Malnutrition chez les personnes âgées

publicité
CURRICULUM
Malnutrition chez les personnes âgées
Reinhard Imoberdorfa, Maya Rühlinb, Alois Beerlic, Peter E. Ballmera
Klinik für Innere Medizin, Departement Medizin, Kantonsspital Winterthur;
Ernährungsberatung, Kantonsspital Winterthur;
c Grundversorgerpraxis, Winterthur
a
b
Quintessence
En Suisse également, la malnutrition est fréquente et elle augmente
avec l’âge.
La malnutrition peut toucher les personnes ayant un poids insuffisant,
normal ou excessif.
La perte de poids involontaire constitue un critère essentiel pour le
diagnostic de la malnutrition.
En s’aidant de trois questions et de la brochure «Dénutrition?!»,
chaque médecin de famille peut facilement identifier les situations à
risque ou les carences manifestes.
Chez les personnes âgées en bonne santé, les apports journaliers
recommandés s’élèvent à 30 kcal d’énergie, 0,8 à 1,2 g de protéines et
30 ml d’eau par kg de poids corporel.
La collaboration avec une diététicienne diplômée revêt une importance
majeure pour la prise en charge nutritionnelle des personnes âgées
souffrant de malnutrition.
Introduction
Actuellement, l’espérance de vie à la naissance en Suisse
est l’une des plus élevées au monde, conséquence d’une
forte augmentation au cours du XXe siècle (www.bfs.
admin.ch). Depuis 1900, elle a pratiquement doublé: de
46,2 à 80,5 ans pour les hommes et de 48,9 à 84,7 ans
pour les femmes. Durant la même période, la proportion
d’adolescents de moins de 20 ans a diminué, passant de
40,7 à 20,6%; la proportion de personnes de plus de
64 ans a augmenté, passant de 5,8 à 17,2%; quant à
l’augmentation de la proportion de personnes très âgées
(80 ans et plus), elle est particulièrement prononcée,
passant de 0,5 à 4,8%.
Au cours des deux dernières décennies, on a assisté à
une amélioration des connaissances de la population
suisse au sujet de l’importance de l’alimentation. En
particulier, le surpoids et l’obésité, avec toutes leurs
conséquences médicales et économiques, font l’objet
d’intenses discussions en tant que problème de politique
de santé. Il peut paraître surprenant de prime abord
que l’on parle également de plus en plus de malnutrition
en Suisse. Bien que dans notre pays où coulent le lait et
le miel, nous pourrions nous procurer des aliments de
grande qualité, la malnutrition et les carences sont
fréquentes, y compris chez les personnes en surpoids et
obèses [1].
La malnutrition est un facteur de risque indépendant
très pertinent ainsi qu’un facteur de coût significatif,
dont les conséquences ont été scientifiquement prouvées
[2]. Chez les patients à risque de malnutrition, une
malnutrition substantielle devrait être diagnostiquée
précocement au moyen d’un interrogatoire systématique
et d’un examen physique ciblé, et elle devrait faire
l’objet d’une thérapie nutritionnelle. A cet égard, la pré­
vention et la détection de la malnutrition dans la pra­
tique revêtent une importance particulière. Pour une
discussion plus détaillée, nous renvoyons à notre article
de mise à jour paru dans cette revue [3].
La malnutrition est fréquente
et elle augmente avec l’âge
La malnutrition peut toucher les personnes ayant un
poids insuffisant, normal ou excessif. D’après le sixième
rapport sur la nutrition en Suisse, en moyenne un
cinquième, voire un quart, des personnes admises à
l’hôpital présentent une carence alimentaire ou un
risque de ce type [4]. Dans une étude que nous avons
réalisée chez 32 837 patients au total (16 540 femmes,
16 297 hommes), une malnutrition a été observée chez
5978 (18,2%) patients lors de l’admission à l’hôpital [5].
La prévalence de la malnutrition dépendait directement
de l’âge: <45 ans: 8%; 45 à 64 ans: 11%; 65 à 84 ans:
22%; >84 ans: 28%.
Ces chiffres illustrent bien le problème de la malnutrition
chez les patients qui sont hospitalisés. A notre avis, la
malnutrition devrait déjà être détectée et, si possible,
prévenue en dehors du contexte hospitalier et ainsi, il
s’agit là également d’une mission essentielle des méde­
cins installés en cabinet.
Cet article fait partie d’une série de six articles spécialisés sur des thèmes ayant trait à la promotion de la santé des personnes âgées.
Les articles ont été rédigés par les auteurs dans le cadre d’un partenariat entre le projet Via – Bonnes pratiques de promotion de la santé des
personnes âgées (http://promotionsante.ch/public-health/promotion-de-la-sante-des-personnes-agees.html) et la Société Professionnelle
Suisse de Gériatrie. La FMH et le Collège de Médecine de Premier Recours soutiennent cette initiative. Les auteurs sont indépendants de
l’autorité responsable de la revue et ils n’ont perçu aucune compensation financière pour leurs travaux. Les articles ont fait l’objet d’une
révision au sein de la rédaction et en externe dans le cadre du processus décisionnel habituel du FMS.
Forum Med Suisse 2014;14(49):932–936
932
CURRICULUM
Description de cas:
incroyable, mais vrai et pas si rare
Figure 1
Perte de tissu graisseux sous-cutané au niveau du visage.
Un patient de 65 ans se présente chez son médecin en
raison d’un ballonnement abdominal croissant. Il n’a
plus d’appétit et se sent déjà repu après quelques
bouchées; certains aliments le dégoûtent vraiment. Son
état se dégrade continuellement au cours des mois sui­
vants et l’homme est finalement admis à l’hôpital pour un
(côté droit) montre le patient lors de
bilan. La figure 1
l’admission à l’hôpital. Son visage émacié avec absence
de tissu graisseux sous­cutané est particulièrement
frappant, surtout en comparaison avec une photo prise
un an avant le début de la maladie (fig. 1, côté gauche).
La figure 2
illustre les arêtes osseuses saillantes au
niveau de l’orifice supérieur du thorax, l’abdomen est
ballonné et il est flagrant que le patient n’a, façon de
parler, «plus que la peau sur les os». L’anamnèse révèle
qu’il a perdu plus de 20% de son poids corporel au cours
des 8 derniers mois. Les examens réalisés ont révélé
un cancer du côlon, qui a pu être totalement réséqué
par chirurgie. Grâce à une réadaptation intensive et à
une prise en charge nutritionnelle, le patient a bien ré­
cupéré.
Qu’est-il possible de faire dans la pratique?
Le cas décrit ci­dessus ne constitue pas une exception.
Nos efforts devraient se concentrer sur la détection
précoce de telles détériorations de l’état nutritionnel et
si possible, sur leur prévention. La perte de poids in­
volontaire constitue un critère essentiel pour le diag­
nostic de la malnutrition. Quiconque perd plus de 5%
de son poids corporel en l’espace d’un mois ou plus de
10% de son poids corporel en l’espace de 6 mois rem­
plit le critère de malnutrition.
En raison du manque de temps au cabinet médical, il
est nécessaire de disposer d’instruments simples et
institutionnalisés pour le dépistage de la malnutrition.
Dans les lignes qui suivent, nous décrivons une marche
à suivre simple, rapide et efficace, que chaque médecin
de famille peut appliquer dans son cabinet.
1. Penser à la malnutrition.
2. Impliquer le patient, en
2.1 mettant à disposition du matériel de dépistage et
d’information dans la salle d’attente du cabinet;
2.2 posant des questions sur l’appétit et sur l’apport
de nourriture (habituel, réduit, diminué, absent).
3. Mesurer la taille et le poids de tout patient deux fois
par an.
Trois petites questions pour le dépistage
Pour le dépistage, trois petites questions suffisent:
1. Avez­vous involontairement perdu du poids?
2. Si vous avez perdu du poids, combien de kilogrammes?
3. Avez­vous mangé peu en raison d’une diminution de
l’appétit? (tab. 1 )
Figure 2
Malnutrition avec atrophie musculaire, absence de tissu graisseux sous-cutané
et abdomen ballonné.
En cas de réponses totalisant deux points ou plus, il
s’agit d’une situation à risque et une anamnèse alimen­
taire détaillée devrait dès lors être réalisée. Ce score
Forum Med Suisse 2014;14(49):932–936
933
CURRICULUM
paraît quelque peu simpliste, mais des scores plus
sophistiqués et donc plus chronophages ne sont guère
plus utiles au cabinet médical. Il est possible de présenter
ces trois questions sur un document coloré de format
A4, de les déposer en salle d’attente et de demander aux
patients d’y répondre. Lors de l’anamnèse alimentaire,
il convient avant tout de poser des questions relatives à
l’appétit, au goût et à la capacité de s’alimenter. Lors de
l’examen physique, un aspect mérite une attention toute
particulière. La cavité buccale est l’une des premières
régions anatomiques de l’organisme où se manifestent
Tableau 1
Les trois questions critiques en cas de suspicion de malnutrition [1].
Réponse
Score
1. Avez-vous involontairement perdu du poids?
Non
0
Incertain/Oui
2
2. Si vous avez perdu du poids, combien de kilogrammes?
1–5
1
6–10
2
11–15
3
>15
4
Incertain
2
3. Avez-vous mangé peu en raison d’une diminution de l’appétit?
Non
0
Oui
1
Tableau 2
Carences nutritionnelles visibles à l’examen clinique.
Région anatomique
Anomalies et symptômes
Carence en
Lèvres
Chéilite angulaire: rougeur et gonflement Niacine, riboflavine,
douloureux avec formation de fissures vitamine B6, fer
Gencives
Spongieuses, sanglantes
Vitamine C
Langue
Glossite: langue rouge, endolorie
et striée
Vitamine B6 et B12,
acide folique, fer
Mangelernährung
trotz Überfluss?!
Figure 3
Brochure «Dénutrition?!»
Téléchargement sur: http://www.fial.ch/files/documents/de/brochure_denutrition_fr-hd.pdf.
Adresse pour commander la brochure: [email protected].
les signes cliniques d’une carence nutritionnelle ou
d’une malnutrition. Les lèvres, la langue, la muqueuse
buccale et les gencives signalent la présence d’états de
carence longtemps avant que d’autres régions du corps
ne soient touchées (tab. 2 ). Ainsi, il est aussi possible
de deviner la présence d’autres troubles tels que
des brûlures de la bouche et de la langue, ainsi que des
altérations du goût.
En complément, il est recommandé de mettre à disposition
des patients une brochure relative à la malnutrition en
tant que matériel d’information. Il s’agit d’une mesure
judicieuse, qui favorise l’autonomie des patients. Il est
vivement conseillé d’utiliser la brochure «Dénutrition?!»
(fig. 3 ).
Régulation perturbée de l’apport alimentaire
et carences chez les personnes âgées
Chez les personnes âgées, la sensation de soif et l’appétit
sont diminués. Cette «anorexie du sujet âgé» s’explique
par une diminution du goût, de l’odorat et de la vue,
ainsi que par l’activité accrue de facteurs de satiété au
niveau gastro­intestinal [6]. Tandis que la fonction de
digestion du tractus gastro­intestinal est préservée chez
la personne âgée, la biodisponibilité du fer, de la vita­
mine B12 et du calcium est réduite en raison d’une sé­
crétion moindre d’acide gastrique. Par ailleurs, la capa­
cité de réaction adéquate au stress métabolique est
altérée. C’est pourquoi même une maladie légère en­
traîne bien souvent déjà une dégradation de l’état
nutritionnel chez la personne âgée. La malnutrition a
de graves conséquences chez les personnes âgées.
Ainsi, la perte de masse musculaire liée à une perte de
poids accentue la sarcopénie et la fragilité liées à l’âge
et favorise ainsi les handicaps et les limitations de
l’autonomie.
Recommandations nutritionnelles
L’objectif des mesures nutritionnelles pratiques chez les
personnes âgées est la mise à disposition de quantités
suffisantes d’énergie, de protéines, de micronutriments
et de liquide. Chez les personnes âgées, le maintien de
la fonction, de l’autonomie et de la qualité de vie est pri­
mordial. La thérapie nutritionnelle chez le sujet âgé va
bien au­delà de simples mesures nutritionnelles et elle
englobe un vaste spectre de mesures qui peuvent toutes
contribuer à une alimentation adéquate, ce qui est illus­
[7]. Si des modifications com­
tré dans le tableau 3
portementales et environnementales et des interven­
tions nutritionnelles par voie orale n’aboutissent pas à
une alimentation couvrant les besoins du patient, il
convient d’envisager en complément une alimentation
artificielle par sonde. Cette modalité peut être mise en
œuvre sous forme de thérapie nutritionnelle transitoire
à domicile ou dans une institution de soins (http://
geskes.ch 3 Homecare).
Pour que l’assistance nutritionnelle continue à produire
un effet durable, il est indispensable de dispenser des
conseils et une aide pour la mise en œuvre à domicile
Forum Med Suisse 2014;14(49):932–936
934
CURRICULUM
Tableau 3
Spectre des mesures possibles pour prévenir une malnutrition
(modifié d’après [7]).
Correction des problèmes oro-pharyngés
Traitement adéquat des maladies aiguës et chroniques, traitement
dentaire, exercices de déglutition
Instauration d’une atmosphère agréable lors des repas
Prise des repas à table, dans une salle à manger, ensemble avec
d’autres personnes; ambiance calme et détendue; aide pour
la prise des repas
Modification des repas et des aliments
Prise en compte des préférences personnelles, collations
supplémentaires, finger food, modification de la texture et de
la consistance des repas
Enrichissements des plats et repas
Avec des aliments riches tels que la crème, le beurre et l’huile, ou
avec des concentrés nutritifs tels que la maltodextrine et la poudre
de protéines
Alimentation buvable
ou dans une institution. A cet effet, il convient de discu­
ter de mesures simples et praticables sur le long terme
pour les personnes âgées, parmi lesquelles figurent par
ex. le recours à des services de repas à domicile et à des
aides ménagères (www.pro­senectute.ch/fr) ou la prise
des repas en communauté (www.tavolata.net/fr). La
collaboration avec une diététicienne diplômée est vive­
ment recommandée.
Apports hydriques
Les apports hydriques journaliers recommandés s’élè­
vent à 30 ml par kg de poids corporel afin de compenser
les pertes causées par la respiration, la sueur, l’urine et
les selles (2,1 litres d’eau pour un homme de 70 kg). Les
pertes supplémentaires provoquées par une sudation
excessive, la fièvre, la diarrhée ou les vomissements
doivent être compensées le plus rapidement possible
par une augmentation conséquente des apports et, le cas
échéant, par une supplémentation par voie intraveineuse
(ou sous­cutanée).
Conseils pour des apports hydriques adaptés aux besoins
et en cas d’apports insuffisants
Prévention
Traitement
Préparer à l’avance la quantité Boire lentement (petites
de boisson pour toute la journée gorgées), mais constamment
(par ex. 1 litre de tisane
[bouteille isotherme] + 1⁄2 litre
d’eau minérale)
Toujours emporter dans son sac Boissons à privilégier:
une bouteille en plastique
– Boissons isotoniques
– Solution de réhydratation
faite maison (2⁄3 de thé noir,
1
⁄3 de jus d’orange, sucre, sel)
– Bouillon léger
Instaurer des rituels de boisson: Solutions de réhydratation, par ex.:
par ex. toujours boire un verre – Elotrans®
d’eau avec le café ou boire
– Normolytoral®
un verre d’eau directement après – GES® 45
le lever le matin (par ex. préparer
le verre à côté du lavabo dans
la salle de bain)
Apports énergétiques
Avec l’âge, la dépense énergétique au repos diminue en
raison de la diminution de la masse corporelle maigre.
Les apports énergétiques journaliers recommandés
s’élèvent à env. 30 kcal par kg de poids corporel. Cette
valeur devrait être adaptée en fonction de l’état nutri­
tionnel, du niveau d’activité et de la situation méta­
bolique de chaque patient. En raison de grandes diffé­
rences individuelles, même chez les seniors en bonne
santé mais surtout chez les personnes très âgées séni­
les, il convient de surveiller si les apports énergétiques
sont adéquats en effectuant des contrôles du poids.
Conseils pour des apports énergétiques adaptés aux besoins
et en cas d’apports insuffisants
Prévention
Traitement
Conserver une structure
régulière des repas:
trois repas principaux
+ collations
Privilégier les aliments et boissons à
densité calorique élevée, par ex.
fromages (fromages gras et fromages
à la crème), fruits secs, noix, mets
sucrés, séré à la crème, yaourt au lait
entier, jus de fruit, boissons lactées
Composition équilibrée
des repas principaux:
féculents (céréales,
pommes de terre),
protéines et légumes/
salade
Enrichissement avec des calories
issues de matières grasses et/ou de
sucres:
– Soupes et plats: huile d’olive, huile
de colza, crème, beurre
– Boissons: miel, sucre ou maltodextrine (supplément glucidique en
poudre issu de l’amidon de maïs pour
un enrichissement au goût neutre,
disponible en droguerie et pharmacie)
Entretenir des rituels
comme la pause-café
avec en-cas (petit pain,
fruit, yaourt, etc.)
Alimentation buvable hautement
calorique:
– comme collation et/ou comme
substitut de repas*
* Pour obtenir des informations relatives à l’indication médicale,
à la garantie de prise en charge des coûts et à l’organisation,
consulter le site de la SSNC 3 Homecare.
Apports protéiques
Comme mentionné ci­dessus, les besoins énergétiques
diminuent certes chez les personnes âgées, mais les
besoins en protéines alimentaires restent inchangés,
voire augmentent légèrement. Afin de maintenir l’équi­
libre des protéines de l’organisme par anabolisme et
catabolisme continus, l’alimentation doit apporter quoti­
diennement des protéines de grande qualité. Sur la
base du rapport de la Commission fédérale de l’alimen­
tation intitulé «Les protéines dans l’alimentation» [8],
l’Office fédéral de la santé publique préconise des apports
protéiques journaliers de 0,8 g par kg de poids corporel
chez les personnes âgées en bonne santé.
Toutefois, des quantités plus élevées sont actuellement
discutées afin de préserver de façon optimale la masse
maigre, les fonctions de l’organisme et la santé. En
situation pathologique, par ex. en cas de maladies in­
flammatoires, d’infections et de plaies, les besoins peu­
vent être encore davantage accrus. Il est néanmoins
difficile d’estimer à quel point ces besoins sont accrus.
Des apports protéiques journaliers compris entre 1,0 et
2,0 g par kg de poids corporel sont actuellement en
discussion, mais l’état actuel des connaissances est cepen­
Forum Med Suisse 2014;14(49):932–936
935
CURRICULUM
dant insuffisant pour pouvoir formuler des recomman­
dations concrètes dans des situations particulières. Tant
que des preuves plus solides ne seront pas disponibles,
il semble raisonnable de recommander la consommation
de 0,8 à 1,2 g par kg de poids corporel chez toutes les
personnes âgées, en particulier celles à risque de mal­
nutrition.
ATTENTION: Tandis que jusqu’à l’âge d’env. 65 ans, il
est recommandé d’adopter un régime méditerranéen,
riche en légumes et en fruits, les recommandations
s’inversent paradoxalement chez les sujets âgés, pour
qui des apports énergétiques et en particulier protéiques
jouent un rôle de plus en plus important. La consommation
de légumes et de fruits devrait être un peu plus limitée,
afin d’éviter une sensation de réplétion prématurée qui
pourrait limiter les apports protéiques.
Conseils pour des apports protéiques adaptés aux besoins
et en cas d’apports insuffisants
Prévention
Traitement
Enrichissement avec des protéines:
Prévoir un aliment riche en protéines lors
– Soupes et plats: fromage râpé, séré, œufs
de chaque repas principal:
– Boissons et aliments de consistance
– Petit déjeuner: par ex. fromage, œuf,
crémeuse: lait écrémé en poudre
yaourt, séré
– Déjeuner et dîner: par ex. viande, poisson, (commerce de détail), poudre de
protéines du commerce (disponible
œufs, fromage, substituts de viande
en droguerie et pharmacie)
(tofu, seitan, etc.)
Alimentation buvable riche en protéines:
Consommer du lait et des produits laitiers
– contenant 18 à 20 g de protéines
lors des collations:
par unité (produits du commerce à 2 ou
– par ex. 2 dl de lait/boissons lactées, un
1,25 dl)
yaourt aux fruits ou un séré aux fruits
Trois portions de produits laitiers par jour
garantissent en plus des apports en calcium
adaptés aux besoins
Apports en vitamine D
La vitamine D est devenue très populaire au cours de
ces dernières années. Etant donné que cette vitamine
est décrite dans un article séparé de cette série (numéro
50 du FMS, Bischoff­Ferrari, et al.), nous ne mentionnerons
ici que l’essentiel concernant les personnes âgées. La
Commission fédérale de l’alimentation préconise une
supplémentation en vitamine D, à la dose de 800 UI par
jour, chez les hommes et les femmes à partir de l’âge de
Conseils pour des apports en vitamine D adaptés
aux besoins et en cas d’apports insuffisants
Prévention
Traitement
Planifier la consommation régulière d’aliments contenant de la vitamine D:
– Poissons gras: saumon, thon, hareng,
sardine (remarque: privilégier les produits
MSC ou bio)
– Œufs, champignons, produits à base
de lait entier
– Le cas échéant, produits enrichis en
vitamine D (par ex. œufs, produits laitiers)
Préparations à base de vitamine D
(gouttes, gélules ou produits pour
administration parentérale)
Le cas échéant, alimentation buvable
spécifique pour les seniors, avec teneur
élevée en vitamine D
Remarque: utilisation pertinente lorsque
l’alimentation buvable est indiquée en
raison d’apports énergétiques et protéiques insuffisants
60 ans. Avec l’âge, la synthèse endogène de vitamine D
par la peau diminue. Par ailleurs, les personnes âgées,
en particulier celles qui sont très âgées et dépendantes,
sortent moins souvent et moins longtemps en plein air.
Dans ces situations, une supplémentation en vitamine
D est recommandée. La concentration sanguine cible de
25(OH)D est d’au moins 50 nmol/l.
Conclusion et perspectives
La malnutrition est un problème fréquent chez les per­
sonnes âgées. Sa prévalence augmente avec l’âge et
avec la dépendance. La malnutrition est responsable
d’une augmentation de la fragilité, de la morbidité et de
la mortalité et, en cas d’hospitalisations, d’une augmen­
tation de la durée de séjour et des coûts de traitement.
La malnutrition devrait déjà être prévenue, détectée et
traitée en dehors du contexte hospitalier et ainsi, il
s’agit là d’une mission essentielle des médecins de
famille. Pour les personnes âgées, il convient de discuter
de mesures simples et praticables sur le long terme,
parmi lesquelles figure le recours à des services de re­
pas à domicile et à des aides ménagères. A cet effet, la
collaboration avec des diététiciennes diplômées (diététi­
cienne diplômée ES/HES, diététicienne BSc), avec des
responsables de l’Association suisse des services d’aide
et de soins à domicile et avec d’autres institutions
comme Pro Senectute est indispensable. Le projet Via
aspire à promouvoir la santé des personnes âgées, à
renforcer leur autonomie et à améliorer leur qualité
de vie. Cet article doit aider à nous rapprocher de cet
objectif essentiel.
Correspondance:
Dr Reinhard Imoberdorf
Facharzt für Innere Medizin FMH
Klinik für Innere Medizin
Kantonsspital Winterthur
CH-8401 Winterthur
reinhard.imoberdorf[at]ksw.ch
Références
1 Imoberdorf R, Ballmer PE. Die Epidemiologie der Mangelernährung.
Therapeutische Umschau 2014; 71(3):123–126.
2 Löser Ch. Ursachen und Klinik der Mangelernährung. Therapeutische
Umschau 2014; 71(3): 135–139.
3 Imoberdorf R, Rühlin M, Beerli A, Ballmer PE. Malnutrition – sous­
nutrition. Forum Med Suisse 2011; 11(44): 782–786.
4 Fäh D, Matzke A. Alimentation et Santé. Dans: Keller U, Battaglia
Richi E, Beer M, Darioli R, Meyer K, Renggli A, Römer­Lüthi C, Stoffel­
Kurt N. Sixième rapport sur la nutrition en Suisse. Berne: Office fédé­
ral de la santé publique, 2012: 127–186. Disponible gratuitement sur
www.blv.admin.ch/dokumentation/00327/04527/05229/index.
html?lang=fr.
5 Imoberdorf R, Meier R, Krebs P, Hangartner P, Hess B, Stäubli M, Weg­
mann D, Rühlin M, Ballmer PE. Prevalence of undernutrition on ad­
mission to Swiss hospitals. Clin Nutr 2010; 29: 38–41.
6 Imoberdorf R, Rühlin M, Ballmer PE. Der ältere Mensch im Kranken­
haus. Schweiz Zeitschr Ernährmed 2006; Nr. 5: 2–5.
7 Volkert D, Bauer JM, Frühwald T, Gehrke I, Lechleitner M, Lenzen­
Grossimlinghaus R, Wirth R, Sieber C. Klinische Ernährung in der Ge­
riatrie. Aktuel Ernahrungsmed 2013; 38: e1–e48.
8 http://www.blv.admin.ch/themen/04679/05065/05093/index.
html?lang=fr
Forum Med Suisse 2014;14(49):932–936
936
Téléchargement