Chronique de Brigitte Lestrade : Avril 2016

publicité
Brigitte Lestrade
L’année 2015 a été fortement marquée
en Allemagne par un afflux considérable
de réfugiés. En ce début de l’année 2016,
l’actualité reste dominée par le problème
des migrants, mais sous des auspices
radicalement changés. Aux soucis de
logistique – comment les loger, les nourrir,
les former, les intégrer – se sont substituées
des considérations plus politiques qui
tendent à envenimer le climat tant au
sein du gouvernement fédéral qu’à celui
des instances régionales et locales. Suite
aux blocages d’un nombre croissant de
pays de transit sur la route des Balkans
et aux tractations entre l’Europe et la
Turquie, le nombre de réfugiés arrivant
en Allemagne a considérablement chuté,
au point qu’un nombre important de
foyers d’accueil construits en prévision
de l’arrivée de centaines de milliers
d’arrivants supplémentaires se retrouvent
vides d’occupants, au désarroi de certains
maires de communes, notamment rurales.
Au lieu de permettre un certain apaisement
de la situation, cette nouvelle donne sème
le trouble au gouvernement et dans la
population, car le pacte entre l’Europe et
la Turquie sur le retour des migrants dont
Mme Merkel est l’architecte apparaît comme
un marché de dupes à la plupart des
Allemands.
Si, sur le plan politique, la situation est
confuse, avec un gouvernement qui a du
mal à cacher ses clivages internes et un
Actualité sociale
avril 2016
parti d’extrême droite qui, aux élections
régionales, engrange les bénéfices de la
discorde, sur le front socio-économique,
toutefois, tout se présente bien, pour les
Allemands du moins. Car pour sa voisine
d’outre-Rhin, c’est autre chose : la France
perd sa place de premier partenaire
économique de l’Allemagne, détrônée, de
peu certes, mais quand même, par les ÉtatsUnis. Les autres thématiques sont également
réjouissantes : les seniors bénéficient d’une
augmentation record des retraites, tout
comme les actifs qui, après des années
de modération salariale, engrangent des
hausses de salaire confortables, surtout dans
un contexte d’inflation proche de zéro. Autre
sujet de satisfaction : le maintien du budget
fédéral à l’équilibre. Cette préoccupation
principale de M. Schäuble, ministre fédéral
des Finances, si elle chagrine certains par
sa négligence de la nécessité d’investir
davantage dans les infrastructures, permet
au pays de réduire progressivement son
niveau d’endettement afin de rentrer, enfin,
dans les clous de Bruxelles.
Le pacte entre l’Europe et la Turquie sur le
retour des migrants
Pour des raisons politiques – le retournement de l’opinion publique en Allemagne,
la montée de mouvements extrémistes, le
blocage de la route des Balkans, pour ne
citer que quelques aspects – le gouvernement allemand a été contraint de trouver
Actualité sociale 63
une solution radicale afin de réduire l’afflux de réfugiés, le pays n’étant pas en
mesure de faire face à une vague de même
ampleur que celle affrontée en 2015.
Contrairement à l’époque du début des
migrations de masse, où la Chancelière
a ouvert les frontières en grand sans solliciter auparavant l’opinion des autres pays
européens, le gouvernement a fait appel à
l’UE afin de concevoir un plan d’ensemble
susceptible de contenir ces mouvements de
masse. L’accord du 18 mars entre l’UE et la
Turquie, signé par les 28 pays de l’Union,
porte la marque du gouvernement allemand. Applicable dès le 20 mars, il prévoit
que la Turquie reprenne sur son sol tous les
réfugiés arrivés illégalement de Grèce. Pour
chaque réfugié syrien illégal repris, l’UE
accepte d’accueillir légalement un réfugié
syrien sur son sol. Aux termes de l’accord,
72 000 réfugiés de la guerre civile syrienne
peuvent dans un premier temps être légalement accueillis en Europe.
Afin d’adoucir le contraste saisissant
entre la culture de l’accueil qui a prévalu en
2015 et la fermeture brutale des frontières,
le pacte Merkel/Davutoglu a prévu de se
conformer aux normes internationales : tous
les réfugiés gardent le droit de demander
l’asile, toute demande sera traitée de
façon individuelle. Mais si, après examen
de la demande, celle-ci paraît infondée,
les demandeurs d’asile seront renvoyés.
Les renvois, commencés le 4 avril, exigent
une augmentation considérable du nombre
des forces de l’ordre, qui devraient passer
de 1 500 à 4 000 personnes, dont des
officiers de police, des militaires, mais
aussi des juges, des interprètes et des
logisticiens. Ne pouvant laisser cette charge
à la seule Grèce, vingt pays européens ont
proposé leurs services, dont l’Allemagne
et la France, qui envoient chacune 200
policiers à Frontex et 100 fonctionnaires
à l’Agence d’immigration European
Asylum Support Office (EASO). Les cinq
hot spots grecs, ces centres d’accueil sur
le sol grec qui accueillaient les candidats
à un asile légal en Europe, sont transformés
en centres d’hébergement fermés, pour
éviter un contournement de la nouvelle
règlementation.
La Chancelière estime que cet accord
est un pas très important vers une solution
durable, qu’il permettra de mettre un
terme aux agissements des passeurs et
qu’il pourra mieux protéger les frontières
extérieures de l’UE. Mais qu’apporte cet
accord à la Turquie ? Le Premier ministre,
Ahmed Davutoglu, fin négociateur, a
obtenu des avantages considérables, tant
financiers que politiques. L’UE a porté à
6 milliards d’euros la somme allouée à la
Turquie pour financer l’accueil des deux
millions et demi de réfugiés ayant fui la
guerre civile en Syrie, soit 3 milliards de
plus que la somme initialement promise
en 2015. De plus, mesure symbolique
importante pour la Turquie, la Commission
de Bruxelles a promis une levée accélérée
du régime des visas pour les Turcs d’ici à
la fin du mois de juin. L’exemption de visas
devait à l’origine entrer en vigueur au mois
d’octobre 2016, mais, sous la pression
d’Ankara, la date a été avancée, sous
condition que la Turquie remplisse tous les
critères exigés par la Commission qui en a
identifié 72. Ankara a par ailleurs obtenu
une accélération du processus d’adhésion à
l’UE avec l’ouverture d’un nouveau chapitre
de négociation, le 33e, sur les dispositions
budgétaires.
Si un certain soulagement est perceptible
dans les commentaires en Europe, en
dépit des énormes obstacles qui se
dressent sur la réalisation de cet accord,
le malaise est grand notamment en raison
de ses modalités, mais aussi pour ce que
représente la Turquie actuellement en termes
de démocratie. Nombre de commentateurs
considèrent que l’accord est un marché
de dupes, la Turquie recevant beaucoup
et donnant très peu. Ce déséquilibre ne
serait pas aussi mal perçu si le régime
politique turc n’avait pas la réputation
d’être autocratique et tenant les droits de
l’homme pour quantité négligeable. Aux
yeux des Allemands, ce pays qui souhaite
intégrer l’UE ne semble pas adhérer aux
valeurs qui la caractérisent, notamment
la liberté d’opinion. Le dernier incident
64
Brigitte Lestrade
entre l’Allemagne et la Turquie en est un
exemple. Si la satire virulente du président
turc diffusé fin mars par l’humoriste Jan
Böhmermann a choqué l’opinion publique,
l’exigence juridique d’Ankara d’entamer
des poursuites pénales contre lui, et surtout
le fait que la Chancelière y ait donné suite,
contre l’avis des sociaux-démocrates, sont
très mal perçus. Mais l’Allemagne a besoin
de la Turquie, et celle-ci en profite (voir aussi
dans ce même numéro la chronique de JeanJacques Alcandre sur la crise migratoire en
Allemagne).
La France perd sa place de premier
partenaire économique de l’Allemagne
Depuis le 2 mars, c’est officiel : la France
n’est plus le premier partenaire commercial
de l’Allemagne. Destatis, l’Office fédéral
des statistiques outre-Rhin l’a confirmé en
publiant les chiffres du commerce extérieur
allemand pour 2015. Ce sont les États-Unis
qui ont pris cette place que la France avait
occupée sans interruption pendant une
quarantaine d’années. C’est la fin d’une
ère pendant laquelle la France était sans
conteste le plus important client de l’Allemagne. Le changement est intervenu très
rapidement. En 2014 encore, les États-Unis
n’étaient que le quatrième partenaire de
l’Allemagne, derrière la France, les PaysBas et la Chine. Mais pendant l’année
dernière, les exportations vers les ÉtatsUnis se sont considérablement accrues,
atteignant 114 milliards d’euros, ce qui
correspond à une augmentation de près de
19 % en un an, qui inclut un effet de change
euro/dollar important. Les exportations vers
la France, par contre, n’ont augmenté que
de 2,5 % pour atteindre 103 milliards d’euros. Du coup, avec un total des échanges
France-Allemagne de 170,1 milliards d’euros comparé à 173,2 milliards pour les
États-Unis-Allemagne, la France n’est plus
que troisième importateur derrière la Chine
et les Pays Bas et deuxième exportateur
derrière les États-Unis, comme le montrent
les chiffres de Destatis ci-dessous.
Les plus importants partenaires
commerciaux de l’Allemagne 2015
Exportations
Importations
États-Unis
114
Chine
92
France
103
Pays Bas
88
Royaume-Uni
89
France
67
Pays-Bas
80
États-Unis
59
Chine
71
Italie
49
Italie
58
Pologne
44
Autriche
58
Suisse
43
Pologne
52
République
tchèque
39
(en milliards d’euros)
Les instituts économiques allemands,
tels que le DIW (Deutsches Institut für
Wirtschaftsforschung) de Berlin estiment
que cette inversion, loin d’être un feu de
paille, s’inscrit dans la durée. Les raisons en
sont multiples, notamment le différentiel de
dynamisme économique et l’affaiblissement
de l’euro par rapport au dollar. La
croissance économique des États-Unis était
de 2,4 % l’année dernière comparée à
1,1 % en France. En 2016, l’écart ne se
réduira que de peu, avec des prévisions de
l’OCDE concernant la progression du PIB de
2,0 % pour les États-Unis et de 1,2 % pour
la France. Par ailleurs, l’affaiblissement de
l’euro par rapport au billet vert, de 20 % en
deux ans, facilite les exportations hors de la
zone euro.
Si la pertinence de ces chiffres bruts
est limitée en raison de la réimportation
de produits semi-finis qui les gonflent
artificiellement, ce tableau permet de voir
l’énorme déséquilibre qui existe dans
les échanges entre l’Allemagne et ses
partenaires : une balance déficitaire avec
la Chine ainsi que, plus légèrement, avec
les Pays Bas, et très excédentaire avec la
plupart des autres pays, notamment la
France. Il montre aussi la réorientation des
échanges vers les États-Unis et la Chine, au
détriment de ses partenaires européens,
notamment la France. Serait-ce un signe de
Actualité sociale 65
plus du relâchement des liens politiques et
économiques entre les deux pays ?
Augmentation record des retraites…
À partir du 1er juillet 2016, les
20,6 millions de retraités allemands – un
quart de la population totale – profiteront
d’une bonne nouvelle : ils verront leur
pension augmenter considérablement, de
4,25 % à l’Ouest et de 5,95 % à l’Est. Sur
la base d’une retraite brute de 900 € par
mois, ce qui correspond à ce que touche la
majorité des retraités, elle rapporte environ
38 € de plus dans les anciens Länder et 54 €
dans les nouveaux. Cette augmentation, la
plus importante depuis plus de vingt ans, est
d’autant plus précieuse qu’elle ne sera pas
amoindrie par l’inflation qui, cette année,
ne dépassera guère les 0,1 %. La différence
entre les hausses à l’Ouest et à l’Est aura
pour effet de réduire l’écart entre le niveau
des retraites qui n’est pas encore complètement absorbé. Dorénavant, les pensions
des retraités habitant les Länder orientaux
atteindront 94,1 % de celles des retraités à
l’Ouest contre 92,6 % actuellement. Cette
hausse importante n’est pas une surprise
pour les initiés, car elle résulte mécaniquement de l’augmentation du niveau des
salaires en Allemagne. Le salaire brut qui
sert de référence au calcul des retraites a en
effet augmenté de 3,78 % dans les anciens
Länder et de 5,48 % dans les nouveaux.
La différence entre les augmentations des
salaires et celles des retraites résultent d’effets statistiques qui rentrent dans les calculs.
L’autre bonne nouvelle pour les retraités
est que cette hausse ne s’accompagne pas
d’une augmentation du niveau des cotisations qui restera fixé à 18,7 % pour les
années à venir.
Ce niveau de progression des retraites
risque toutefois de rester l’exception. Si elles
continuent à augmenter dans les années à
venir, elles le feront de façon plus modérée et
partiellement déconnectée de la hausse des
salaires. Car un facteur démographique, dit
de durabilité, introduit dans le calcul des
retraites permet de moduler leur évolution
en fonction du rapport entre le nombre de
cotisants et celui des retraités dont on ne
peut pas prévoir l’évolution avec précision.
Il n’y a toutefois pas lieu de s’alarmer,
d’après les informations du dernier rapport
du gouvernement sur l’assurance retraite.
Si le taux de remplacement, c’est-à-dire le
rapport entre le niveau de la retraite et celui
du salaire antérieur, est censé reculer de
48 % en 2014 à 45 % en 2029, la limite
au-dessous de laquelle il ne doit pas tomber
est fixée à 43 % en 2030.
Cette revalorisation des retraites est
une bonne nouvelle pour tous ceux parmi
les actifs actuels qui, comme en France,
se disent que leur retraite ne sera en rien
comparable à celle des anciens actuels.
La parole de l’ancien ministre du Travail
Norbert Blüm « Die Rente ist sicher », forgée
en 1986 et réitérée lors de la réforme des
retraites en 1997, peine à convaincre
les salariés actuels. Or l’augmentation
décidée par le gouvernement devrait mettre
du baume au cœur de bon nombre de
retraités actuels et futurs, car ce bond se
compare très favorablement au niveau de
rémunération qu’ils peuvent espérer tirer de
leurs investissements bancaires ou autres.
L’importance du timing de cette annonce
est également à souligner, en raison de son
effet symbolique : à l’heure où une fraction
croissante de la population considère
que le gouvernement en fait plus pour les
réfugiés que pour les Allemands pauvres,
dont justement de nombreux retraités,
ce geste leur rappelle que le Sozialneid,
cette jalousie envers des groupes sociaux
supposés mieux traités que d’autres, n’est
pas de mise.
Si la satisfaction au gouvernement et
parmi les récipiendaires de ces largesses est
réelle, cette augmentation ne peut constituer
qu’une pause dans le recul déjà programmé
des retraites d’État sur la durée. La nécessité
pour les générations en activité aujourd’hui
de se constituer une retraite complémentaire,
d’entreprise ou sur le modèle de la Riester
Rente, reste d’actualité.
… et des salaires
Les retraites, dont la progression est liée
à celle des salaires, ont fait un bond inédit
depuis vingt ans. Cela suppose que le
66
Brigitte Lestrade
niveau des salaires a également augmenté
de façon considérable, un fait qui a été
révélé au mois de février par l’Agence
fédérale de statistique Destatis. Sans être
aussi considérable que celle des retraites,
la progression des rémunérations, de
2,8 %, est la plus importante enregistrée
depuis 2008 pour l’ensemble des salariés
allemands. Compte tenu de la faiblesse
de l’inflation, de 0,3 % seulement l’année
dernière, la hausse du salaire réel est de
2,5 %. C’est d’autant plus remarquable
qu’en 2014 le salaire réel n’avait progressé
que de 1,7 %, après avoir même reculé
de 0,1 % en 2013. Plusieurs facteurs sont
cités pour expliquer cette performance :
après des années de modération salariale,
une retenue portée aussi par les syndicats
qui craignaient une perte de compétitivité
de l’économie allemande, les entreprises
peuvent se permettre des mesures de rattrapage. Ainsi, le puissant syndicat IG Metall
a obtenu l’année dernière une augmentation de 3,4 % pour les plus de 3,5 % de
salariés du secteur de la métallurgie et de la
construction électrique. De plus, l’introduction d’un salaire minimum, de 8,50 euros
depuis le début de l’année 2015, a pu
peser, bien qu’il soit encore trop tôt pour
mesurer l’impact précis de cette mesure.
En raison du ralentissement de l’économie
mondiale, notamment de celle de la Chine
et du Brésil, sans compter les difficultés de
bon nombre de pays européens, c’est la
consommation des ménages, dopée par
la progression des salaires, qui a soutenu
la croissance en Allemagne. Les dépenses
privées et publiques ont en effet contribué à
hauteur de 1,5 % à la croissance de 1,7 %
que l’Allemagne a enregistrée en 2015.
Les économistes ne s’attendant pas à une
reprise notable du commerce extérieur pour
cette année, ce sera encore à la demande
intérieure de servir de moteur à la croissance
en Allemagne. C’est apparemment aussi
la vision de IG Metall qui envisage de
réclamer une hausse des salaires proche
de 5 % en 2016 afin, selon son président,
de stimuler les dépenses des ménages pour
le grand bien de l’économie allemande.
Si la progression importante des salaires
enregistrée en 2015 et celle programmée
pour 2016 ne seront pas suffisantes pour
compenser plus d’une dizaine d’années
de modération salariale, ces mesures de
rattrapage sont néanmoins une bonne
nouvelle pour la zone euro, car elles
constituent autant de signes de convergence
dans un domaine où l’écart s’était par trop
creusé dans le passé.
Maintien à l’équilibre du budget fédéral
Les orientations budgétaires pour l’exercice 2017 et les années suivantes jusqu’en
2020, adoptées au mois de mars par le
Conseil des ministres, restent fidèles au
crédo du ministre des Finances Wolfgang
Schäuble, pour lequel die schwarze Null,
le déficit zéro, est l’objectif principal de
sa politique budgétaire. Depuis quatre ans
déjà, l’Allemagne connaît un budget proche
de l’équilibre. En 2015, le gouvernement
fédéral est même parvenu à dégager un
excédent de plus de 12 milliards d’euros,
deux fois plus que les 6,1 milliards anticipés
au mois de novembre, grâce notamment à
des rentrées fiscales en hausse, tirées par la
vitalité de son économie et l’accroissement
du nombre d’actifs subséquent. Pour 2017,
le budget fédéral prévoit 325,5 milliards
d’euros de dépenses, soit 8,6 milliards de
plus que cette année. En 2020, ce chiffre
atteindra 347,8 milliards d’euros d’après
les prévisions budgétaires, à savoir un
accroissement de 30,9 milliards par rapport
à 2016.
En raison du coût de l’afflux de réfugiés
en 2015, le budget pour 2017 prévoit près
de 10 milliards d’euros supplémentaires
qui serviront notamment à financer la
construction de logements sociaux –
une nouveauté pour l’Allemagne où le
parc de HLM est réduit – et des mesures
d’intégration sur le marché de l’emploi. Le
nombre de familles étant assez élevé parmi
les migrants, des dépenses pour l’éducation
ainsi que pour la politique familiale sont
également prévues. Si l’accroissement des
dépenses pour l’accueil des réfugiés a capté
l’attention des médias, d’autres priorités ont
été mises en exergue par le gouvernement,
notamment dans le domaine des dépenses
Actualité sociale 67
d’investissements dont la faiblesse a
souvent été critiquée par le passé. Ainsi,
33,7 milliards sont crédités au budget
2017, soit 2,2 milliards de plus qu’en 2016,
essentiellement destinés aux infrastructures
de transport et aux activités du numérique.
Cette progression est toutefois considérée
comme insuffisante par bon nombre de
spécialistes qui ont noté que la progression
des dépenses d’investissement est appelée
à se réduire au-delà de 2018.
Il est vrai que les orientations budgétaires
reflètent les priorités accordées par le
gouvernement aux mesures sociales mises
en place pendant l’actuelle législature.
Ainsi seront augmentées les dépenses pour
l’allocation logement, la réforme du congé
parental qui implique un accroissement de
l’allocation versée aux parents, ainsi que
pour la réforme des retraites en faveur des
carrières longues et des mères de famille.
Le total des dépenses sociales est ainsi
prévu de passer de 161 milliards d’euros
en 2016 à 171 milliards en 2017, ce
qui correspond à une augmentation aussi
importante que les dépenses prévues pour
l’accueil des réfugiés. De quoi rassurer
ceux qui s’inquiètent de la priorité que
le gouvernement semble accorder aux
migrants.
La bonne santé des finances publiques
permet également à Berlin de faire revenir
la dette publique sous la barre des 60 %
du PIB en 2020. Le taux d’endettement
de l’État fédéral, des Länder, des
communes et des assurances sociales se
réduit progressivement : de 71,2 % en
2015, il est prévu de passer à 68,2 cette
année et à 65,7 % en 2017. Le contraste
avec la France, qui accuse un déficit de
81 milliards d’euros et une dette de 97 %
du PIB pour 2015 est saisissant. Il est vrai
que, contrairement à Berlin, Paris n’a pas
inscrit de frein à l’endettement dans la
Constitution.
[email protected]
Téléchargement