
MARIE
Je voudrais reprendre en commençant les questions posées sur l’invitation. La place donnée
à Marie dans nos Églises serait-elle un obstacle ou au contraire une stimulation pour l’unité des
chrétiens à Lyon ? En posant cette alternative, nous raisonnons en bons occidentaux, habitués aux
relations entre catholiques et protestants. Il y a quelques semaines, j’ai participé à une rencontre
interconfessionnelle à Damas, un chrétien syriaque orthodoxe de Jérusalem est venu avec des
cadeaux pour chacun des participants, il nous a offert, en autres, ce que les catholiques appellent un
chapelet ou un rosaire, les réformés et luthériens ont remercié mais ont été un peu encombrés par ce
cadeau… Nous sommes allés ensemble dans un monastère orthodoxe où les chrétiens orientaux
vénèrent une icône de la Vierge, très ancienne et considérée comme miraculeuse ; encore une fois,
les protestants n’étaient pas très à l’aise… C’est dire que la fracture, si fracture il y a, ne passe pas
entre catholiques et protestants sur ce sujet. La différence se trouve entre des chrétiens s’inscrivant,
peu ou prou, dans la continuité de la tradition ancienne, et des chrétiens d’après la Réforme ayant
rompu avec des pratiques considérées par eux comme idolâtres…
N’imaginons pas non plus que tous les catholiques ont la même piété mariale. Les “équipes
du Rosaire“ et la “légion de Marie” n’ont pas les mêmes pratiques que l’Action Catholique Ouvrière
davantage portée davantage sur le militantisme que sur le culte, ou que des groupes bibliques
œcuméniques centrés sur l’Écriture. Personnellement, réciter le Rosaire, mettre des fleurs ou des
cierges devant une statue de la Vierge Marie, aller à Lourdes en pèlerinage,… ne font pas partie de
ma vie spirituelle, mais lire et méditer la Bible, ainsi que la participation régulière à l’eucharistie,
oui !
Quelques éclairages théologiques
La “hiérarchie des vérités” du concile Vatican II :
Dans le décret sur l’œcuménisme, le concile Vatican II affirme : « En exposant la doctrine,
les théologiens catholiques se rappelleront qu’il y a un ordre ou une “hiérarchie” des vérités de la
doctrine catholique, en raison de leur rapport différent avec les fondements de la foi chrétienne » (n°
11) C'est-à-dire que toutes les vérités n’ont pas la même place dans le mystère du salut. En effet,
quand les symboles de foi parlent de la Vierge Marie, ils confessent ainsi la divinité du Christ ;
quand le concile d’Éphèse proclame Marie “mère de Dieu” (theotokos), il porte le regard sur la
personne du Christ, vrai Dieu et vrai homme, et déduit que la mère de Jésus peut être reconnue aussi
mère de Dieu. Ces affirmations sont christologiques, elles se rapportent au Christ Sauveur de
l’humanité. Ce que les siècles suivants, en particulier dans la piété populaire, ont pu dire de Marie,
n’a pas la même portée théologique, car plus loin du cœur de la foi chrétienne.
Pour continuer avec des éclairages théologiques, j’aime bien citer un texte du cardinal
Ratzinger, devenu aujourd’hui Benoit XVI, à propos des apparitions à Fatima au Portugal. En effet,
l’ancien préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi propose des distinctions intéressantes.
Trois formes de perception ou de vision
Une première distinction qui peut nous éclairer, c’est le cas de le dire : la distinction entre
trois formes de perception ou de vision.
« L'anthropologie théologique distingue en ce domaine trois formes de perception ou de
“vision” : la vision des sens, donc la perception externe corporelle, la perception intérieure et la
vision spirituelle. Il est clair que, dans les visions de Lourdes, Fatima, etc., il ne s'agit pas de la