prof. T. ~uarez-Nani Chaire de hilosophie médiévale Chapitre 1.5, Lu théologie augustinienne de L"bistoin & O La très glorieuse Cité de Dieu considérée, d'une part, au cours des âges d'ici-bas où vivant de la foi elle fait son pèlerinage au d e u des impies, d'autre part dans cette stabilité de l'éternelle demeure, qu'elle attend maintenant avec patience jusqu'au jour où la justice sera changée en jugement et que, grâce à sa sainteté, elle possédera alors par une suprême victoire dans une paix parfaite, tel est, mon cher fils Marcellin, l'objet de cet ouvrage. Je l'ai entrepris à votre demande, pour m'acquitter de la promesse que je vous ai faite de défendre cette Cité contre ceux qui, à son Fondateur, préfèrent leur propres dieux. Grand et dur travail ! Mais Dieu est notre aide. (. . .) C'est donc aussi de la Cité de la terre qui, en voulant tout dominer, malgré sa main mise sur les peuples, est dominée elle-même par la passion d'hégémonie, qu'il faudra parler, sans rien omettre de ce que réclame le plan de cet ouvrage et de ce que permet ma capacité. - - - De civ. Dei 1, 1. O On appelle Babylone la cité selon le monde. De même qu'il y a une cité sainte, Jérusalem, il y a une cité injuste, Babylone. Tous les méchants appartiennent à Babylone, comme tous les justes appartiennent à Jérusalem. De civ. Dei X I V , 1. @ Le peuple est une réunion d'êtres raisonnables associés pour participer dans la concorde aux biens qu'ils aiment ; il faut donc pour connaître la valeur de chaque peuple considérer l'objet de son amour. Quel que soit cet objet pourtant, si c'est une réunion non d'animaux mais de créatures raisonnables, associées pour participer en paix aux biens qu'elles aiment, cette réunion peut légtimement s'appeler un peuple : peuple d'ailleurs d'autant meilleur qu'il est d'accord sur des choses meilleures ; d'autant plus mauvais qu'il s'entend sur de plus mauvaises. De civ. Dei XIX, 24. - prof. 'ï.~ u a r e z - ~ a n i Chaire de philosophie médiévale Chapitre 1.5, La tbéohgie augustinienne de i'histoire @ Deus amours ont donc fait deux cités : l'amour de soi jusqu'au mépris de Dieu, la cité terrestre ; l'amour de Dieu jusqu'au mépris de soi, la Cité céleste. L'une se glorifie en elle-même, l'autre dans le Seigneur. L'une demande sa gloire aux hommes ; pour l'autre, Dieu témoin de sa conscience est sa plus grande gloire. L'une dans sa gloire dresse la tête ; l'autre dit à son Dieu : « Tu es ma gloire et tu élèves ma tête » (Psaim. III, 4). L'une dans ses chefs ou dans les nations qu'elle subjugue, est dominée par la passion de dominer ; dans l'autre, on se rend mutuellement service par charité, les chefs en dirigeant, les sujets en obéissant. L'une, en ses maîtres, aime sa propre force ; l'autre dit à son Dieu : « Je t'aimerai, Seigneur, toi ma force » ( P h .M I , 2). Aussi, dans l'une, les sages vivant selon l'homme ont recherché les biens du corps ou de l'âme ou les deux ; et ceux qui ont pu connaître Dieu « ne l'ont pas glorifié comme Dieu ni ne lui ont rendu grâce, mais se sont égarés dans leurs vains raisonnements et leur cœur insensé s'est obscurci ; s'étant flattés d'être sages (c'est-à-dire s'exaltant dans leur sagesse sous l'empire de l'orgueil), ils sont devenus fous : ils ont substitué à la gloire de Dieu incorruptible des images représentant l'homme corruptible, des oiseaux, des quadrupèdes et des serpents (car à l'adoration de telles idoles, ils ont conduit les peuples ou les y ont suivi) ; et ils ont décerné le culte et le service à la créature plutôt qu'au Créateur qui est béni dans les siècles » (Rom. 1, 21-24). Dans l'autre au contraire, il n'y a qu'une sagesse, la piété qui rend au vrai Dieu le culte qui lui est dû, et qui attend pour récompense en la société des saints, hommes et anges, « que Dieu soit tout en tous » (Rom. 1, 25). - De n'v. Dei X I V , 28. - - Prof. T. ~uarez-Nani Chlre de philosophie médiévale Chapitre 1.5, La théologie azlgustinienne de I'bistoi~~ O h s i donc, la paix du corps, c'est l'agencement harmonieux de ses parties ; la paix de l'âme sans raison, c'est le corps bien réglé de ses appétits ; la paix de l'âme raisonnable, c'est l'accord bien ordonné de la pensée et de l'action ; la paix de l'âme et du corps, c'est la vie et la santé bien ordonnées de l'être animé ; la paix de l'homme mortel avec Dieu, c'est l'obéissance bien ordonnée dans la foi sous la loi éternelle ; la paix des hommes, c'est leur concorde bien ordonnée ; la paix de la maison, c'est la concorde bien ordonnée de ses habitants dans le commandement et l'obéissance ; la paix de la cité, c'est la concorde bien ordonnée des citoyens dans le commandement et l'obéissance ; la paix de la cité céleste, c'est la communauté parfaitement ordonnée et parfaitement harmonieuse dans la jouissance de Dieu et dans la jouissance mutuelle en Dieu ; la paix de toutes choses, c'est la tranquillité de l'ordre. L'ordre, c'est la disposition des êtres égaux et inégaux, désignant à chacun la place qui lui convient. De civ. Dei XIX, 13. 8 Donc où manque cette justice, il n'y a assurément pas une multitude d'hommes assemblés en société par le consentement à un droit et par la communauté d'intérêts. Dès lors, il n'y a certes pas de peuple, si telle est la véritable défintion du peuple. Donc il n'y a pas de république non plus, car il n'y a pas de choses du peuple là où il n'y a même pas de peuple. De civ. Dei XIX, 23. O Le peuple est une multitude d'êtres raisonnables associés par la participation dans la concorde aux biens qu'ils aiment De ch. Dei XIX, 24. @ Quel que soit l'objet qu'il aime, s'il pe peuple] est une réunion, non d'animaux, mais d'une multitude de créatures raisonnables assemblées en société par la participation dans la concorde aux biens qu'elles aiment, il mérite à bon droit le nom de peuple ; peuple d'autant meilleur qu'il s'entend sur des choses meilleures, d'autant plus exécrables qu'il est d'accord sur des choses plus exécrables. D'après cette définition, qui est la nôtre, le peuple romain, sans nul doute, est un peuple, et sa chose une république. De ch. Dei XIX, 24. prof. T. s u a r e z - ~ a n i Chaire de phiiosophie médiévale Chapitre 1.5, La théologie azrgzr~tiniennede I'bis~oire -%%M-m @ Malheureux donc le peuple séparé de ce Dieu ! Il aime pourtant, lui aussi, une certaine paix légitime qui lui est propre (. . .). Qu'il en profite dans l'entretemps de cette vie, c'est également notre intérêt ; car, tant que s'entremêlent les deux cités, nous usons nous aussi de la paix de Babylone. - D P kv. Dei XIX, 26. @ Pour ce qui est de la vie mortelle, qui s'achbe après une durée de quelques jours, en quoi importe-t-il sous le r & p e de quel dmgeant un homme vit, puisqu'il doit bientôt mourir, pourvu que les dtngeants ne le forcent pas à poser des actes impies et mauvais ? - De kv. Dei 17, 1 7 .