particulière au système kantien […] les pyramides gymniques des orgies bourgeoises et la
hiérarchie des premières loges
», en y reconnaissant un mode d’organisation « de la vie
entière privée de toute fin ayant un contenu
», bref de toute cause finale. De la sorte,
jugement moral kantien, sous l’effet de la raison, se coordonnerait avec l’immoralité sadienne.
Ainsi, les « équipes sportives modernes dont les activités collectives sont réglées avec une
telle précision qu’aucun membre n’a le moindre doute sur le rôle qu’il doit jouer et qu’un
remplaçant est prêt à se substituer à chacun sont un modèle précis dans les jeux sexuels
collectifs de Juliette, où aucun instant n’est inutilisé, aucun orifice corporel négligé, aucune
fonction ne reste inactive. Dans le sport, comme dans tous les secteurs de la culture de masse,
il règne une activité intense et fonctionnelle
». On comprend que cette écroulement de la
raicon transcendante annonce dans le même mouvement la chute des instances qui
l’annonçaient : les « grands récits », les métarécits », et 25 ans après la découverte
d’Auschwitz, lyotard pourra voir dans cette fin des Gr le signe de la postmodernité.
La deuxième grande raison, curieusement vient de la posture des philosophes des années
soixante et du contexte de l’époque. Le contexte était celui du triangle hiérarchisé et d’une
société dont la rigidité devenait insupportable. Ainsi pourra-t-on par exemple se souvenir de
la Chronique de l’école caserne de Jacques Pain et Fernand Oury. D’autre part, ce contexte
coïncide avec l’effritement annoncé des « grands récits » qui, jusque-là, fédéraient la vie
intellectuelle qu’on pourrait qualifier « d’opposition » (de gauche). Il serait ici possible de
situer la reprise de la psychanalyse sous l’arbitraire d’un signifiant lacanien se voulant en
phase avec la logique structuraliste. G. Deleuze et F. Guattari dénoncent ainsi l’aspiration « à
remplir une fonction majeure du langage, faire des offres de service comme langue d’Etat,
langue officielle (la psychanalyse aujourd’hui, qui se veut maîtresse du signifiant, de la
métaphore et du jeu de mots) » (Kplm, 50). Il en va de même pour le marxisme, alors en très
large part oblitéré par une dérive dogmatique basée sur le modèle soviétique, et dont les
principaux représentants politiques en France n’arrivaient pas à se défaire. Ni Lacan, ni Marx.
C’est ainsi que le philosophie émergente va chercher à quitter toute position de synthèse ou de
surplomb, « du haut », ce que Deleuze nommait le « molaire ». Lyotard, quant à lui, fustige
toute posture philosophique qui chercherait du haut de son trône, même pour libérer les
masses, à édicter une « vérité », toujours dogmatique.
On comprend d’ailleurs le retour à Nietzsche chez Deleuze, à la quête d’une philosophie qui
ne serait plus édictée depuis les nuages, depuis le sommet du triangle, mais qui se ferait à
« coups » de marteaux, en renouant avec le sol terrestre, avec les intensités qui circulent à la
surface, le micro-vibrations, ce que Deleuze nomme le « moléculaire ». C’est d’ailleurs le
retour à une philosophie « intensive », que ce soit chez Deleuze ou Lyotard, qui se profile. Il
s’agit de dresser ce que Deleuze nommait une « machine de guerre » contre le vieux triangle,
d’en déconstruire (le mot de derrida) systématiquement les organisations hiérarchisées.
La troisième raison s’oppose à la précédente, et marque toute l’ambiguïté des penseurs de la
postmodernité. Bien évidemment, en s’en prenant au triangle hiérarchisé, c’est l’ordre de
l’oppression qu’entendait critiquer tant Deleuze que Lyotard. T cette oppression a pour nom
au 20ème siècle le capitalisme. Mais le paradoxe est là, le capitalisme ne cherche pas à faire
penser, mais avant tout à capitaliser. Plus il peut capitaliser des flux financiers, mieux il se
porte. Plus ce qui peut le contraindre, comme les instances étatiques, est levé, mieux il se
porte. Parmi ce que peut le contraindre et le réguler, on reconnaît le grand triangle dominé par
Ibid., p. 99.
Ibid.
Ibid., pp. 98-99.