TSI1 L’amplificateur opérationnel Les premiers circuits intégrés sont apparus au début des années 60. Ils permettent de réaliser des fonctions complexes et présentent l’avantage d’être de taille réduite. Ces éléments sont en outre très fiables, consomment peu d’énergie, et sont très peu chers, en raison des quantités produites. L’amplificateur opérationnel est un circuit intégré qui contient de nombreux transistors, diodes, résistors et condensateurs, et qui a été conçu pour réaliser des opérations mathématiques telles que des sommations, multiplications par une constante, intégrations, comparaisons. . . Aujourd’hui, outre son intérêt pédagogique, cet élément a vu son champ d’application s’élargir considérablement. Cette fiche a pour but de vous présenter les principaux montages utilisant des amplificateurs opérationnels supposés idéaux. Certains défauts des amplificateurs opérationnels réels sont abordés en exercice. Toute étude de la réponse en fréquence des différents montages présentés est exclue de cette fiche et sera l’objet d’une séance de travaux pratiques. 1 1.1 L’amplificateur opérationnel idéal Présentation L’amplificateur opérationnel (AO) idéal est un composant théorique ! Il s’agit d’un amplicateur idéal de tension. i+ ε i− + − vs Comme on peut le voir sur le schéma ci-dessus, l’amplificateur comporte trois bornes : l’entrée - inverseuse, l’entrée + non inverseuse et la sortie. La résistance d’entrée de l’amplicateur opérationnel idéal est infinie : les intensités des courants d’entrée sont donc nulles, dans le modèle d’AO idéal : i− = 0 et i+ = 0 Il faut faire attention au fait que le courant à la borne de sortie est en général non nul : il dépend des circuits extérieurs à l’amplificateur opérationnel. F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 1 La résistance de sortie de l’amplificateur opérationnel idéal est nulle. Noter que sur le schéma ci-dessus, on n’a pas représenté l’alimentation de l’amplificateur opérationnel. C’est grâce à cet apport d’énergie extérieur que l’AO permet éventuellement d’amplifier un signal. 1.2 Schéma équivalent Le schéma équivalent à l’amplificateur opérationnel idéal est le suivant : i+ = 0 + ε i− = 0 µ0 ε − vs On a la relation suivante entre vs et ε : vs = µ 0 ε où µ0 est le gain statique de l’amplificateur opérationnel. En raison de sa valeur élevée (proche de 105 ), on pose que pour l’amplificateur opérationnel idéal, ce gain est infini. 1.3 Régimes de fonctionnement La caractéristique de transfert vs = f(ε) d’un amplificateur opérationnel est la suivante : F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 2 vs +Vsat 0 ε −Vsat À l’examen de la caractéristique statique de transfert, on distingue deux régimes de fonctionnement : • un régime linéaire pour lequel la condition ε = V + − V− = 0 est imposée 1 et vs est fixé par les circuits extérieurs à l’amplificateur opérationnel. Le régime de fonctionnement de l’AO reste linéaire tant que la tension de sortie vs ne dépasse pas les valeurs des tensions d’alimentation (−Vsat < vs < +Vsat ). • un régime non linéaire ou de saturation pour lequel la tension de sortie vs atteint les valeurs de saturation ±V sat selon le signe de la différence de potentiel ε qui n’est plus nulle dans ce régime : vs = (signe de ε) · Vsat soit vs = +Vsat lorsque ε > 0 et vs = −Vsat lorsque ε < 0. Dans ce régime, la différence de potentiel ε est comparée à zéro. Le signe de la tension de sortie vs exprime le résultat de cette comparaison. En régime non linéaire, l’AO sert de comparateur. En résumé, on doit retenir les résultats suivants : Équation de fonctionnement Condition de validité Régime linéaire Régime de saturation ε=0 vs = (signe de ε) · Vsat |vs | ≤ Vsat ε 6= 0 1 Les potentiels des entrées inverseuses et non inverseuses sont respectivement notés V− et V+ . F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 3 Il faut maintenant savoir identifier à la vue d’un montage dans quel régime l’amplificateur opérationnel va fonctionner. 1.4 Points de fonctionnement d’un montage à amplificateur opérationnel Un amplificateur utilisé tout seul, comme sur la figure suivante, fonctionne nécessairement en régime de saturation. + − ve vs Si ve > 0 alors vs = Vsat ; si ve < 0 alors vs = −Vsat . Dans ce cas, on dit que l’amplificateur opérationnel fonctionne en comparateur. Ce montage sera étudié plus tard dans ce fascicule. Pour que l’amplificateur opérationnel fonctionne en régime linéaire, il faut utiliser une chaı̂ne de retour ou réaction depuis la sortie vers l’entrée de l’amplificateur opérationnel. Comme toute théorie de la rétroaction est hors-programme, nous nous contenterons d’étudier graphiquement l’influence d’une réaction résistive sur l’entrée inverseuse et sur l’entrée non inverseuse. 1.4.1 Réaction sur l’entrée inverseuse Considérons le montage ci-dessous : + − ve R1 S vs R2 F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 4 Comme l’intensité qui rentre dans la borne inverseuse est nulle (modèle de l’amplificateur opérationnel idéal), les deux résistances R 1 et R2 constituent un pont diviseur de tension. On a donc la relation : V− = R1 vs R1 + R 2 1 vs . On en déduit que la chaı̂ne de retour D’où ε = V+ − V− = ve − R1R+R 2 impose la relation suivante entre v s et ε : R2 R2 vs = 1 + ve − 1 + ε R1 R1 On obtient donc la représentation graphique suivante : vs +Vsat L 0 ε −Vsat R2 2 La droite en tirets correspond à la relation v s = 1 + R − 1 + v e R1 R1 ε. On voit que l’on obtient un seul point de fonctionnement L qui correspond 2 au régime linéaire. On a alors ε = 0 et v s = 1 + R R1 ve . On peut juger de la stabilité de ce point de fonctionnement par un raisonnement qualitatif. Envisageons une légère augmentation de v s par rapport à sa valeur d’équilibre : vs > vs (L). Cette fluctuation entraı̂ne, via la chaı̂ne de retour résistive, une diminution de ε. L’amplificateur opérationnel réagit à cette diminution de ε par une diminution de v s 2 , qui vient contrarier la fluctuation initiale de vs . Ce raisonnement montre que le point de fonctionnement L est stable. Il faut toutefois préciser que le point de fonctionnement obtenu correspond au régime linéaire (ε = 0) à condition que |v e | ne soit pas trop grande, sans quoi on obtient un point d’intersection des deux caractéristiques correspondant au régime de saturation de l’amplificateur opérationnel. 2 Ne pas oublier qu’en régime linéaire, l’amplificateur opérationnel impose v s = µ0 ε. F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 5 Par conséquent, lorsqu’on utilise une réaction sur l’entréeinverseuse, l’amplificateur opérationnel peut fonctionner en régime linéaire. Il faut bien retenir que l’utilisation d’une réaction sur l’entrée inverseuse est une condition nécessaire mais non suffisante au fonctionnement en régime linéaire. 1.4.2 Réaction sur l’entrée non inverseuse Étudions maintenant le cas d’une réaction sur l’entrée non inverseuse, conformément au schéma ci-dessous : − S + ve vs R2 R1 La chaı̂ne de retour résistive impose la relation suivante entre v s et ε : R2 R2 vs = 1 + ve + 1 + ε R1 R1 La représentation graphique associée à cette situation est, par exemple, la suivante : vs +Vsat S+ 0 L S− ε −Vsat On obtient trois points de fonctionnement : d’une part, L correspondant au régime linéaire, d’autre part S − et S+ correspondant au régime de F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 6 saturation. Un raisonnement analogue à celui mené dans le paragraphe précédent montre que L est un point de fonctionnement instable. Une fluctuation positive de vs à partir de vs (L) entraı̂ne, via la chaı̂ne de retour résistive, une augmentation de ε que l’amplificateur opérationnel répercute comme une augmentation de vs . L’effet est cumulatif : la tension de sortie vs s’éloigne irrémédiablement de la valeur v s (L) et arrive à la valeur de saturation. Par conséquent, lorsqu’on utilise une réaction sur l’entrée non inverseuse, l’amplificateur opérationnel fonctionne obligatoirement en régime de saturation. 2 Montages de base 2.1 Une question de méthode L’analyse d’un montage à amplificateur opérationnel ne comporte pas de difficulté majeure à condition de raisonner avec rigueur et méthode. Il faut savoir identifier dans quel régime va fonctionner l’amplificateur opérationnel (bien souvent, cela sera même précisé. . . ). Il est donc nécessaire de savoir écrire l’équation de fonctionnement de ce régime et sa condition de validité (CDV). On effectue ensuite un décompte des nœuds apparaissant dans le montage étudié et l’on écrit aux nœuds indépendants la loi des nœuds en termes de potentiels ou, de façon équivalente, le théorème de Millman. Il faut cependant bien prendre garde aux deux points suivants : • La masse M du montage est bien souvent imposée. On n’écrira pas la loi des nœuds en M car on ne peut pas calculer l’intensité qui y parvient : des courants, correspondant aux alimentations nécessaires au fonctionnement de l’amplificateur opérationnel, non représentés sur les schémas arrivent et partent de M. • Il est inutile d’écrire la loi des nœuds à la sortie directe de l’amplificateur opérationnel car il n’y a aucun moyen d’évaluer le courant délivré en sortie par l’amplificateur opérationnel. Par ailleurs, le potentiel de sortie de l’amplificateur opérationnel constitue bien souvent une inconnue du problème. F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 7 2.2 Amplificateur non inverseur i+ = 0 ve + S is − A R1 R2 vs Remarquons qu’il existe une chaı̂ne de retour sur l’entrée inverseuse de l’AO : celui-ci peut fonctionner en régime linéaire : ε = 0 à condition que |vs | ≤ Vsat . Ce circuit comporte trois nœuds : le point A, la sortie S et la masse. Deux sont indépendants : il suffit d’écrire deux équations pour caractériser complètement l’état électrique de ce circuit, c’est-à-dire connaı̂tre V A et VS : • l’équation de fonctionnement de l’amplificateur opérationnel donne : ε = 0, soit V− = V+ , ce qui se traduit par VA = ve . • il faut ensuite écrire la loi des nœuds en termes de potentiels (ou le théorème de Millman) au nœud A. Il faut insister sur le fait qu’un circuit amont attaque l’étage amplificateur, représenté sur le schéma ci-dessus, qui est aussi connecté à un montage aval (charge) qui fixe la valeur de is . Comme ce courant est inconnu de façon générale, puisque la charge est elle-même inconnue, il n’est pas utile d’écrire la loi des nœuds au point S. Écrivons la loi des nœuds en termes de potentiels (ou théorème de Millman) au point A (on rappelle que le courant d’entrée i − est nul) : VS − V A 0 − VA + =0 R1 R2 Sachant que VA = ve et VS = vs , on en déduit que : H0 = vs R2 =1+ ve R1 La résistance d’entrée de cet amplificateur est infinie (i e = i+ = 0) et sa résistance de sortie est nulle (vs est indépendant de is ). F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 8 Le fonctionnement de l’amplificateur non inverseur restera linéaire tant que |vs | ≤ Vsat , soit tant que : |ve | ≤ 2.3 R1 Vsat R1 + R 2 Montage suiveur − + vs ve Le montage suiveur est un cas particulier de l’amplificateur non inverseur où R1 → ∞ et R2 → 0. L’amplificateur fonctionne en régime linéaire car il existe une chaı̂ne de retour depuis la sortie jusqu’à l’entrée inverseuse. Donc ε = 0. Ceci impose V− = V+ , soit vs = ve . On en déduit que la fonction de transfert statique du montage suiveur est : H0 = vs =1 ve La valeur limite, lorsque R1 → ∞ et R2 → 0, de la fonction de transfert de l’amplificateur non inverseur établie ci-dessus redonne bien le résultat encadré ci-dessus. Le principal intérêt de ce montage est qu’il est un adaptateur d’impédance : sa résistance d’entrée est infinie alors que sa résistance de sortie est quasiment nulle. Nous l’utiliserons donc dans les circuits nécessitant une grande impédance de charge. Ce montage est aussi un amplificateur de puissance : la puissance absorbée en entrée est nulle (car i e = i+ = 0) alors que la puissance en sortie est finie et non nulle. F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 9 2.4 Amplificateur inverseur R1 A R2 − + ve vs Ce montage amplificateur est connecté à un circuit amont (circuit d’attaque) et à un circuit aval (circuit de charge). On constate qu’il existe une boucle de retour depuis la sortie de l’AO jusqu’à l’entrée inverseuse : l’AO peut fonctionner en régime linéaire. Ce circuit contient 3 nœuds : A, la sortie S et la masse. Il suffit donc d’écrire deux équations pour connaı̂tre les deux potentiels VA et VS indépendants, et donc l’état électrique du circuit. Le régime de fonctionnement est linéaire, donc ε = 0, soit V − = V+ , ou encore VA = 0. On calcule aisément la fonction de transfert statique H0 de ce montage en appliquant au point A, la loi des nœuds en termes de potentiels (théorème de Millman) (le courant i − entrant dans l’entrée inverseuse de l’AO est nul) : ve − V A vs − V A + =0 R1 R2 On en déduit que : H0 = vs R2 =− ve R1 Ce montage est dit inverseur car les tensions v s et ve ont des signes opposés. La résistance d’entrée de cet amplificateur est R 1 (ie = Rve1 ) alors que la résistance de sortie de cet amplificateur est nulle, puisque v s est indépendante de is . Il reste maintenant à exprimer la condition de validité du régime linéaire (|vs | ≤ Vsat ) : R1 |ve | ≤ Vsat R2 Remarque : en pratique, on place une résistance convenablement choisie entre l’entrée non inverseuse de l’AO et la masse afin de compenser la tension de décalage en entrée (input offset voltage) et le fait que les courants i− et i+ ne sont pas rigoureusement nuls. F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 10 2.5 Montage sommateur (et amplificateur) de tension R R1 A v1 v2 − + R2 vs S’il est simple d’additionner deux intensités i 1 et i2 en reliant les deux fils parcourus par ces intensités, il n’est, par contre, pas aisé d’additionner deux tensions. Le montage à amplificateur opérationnel ci-contre permet de réaliser cette fonction. Cet amplificateur opérationnel peut fonctionner en régime linéaire car il existe une boucle de retour sur l’entrée inverseuse. Ce circuit comporte trois nœuds : A, la sortie S et la masse. Il faut donc écrire deux équations pour déterminer les potentiels inconnus V A et VS . Le régime est linéaire : on en déduit que V A = V− = V+ = 0 à condition que |vs | ≤ Vsat. Par application de la loi des nœuds en termes de potentiels au point A, on obtient que : v1 v2 vs + + =0 R1 R2 R On en déduit que : vs = − R R v1 + v2 R1 R2 Par l’intermédiaire de la sommation de courants, on réalise une somme pondérée de tensions. Dans le cas particulier où l’on choisit R = R 1 = R2 , on obtient que vs = −(v1 + v2 ) : la tension de sortie est l’opposée de la somme des tensions d’entrée. Ce montage a le même défaut que l’amplificateur inverseur : ses résistances d’entrée sont finies, ce sont R 1 et R2 . Par contre, comme vs est indépendant de is , la résistance de sortie de ce montage est nulle. La condition de validité du régime linéaire s’écrit : R R R1 v1 + R2 v2 ≤ Vsat F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 11 Remarque : comme pour l’amplificateur inverseur, on place , en pratique, une résistance convenablement choisie entre l’entrée non inverseuse de l’AO et la masse afin de compenser la tension de décalage en entrée (input offset voltage) et le fait que les courants i − et i+ ne sont pas rigoureusement nuls. 2.6 Montage intégrateur C R A − + ve vs Le montage théorique ci-contre permet d’intégrer la tension d’entrée. L’interrupteur est placé de façon à pouvoir décharger le condensateur. L’amplificateur opérationnel peut fonctionner en régime linéaire car il existe une chaı̂ne de retour sur l’entrée inverseuse. Par ailleurs, ce circuit comprend trois nœuds : A, la sortie de l’amplificateur et la masse. Par conséquent, deux équations suffisent à déterminer l’état électrique complet du circuit. En régime linéaire, le potentiel de l’entrée inverseuse de l’amplificateur opérationnel est nul : VA = V− = V+ = 0. En appliquant la loi des nœuds au point A, on obtient : ve dvs =− dt RC En pratique, ce montage ne fonctionne pas. Si l’on court-circuite l’entrée (ve =0) et si l’on ouvre l’interrupteur à t = 0, on observe soit une croissance linéaire de vs avec le temps jusqu’à la saturation de l’amplificateur opérationnel (vs = +Vsat ), soit une décroissance vers −Vsat. Cette dérive est due aux défauts de l’amplificateur opérationnel : la tension de décalage et les courants de polaristion sont non nuls et contribuent à charger le condensateur. Pour stabiliser le montage, il faudrait décharger régulièrement le condensateur. On choisit en pratique de remplacer l’interrupteur F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 12 par une résistance R0 . Si l’on suppose que l’amplificateur fonctionne en régime linéaire (V− = 0), la loi des nœuds au point A s’écrit : ve dvs vs +C + 0 = 0, R dt R soit : vs ve dvs + 0 =− dt RC RC Les graphes ci-dessous illustrent la réponse à un signal carré de période T : 2 Cas où τ = R0 C T : Signal d′entree Signal de sortie Amplitude du signal de sortie 1.5 1 0.5 0 −0.5 −1 −1.5 −2 0 2 5 15 20 Cas où τ = R0 C T : Signal d′entree Signal de sortie 1.5 Amplitude du signal de sortie 10 Temps 1 0.5 0 −0.5 −1 −1.5 −2 20 25 30 Temps 35 F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 40 13 On constate qu’il n’y a intégration du signal d’entrée que dans le cas où τ = R0 C T . Le montage est appelé hh pseudo-intégrateur ii. 2.7 2.7.1 Montages comparateurs Comparateur simple R v− − v+ + R0 Vs Le montage ci-contre utilise un amplificateur opérationnel fonctionnant en régime non linéaire (régime de saturation) puisqu’il n’existe aucune chaı̂ne de retour sur l’entrée inverseuse. L’état de la tension de sortie v s dépend du signe de ε = v+ − v− . v+ > v − v+ < v − vs = +Vsat vs = −Vsat Examinons le cas où v+ = E et v− = v0 cos(ωt). Le montage compare donc v− à la tension de référence E. On a les chronogrammes suivants : 8 Signal d′entree Signal de reference Signal de sortie Amplitude des signaux 6 4 2 0 −2 −4 −6 −8 0 5 10 Temps 15 20 Chronogramme des différents signaux F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 14 2 Amplitude du signal de sortie 1.5 1 0.5 0 −0.5 −1 −1.5 −2 −4 −2 0 2 Amplitude du signal d′entree 4 Caractéristique de transfert du comparateur simple La vitesse finie de balayage de l’amplificateur opérationnel ( hh slew-rate ii) fait que le montage à comparateur simple ne fonctionne pas lorsque la fréquence du signal d’entrée est trop élevée (le signal n’a plus le temps de s’établir). 2.7.2 Comparateur à hystérésis ou trigger de Schmitt − + R1 ve vs u R2 Un système physique présente un hystérésis, lorsque l’état de ce système dépend de ses états antérieurs. Autrement dit, la système garde mémoire de ses états antérieurs. Le montage à amplificateur opérationnel ci-contre constitue un comparateur à hystérésis. L’amplificateur opérationnel n’est pas bouclé sur son entrée inverseuse, il fonctionne donc en régime non linéaire. Ce circuit comprend trois nœuds (l’entrée + de l’amplificateur, la sortie et la masse). Il faut donc écrire deux équations pour déterminer l’état électrique du circuit. F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 15 Comme le courant d’entrée i+ est négligeable, les deux résistances R 1 et R2 sont associées en série et constituent un pont diviseur de tension. 2 Donc, on peut écrire que : V+ = u = R1R+R vs . Comme vs = ±Vsat , on 2 R2 2 obtient : V+ = u = ± R1 +R2 Vsat . Posons U0 = R1R+R Vsat de sorte que : 2 V+ = u = ±U0 (1) On choisit par exemple un signal d’entrée sinusoı̈dal : v e = v0 sin(ωt). Comme ce comparateur garde mémoire de ses états antérieurs, il est nécessaire de définir un état initial afin d’établir un chronogramme des différents signaux. Supposons donc qu’à t = 0, v s = +Vsat, ce qui implique que V− < V+ et que (selon la relation (1)) V+ = U0 . Le comparateur reste dans cet état (vs = +Vsat) tant que V− < V+ , soit tant que ve < U0 . Au moment où ve = U0 , on observe un hh basculement ii : la tension de sortie vs bascule à la valeur −Vsat . Du coup, V+ = u = −U0 . Cet état persiste tant que V− > V+ , soit ve = V− > −U0 . Dès que ve = −U0 , on observe un nouveau basculement : v s = +Vsat , V+ = u = +U0 . Le comparateur reste dans cet état tant que V − < V+ , soit ve < U0 . Et ainsi de suite. . . On en déduit les chronogrammes suivants : 6 v e u Amplitude du signal 4 2 0 −2 −4 −6 0 5 10 Temps 15 20 Chronogramme des signaux ve et u F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 16 6 v e v Amplitude du signal 4 s 2 0 −2 −4 −6 0 5 10 Temps 15 20 Chronogramme des signaux ve et vs 2 1.5 Vsat 1 vs 0.5 0 −U0 U0 −0.5 −1 −Vsat −1.5 −2 −5 0 ve 5 Caractéristique de transfert du comparateur à hystérésis Le cycle d’hystérésis ci-contre est parcouru toujours dans le même sens : la branche supérieure (vs = +Vsat) est toujours parcourue depuis ve = −U0 vers ve = +U0 , où se produit un basculement. La branche inférieure (vs = −Vsat) est toujours parcourue depuis ve = +U0 vers ve = −U0 , où se produit un nouveau basculement. L’avantage d’un comparateur à hystérésis est que ses fronts de commutation sont bien marqués. Ce type de comparateur est couramment utilisé dans les montages multivibrateurs. F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 17 Notons que ce comparateur génère un signal carré (v s ) à partir d’un signal sinusoı̈dal (ve ). Les comparateurs sont couramment utilisés en électronique pour la génération de fonctions. Enfin, il convient de signaler qu’il existe d’autres types de comparateurs à hystérésis que celui que nous venons d’étudier. 2.8 Multivibrateurs Un multivibrateur est un circuit qui possède deux états de fonctionnement. Selon la stabilité de ces états, on distingue : • les multivibrateurs astables à deux états instables. Le circuit ne cesse d’osciller entre ses deux états de fonctionnement. Ces circuits constituent des oscillateurs de relaxation 3 • les multivibrateurs monostables à un état de fonctionnement stable, le second état de fonctionnement étant instable. Le basculement de l’état stable vers l’état instable doit être provoqué alors que le retour de l’état instable vers l’état stable (relaxation) est spontané. • les multivibrateurs bistables dont les deux états de fonctionnement sont stables. Le basculement de l’un des deux états à l’autre n’est jamais spontané : il faut le provoquer. Nous envisagerons ici l’exemple d’un multivibrateur astable. Pour ce, considérons le circuit suivant : 3 En physique, on désigne par relaxation, l’évolution en fonction du temps des propriétés d’un système physique écarté de sa position ou de sa configuration d’équilibre par des actions extérieures et qui y revient une fois ces actions supprimées. Une oscillation de relaxation désigne l’oscillation produite par un système ne possédant généralement pas une configuration d’équilibre, mais deux, le passage de l’une à l’autre étant dû à une rupture brusque de l’équilibre interne. Le fonctionnement d’un oscillateur à relaxation nécessite une source extérieure d’énergie continue. L’équation qui détermine un oscillateur de relaxation n’est pas linéaire ; sa fréquence est arbitraire dans de larges limites ; son amplitude est fixée par la constitution de l’oscillateur. F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 18 R − A S + C R1 ve vs R2 Le montage ci-dessus consiste en l’association d’un comparateur à hystérésis et d’un montage pseudo-intégrateur (circuit (R, C)) qui est alimenté sous vs et qui délivre ve . On peut appliquer la loi des nœuds au point A pour trouver l’équation suivante : C dve vs − v e dve ve vs = soit : + = , dt R dt τ τ où τ = RC. Pour analyser le fonctionnement de ce circuit, supposons que l’on ait les conditions initiales suivantes : l’instant t = 0 correspond à un basculement 2 2 de vs = −Vsat à vs = +Vsat (alors V+ = R1R+R vs = R1R+R Vsat = +U0 ) . 2 2 Ce basculement se produit parce qu’à t = 0, v e (0) = −U0 . On peut en déduire qu’alors : t ve (t) = Ke− τ + Vsat . La constante d’intégration K est telle que : v e (0) = −U0 soit K = −U0 − Vsat . D’où : t ve (t) = −(U0 + Vsat )e− τ + Vsat Le condensateur se charge sous la tension constante v s = +Vsat et la tension ve croı̂t dans le temps jusqu’à ce qu’elle atteigne, à l’instant t 1 , la valeur U0 . À cet instant-là, la tension vs bascule à la valeur −Vsat t − τ1 et V+ = −U0 . L’instant t1 est + Vsat tel que : U0 = −(U0 + Vsat )e R2 et vaut : t1 = τ ln 1 + 2 R1 . Pour t immédiatement supérieur à t 1 , l’équation différentielle vérifiée par v e est : ve −Vsat dve + = dt τ τ F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 19 Compte tenu de ve (t1 ) = U0 , la solution de cette équation différentielle est : (Vsat + U0 )2 − τt ve (t) = − Vsat e (Vsat − U0 ) Le condensateur se décharge sous la tension constante −V sat et la tension ve décroı̂t jusqu’à l’instant t2 où elle atteint la valeur −U0 . On trouve R2 que : t2 = 2τ ln 1 + 2 R1 À l’instant t2 , le multivibrateur astable se retrouve dans le même état qu’à l’instant t = 0. Le phénomène étudié se poursuit donc indéfiniment. Les oscillations de ce multivibrateur sont caractérisées par une période T égale à t2 : R2 T = 2τ ln 1 + 2 R1 On caractérise aussi les oscillations de ce multivibrateur par son rapport cyclique δ, qui est, par définition, le rapport de la durée de l’état à saturation positive t1 sur la période T : δ= t1 = 0.5 T Il est possible d’améliorer le montage pour contrôler à la fois la période d’oscillation et le rapport cyclique. Le chronogramme des signaux v e (t) et vs (t) est le suivant : 10 v s v Amplitude du signal e 5 0 −5 −10 0 5 10 Temps 15 20 Le signal d’entrée ve (t) oscille entre les valeurs U0 et −U0 alors que le signal de sortie bascule régulièrement de +V sat à −Vsat . F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 20 3 Exercices Les exercices 1 et 2 sont des applications directes du cours. Les exercices 3,4 et 5 illustrent quelques défauts des amplificateurs opérationnels réels. Les exercices 6 et 7 sont un peu plus difficiles. 1 L’amplificateur opérationnel, dans le montage ci-dessous, est supposé idéal et fonctionne en régime linéaire. Exprimer V s en fonction de e1 et e2 . Comment réaliser Vs = K(e2 − e1 ) ? R1 R e1 e2 − + R0 Vs R2 2 Exprimer i en fonction de u1 , u2 et r. Quelle condition doit-on avoir sur R1 , R2 , R3 et R4 pour que le montage ci-contre soit une source idéale de courant pour la résistance r ? Donner alors l’expression de i. On supposera que l’amplificateur opérationnel, idéal, fonctionne en régime linéaire. R2 R1 − + R1 u2 u1 R4 R3 i r 3 Le montage ci-contre est un montage amplificateur non inverseur avec une sortie à vide (is = 0). L’amplificateur opérationnel a pour tensions de saturation ±Vsat (Vsat = 15 V), pour courants de saturation ±I sat F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 21 (Isat = 20 mA) et pour vitesse de balayage maximale ( hh slew-rate ii) : dvs σ= = 0.5 V · µs−1 . dt max + is = 0 − R2 ve vs R1 1. Quelle condition doivent vérifier R 1 et R2 pour que la saturation en tension apparaisse avant la saturation en courant ? (on admettra, pour la suite, que cette condition est vérifiée). 2. Déterminer l’amplitude maximale v s0 de vs , en régime linéaire, pour un signal d’entrée sinusoı̈dal de fréquence f. Quelles sont les valeurs de vs0 pour f = 100 Hz, 1000 Hz, 10 kHz, 100 kHz et 1 MHz ? Représenter sur un graphe le domaine (f,v s0 ) correspondant à un fonctionnement en régime linéaire. 4 Dans le montage intégrateur ci-contre, on tient compte d’une tension de décalage vd (c’est un défaut de l’amplificateur opérationnel réel). L’amplificateur opérationnel dessiné sur le schéma ci-contre est idéal. Montrer que la présence de cette tension de décalage conduit l’amplificateur opérationnel à la saturation (on fera les calculs en supposant que l’amplificateur fonctionne en régime linéaire et on concluera que ce régime ne peut pas perdurer.) C R A − + ve vd F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel vs 22 5 Dans un amplificateur opérationnel réel, les courants i + et i− ne sont pas nuls ainsi que la tension de décalage en entrée v d . On peut modéliser un tel amplificateur comme indiqué dans le schéma ci-dessous. Pour l’amplificateur opérationnel µA741, on a I p+ ≈ Ip− ≈ 80 nA, A = 105 (gain de l’amplificateur), |vd | = 2 mV. − ε vd Ip− + —– Ip+ —– Aε Les sources de courant Ip+ et Ip− représentent les courants de polarisation des transistors d’entrée de l’amplificateur opérationnel. Ces courants sont toujours du même ordre de grandeur. On les supposera donc égaux : Ip+ ≈ Ip− = Ip . R2 R1 − + ve vs R 1. En utilisant le modèle d’amplificateur opérationnel réel, décrit cidessus, déterminer la tension de sortie v s en fonction de ve , vd et Ip , pour l’amplificateur inverseur représenté ci-contre avec R 1 = 10 kΩ et R2 = 100 kΩ. 2. Comment doit-on choisir R pour que la tension de décalage en sortie liée aux courants de polarisation soit éliminée ? 6 Déterminer la réponse vs du montage ci-contre, selon que la tension d’entrée ve est positive ou négative (l’amplificateur opérationnel est idéal et fonctionne en régime linéaire). Préciser dans chacun de ces cas, l’état passant ou bloqué des diodes. Tracer la courbe v s = f(ve ). F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 23 R R D1 − ve vs + D2 7 On considère le montage ci-dessous, comportant trois amplificateurs opérationnels supposés idéaux et des éléments passifs dont les valeurs sont : R1 = 10 kΩ, R2 = 4.7 kΩ, R = 10 kΩ, C = 10 nF, R3 = 4.7 kΩ, R4 = 10 kΩ. R2 R1 C − R + − − + v1 + v2 R4 vs R3 1. Identifier le rôle de chacun des trois amplificateurs opérationnels. Les deux premiers amplificateurs opérationnels fonctionnent en régime linéaire alors que l’amplificateur opérationnel de droite fonctionne en régime non linéaire. 2. À l’instant t = 0, la tension de sortie est égale à +V sat = 15 V ; le condensateur de capacité C n’est pas chargé. Étudier l’évolution ultérieure de la tension v2 (t) jusqu’au basculement de vs (t) (on supposera les amplificateurs opérationnels idéaux ; en particulier on négligera l’existence de défauts pouvant altérer le fonctionnement de l’étage intégrateur.) 3. Tracer, en concordance de temps, pour deux périodes, les graphes des fonctions vs (t), v1 (t) et v2 (t). Calculer la fréquence des signaux obtenus. F. Vandenbrouck – TSI1 – L’amplificateur opérationnel 24