DOSSIER
32 jurisassociations 462 - 1er juillet 2012
L es structures de l’économie sociale
et solidaire doivent répondre à deux
spéci cités quant à leur modèle écono-
mique et leur assise  nancière: la nécessité,
d’une part, de trouver un équilibre entre la
rentabilité et le projet collectif et, d’autre
part, savoir faire face à une fragilité d’assise
nancière découlant trop souvent d’une
sous-capitalisation au démarrage, de faibles
rentabilités et donc de dif cultés d’accès à
des outils  nanciers.
Les bouleversements en cours, aussi bien
internes (forte professionnalisation, recours
à des activités lucratives, etc.) qu’externes
(contraintes budgétaires, concurrence
accrue, passage au marché public, etc.),
exercent de nouvelles pressions sur cet équi-
libre économique et social ainsi que sur cette
fragilité  nancière.
Gageons que les structures de l’économie
sociale et solidaire seront être créatives
fragilité du modèle économique empêche
le renforcement de l’assise  nancière des
structures, notamment pour les associations
qui démarrent trop fréquemment leur acti-
vité sans trésorerie. Elle est également un
obstacle à l’accès au crédit bancaire et donc
au développement des entreprises de l’ESS
dans de bonnes conditions. Les banques,
en effet, appréhendent la relation avec une
structure de l’ESS en termes de risques.
Pour prendre leur décision, elles s’appuient
sur la rentabilité – ou plutôt la capacité
d’auto nancement – et le niveau de fonds
propres de la structure – soit son assise  nan-
cière. Ces deux indicateurs pénalisent les
entreprises de l’ESS.
De plus, le développement du secteur
s’enregistre aujourd’hui dans un contexte
tendu, qui le fragilise davantage : croissance
économique ralentie par la crise, fortes
variations des aides aux emplois allouées
sur les 15dernières années, évolution des
priorités des politiques publiques et donc
des soutiens, concurrence des entreprises
lucratives, multiplication du nombre de
structures de l’économie sociale et solidaire
dans un environnement de  nancements
publics contraint, etc.
OUTILS FINANCIERS : BESOINS
ET SOLUTIONS EXISTANTES
Comme toutes les entreprises, les structures
de l’ESS ont des besoins de  nancement
tout au long de leur cycle de vie: capitaux
de démarrage, investissements, croissance,
besoins d’exploitation et de trésorerie.
Pour les raisons évoquées plus haut rela-
tives à la fragilité de l’assise  nancière et
du modèle économique, les entreprises de
l’ESS rencontrent des dif cultés d’accès au
crédit bancaire pour:
pour faire face à ces dif cultés et qu’elles
continueront de développer des outils
alternatifs pour répondre à leur besoin de
développement.
MODÈLE ÉCONOMIQUE : TENSIONS
ET FRAGILITÉS
Pour répondre à leur objet social, les struc-
tures de l’économie sociale et solidaire
construisent leur modèle économique en
combinant plus ou moins, selon les besoins,
le projet et la forme juridique, des ressources
économiques et  nancières diverses telles
que subventions, recettes issues d’activités
économiques, bénévolat, aides aux emplois,
ou encore participation des usagers.
Ce modèle est bien souvent fragile: la renta-
bilité est en général plus faible que celle des
entreprises lucratives, l’équilibre dépendant
fortement des politiques publiques. Cette
LES OUTILS FINANCIERS
DE L’ÉCONOMIE SOCIALE
ET SOLIDAIRE
Composante particulièrement dynamique et indispensable à
l’équilibre social de notre pays, l’économie sociale et solidaire, à
laquelle participent les associations, s’est beaucoup développée
ces 15 dernières années. Perçue comme un véritable acteur de
cohésion sociale, elle appuie le développement social mais
aussi économique des territoires et renforce les liens sociaux.
Zoom sur son assise fi nancière.
Article extrait de jurisassociations n° 462 du 1er juillet 2012. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz www.juriseditions.fr
1er juillet 2012 - jurisassociations 462 33
1. Ndlr : voir JA n° 457/2012, p. 16.
2. Ndlr : voir JA n° 445/2011, p. 19.
3. H. Sibille, « La voie de l’innovation so-
ciale », 26 janvier 2012 ; http://lelabo-ess.org
> « Échanger » > « Les tribunes du Labo ».
Innov’ESS, destinée à apporter des capi-
taux « patients » à des entreprises sociales
porteuses d’un projet socialement innovant.
Toutefois, les contraintes de liquidité et de
risque des systèmes basés sur l’épargne soli-
daire ne permettent pas le  nancement de
la partie concernant la recherche et le déve-
loppement. Les  nancements d’OSEO,
opérateur  nancier de l’État, sont quant à
eux limités à l’innovation technologique.
Sans doute y a-t-il lieu de croiser l’expertise
sectorielle des opérateurs spécialisés et la
capacité d’intervention des circuits de droit
commun du  nancement de l’économie
classique.
Concernant le changement d’échelle, on
assiste depuis quelques années à un mouve-
ment de concentration des entreprises de
l’ESS, notamment dans le secteur social.
Ces concentrations génèrent des besoins
de  nancement pouvant atteindre des
montants unitaires de plusieurs millions
d’euros.
pour renforcer l’assise  nancière, sous forme
d’apport remboursable, des entreprises de
l’économie solidaire qui créent ou consoli-
dent des emplois.
Le développement de ces outils  nanciers
pendant les 10 dernières années traduit le
fort besoin de  nancement de l’économie
solidaire ainsi que sa reconnaissance par un
public d’épargnants de plus en plus large.
Les pouvoirs publics participent également
à ce développement: les collectivités terri-
toriales  nancent l’accompagnement des
projets, sécurisant ainsi les  nancements.
De son côté, l’État a réservé une enveloppe
du programme d’investissement d’avenir
(ex-grand emprunt) de 100 millions d’euros
pour co nancer les projets de développe-
ment de l’économie solidaire.
ENJEUX : FINANCEMENT
DE L’INNOVATION SOCIALE
ET CONCENTRATION
Les acteurs de la  nance solidaire devront
une fois encore démontrer leur capa-
cité d’innovation pour accompagner les
nouveaux dé s auxquels l’ESS doit faire
face: le  nancement de l’innovation sociale
et le changement d’échelle des entreprises
de l’ESS.
L’innovation sociale3, dont fait tradition-
nellement preuve le secteur, demande des
investissements immatériels importants et
peu de réponses sont aujourd’hui appor-
tées. Citons l’initiative de la SIFA, qui a
créé, en 2011, une ligne de  nancement en
fonds propres dotée de 2 millions d’euros,
les opérations de crédit long terme (7 à
25 ans), qui sont généralement utilisées
pour des acquisitions immobilières ou les
gros travaux de rénovation du bâti. Ainsi, les
résultats de l’enquête menée par la CPCA
et France Active (CNAR Financement)1
montraient que seules les associations les
plus importantes, c’est-à-dire à partir de
2millions d’euros de budget, béné ciaient
de crédits long terme;
les opérations de crédit moyen terme (2à
7 ans), destinées à  nancer des investisse-
ments matériels (acquisition d’un bien)
ou immatériels (innovation, recherche
et développement, etc.). Par manque de
garantie et de visibilité, les crédits pour des
investissements immatériels ou de fonds de
roulement sont particulièrement dif ciles à
obtenir.
Face à ces dif cultés, les acteurs de la
nance solidaire combinent deux types de
solution:
la création de fonds de garantie spécialisés
tels que Sogama ou France Active pour faci-
liter l’accès au crédit bancaire;
la création de circuits de  nancement
propre, qui s’appuient sur la mobilisation
d’une épargne solidaire et qui permettent
de couvrir les besoins que les acteurs  nan-
ciers classiques ne prennent pas en compte.
La Foncière Terre de liens est un outil d’in-
vestissement solidaire destiné à collecter
l’épargne et à acquérir des terres pour
installer ou maintenir des porteurs de projets
agricoles respectant la charte de Terre de
liens2. La Société d’investissement France
Active (SIFA) mobilise l’épargne salariale
AUTEUR Fanny Gérôme
TITRE Chargée de mission,
France Active – CNAR Financement
Cet article a été rédigé avec le concours
de France Active et du CNAR Financement.
Les pouvoirs publics participent également au
développement des outils fi nanciers : les collectivités
territoriales fi nancent l’accompagnement des
projets, sécurisant ainsi les fi nancements. De son côté, l’État
a réservé une enveloppe du programme
d’investissement d’avenir de
100 millions d’euros
pour cofi nancer les projets de
développement de l’économie solidaire.
Article extrait de jurisassociations n° 462 du 1er juillet 2012. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz www.juriseditions.fr
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