La transition métal-isolant d`Anderson observée avec un gaz

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Lerefroidissementdatomesparlaserarendupossible létude d’une grande varté de systèmesquantiques
complexesdansdesconditionsoptimales.En particulier, à laide de potentielscréésparlalumière,on peut
étudierdes«réseaux optiques»spatialementriodiques ressemblantbeaucoupàuncristal. Cesmêmes
potentielsoptiquespeuventêtreutiliséspour réaliserdes systèmesquantiques«chaotiques». Nous montrons
danscetarticle comment unsystème quantiquementchaotiqueréaliséavecdesatomesfroidspermetdexplorer
latransition métal-isolantdAnderson en dimension trois,etde mesurerpour lapremière fois un exposant
critique de cettetransition avecdesondesde matresansinteraction.
alocalisation dAnderson (encoreappelée localisa-
tion forte) est un phénomène non intuitif,mais
aujourdhuisolidementétabli. La situation physi-
que de base est celle d’une particule libresoumiseàun
potentiel spatialementsordonné, cest-à-direaatoire
avecdesfonctionsde corrélation connues.Parexemple,
une version simple « discrétisée » est donnée parle
modèle dAnderson,critdanslencadré 1 de larticle
«La localisation forte dAnderson »,oùlaparticule est
localisée sur des sites, avecuncouplage constant
(« hopping ») entresites voisins,et un potentiel quivarie
de fon aatoiredesiteensite,sanscorrélation entre
sites.Danscettesituation,un paquetdondesinitialement
localisé ne vapasdiffuseràlinfini,mais varesterlocalisé
dans une région finie de lespace, avecune extension typi-
queappelée longueur de localisation. La localisation
dAnderson résulte directementde linterrence quanti-
que entre différents chemins(au sensde Feynman) qui,à
grande distance,peuventêtre (selon ladimensionalité et
les valeurs desparatresdu système) systématiquement
destructifs.
La localisation dAnderson se produitpour une seule
particule etnest doncpasliée àlinteraction entre par-
ticules(contrairementàlalocalisation de Mott par
exemple). Elle présente descaractéristiques très sembla-
blesdansdesmodèlesde désordre discretcomme le
modèle dAnderson,oudansle casd’un potentiel désor-
donné continuappliquéàune particule libre, comme dis-
cuté danslasuite de cetarticle. Unrésultatétonnantest
qu’en dimension 1 ou 2,lalocalisation dAnderson est la
règle générale. Evidemment,quand lénergie est très
grande devantlesfluctuationsdupotentiel,lalongueur de
localisation peut êtresi grande qu’elle devientimpossible
àmesurerexrimentalement.
En dimension 3,le scénario général est que lesétats de
basse énergie sontlocalisés,tandisqueceux de haute
énergie (quand laparticule « vole » au-dessus desbosses
de potentiel) restentdélocalisés, avecun mouvementglo-
balementdiffusif, comme résultantd’une marche au
hasard de laparticule dansle potentiel aatoire. Lesdeux
régimes sont séparéspar un « seuil de mobilité ». Au voi-
sinage de ceseuil,se produitlatransition délocalisé-
localisé (outal-isolant) dAnderson. Il est aujourdhui
bien établi àpartirde simulationsnuriques,en parti-
culierdumodèle dAnderson,quecettetransition est une
transition de phase quantique du second ordre,oùlalon-
gueur de localisation (resp. la constante de diffusion)
diverge en loi de puissance ducoté localisé (resp. déloca-
lisé) de latransition.
Insistons sur ladistinction entrecesdeux phéno-
mènes:lalocalisation dAnderson –quise manifeste par
la concentration spatiale de lafonction donde,etexiste
quelle quesoitladimension du système – etlatransition
dAnderson qui est une transition de phase quantique
entreun étatoùlesfonctionsdonde sontlocalisées(iso-
lant) et un étatoùlesfonctionsdonde sontdélocalisées
(métal),transition qui ne se manifeste qu’en dimension
égale ou surieureàtrois.
L
La transition métal-isolant
dAnderson observée
avecun gazatomique froid
en régime chaotique
Article proposé par:
Jean-Claude Garreau, PascalSzriftgiser
LaboratoiredePhysique desLasers, AtomesetMolécules, UMR 8523, CNRS /Univ.Lille 1, Villeneuve-dAscq
Gabriel Lemar, DominiqueDelande
LaboratoireKastlerBrossel, UMR 8552, UPMC /CNRS /ENS, Paris
La transition métal-isolantdAnderson observée avecun gazatomique froid en régime chaotique
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Il est trèsdifficile dobserverexrimentalementla
transition dAnderson. Pour ce faire il faut pouvoircontrô-
lerle désordre de fon précise. Tout effetde décohérence
de laparticule à cause de son environnementextérieur
(dûparexemple àdescollisionsavecdesphononsdansle
casdélectronsdans uncristal) tendraàbriserladélicate
interrence quantiqueresponsable de lalocalisation. Le
scénario de latransition dAnderson pouvant s’appliquer
àune grande varté de systèmesondulatoiressordon-
sycomprisdesondes«classiques»,oùlesca-
nismesde brisure de la cohérence de phasesont
contrôlables– desobservationsexrimentalesde latran-
sition dAnderson ontété effectuéesavecdesondes ultra-
sonoresouélectromagnétiquesen milieusordonné
(voirlarticle « La localisation forte dAnderson desondes
classiques» dansce nuro). Mais une observation
directeavecdesondesde matrerestaitessentiellement
inaccessible :les raresobservationsdansdes solides sont
ambiguëscarlesinteractionsélectron-électron ypertur-
bentnotablementlescaractéristiquesde lalocalisation.
Nous avonsmisàprofitnotre expertisesur létude du
chaosquantique pour réaliser unsystème atomique équi-
valentaumodèle dAnderson tridimensionnel. Nous
avonsainsi pu,en faisantinteragirdesatomesfroidset
desfaisceaux laser,observerpour lapremière foislatran-
sition dAnderson avecdesondesde matre eteffectuer
lapremière mesure exrimentale de lexposantcritiquede
cettetransition (défini ci-dessous).
Chaosquantique
etlocalisation dynamique
Lecomportementquantique d’unsys-
tème simple est critparléquation de
Schrödinger.Orcelle-ci est linéaire, ce qui
signifie qu’untel système ne peut paspré-
senterla«sensibilitéaux conditions
initiales» qui est un ingrédientde base du
chaos.Il est doncjustifié de se demanderce
qu’est le chaosquantique .La définition la
plus simple reposesur ladynamique
classique:unsystème est quantiquement
chaotiquesison équivalentclassique
(obtenudanslalimite oùla constante de
Plancktend vers 0) est chaotique. On
s’intéressealors aux proprtésdesniveaux
dénergie oudesétats propresdu système
quantique,oubien encoreàsesproprtés
de transport,en essayantdétablir un lien
aveclesproprtésclassiqueschaotiques.
Dans saforme laplus simple,le rotateur
forcé est formé d’une particule tournant
librement sur une orbitecirculaire,à
laquelle lon applique,de fon périodique,
desimpulsionsdans une direction donnée
(doùle nom anglais« kicked rotor»),que
nous appelleronsici « pulses» pour éviterla confusion
aveclagrandeur impulsion. La particule voitdoncune
force impulsionnelle de forme sinusoïdale. Si lespulses
sont suffisammentcourts pour qu’on puisse négligerle
mouvementde laparticule pendantle pulse,on peut les
assimileràdesfonctionsdelta.La dynamique de cesys-
tème est particulièrementfacile àétudiernuriquement,
carlévolution serésume àdesévolutionslibresentrecou-
péesriodiquementpardes sauts de limpulsion de
latome produits parlapplication de laforce (voirfigure1 ).
Ils’avère que ladynamiqueclassique de cesystème est
chaotiquesi laforceappliquée est suffisammentintense.
Plus précisément,ladynamiqueclassique, bien que parfai-
tementterministe,ressemble beaucoupàune marche
auhasard danslespace desimpulsions:àchaque pulse,la
particule voit son impulsion modifiée d’une quantité
pseudo-aatoire de moyenne nulle. Globalement,si on
effectueune moyenne sur un ensemble de conditionsini-
tiales,on observe, comme pour une marche auhasard,un
mouvementdiffusif,maisdanslespace desimpulsions.
Cette dynamiqueaétéappelée diffusion chaotique. Ainsi,la
largeur de ladistribution gaussienne dimpulsion d’un
ensemble de particulesclassiques s’élargitavecle tempset
lénergie cinétique moyenne augmente linéairementavec
le temps ; ,oùDest la constante de diffusion.
Cesystème se prête parfaitementàlétude duchaos
quantique. Que devientladiffusion de limpulsion
proprtécaractéristique duchaosclassique–dansle cas
quantique?
Considérons un étatquantique initialtrèslocalisé
autour d’une impulsion moyenne nulle. Pendant un
certain temps,ladynamique quantique mime ladynami-
-
〈〉pDt
2=2
Figure 1 – Schémade lexrience. Londe stationnaire est allumée de fon périodique dansle
temps(flèche rouge) pendant une courte durée. A chaqueallumage lamplitude de celle-civarie
selon une série quasi-périodiqueàdeux fréquencesincommensurablesentre ellesainsi qu’avecla
fréquence desallumages.Le nuage datomesfroidsinitialement sytrique (àgauche) reçoitdes
pulses selon ladirection de londe stationnaire etdevientainsi de plus en plus allongé (àdroite).
Pour étudierexrimentalementle chaosquantique,il faut trouver unsystème quantique,réalisa-
ble exrimentalement,dontlalimiteclassiquesoitchaotique. Il existeuncertain nombre de sys-
tèmesprésentantcettecaractéristique,parexemple lesatomesde Rydbergsoumisàdeschamps
électriqueset/oumagnétiques statiquesouoscillants,ouencore des«billards»chaotiques réalisés
avecdescavitésoptiquesoumicro-ondes.Dansle domaine du transport etde lalocalisation,un
système s’est imposécomme paradigme duchaosquantique:le rotateur forcéatomique,crit
danslencadré.
83
La transition métal-isolantdAnderson observée avecun gazatomique froid en régime chaotique
queclassique,etlon observeune augmentation linéaire
de lénergie cinétique moyenne ;lafonction donde prend
alors une forme gaussienne .
Maisdurantlévolution temporelle,desinterrences
quantiques se développentdansle système. Comme pour
le modèle dAnderson unidimensionnel, cesinterrences
sonten moyenne destructivesàgrande distance,etprovo-
quent unralentissement,puis un gel du transport.Léner-
gie cinétique moyenne tend alors vers une constante,
tandisque lafonction donde tend vers une distribution
exponentielle ,oùξest appelé lon-
gueur de localisation.Letempscaractéristiqueassocà ce
changementde dynamique est le tempsde localisation.
Cephénomène,couvert nuriquementparCasati,
Chirikov, Ford etIzraileven 1979,est nommé localisation
dynamique ,ladjectif dynamiqueexprimantle faitquecette
localisation se produitdanslespace desimpulsions.
Le mouvementdiffusif initial,suivi par un phéno-
mène de localisation, accompagné parlaforme exponen-
tielle de ladistribution dimpulsion,suggère fortement
une analogie aveclalocalisation dAnderson,même si les
deux systèmes sontde nature différente. Le fait remarqua-
ble est qu’il existeun lien profond entre lesdeux phéno-
mènes, comme démontré parGrempel, Prange et
Fishman en 1982:lesétats propresde lopérateur dévolu-
tion du rotateur forcésur une période (voirencadré ) obéis-
sentàune équation analogueà celle dumodèle
dAnderson (voiréquation (2) de lencadré1delarticle
«La localisation forte dAnderson »),sauf que le terme
diagonalW iaulieudêtreaatoire,est donné par une for-
mule explicitecompliquée générantdesnombrespseudo-
aatoires(un peucomme lesgénérateurs de nombres
aatoires utilisésdanslesprogrammesinformatiquesqui
sonten faitparfaitementterministes,mais statistique-
mentdistribuéscomme desnombresaatoires). A ce
tail près,il yaune analogie complète entre lalocalisa-
tion dynamique etlalocalisation dAnderson.
Lerotateur forcéatomique
Comment réaliserexrimentalementlalocalisation
dynamique d’unrotateur forcé quantique,en conservant
lesfragilesinterrencesquantiques responsablesduphé-
nomène de localisation ? Lesondesde matre d’un gaz
atomique froid,manipuléespardesfaisceaux laser,sont
iciun outil incomparable.
En effet,on saitcréer un potentiel périodique pour le
mouvementexterne desatomes(cest-à-dire ducentre de
masse,lesdegrésde liberté internesétanticispectateurs).
Pour réaliserle rotateur forcé,il suffitdoncde laisserles
ondesde matreatomiquesévoluerlibrementlessentiel
du tempsetde simplementleur appliquer un potentiel
variant sinusoïdalementdanslespaceà chaque multiple
entierd’une période que lon choisit.
Comment réaliser untel potentiel ? On peut utiliser
pour celales« forceslumineuses» dinteraction entreun
atome et un faisceaulaserdontlafréquence est proche
d’une résonanceatomique,forcesqui découlentdufait
qu’un faisceaulaserprovoqueun « déplacement
lumineux » desniveaux atomiques ; pour ladynamique du
centre de masse de latome, cecicorrespond àun
« potentiel lumineux » proportionnel au rapport de
lintensité lumineuseIparle désaccordΔde fréquence
entre le rayonnementetlatome. Pour créerladépendance
spatiale sinusoïdale,il suffitd’utiliser une onde station-
naire obtenue en réfléchissant un faisceaulaser sur un
miroir.Danscecaslintensité du rayonnementest modu-
lée sinusoïdalementdanslespace:où
k=2 π / λest le nombre donde du rayonnement.On pro-
duitainsiun potentiel optique proportionnel à
, cest-à-direun potentiel sinusoïdal de pas
.Enfin,on placeun modulateur acousto-
optiquesur le chemin dufaisceaupour le couper(en le
viantde satrajectoire initiale). On peut ainsiréaliserdes
Lrotateur forcé»
Encadré
Dansle rotateur forcéclassique,une particule est sou-
miseàdesinteractionsriodiquesde trèscourte durée avec
un potentiel sinusoïdalKcosx .Quand aucune force ne lui
est appliquée,lavitesse de laparticule est constante. Périodi-
quement–quand le tempsest un multiple entierde la
riode –le potentiel est «allumé » pendant untemps très
court, ce quichange instantanémentlimpulsion de laparti-
cule d’une valeur Ksin x(on utilise, conventionnellement,
des variablesadimensionnées). Cette dynamiquecorrespond
donc auhamiltonien
(4)
On peut alors écrire lévolution du système sur une
riode (de à)àlaide deséquations
suivantes:
(5)
Cest lasimplicité de ces relationsde récurrence qui est
responsable dustatut de « paradigme » du rotateur forcé.
Dansle casquantique lévolution est crite en termes
de lopérateur dévolution sur une période. Le mouvement
libre est diagonal en représentation dimpulsion :
.Pendantlapplication dupulse,on
peut négligerlévolution libre de laparticule ;lopérateur
dévolution correspondantest doncdiagonal en représenta-
tion de position :.Lévolution tem-
porelle du système peut doncsecalculer sur un nombre
arbitrairende périodesparlarelation ,
où.
HpKxtn
n
=2()
2+−
cos
δ
tn=
ε
n+−1
ε
xxp
nnn++
+
11
=
Uip
libre=(/2 )
2
exp-
UiKx
pulse=( /)expcos-
ψψ
(= )= (0)tnUn
UU U=librepulse
|(,)|/4
22
ψ
ptpDt∝−exp( )
|(,)|||/
2
ψξ
ptp∝−exp( )
I/Δ
II kx=(2)
0cos
(/)(2)
0
IkxΔcos
λµ
/2 0,5m
La transition métal-isolantdAnderson observée avecun gazatomique froid en régime chaotique
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pulses trèscourts ()de londe stationnaire. Il est
facile de voirque lesatomesfroids soumisà ce potentiel
évolueront selon lhamiltonien (4) de lencadré .Untel dis-
positif réalise doncle rotateur forcéatomique .
Enutilisantcesystème, Raizen etcollaborateurs ont
observé pour lapremière foisen 1995 lalocalisation dyna-
mique – équivalenteàlalocalisation dAnderson unidi-
mensionnelle – avecdesondesde matre. Appliquant
une vingtaine dimpulsionsàdesatomesfroids,ilsont
observé latransformation d’une distribution dimpulsion
gaussienne en exponentielle figée caractéristique de la
localisation. La figure2montrecechangementde
comportement tel qu’il aété observé dansnotre labora-
toire. Beaucoup plus récemment,en 2008,lalocalisation
dAnderson danslespaceréel (telle que décrite originelle-
mentparAnderson) aété observée dans un potentiel opti-
que désordonné unidimensionnel par une équipe de
lInstitut dOptique (voirarticle « Localisation dAnderson
datomes ultrafroids» dansce nuro). Cependant,la
généralisation de cette exrienceàtroisdimensions
condition sine quanon pour lobservation de latransi-
tion dAnderson – pose desdifficultésconsidérables.
Transition d’Anderson
avecle rotateur atomique forcé
La transition dAnderson ne peut être observée que
dans unsystème tridimensionnel ;il faut donc chercher
une variante du rotateur forcé équivalenteaumodèle
dAnderson tridimensionnel. Lidée laplus naturelle est
d’utiliser, à laplace de londe stationnaire (1D),unréseau
optique3D.Cetteréalisation dupassage à3Dest cepen-
dantcompliquée pardesdifficultésexrimentales,dont
lagravité,quibrise lasytrie spatiale du système.
Casati, Guarnieri etShepelyanskyontnoté en 1989 que le
caractèreunidimensionnel de lalocalisation dansle rota-
teur forcérésulte de lariodicitétemporelle duhamilto-
nien. En enrichissantlexcitation temporelle pardeux
fréquences supplémentairesincommensurables,il
s’avère que le système obtenuest équivalentaumodèle
dAnderson 3Dtridimensionnel,lalocalisation étant tou-
jours observée le long de limpulsion. Onutilisetoujours
une onde stationnaire pulsée,maislamplitude despulses
est modulée avecdeux fréquences supplémentaires(voir
figure1 );on réaliseainsi le hamiltonien durotateur forcé
quasi-périodique:
(1)
oùω 2/2 πetω 3/2 π(en unités réduites)sontdesnom-
bresirrationnelsentre eux 1 .La réalisation exrimentale
de cesystème nimplique qu’une modification assez sim-
ple dumontage utilisé dansle cas1D.
Comment se manifeste latransition dAnderson dans
untel système ? Le hamiltonien (1) comprend deux para-
tresdontle rapport avecle modèle dAnderson peut-
être facilementétabli :K,quicontrôle le hopping (couplage
entresites voisins) etεquicontrôle lanisotropie,doncle
caractère3Ddu système. Des valeurs de Ksurieuresà
lavaleur critiqueKc(ε )correspondentàlasituation oùle
hopping domine le désordre:on est alors en phase métal-
lique. Pour desfaibles valeurs de K<K c( ε ) on est dansla
phase isolante. Nous avonsgénéré nuriquementle dia-
gramme de phase de latransition dAnderson pour le
rotateur forcé quasi-périodique (voirfigure3 ). Afin détudier
exrimentalementlatransition dAnderson,nous avons
suivi le chemin en pointillé sur lafigure3 ,quicroise la
transition vers Kc=6,42 .Afin de caractériserprécisément
latransition,nous avonsmesuré lévolution de lataille du
paquetdonde danslespace desimpulsionsen
fonction du temps,pour différentes valeurs desparamè-
tresKetε .Lerésultatexrimental est montrésur la
figure4 .Pour K
<
Kcdansle régime localisé,sature
aux tempslongsàune valeur proportionnelle aucarré de
lalongueur de localisation, comme dansle régime uni-
dimensionnel de localisation dynamique. Pour K
<
Kc
dansle régime diffusif, augmente indéfiniment,
proportionnellementau tempsetlapente mesure le coef-
ficientde diffusion. Quese passe-t-il aupointcritique
K=Kc?Il nest pas trèsfacile de le deviner.Les théories
déchelle de latransition dAnderson prédisent un
comportementde diffusion anormale,oùest pro-
portionnel àt 2/3.Cest exactementce que nous observons
Figure2Distributionsdimpulsion observéesexrimentalementpour le
rotateur atomique forcé quasi-périodique dansles régimeslocalisé (bleu) et
diffusif (rouge). Limpulsion est mesurée en unité d« impulsion de recul »,
égale àlimpulsion d’un photon dulaser.Sur unaxe logarithmique,ladistri-
bution diffusiveGaussienne apparaîtcomme une parabole tandisque ladis-
tribution exponentielle localisée apparaîtcomme une double ligne droite
croissante.
500 ns
1. On peut se demander s’il yaunsensde parlerde nombres
irrationnels sur un montage exrimental. Le faitque le rapport de
deux fréquencesest unrationel p/qne serasensible qu’aubout de Q
riodes.Si ladurée de lexrience est nettementinférieureà ce
temps,tout se passera comme si lesdeux fréquencesétaient
incommensurables.
2.Il faut noterqueceseuil de mobilité dépend desparatresprécisdu
système,eten particulierdesdifférentesfréquencesincommensu-
rables utilisées.Pour ε=0,on seretrouve dansle cas1Detle système
est toujours localisé,doùladivergence de Kcàpetitε.
HpKxttt
Dn
3
2
23
=21(++
()
coscos()cos()
εωωδ
−− n)
〈〉pt
2()
〈〉pt
2()
〈〉pt
2()
〈〉pt
2()
85
La transition métal-isolantdAnderson observée avecun gazatomique froid en régime chaotique
exrimentalement(courbeviolettesur lafigure4 ). Evi-
demment,lesexriencesont une durée nécessairement
limitée etcette diffusion anormale ne peut être observée à
linfini. Les simulationsnuriques sontmoins
soumisesà ceslimitationsetpeuventêtre prolongées
jusqu’à1 million de périodes(aulieude 200 maximum
pour lesexriences);ellesconfirmentcerégime de
diffusion anormale avecexposant 2/3.
Lexistence d’unrégime critiqueanormal, avecde part
etdautreune évolution lentesoit vers unrégime diffusif,
soit vers unrégime localisé,est une signature d'une tran-
sition de phase du second ordrecomme latransition
d'Anderson.
Apartirdesdonnéesdesexriences réellesounumé-
riques,il est possible dextraire lalongueur de localisation
etdétudier sadivergenceàlapproche dupointcritique.
Cette divergence est, comme pour toutesles transitions
de phase du second ordre,en loi de puissance du type :
(2)
oùνest appelé exposantcritique de latransition.
De même,ducôté délocalisé de latransition,il est pos-
sible d'extraireune longueur caractéristique (reliée àla
constante de diffusion) présentantlamême divergence en
loi de puissance.
Sur lafigure5 ,nous montronsle comportementde
cette longueur caractéristiqueautour de latransition.
Comme nous travaillonscessairementavecun nombre
fini de pulses,lalongueur de localisation ne peut pasexcé-
derlimpulsion maximum donnée parladiffusion
linéaireclassique:ladivergencestricte est doncimpossi-
ble,on observeàlaplaceun maximumtrèsmarqué. A
partirde cesdonnées,on peut extraire lexposantcritique
de latransition dAnderson. Pour les simulationsnuri-
ques,on obtientν=1,50,01. Cettevaleur est uni-
verselle, cest-à-dire qu’elle est indépendante des valeurs
précisesdesparatresdu système ;ceci ne faitquetra-
duire lidée simple que, au voisinage de latransition,la
physique du système est entrementterminée par
léchelle laplus grande (ici lalongueur de localisation) et
devientindépendante destailsàplus petite échelle.
Ceci est confirmé parle faitque lavaleur obtenue est
exactementégale à celle extraitedesimulations
nuriquesdumodèle dAnderson, ce quiconstitueune
autre preuve que latransition observée sur le rotateur
forcé quasi-périodique est bien latransition métal-isolant
dAnderson.
Si lon regarde maintenantlesdonnéesexrimenta-
les,on obtientpour lexposantcritique:
ν=1,0,2(3)
oùlincertitude provientessentiellementde ladurée finie
de lexrience. Un pointextrêmementimportantest que
νest significativementdifférentde l’unité. En effet,les
observationsexrimentales sur les transitionstal-
isolantpour lesélectronsdansdes solidessordonnés
le contexte initial oùest née l'idée de lalocalisation
dAnderson – donnent un exposantcritiquetrèsproche
de 1 ;linterprétation laplus courammentadmise est que
leseffets dinteraction électron-électron dansle solide
affectentfortementlatransition dAnderson etnotam-
mentlexposantcritique. La présente détermination est de
faitlapremière mesure exrimentale de lexposantcriti-
que de latransition dAnderson sur desondesde matre
sansinteraction.
Sur le planthéorique,lobservation d’un exposantplus
grand que1est égalementimportante. En effet,les théo-
riesapprochées,dites«auto-consistantes»,de lalocalisa-
tion dAnderson prévoientν=1. Or, ces théories
négligentlesfluctuationsantesobservéesau voisinage
de latransition ;cesontdes théoriesde champ moyen
Figure3Diagramme de phase de latransition dAnderson dansle plan
( K , ε ). La zone en bleucorrespond àlaphase isolante etlazone en rouge à
laphase métallique. Dansnotre exriences,nous avonschoisi de
«croiser» latransition selon laligne pointillée.
Figure 4 – La transition métal-isolantdAnderson observée sur le rotateur
atomique forcé quasi-périodique. On mesure ladispersion en impulsion
d’un paquetdondesinitialementlocalisé,en fonction du tempst
(mesuré en nombre de pulses). Dansle régime localisé( K=4,0, courbe
bleue),le paquetdondes se localiseaprès untempscourt.Dansle régime
diffusif ( K=9,0, courberouge), augmente indéfiniment,proportion-
nellementau temps.Lerégime critique( K=K c=6,4, courbeviolette) est
caractérisé par une diffusion anormale .
〈〉pt
2()
〈〉pt
2()
〈〉ptt
22/3
()
ξν
∝−
()KK
c
1 / 6 100%
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