SOMMAIRE
INTRODUCTION................................................................................................1
I. Le flou scientifique et médiatique autour de ces écoles ................................................2
II. le protocole d’enquête.....................................................................................................7
CHAPITRE1 : Revendications d’une avant-garde scolaire ............................18
Section1: Le sous champ des écoles nouvelles.................................................................18
I. En marge de l’institution scolaire « traditionnelle »...................................................18
II. Un espace de distinction : des usages différenciés des méthodes pédagogiques
nouvelles..............................................................................................................................34
Section 2 : une relation pédagogique « innovante».........................................................42
I. Les fondements théoriques de la relation pédagogique..............................................42
II. Un rapport pédagogique « invisible » aux effets sociaux visibles.............................45
III. La figure de l’enseignant dans le rapport pédagogique...........................................55
Chapitre 2 : Les usages sociaux d’un modèle pédagogique « expressif et
spontané »...........................................................................................................66
Section1: Cristallisation d’une définition de l’enfant « spontanée et expressive » dans
l’offre pédagogique de ces écoles......................................................................................66
I. Le « métier d’enfant » dans les pratiques pédagogiques d’avant-garde...................67
II. les conditions sociales et culturelles du bon usage de ces écoles...............................88
Section2: Les parents d’élèves, des stratégies différenciées...........................................96
I. Des familles dotées d’un fort capital culturel ..............................................................97
II. Les motivations parentales: des justifications plurielles.........................................105
CONCLUSION.................................................................................................117
ANNEXES........................................................................................................119
BIBLIOGRAPHIE :.........................................................................................120
TABLE DES MATIERES ...............................................................................125
1
INTRODUCTION
« Il était une fois, dans une ville perchée sur la montagne, un groupe de parents qui
rêvaient d’une école d’avant-garde pour leurs enfants, une école leurs idéaux éducatifs
feraient partie intégrante de la vie quotidienne… »
1
« C’est génial ma nouvelle école, on apprend à lire quand on veux, on n’a pas de
devoir, on apprend à jardiner, on n’a pas de notes… »
2
Ces paroles participent de la construction que les acteurs se font du monde social et de
la représentation de ces écoles diffusée dans le sens commun au travers de l’image d’une
école « libérale », « libertaire », « alternative », « pour artistes », « un endroit extraordinaire »
mais mal connu qui suscite à la fois la fascination et méfiance.
Les écoles dites nouvelles se caractérisent avant tout par leurs revendications de
proposer une autre idée de l’école, une éducation différente, une école qui ne soit pas « le
conditionnement et le psittacisme de l’éducation traditionnelle »
3
, un espace « une autre
pédagogie puisse s’implémenter ».
Si l’analyse sociologique doit se défaire du sens commun, celui-ci donne un élément
initial à savoir le flou qui existe autour de ces écoles, de la pédagogie mise en place et du
public accueilli. Elles restent très marginales dans le système éducatif et sont réservées à de
petits groupes d’initiés qui ont connaissance de leur existence et pour qui elles semblent une
option pédagogique adéquate pour l’éducation de leurs enfants.
Ces pédagogies dites « nouvelles », actives et coopératives ont été impulsées par des
hommes et des femmes par des hommes et des femmes Célestin Freinet, Maria Montessori,
Ovide Decroly, Fernand Oury et bien d’autres depuis plus d’un siècle; qui se sont
continuellement revendiqués comme des précurseurs tant en ce qui concerne les méthodes
d’apprentissage que les relations enseignants-élèves ou le matériel scolaire.
1
Citation extraite du site de l’école nouvelle de la grande Ourse www.grande-ourse.ch situé en Suisse.
2
Paroles rapportées lors d’entretien avec parents d’élèves de l’école de la Prairie, annexe II p
3
Extrait questionnaire enseignant à la question « qu’est ce que pour vous l’éducation nouvelle ? ».
2
Ainsi, au début du siècle, les écoles de l’enseignement mutuel sont fondées sur le fait
que les élèves s’enseignent les uns aux autres et expérimentent un matériel innovant: des
tableaux noirs et les ardoises; Célestin Freinet invente le « texte » libre, le travail
individualisé sur fichiers, la pédagogie du projet, le journal scolaire; Fernand Oury et les
praticiens de la pédagogie institutionnelle, eux font du conseil l’une de leurs institutions
phares; la pédagogie active est fondée sur l’interdisciplinarité. Ces innovations étaient
perçues comme subversives à leurs époques car porteuses d’un discours de contestation
sociale et en opposition avec l’éducation républicaine et laïque.
Aujourd’hui ces établissements sont toujours en marge du système éducatif et restent
attachés à la filiation des pionniers de l’éducation nouvelle.
Ce travail cherche à comprendre les usages sociaux actuels de ces théories
pédagogiques. Il s’agit alors pour cerner cet objet d’analyser les conditions sociales
d’utilisation et les effets sociaux du discours et des pratiques pédagogiques revendiqués par
ces écoles, afin de voir avec quels milieux sociaux ils rentrent en affinité.
Si la sociologie n’a rien à dire des objectifs de cette pédagogie, elle doit cependant les
objectiver et les mettre en relation avec toute une conception du monde et de l’éducation
qu’ils présupposent.
4
Ce qui invite à préciser certains termes et aspects du sujet, qui seront développés dans les
pages suivantes.
I. Le flou scientifique et médiatique autour de ces écoles
Le regard sociologique sur le statut de la pédagogie
Pierre Gréco
5
souligne que ni l’appel à l’étymologie, ni l’inventaire même méthodique,
des multiples emplois du terme « pédagogie » ne sont d’un grand secours pour qui tente
d’établir le statut d’un concept, d’une discipline au sujet desquels la seule certitude autorisée,
est que ce statut évident cent ans plus tôt ne va plus de soi.
Néanmoins, malgré cette difficulté de saisir ce qu’est la pédagogie, le regard sociologique
choisit de la définir comme « la rationalisation du travail d’éducation entendue comme
4
Roussel (Roger), « remarques sociologiques sur quelques invariants de la pédagogie Freinet » in Clanché
(Pierre), dir. la pédagogie Freinet : mise à jour et perspectives, Bordeaux, Presses universitaires, 1999, p155.
5
Gréco (Pierre), « Les problèmes de l’éducation scolaire », in Pédagogie, Encyclopedia Universalis, p729.
3
technique sociale autonomisée et spécialisée »
6
; l’éducation quant à elle est un produit, c'est-
à-dire le résultat d’une conjonction d’influences et de déterminations relatives à une société
donnée.
Il semble alors plus pertinent de s’attacher à finir la pédagogie par les fonctions
sociales qu’elle remplit. La fonction externe la plus la plus importante du travail pédagogique
qui a été mise en avant par les travaux sur la reproduction de Pierre Bourdieu et Jean-Claude
Passeron
7
: est sa fonction de sélection culturelle et sociale, qui est rendue possible par tout un
ensemble de relations pédagogiques cachées entre méthodes pédagogiques et structures des
inégalités de capital culturel au sein de la société.
En effet, tout système pédagogique que cela se voit ou non est articulé à la circulation sociale
des idées, ce qui invite à reconnaître que même les discours pédagogiques les plus
contestataires exercent « une entreprise de normalisation pratique ».
8
Cette définition invite à s’interroger sur certaines caractéristiques et spécificités de ces
pédagogies dites « nouvelles », qui se réclament différentes des pédagogies traditionnelles
9
.
Elles supposent d’être mises en relation avec les conditions sociales de la circulation des
valeurs d’une société à un moment donné, afin de dégager quels vont en être les usages faits
par les familles. Par ailleurs, bien que contestant le formatage et l’entreprise de normalisation
des éducations traditionnelles, elles participent aussi par la vision de l’enfant qu’elles
entendent former à la mobilisation d’un système de normes au travers du système
pédagogique.
.
Un travail qui s’inscrit dans les travaux de Pierre Bourdieu sur la reproduction
Pour s’interroger sur le caractère socialement situé de la production et réception de ces
pédagogies, le point d’appui théorique de ce travail sera les travaux de Pierre Bourdieu sur La
reproduction, il montre que tout rapport pédagogique est un rapport de force, car l’action
pédagogique exerce une violence symbolique au travers de l’imposition d’un arbitraire
culturel.
6
Passeron (Jean-Claude), «Pédagogie et pouvoir », in Pédagogie, Encyclopedia Universalis, p731.
7
Idem.
8
Hameline (Daniel), « le statut de la pédagogie », in Pédagogie, encyclopedia universalis, p725.
9
On utiliser tout au long de cette recherche le terme école traditionnelle, qui est le terme utilisé par les écoles
elles mêmes en férence aux écoles publiques ou privées confessionnelles qui n’utilisent pas les méthodes de
l’éducation nouvelle. Il sera surtout utiliser dans un souci de clarté.
4
La problématique de ce travail s’inscrit aussi dans le prolongement des travaux de
Jean-Claude Chamboredon sur les mutations de l’école maternelle, s’est développée une
pédagogie nouvelle et active qui s’appuie sur l’activité de l’enfant, sur sa curiosité et son
envie de grandir. Ces changements ont été impulsés par les milieux supérieurs. Par ailleurs,
comme le souligne Philippe Perrenoud
10
les principes pédagogiques de l’éducation nouvelle
présentent de fortes ressemblances avec les changements survenus au niveau de l’école
maternelle, qui ont cependant la particularité d’essaimer à tous les niveaux.
Il apparaît alors d’autant plus pertinent de s’appuyer sur la démarche de recherche de
Jean-Claude Chamboredon. Celui-ci précise qu’elle ne doit pas procéder d’une simple
comparaison des attentes que livrent les opinions des utilisateurs et de l’offre qu’énonce la
définition officielle ou les programmes de l’institution. Il est nécessaire de mettre en
perspective les attentes qui découlent des déterminations objectives régissant dans chaque
milieu social les formes de traitement et perception de l’enfant avec l’offre de ces écoles ; en
restituant les conditions sociales de l’utilisation de celles-ci. Cela suppose de gager la
définition dominante de l’enfance que tend à façonner l’institution, et d’étudier comment
cette définition s’inscrit dans le programme et les pratiques pédagogiques.
Or, le préalable d’une analyse sociologique des fonctions différentielles de l’école maternelle
qu’il pose, est d’une part l’analyse de la constitution de la définition dominante de l’enfance,
les conditions sociales qui rendent possible la reprise de cette définition dans certains groupes
sociaux, et d’autre part l’analyse de l’histoire maternelle comme histoire de cette définition
dans le programme de l’institution.
La problématique centrale de ce travail s’appuie sur cette démarche mais la spécificité
de l’objet étudié suppose des interrogations préalables différentes.
Les travaux de recherche portant sur les écoles nouvelles s’avèrent très réduits. C’est
sur l’école des Roches, considérée comme l’école pionnière et archétype du courant de
l’éducation nouvelle en France, que se concentre l’essentiel des productions écrites. Elle est
surtout saisie par le regard de l’historien
11
qui retrace et s’intéresse aux précurseurs de
l’éducation nouvelle à la fin du XIX siècle. Elle est aussi évoquée comme l’école
internationale de la haute bourgeoisie dans les travaux de Michel Pinçon et Monique Pinçon-
Charlot
12
.
10
Perrenoud (Philippe), La pédagogie à l’école des différences, Paris, ESF éditeurs, 1995, 205p
11
On peut citer la thèse en cours de Nathalie Duval sur l’école des Roches sous la direction de et les écrits de
Antoine Savoye dans la revue études sociales.
12
Pinçon (Michel), Pinçon Charlot (Monique), Sociologie de la Bourgeoisie, Paris, collection repères la
découverte, 2000.
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