E
n 10 ans, l’Agence des participations de l’État a indéniablement
conforté son rôle et assume désormais ses missions avec force
et conviction. Dix ans à incarner l’État actionnaire au service
d’une gouvernance vigilante et soucieuse des équilibres de long
terme ; dix ans à accompagner les managements dans l’adaptation
de leurs entreprises, avec des dossiers parfois complexes et toujours
exigeants comme Dexia en 2012, PSA Peugeot Citroën en 2014, ou
encore la lière nucléaire française aujourd’hui ; dix ans à valoriser
le patrimoine de l’État au service des Français.
Créer l’APE a permis de professionnaliser l’État actionnaire, de mieux
l’identier, et de le distinguer clairement de l’État régulateur ou tutelle.
En 2014, nous avons franchi une nouvelle étape en dénissant une
doctrine de l’État actionnaire. Quelle est-elle ? D’abord, l’État doit
accompagner les choix industriels sans se substituer aux équipes
dirigeantes. Pour une plus grande lisibilité, notre cadre d’intervention a
été clarié autour de quatre grands objectifs : préservation des secteurs
de souveraineté ; existence d’opérateurs résilients pourvoyant aux
besoins fondamentaux du pays ; développement et consolidation des
secteurs et des lières déterminantes pour la croissance économique ;
interventions ponctuelles, dans le respect des règles européennes,
dans des opérations de sauvetage d’entreprises dont la défaillance
présenterait des risques systémiques.
Dans ce cadre rénové, l’État doit faire preuve d’agilité ; en tant
qu’investisseur avisé, il peut ajuster son niveau de participations en
conservant un niveau d’inuence inchangé. Ce que nous avons fait
en juin 2014 avec Engie (ex GDF Suez) ou Safran en janvier 2015. Cette
gestion dynamique du portefeuille permet à la fois de désendetter
l’État et de libérer des marges de manœuvre pour réinvestir dans
d’autres entreprises lorsque la situation l’exige. L’entrée au capital
de PSA Peugeot Citroën, en avril 2014, a ainsi permis la relance de
l’entreprise, et s’avère une excellente opération patrimoniale avec
une valorisation de notre investissement qui a doublé en un an.
D’autres opérations de marché ont été réalisées depuis l’été 2014 et
s’inscrivent dans cette perspective avec en particulier l’acquisition de
titres Renault en avril 2015 et de titres Air France-KLM en mai 2015,
qui ont permis de conforter le poids de l’État dans la gouvernance
de ces sociétés.
L’État doit pour autant demeurer un actionnaire de long terme,
avec une vision industrielle claire. Rare, la ressource publique en
fonds propres doit être mobilisée au service de nouveaux acteurs
économiques porteurs de projets innovants et structurants pour
le pays. La participation active de l’APE à la constitution puis à
la gouvernance de Bpifrance contribue à faire émerger et à
accompagner de nouveaux champions économiques au service
de la France d’aujourd’hui et de demain.
Outil privilégié de la modernisation de l’actionnariat public,
l’ordonnance du 20 août 2014 a permis de simplier et de clarier
les règles de gouvernance, les règles relatives à nos opérations en
capital et notre cadre d’intervention. Dessiner aujourd’hui l’avenir de
l’État actionnaire suppose toutefois que l’Agence continue à s’adapter
à de nouvelles exigences fortes ; j’en vois principalement trois :
• une exigence de professionnalisme et de technicité, d’abord.
Gestionnaire d’un portefeuille pesant près de 110Md€, l’APE est
déjà l’un des plus grands gérants de participations au monde. Cette
taille et notre place dans l’économie française nous imposent un
professionnalisme accru et nous commandent d’intensier notre
dialogue stratégique et nancier avec nos entreprises ;
• une exigence de transparence et de lisibilité de nos choix ensuite.
La politique de l’État actionnaire assume des choix, des valeurs, des
principes d’action qui se trouvent au cœur de sa fonction comme de
sa légitimité, avec des décisions parfois diciles : mise en place des
droits de vote doubles et renforcement des pouvoirs des conseils en
cas d’OPA conformément à la loi du 29 mars 2014 visant à reconquérir
l’économie réelle, encadrement de la rémunération des dirigeants,
examen de certaines opérations capitalistiques lorsque nous estimons
que les intérêts du pays sont en jeu. Nous agissons également au
quotidien en faveur de la mixité des conseils d’administration, ou de
la responsabilité sociale et environnementale. Parce qu’elles relèvent
de l’intérêt général, ces missions font partie intégrante de notre rôle
d’actionnaire public et responsable, responsable parce que public ;
• une exigence de réactivité et de sens de l’anticipation enn. La
stratégie actionnariale de l’État doit être oensive, réactive, avec
un sens de l’anticipation et du long terme.
La qualité de notre travail est aujourd’hui très largement reconnue.
Parce que l’État actionnaire est plus que jamais de retour, il doit
poursuivre sans relâche cet eort de modernisation et d’excellence. Je
remercie vivement tous les agents de l’APE de m’accompagner dans
ce projet majeur, ainsi que l’ensemble de nos administrateurs qui
représentent l’État au sein des conseils et qui participent pleinement
à cette belle ambition.
AVANT-PROPOS
Régis Turrini
Commissaire
aux participations de l’État
© B. Sidler