres. Le
traitement du délire est alors un enjeu médical urgent.
Vous devez examiner les facteurs reliés au patient, sa capacité à adopter des stratégies
de soutien et les types de soutien disponibles. Ceci permet de déterminer le degré de
risque et les mesures à prendre immédiatement, et à préciser les domaines où des
interventions immédiates pourraient se faire.
Vous devez envisager la façon de collaborer avec la personne, la famille et d’autres
prestataires de soins dans le but d’assurer un traitement sécuritaire et efficace.
Vous devez en arriver à une série d’objectifs communs et de rôles clairement définis, en
maintenant le patient au centre de l’évaluation et de la stratégie de traitement.
2. Quels sont les tests ou les renseignements additionnels qui seraient
utiles?
Si vous soupçonnez une cause médicale, effectuez les examens et enquêtes appropriés
:
•
•
•
•
Médicaments (c’.-à-d., toxicité de la digoxine, ou Sinemet)
Changements métaboliques (fonction de la thyroïde, phosphore de calcium, B12 et
acide folique, reliés à la psychose à un âge avancé; dans ce cas, l’hyponatrémie
devrait particulièrement être envisagée).
Infections microbiennes (étant donné la récente apparition d’incontinence chez cette
personne en particulier, il est important d’inclure une analyse d’urine; des
radiographies pulmonaires peuvent être indiquées chez les personnes susceptibles
aux infections pulmonaires).
Maladies myocardiques et autres maladies à prendre en considération, telles que
l’aggravation de l’insuffisance cardiaque congestive, etc.)
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En fait, dans ce cas-ci de « psychose médicale », la correction de problèmes médicaux
sous-jacents est pressante. Soyez conscient du fait qu’il existe habituellement plus
d’une cause médicale. Cependant, jusqu’à 30% des cas de délire clinique
n’impliquent aucune cause médicale précise. Même sans la présence d’une cause
précise, vous devez considérer le cas comme « une psychose médicale et/ou un délire »
et mettre en place des stratégies de soutient et des traitements efficaces.
3. Démarches non-pharmacologiques si la psychose est due au délire
Les principes généraux amenant à aider et à intervenir dans le cadre d’une démarche
non-pharmacologique pour une psychose due à une cause médicale et/ou au délire
peuvent être extraits du travail accompli par Inouye, tel qu’il est décrit au chapitre 4.
L’acronyme anglais CHAOS peut servir à retenir les éléments critiques du traitement :
o Cause (traiter)
o Hydratation (assurer la nutrition)
o Démarche (Approach) (les choses à faire et à ne pas faire; porter surtout
attention à la communication non-verbale)
o Orientation (assurer une structure appropriée)
o Soutien pour le soignant et évitement de la sédation
4. Démarches non-pharmacologiques, si la psychose est due à des
changements au cerveau
Dans cette situation, il peut être utile de faire appel à l’acronyme anglais ERRORS afin
de définir les démarches non-pharmacologiques.
Environnement : Que représente-t-il pour la personne? Par exemple, si l’environnement
déclenche un événement traumatisant passé, le fait d’enlever le stimulus peut aider, p.
ex., blouson de cuir qui déclenche la peur chez un survivant de l’holocauste.
Réception : Vision et ouïe
Régulation : Sur et sous-stimulation
Organisation : Comment dois-je aborder l’individu étant donné les changements
survenus dans son cerveau ou comportement? (Attention particulière aux interactions
non verbales)
Réalité : Causes variées et uniques à cette personne; pensez à P.I.E.C.E.S.
Soutien pour le soignant
5. Quelles autres interventions devraient être envisagées?
6. Qui d’autre pourrait être impliqué?
7. Interaction
Examinez les choses à faire et à ne pas faire lors de l’interaction avec une personne en
psychose :
• Veillez à votre sécurité et à celle de la personne
• Comprenez qu’il s’agit d’une réaction face à une perception « réelle » de l’individu
• Concentrez votre attention sur les effets sur la personne, non pas le contenu
(validez les sentiments, préoccupations)
• Distrayez la personne
• Ne confrontez pas les fausses croyances
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Suivi (Comment contrôler et ré-évaluer)
Afin de définir les risques et de contrôler la réaction, il est très utile de faire appel aux 7
éléments ci-dessous afin de caractériser la psychose. Ces éléments procurent un
mécanisme permettant de :
1. déterminer les mesures immédiates à prendre
2. contrôler la réaction
3. décider de prescrire ou non un médicament
Ces éléments caractérisent la psychose/idée délirante et son impact :
1. Dangerosité
2. Aspect pénible
Habituellement résolus initialement
3. Aspect troublant
4. Incapacité
5. Mesures à prendre
Résolus en deuxième
6. Distant ou présent
7. Défini (idée délirante fixe) Résolu en dernier ou ne disparaît pas complètement
La séquence des réactions à une psychose et aux problèmes comportementaux reliés suit
habituellement un modèle de résolution similaire. Souvent, les comportements pénibles et
troublants commencent à se manifester chez l’individu; il cesse d’agir sur l’idée délirante, p.
ex., verrouiller la porte à double tour à cause de la peur de persécution. La psychose peut
alors être perçue par l’individu comme étant dans son passé et l’idée délirante peut finir par
se résoudre elle-même.
Il est important de tenir compte de cette séquence habituelle car cela peut aider le clinicien
et ses collègues à mieux prévoir la réaction, à déterminer une augmentation d’un
médicament et à prévenir un arrêt prématuré de stratégies efficaces.
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Partie B - Psychose secondaire à une maladie mentale
comorbide ou connexe
(Troubles de l’humeur ou de l’anxiété ou perturbations de type schizophrénique)
Les enjeux et la pertinence
•
•
25% des personnes atteintes de démence manifestent des signes et symptômes d’un
trouble affectif majeur tout au long de leur maladie, c’.-à-d., des troubles majeurs de
l’anxiété et de l’humeur sont répandus.
Une maladie mentale majeure, telle que la schizophrénie ou le trouble bipolaire peut
accompagner la démence.
Études de cas
Cas 1
Une femme de 79 ans entend des voix qui lui disent qu’elle est pourrie et elle croit que les
voisins lui volent des choses et qu’ils mettent un gaz odorant dans son système de
ventilation. Elle déménage tous les 3 ou 4 ans et a récemment entrepris de verrouiller ses
portes à double tour et de sceller ses fenêtres. Elle éprouve des difficultés de mémoire
depuis environ 5 ans.
Cas 2
Une femme de 92 ans qui éprouve de légers problèmes de mémoire a perdu son mari il y a
huit mois après 40 ans de mariage. Elle est maintenant très irritable et se plaint de douleurs
à l’estomac. Elle estime avoir commis un péché et que les gens sont tournés contre elle.
Lorsqu’on l’interroge à ce sujet, elle répond qu’elle estime mériter ce genre de traitement.
Application de la démarche U.R.A.F. aux études de cas
Compréhension (Understanding) (Que dois-je savoir?)
1. Quelles sont les principales préoccupations et qu’est-ce qui a changé?
•
Le principal enjeu dans ces cas consiste à identifier à quel moment la psychose s’est
manifestée et depuis combien de temps elle est présente. Comme il a été mentionné
auparavant, une psychose à invasion brutale est le plus souvent reliée à une cause
médicale.
•
Une psychose progressive et plus lente et, si elle est reliée à des changements
fonctionnels et à une démence au stade « modéré », peut amener le médecin à
envisager une psychose reliée à la démence elle-même.
•
Les changements reliés à des maladies mentales majeures et/ou des grappes
psychiatriques ont tendance à survenir entre les deux. Lors d’une psychose de type
schizophrénique (cas 1), des troubles de personnalité prémorbides peuvent immerger,
ou s’aggraver s’ils sont déjà présents, causant ainsi des problèmes fonctionnels et
entraînant des perturbations dans les rapports avec les autres, et/ou comme pour le cas
2, des antécédents familiaux de troubles anxieux et/ou des antécédents personnels de
troubles de l’humeur ou troubles anxieux d’abus d’alcool ou de drogues.
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•
Identifiez à quel point les comportements sont pénibles. Plus particulièrement lors d’une
maladie de type schizophrénique, il peut arriver que la psychose n’entraîne pas de
détresse importante chez la personne. Ceci permet de mieux comprendre le type
d’intervention requise et comment procéder de façon opportune et sensible.
•
Faites appel aux 7 éléments d’une psychose de type schizophrénique (cas 1) afin de
caractériser le degré de détresse et d’incapacité relié à la psychose. Fiez-vous aux
résultats d’une discussion collaborative en utilisant ces 7 éléments à titre d’outil de
discussion, afin d’établir le taux de risque et d’urgence, et afin de comprendre la nature
pénible et troublante du comportement, pour l’individu ainsi que pour son soignant.
•
Dans le cas 2, des outils tels que SIG E CAPS et des questions provenant de l’échelle
Cornell en matière de dépression dans la démence, une échelle développée par
Alexopoulos et al pour les personnes atteintes de démence et de dépression, peuvent
aider à identifier la possibilité d’une psychose reliée à l’humeur. Il se peut que les
professionnels de la santé et les membres de la famille ne soient pas conscients du fait
qu’une psychose peut faire partie d’un trouble affectif important et qu’un traitement
approprié peut apporter un soulagement significatif.
2. Quels sont les risques et causes possibles?
•
Une évaluation soignée des risques, en utilisant l’acronyme anglais RISKS peut aider à
identifier la présence d’idées suicidaires et/ou de menaces à l’égard d’autrui.
Réflexion (Reflection) (Comment puis-je donner un sens à la situation?)
Une fois l’étape de la compréhension franchie, déterminez les objectifs et résultats désirés
qui sont adoptés d’un commun accord. Le fait de trouver un terrain d’entente et d’identifier
les priorités sera bénéfique pour le patient, les membres de la famille et d’autres
prestataires de soins. Un manque de compréhension et de collaboration entraîne souvent
un échec en matière d’évaluation et de traitement.
Interventions (Actions (Qu’est-ce qui doit être fait?)
Identifiez les rôles que chaque partenaire doit assumer afin de réaliser les objectifs et
d’atteindre les résultats désirés.
1. Qu’est-ce qui doit être fait dès maintenant?
Afin de déterminer ce qui doit être fait dès maintenant, on doit examiner les facteurs de
risque tels que le suicide, et les résultats de la caractérisation de la psychose à l’aide
des 7 éléments, surtout l’aspect de la dangerosité. De plus, ceci permettra d’investiguer
plus profondément et de contrôler les processus en collaboration avec l’individu et son
réseau de soignants.
Dans le cas d’une psychose aigue due au délire, lorsqu’il n’y a pas d’idées délirantes de
longue date ni de paranoïa, on peut considérer l’usage à très court terme d’halopéridol à
titre de mesure d’urgence afin de permettre des investigations appropriées (voir le
chapitre au sujet du délire).
Lorsqu’il est clair qu’un médicament antipsychotique sera nécessaire pendant au moins
plusieurs semaines, nous préférons utiliser des médicaments antipsychotiques
atypiques tels que Risperidone, Olanzapine ou Quetiapine.
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Étant donné que tous les médicaments antipsychotiques peuvent entraîner des graves
effets secondaires, y compris un plus grand risque de décès, il est important de
documenter que le médicament est clairement indiqué (pour une psychose qui est
susceptible de continuer et d’entraîner beaucoup de détresse chez le patient), qu’il sera
utilisé pour une période aussi courte que possible (p. ex., avec un examen de son
utilisation et de la diminution possible de la dose ou de l’arrêt du médicament tous les 3
mois) et à la dose la plus basse possible (avec une légère diminution de la dose dès
l’apparition de légers effets secondaires ou de bénéfices clairs, afin d’éviter
l’accumulation et des effets secondaires importants).
Il est également important de documenter la façon dont un consentement éclairé a
été obtenu (discussion au sujet des risques et bénéfices) avec le patient ou la
personne désignée afin de prendre des décisions pour lui. Généralement, lorsqu’une
psychose survient suite à une démence, l’usage continu d’un antipsychotique n’est
habituellement pas requis et il est possible de cesser le médicament sans entraîner la
réapparition de symptômes psychotiques. Cependant, pour des maladies
psychiatriques telles que la schizophrénie, il peut être nécessaire de cesser indéfiniment
des médicaments antipsychotiques, quoiqu’une réduction de la dose puisse être
possible. Le laminé psychotrope donne des renseignements concis sur les doses
de départ, les doses maximum recommandées, les risques et les effets
secondaires, ainsi que des suggestions de contrôle.
2.
Investigations
Les investigations dépendent du type de trouble relié. S’il s’agit d’un trouble de l’humeur
ou de l’anxiété co-existant, consultez le chapitre 6. Remarque : le traitement d’une
psychose résultant d’une dépression exige souvent un antipsychotique et un
antidépresseur et peut aussi exiger la thérapie électroconvulsive. S’il s’agit d’un trouble
comorbide de type schizophrénique, parfois appelé paraphrénie à un âge avancé,
éliminez les causes médicales répandues qui peuvent ou qui ont été associées avec la
paranoïa à un âge avancé : il est donc utile de vérifier Ca, P, B12, acide folique, TSH.
3. Qui d’autre doit être impliqué?
Pour assurer le succès du traitement, il est nécessaire que toutes les personnes
impliquées trouvent un terrain d’entente lorsque la psychose est due à un trouble de
l’humeur ou de l’anxiété, ou une schizophrénie co-morbide à un âge avancé. La
démarche U.R.A.F. sera très utile afin de déterminer les causes et d’identifier et de
corriger les malentendus.
4. Interaction
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N’oubliez pas les choses à faire et à ne pas faire.
Les clés de l’interaction sont la confiance, l’empathie et la compréhension.
Le comportement non-verbal représente 80% de la communication.
Il est fondamental d’établir des rapports de soutien, de confiance et thérapeutiques
continus avec le patient afin d’assurer l’efficacité des soins.
Suivi (Follow-up) (Comment les choses doivent-elles être contrôlées et
réévaluées?)
Avec le patient, la famille ou d’autres prestataires de soins, identifiez les résultats
prévus/désirés et le moment où ils devraient se manifester. Définissez les éléments
déclencheurs, ainsi que la réévaluation et les interventions nécessaires.
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