Sessions scientifiques de l'American Heart Association(AHA) 13-16 novembre 2005 à Dallas Imagerie des coronaires Que peut-on attendre du scanner ? Grâce à la technologie « 64 barrettes », le scanner coronaire permet aujourd'hui d'obtenir des images de très bonne qualité, susceptibles de pouvoir être exploitées, sous certaines conditions... Caractérisation de la plaque athéromateuse en scanner haute résolution(Photo DR) COMPARATIVEMENT à la coronarographie, qui reste la technique de référence, les performances des scanners actuels sont très bonnes, avec des chiffres de sensibilité et de spécificité supérieurs à 90 % pour le diagnostic des sténoses significatives, c'est-à-dire induisant une réduction de plus de 50 % du diamètre intraluminal de l'artère. Quelques précisions doivent être fournies eu égard à ces résultats. Tout d'abord, les séries présentées sont courtes, quelques dizaines de patients en général, et la majorité des résultats proviennent d'un seul constructeur. Ensuite, l'analyse détaillée des différentes présentations montre que les images restent d'interprétation difficile, voire impossible, pour environ 10 % des examens, en raison principalement d'irrégularités de la fréquence cardiaque en cours d'acquisition ou de la présence de calcifications trop importantes. Deux modes de présentation des résultats sont utilisés : par segments ou par patients. Chacune de ces présentations peut être trompeuse. Imaginons un exemple dans lequel, l'arbre artériel coronaire ayant été divisé en treize segments, la coronarographie trouve une sténose, alors que le scanner est normal. Il s'agit d'une erreur potentiellement lourde de conséquences, mais en présentation par segments, le scanner donne la bonne réponse douze fois sur treize... Imaginons un autre exemple, où le scanner met en évidence six sténoses et la coronarographie, sept. Cette différence a peu d'incidence pratique, mais, en présentation par patients, l'erreur du scanner est de 100 %. La lecture des résultats doit donc prendre en compte, entre autres, la prévalence de la maladie dans la population examinée, ce qui, convenons-en, ne simplifie pas l'échange d'informations. En pratique, ce sont les situations de « prévalence basse » qui constituent sans doute actuellement l'indication la plus légitime du scanner coronaire, c'est-à-dire lorsque l'impression clinique est qu'il n'y a pas de lésion significative, mais que l'on veut s'en assurer. Comme le souligne un éditorial très récent de la revue « Circulation » (1), la mise en évidence d'une lésion potentiellement significative sur un scanner coronaire ne constitue pas actuellement une indication de coronarographie. Il s'agit en effet d'une information purement anatomique, dont on sait depuis fort longtemps qu'elle a peu ou pas de valeur pronostique ; on n'a jamais pu montrer de relation entre le risque évolutif et le degré de sévérité anatomique qu'une sténose, même lorsque cette information est obtenue au moyen d'une coronarographie classique. L'existence d'une ischémie myocardique, au contraire, documentée par épreuve d'effort et/ou scintigraphie, doit conduire à la coronarographie et à la revascularisation, si elle est possible, car, a contrario des informations anatomiques, les données fonctionnelles sont un très puissant marqueur du risque évolutif. Cette réalité a conduit certains auteurs à évaluer le potentiel du scanner dans l'ischémie myocardique. En théorie, rien ne s'oppose à ce que l'existence d'une hypodensité réversible au moment d'un test de provocation de l'ischémie ne soit un témoin fidèle de cette ischémie. Les premiers travaux présentés cette année à Dallas vont dans ce sens, en sachant qu'il s'agit de résultats préliminaires qui portent sur de très courtes séries et que le problème de l'irradiation n'est pas réglé. Le scanner en urgence. Dans le domaine des applications concrètes et de la « vraie vie », plusieurs équipes ont présenté le résultat de leur expérience du scanner coronaire en urgence, dans le cadre de douleurs thoraciques aiguës ne faisant pas leur preuve sur le plan électrocardiographique et biologique. Les résultats confirment l'intérêt du scanner dans un contexte de prévalence basse : l'examen est remarquablement utile pour éliminer un problème coronaire aigu dès lors qu'on s'adresse à une population relativement jeune où la prévalence de la maladie est basse, ce qui constitue typiquement le recrutement des urgences tout-venant. Dans un contexte de prévalence élevée, qui constitue, en règle générale, le recrutement des unités de soins intensifs coronariens, le scanner coronaire est moins probant. Une proportion significative des examens est de lecture difficile (arythmies, calcifications), et on est fréquemment confronté à un athérome coronaire étendu, dont il est difficile de dire s'il est ou non à l'origine du tableau clinique. Le scanner peut être utile pour éliminer une embolie pulmonaire ou une dissection aortique, par exemple, mais ce point n'a pas été abordé. Visualiser les plaques. Le scanner coronaire, à la différence notamment de la coronarographie, permet de voir les plaques athéromateuses, même lorsqu'elles ne modifient pas de façon appréciable le calibre intraluminal du vaisseau. Ces lésions athéromateuses débutantes ne provoquent pas d'ischémie et ne sont donc pas justiciables d'un geste de revascularisation. Toutefois, leur prise en charge constitue sans doute l'ébauche d'une véritable cardiologie préventive. Le scanner est une technique fiable pour le diagnostic des plaques athéromateuses coronaires, pourvu que le vaisseau ait un diamètre supérieur à 1,5 mm. C'est ce que confirment plusieurs études comparatives avec l'échographie intravasculaire (IVUS- IntraVascular UltraSound), technique référence en la matière. Pour autant, il n'est pas actuellement possible de discriminer les plaques « à risque », susceptibles de se compliquer d'un syndrome coronaire aigu, même si certains travaux décrivent un aspect plus ou moins caractéristique des plaques observées immédiatement au décours d'un tel syndrome (lésion mixte, lipidique et calcifiée, associée à un remodelage positif). En ce qui concerne les plaques calcifiées, elles sont incontestablement, comme on l'a vu, une difficulté pour la lecture des images, mais elles représentent également une information utile : le score calcique témoigne de l'étendue de l'athérome coronaire total. Cette information est importante : dans une étude portant sur 25 253 sujets suivis 6,8 ± 3 ans, le score calcique est étroitement corrélé avec la survie sans accident. La crédibilité de l'étude est renforcée par le fait qu'il existe l'équivalent d'une relation dose/effet : plus le score calcique est élevé, plus le risque d'accident est important, avec un très remarquable parallélisme des courbes. A titre d'exemple, la survie à 10 ans est de 99,7 % pour les sujets qui ont un score calcique égal à zéro et de 87,8 % si le score est supérieur à 1 000. Peut-on faire régresser ces plaques ? La question fait l'objet d'un nombre croissant de travaux chaque année. Brièvement, il faut savoir que la progression spontanée du score calcique est d'environ 25 % par an. Les traitements hormonaux (chez la femme ménopausée) ne modifient pas cette progression. Il n'y a pas non plus de différence de progression du score calcique entre une faible et une forte dose de statine (10 vs 80mg d'atorvastatine). La seule étude objectivant un net ralentissement de l'évolution de l'athérome coronaire a été menée avec un IEC. Elle montre une progression de 3 % par an dans le groupe IEC, contre 38 % dans le groupe témoin (p < 0,01 ; 60 patients). A suivre... > Dr JEAN-MARC FOULT (1) Christian TF. Anatomy of an Emerging Diagnostic Test: Computed Tomographic Coronary Angiography. Circulation 2005;112:2222-2225. Le Quotidien du Médecin du : 02/12/2005