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Union Française
des Industries des Cartons,
Papiers et Celluloses
La Lettre
1
La Lettre
La COP21, ou 21e Conférence des Parties prenantes à la Convention Climat des
Nations Unies, a pour objectif de dénir le contenu d’un accord international visant
à limiter le réchauffement anthropique de 2°C par rapport à la période préindustrielle
(1750). Un tel accord, qui vise à succéder à partir de 2020 à celui qui avait été conclu
en 1992 à Kyoto (Protocole de Kyoto), est complexe à établir. En effet, la responsabilité
passée et actuelle en matière d’émission de gaz à effet de serre (GES) varie selon
les Etats, tout comme leur niveau de développement, leur capacité à effectuer une
transition vers une économie à bas niveau de carbone ou encore leur vulnérabilité aux
conséquences du changement climatique. La question des transferts nanciers entre
Etats, enn, constitue l’une des difcultés majeures qui se pose aux négociateurs.
En raison de l’importance de cette réunion internationale, il nous est apparu utile
de publier un numéro spécial de la Lettre de COPACEL, non pas pour rappeler les
grands enjeux de la COP, mais plus modestement pour préciser les trois raisons qui
conduisent l’industrie papetière française à être attentive à ce processus.
En premier lieu, la question de la lutte contre le changement climatique nécessite
l’implication de tous, et les entreprises papetières ne font pas exception à la règle.
La première partie de ce bulletin présentera ainsi les émissions de GES actuelles et
passées du secteur papetier, ainsi que les moyens qui ont été mis en œuvre pour
réduire « l’intensité carbone » de la fabrication des pâtes, papiers et cartons.
En second lieu, les décisions qui seront prises durant la COP21 entraîneront, comme
cela avait été le cas après l’adoption du Protocole de Kyoto, des conséquences sur
le cadre juridique dans lequel opèrent les entreprises. Ainsi, le système européen
d’échange de quotas d’émission de GES, la scalité de l’énergie ou encore les
dispositifs d’aide au développement des énergies renouvelables sont, dans une large
mesure, les fruits de la « politique climat » de l’Union européenne et de la France.
Les outils de la politique climatique ayant un retentissement direct sur les entreprises
papetières seront ainsi présentés dans une deuxième partie.
Enn, au-delà même de la transformation de ce cadre, se pose plus fondamentalement
la question du contenu même de l’accord qui sera conclu lors de la COP21, et de son
impact sur la compétitivité des entreprises industrielles (troisième partie).
NOVEMBRE 2015
Dans cette lettre d’information, nous limitons
le champ de l’analyse à l’industrie papetière
française. A l’échelle européenne, le bilan
et les perspectives de réduction des émis-
sions sont précisés par les publications de
la Confédération Européenne de l’industrie
papetière (CEPI), telles que la « Roadmap
2050 » (www.unfoldthefuture.eu/uploads/
CEPI-2050-Roadmap-to-a-low-carbon-bio-
economy.pdf).
Le terme de « gaz à effet de serre » (GES)
désigne les sept molécules prises en
compte dans le cadre des conventions
internationales relatives au climat (CO2,
CH4, N2O, HFC, PFC, SF6 et NF3). Le
gaz dont l’effet est prépondérant étant le
dioxyde de carbone (CO2), c’est principa-
lement celui-ci qui est analysé dans cette
lettre. Les valeurs numériques correspon-
dant aux émissions de CO2 prennent en
compte la combustion des combustibles
fossiles, mais pas le dioxyde de carbone
provenant de la valorisation énergétique de
la biomasse (voir encadré page 2).
Une information technique complète sur
le changement climatique est disponible
sur le site du CITEPA (www.citepa.org),
association dont est membre
COPACEL. Des études économi-
ques et analyses stratégiques sont
pour leur part disponible sur le site
de l’Institut pour l’Economie du
Climat (www.i4ce.org).
COP21 :
quels enjeux pour l’industrie
papetière française ?
Quelques
précisions
méthodologiques
et sources
Numéro spécial
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2La Lettre
Le changement du mix énergétique et l’amélioration de l’efficacité énergétique sont les principales
raisons expliquant le recul fort des émissions de GES
Cette bonne performance de l’industrie
papetière est en premier lieu le résultat
d’une évolution de son mix énergétique.
Depuis 1990 (voir Fig. 3), le charbon a
disparu des sites industriels papetiers,
et le fioul lourd a vu sa part très
fortement décroître au profit du gaz
naturel et de la biomasse. En 2014, la
biomasse (liqueur noire, écorces, boues
papetières…) a représenté plus de 50 %
de l’approvisionnement en chaleur, ce qui
permet la production d’une importante
quantité d’énergie sans impact sur le
changement climatique.
Les émissions de GES
de l’industrie papetière ont
reculé de 40 % entre 1990 et 2013
La production de pâtes, papiers et cartons
en France a conduit en 2014 à l’émission
de 2,3 millions de tonnes de CO2.
A titre de comparaison, et en prenant
les valeurs de 2013, les émissions de
l’industrie papetière représentent 0,4 %
des émissions nationales de CO2.
Depuis plusieurs années, l’industrie
papetière s’est inscrite dans une
dynamique de réduction des émissions
de CO2 (voir Fig. 1).
En effet, entre 1990 (année de référence
du Protocole de Kyoto) et 2014, les
émissions de ce gaz ont diminué de 40 %
alors que la production de papier et de
pâte marchande augmentait de 13 %.
Sur la période 1990-2013, ce recul des
émissions est voisin de celui de l’industrie
manufacturière (- 35 %) et sensiblement
plus important que la diminution des
émissions françaises (- 13,4 %).
Alors que les entreprises industrielles ont
des émissions en réduction très sensible,
le secteur résidentiel et celui du transport
(voir Fig. 2) ont vu leurs rejets augmenter,
de + 10 % et + 11 % respectivement.
La réduction des émissions de GES est
également le résultat d’une démarche
continue d’amélioration de l’efficacité
énergétique. Cette démarche consiste
au remplacement d’équipements anciens
par des matériels plus performants, en
optimisant la conduite des procédés
industriels ou encore en mettant en place
des systèmes de management de
l’énergie.
Pourquoi la combustion de la biomasse est-elle sans impact
sur le changement climatique ?
La combustion de gaz, de charbon ou de dérivés pétroliers entraîne à une
augmentation du stock net de carbone dans l’atmosphère (ce carbone était, avant
sa combustion, séquestré dans les formations géologiques du sol depuis des millions
d’années). A la différence de ce processus, la combustion de la biomasse conduit à
rejeter dans l’atmosphère du carbone qui s’y trouvait déjà, et qui a transitoirement
(pendant quelques dizaines d’années par exemple pour un arbre) été capté par les
végétaux photosynthétiques. Cette « neutralité carbone » nécessite évidemment
que les prélévements de biomasse soient inférieurs à la croissance de la forêt, ce
qui est le cas en Europe.
Figure 1 : évolution des émissions de CO2 et de la production papetière
entre 1990 et 2014 (base 100 en 1990)
Figure 2 : évolution 1990-2013 des émissions de GES en France par secteur
Source : CITEPA / SECTEN 2014
1990 2014
Charbon
Fioul
Gaz naturel
Electricité thermique
Biomasse
0
20
40
60
80
100
120
production
(papier + pâte marchande)
émissions de CO2
1990 2014
Figure 3 : évolution du mix énergétique de l’industrie papetière entre 1990 et 2014
Transformation
énergie
- 24 Mt
- 31 %
- 58 Mt
- 35 %
+ 9 Mt
+ 10 %
- 6 Mt
- 6 %
+ 12 Mt
+ 11 %
- 0,2 Mt
- 2 %
Industrie
manufacturière
Résidentiel
Tertiaire
Agriculture
Sylviculture
Transport
routier
Autres
transports
L’industrie papetière a sensiblement
réduit ses émissions de gaz à effet de serre
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La fiscalité de l’énergie est également un levier important
La politique climatique européenne est
complétée par des dispositifs nationaux
visant à lutter contre les émissions de
GES. La loi sur la transition énergétique
pour la croissance verte, promulguée le
17 août 2015, fixe ainsi les objectifs du
nouveau modèle énergétique français. Le
but est ainsi, pour la France, de réduire ses
émissions de GES de 40 % entre 1990 et
2030 et de diminuer sa consommation
énergétique finale de 50 % en 2050 par
rapport à la référence 2012.
Un des leviers des pouvoirs publics pour
y parvenir est d’augmenter la fiscalité sur
l’énergie, c’est-à-dire de relever les taxes
intérieures pesant sur la consommation de
produits énergétiques (gaz naturel, pétrole
et charbon). Dans la pratique, depuis
2014, ces taxes incluent une « contribution
climat énergie », également appelée « taxe
carbone », dont le montant s’élève en
2015 à 16 Euros/t de CO2. Le premier
article de la loi sur la transition énergétique
pour la croissance verte dispose ainsi que
le gouvernement doit se fixer pour objectif
de faire payer les émissions de GES, au
travers de cette taxe, à hauteur de 100 €/t
en 2030. Signalons que, fort logiquement,
les installations concernées par le système
ETS ne sont pas assujetties à la taxe
carbone sur leurs achats de combustibles
fossiles. Quelques entreprises papetières,
celles de plus petite taille, sont cependant
directement concernées par ces évolutions
de la fiscalité, de sorte que l’objectif de
COPACEL sera de veiller à ce que le coût
du carbone soit pour elles semblable
à celui qu’acquitteront les papeteries
soumises au système ETS.
Les « politiques climat »
devraient afficher des objectifs
liés à la consommation des biens
et services
Les objectifs des politiques de lutte contre
le changement climatique portent sur les
émissions d’un territoire donné (France,
UE). Cette approche a le mérite de la
simplicité (l’inventaire des émissions des
différentes sources de GES est bien
maitrisé) et permet une action des pouvoirs
publics sur ces mêmes sources. Pourtant,
l’impact d’un territoire sur le changement
climatique est surtout lié aux émissions
induites par sa consommation de biens
et services plutôt qu’aux émissions qui
peuvent être comptabilisées sur son
sol. Ainsi, la fermeture d’une usine sur
le sol français contribue à ce que la
France atteigne ses objectifs de réduction
d’émission, mais ne réduit pas pour autant
l’impact associé à sa consommation. En
effet, dans ce cas de figure, les biens
non produits en France mais nécessaires
à la vie des citoyens seront fabriqués
ailleurs puis importés. Au total, la
délocalisation de la production peut
même s’accompagner d’émissions
plus importantes, dès lors que (et
même sans prendre en compte
l’impact du transport international)
le pays de production a une plus
forte « intensité carbone » que la
France.
Numéro spécial
L’industrie papetière est massivement impactée par le système européen d’échange de quotas de CO2
Depuis 2005, l’UE s’est engagée dans la
lutte contre le changement climatique en
introduisant le Système communautaire
d’Echange de Quotas d’Emission
(EU ETS pour Emission Trading Scheme
en anglais). Pierre angulaire de la
politique environnementale européenne,
ce dispositif couvre plus de 11 000
installations industrielles et de production
d’électricité. Avec ce système, qui vise une
régulation des émissions par le marché
(à la différence, par exemple, d’autres
outils comme la fiscalité), une installation
doit restituer chaque année un volume
de quotas égal à ses émissions de CO2
de l’année précédente. La régulation est
effectuée par des règles communautaires
fixant les modalités d’allocation et du
volume des quotas mis sur le marché.
La crise économique survenue en 2008
et la réduction progressive du tissu
industriel européen ont conduit à un recul
de la demande de quotas et donc à un
repli du cours (qui est passé de 20€/t
en 2007 à 6€/t en 2014). Afin d’inciter
les installations industrielles à investir
dans des technologies bas-carbone, la
Commission européenne a mis en place,
en 2014, une Réserve de Stabilité de
Marché (ou MSR pour Market Stability
Reserve en anglais), ceci afin de prélever
des quotas du marché lorsque la quantité
disponible dépasse une certaine limite et
ainsi soutenir les prix.
L’industrie papetière française est très
fortement impactée par l’échange de
quotas, qui concerne 84 des 88 sites
français. La modification des modalités
du système ETS, prévue pour 2020
mais discutée dès 2016, est un enjeu de
compétitivité important pour l’industrie
papetière.
L’industrie papetière est concernée
par de nombreux dispositifs visant
à une réduction des GES
L’industrie papetière est inquiète de certaines
des orientations prises par les « politiques climat »
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4La Lettre
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Site Internet : www.copacel.fr
Directeur de la Publication :
Paul-Antoine LACOUR
Rédaction : Anaïs ROBERT
Des engagements analogues doivent être pris par toutes les Parties
avec lesquelles les entreprises sont en concurrence
Actuellement, selon les termes du
Protocole de Kyoto, seule une partie des
Etats, représentant 15 % des émissions
mondiales de GES, s’est engagée à
réduire ses émissions. L’enjeu de la
COP21 est donc d’obtenir un engagement
des parties représentant les 85 % restant.
Le succès de la démarche implique
l’adhésion de deux Etats, les Etats-Unis
et la Chine, qui représentent, à eux seuls,
35% des émissions mondiales de GES.
Par comparaison, l’Union européenne
ne contribue qu’à 11 % des émissions
mondiales et la France à moins de 1 %.
Le coût de l’émission d’une tonne de CO2
varie de manière très forte selon les pays.
Alors que certains ont mis en place des
systèmes de régulation par le marché ou
une fiscalité élevée sur les sources de GES,
d’autres encouragent le développement
de la consommation et de la production
de combustibles fossiles (gaz de schistes
aux Etats-Unis, schistes bitumineux au
Canada…). Dans un monde globalisé, où
les produits manufacturés sont transportés
à coût modique d’un endroit à l’autre de
la planète, ces différences marquées
du coût du CO2 agissent fortement sur
la compétitivité des entreprises. A cet
effet direct de la contrainte carbone sur
les industries manufacturières s’ajoute
un impact macro-économique. Faut-il
rappeler que la reprise économique ténue
dont bénéficie l’UE depuis le début 2015
est notamment la conséquence d’un
recul très sensible des cours du pétrole
(et du gaz dans une moindre mesure) ?
En d’autres termes, un renforcement
unilatéral de la contrainte climatique au
sein de l’UE serait inefficace en termes
de lutte contre le changement climatique,
négatif sur le plan macro-économique et
destructeur sur le plan industriel.
Certains envisagent la mise en place
d’une « taxe carbone aux frontières »,
qui permettrait un rééquilibrage entre
les différents pays (du papier importé
de Chine serait ainsi assujetti à une taxe
équivalente au « coût carbone » supporté
par un fabricant européen). Un tel dispositif
est cependant pour l’heure illusoire, tant
sur le plan pratique (comment le calculer ? )
qu’au regard des règles du commerce
international. Pas plus que de vagues
promesses de tel ou tel, la perspective d’un
hypothétique « mécanisme d’ajustement
aux frontières » ne devrait conduire l’UE à
s’engager de manière unilatérale sur la voie
de mesures accentuant des distorsions de
concurrence entre les pays.
De nouvelles technologies
sont nécessaires pour
substantiellement décarboner
les économies modernes
Dans sa feuille de route 2050, publiée
en 2011, la confédération européenne
de l’industrie papetière (CEPI) s’était
donnée comme ambition, d’ici à 2050,
de simultanément réduire de 50 % les
émissions de GES de l’industrie papetière
et d’accroitre de 50 % la valeur ajoutée
produite. Le prérequis pour que cette
ambition se matérialise était l’émergence
de nouvelles technologies de rupture, à
basse intensité en carbone fossile. Cette
nécessité est plus que jamais d’actualité,
car seules des innovations de rupture, et
donc des efforts massifs de soutien à la
recherche industrielle, permettront demain
à un nombre croissant d’êtres humains de
réduire leur impact carbone.
Les objectifs de réduction
des émissions devraient être
couplés à ceux relatifs
à la croissance économique
Les objectifs que fixent les politiques
publiques, que ce soit en matière de lutte
contre le changement climatique, ou dans
le domaine de l’énergie, sont indépendants
des perspectives de croissance. Mais
quel est le sens de vouloir réduire (art. 1
de la loi sur la transition énergétique) la
consommation d’énergie finale de 50 %
en 2050 (par rapport à 2012) s’il n’est
fait aucune hypothèse sur la croissance
économique souhaitée (ou prévue) durant
les 38 ans qui nous séparent de cette
date ? Sur cette période, une croissance
du PIB de 1 % en moyenne annuelle
conduit à multiplier le PIB de 2012 par
moins de 1,5, alors qu’il est plus que
doublé si le taux de croissance est …
de 2 % ! Il n’est nul besoin d’être expert
pour comprendre que l’objectif de 50 %
de réduction est beaucoup plus difficile
à atteindre dans le second cas que dans
le premier.
Favoriser l’émergence
d’une bioéconomie
La production de biens manufacturés à
partir de ressources renouvelables végétales
est tout à la fois une composante de la
bioéconomie et un moyen de réduire la
dépendance au carbone fossile. L’industrie
papetière, en transformant une ressource
végétale en une multitude de produits
manufacturés répondant à des usages
divers (graphique, emballage, hygiène…)
et en recyclant très largement ces mêmes
produits, s’inscrit pleinement dans ce
mouvement de montée en puissance de
la bioéconomie. Par son utilisation d’une
ressource végétale, le bois, elle contribue en
outre à la dynamisation du puits de carbone
qu’est la forêt.
The Forest Fibre Industry
2050 Roadmap to a low-carbon bio-economy
Pour en savoir a
http://www.unfoldthefuture.eu/uploads/
CEPI-2050-Roadmap-to-a-low-
carbon-bio-economy.pdf
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