Dyslexie et trouble de l`acquisition de la coordination

Les troubles spécifiques de l’apprentissage (lecture,
écriture ou mathématiques) et/ou du développe-
ment (langage ou motricité) sont maintenant inclus
dans le groupe des troubles neuro- développementaux
dans la nouvelle version du manuel diagnostique
et statistique des troubles mentaux (DSM) [1].
Ces troubles ont en commun de débuter pendant
les phases initiales du développement et d’être
fréquemment associés: on parle de comorbidités
ou de co- occurrences, suggérant des bases étiolo-
giques en partie communes. Certains auteurs
évoquent par exemple un déficit général de
l’apprentissage procédural à l’origine de l’ensemble
de ces troubles. D’origine neurologique, ils impli-
quent des facteurs génétiques et environnemen-
taux et répondent aux modèles de l’hérédité
complexe. Ils sont plus fréquents chez les garçons.
Ils persistent généralement à l’âge adulte, même si
des prises en charge adaptées, peuvent permettre
une compensation des troubles pour une partie
des individus.
Parmi les troubles spécifiques de l’appren-
tissage, la dyslexie développementale concerne 5 à
10 % des enfants d’âge scolaire selon les études
et, parmi les troubles moteurs, le trouble d’acquisi-
tion de la coordination ou dyspraxie développemen-
tale est retrouvé chez 5 à 6% des enfants âgés de
7ans. Cette fréquence élevée en fait un véritable
problème de santé publique avec un retentisse-
ment familial et personnel, académique, social et/
ou professionnel généralement marqué.
Les mécanismes cognitifs et cérébraux de ces
troubles restent en grande partie aujourd’hui
encore inconnus, mais les progrès réalisés ces
vingt dernières années permettent d’avancer un
certain nombre de faits étayés par la littérature
scientifique qui reste plus abondante pour la
dyslexie développementale que pour le trouble
d’acquisition de la coordination. L’implication de
la vision dans l’activité de lecture ou dans la motri-
cité a conduit naturellement à des hypothèses sur
le rôle de la vision comme facteur étiologique de
ces troubles. Si un tel rôle ne peut être exclu, la
littérature actuelle envisage la dyslexie comme un
trouble avant tout linguistique avec un rôle central
pour le déficit des processus phonologiques, et la
dyspraxie comme un trouble avant tout moteur
avec un rôle central pour le déficit dans les coordi-
nations motrices et/ou visuomotrices. Mais l’hété-
rogénéité rapportée par de nombreux auteurs
pour chacun de ces deux troubles peut suggérer
l’hypothèse de déficits multiples, parmi lesquels la
défaillance de certains processus visuels pourrait
être impliquée indépendamment des autres
déficits linguistiques ou moteurs.
Dyslexie
veloppementale [2, 3]
Définitions
La dyslexie développementale est un trouble spéci-
fique d’apprentissage de la lecture survenant de
façon inattendue chez un enfant doté d’une intelli-
gence normale, en dépit d’une instruction adéquate
et en l’absence d’une pathologie neurologique ou
Yves Chaix, Jean- Michel Albaret
Dyslexie et trouble de l’acquisition
de la coordination 7
2 Traitement de l’amblyopie et du strabisme + Divers
psychiatrique avérée ou de déficits neurosensoriels
auditifs ou visuels sévères.
La dyslexie est une des causes des difficultés de
lecture rencontrées chez l’enfant : elle se carac-
térise plus précisément par une difficulté à lire
rapidement et/ou de manière exacte des mots
écrits, associée le plus souvent à un déficit dans
la transcription de ces mêmes mots. Un trouble de
la compréhension du langage écrit peut en décou-
ler mais la difficulté initiale se situe au niveau de
l’identification de mots isolés (ou décodage).
L’identification des mots écrits selon le modèle
de lecture à double voie postule l’existence de
deux procédures de lecture qui peuvent être
en échec chez l’enfant dyslexique. Au début de
l’apprentissage de la lecture, l’enfant va devoir
apprendre à mettre en relation une lettre écrite (ou
graphème) et un son (ou phonème). Chez l’enfant
sans trouble de l’apprentissage, on observe une
automatisation progressive de la procédure de
conversion grapho- phonémique (ou assemblage),
automatisation qui va faire défaut chez le sujet
dyslexique. La seconde procédure de lecture met
en jeu un accès direct à la représentation ortho-
graphique du mot stockée en mémoire (ou adres-
sage). Ce lexique orthographique se constitue
progressivement au cours de l’apprentissage de la
lecture mais si la procédure d’assemblage précède
l’adressage du point de vue développemental, les
deux procédures sont en interaction permanente.
La majorité des enfants dyslexiques présentent
des difficultés pour lire ou écrire des mots inven-
tés ou logatomes, qui mobilisent la procédure de
lecture par assemblage. Un nombre plus limité
d’enfants présentent des difficultés uniquement
pour la procédure d’adressage.
Théorie phonologique
De nombreux travaux scientifiques, depuis la fin
des années 1970, ont permis de poser de manière
robuste l’hypothèse d’un trouble du langage à
l’origine de ces difficultés (théorie phonologique) [4].
La dyslexie concernerait la composante phonolo-
gique du langage et ces enfants pourraient présen-
ter une altération des processus phonologiques en
lien avec un déficit au niveau des représentations
phonologiques ou de l’accès à ces représenta-
tions. Au niveau clinique, le déficit phonologique
se caractérise par trois symptômes clés compre-
nant une réduction des capacités de conscience
phonologique, une limitation des capacités de
mémoire verbale à court terme, et un déficit
dans les épreuves de dénomination rapide. La
conscience phonologique est la capacité pour un
individu à reconnaître et à manipuler consciem-
ment les unités sous- lexicales qui constituent le
mot lors d’épreuves de comptage, d’inversion
ou de suppression de syllabes ou de phonèmes.
Dans cette théorie, c’est l’altération des processus
phonologiques qui empêche l’enfant de mettre
en place une procédure de conversion grapho-
phonémique efficace à l’origine d’une identifica-
tion du mot lente et/ou erronée.
Les études longitudinales montrent que les
capacités phonologiques avant l’acquisition de
la lecture sont prédictives du niveau de lecture
ultérieur. La complexité ou la transparence de
l’orthographe dans laquelle l’enfant apprend à lire
influence l’acquisition de la lecture et l’expression
de la dyslexie, néanmoins les études translinguis-
tiques comme l’étude européenne Neurodys [5]
concernant plus de 2000 enfants montrent que
quels que soient la langue et son degré de trans-
parence, les processus phonologiques (notamment
la conscience phonémique et la dénomination
rapide) sont de forts prédicteurs de survenue de
la dyslexie dans ces différentes langues (finlan-
dais, hongrois, allemand, hollandais, français,
anglais).
Au niveau cérébral, la théorie phonologique
est appuyée par les résultats d’études structu-
relles et fonctionnelles qui rapportent des anoma-
lies concernant les aires du langage le long de
la scissure de Sylvius de l’hémisphère gauche,
comprenant notamment un défaut d’activa-
tion des deux régions postérieures temporo-
occipitale et temporo- pariétale hémisphériques
gauches, et une activation anormale au niveau
de la région antérieure frontale inférieure gauche.
Deux récentes méta- analyses [6, 7] confirment le
défaut d’activation des régions temporo- pariétales
gauches qui sous- tendrait le déficit des proces-
sus phonologiques, et le défaut d’activation des
régions temporo- occipitales gauches qui serait
impliqué dans la lecture des mots par adressage.
Des anomalies dans la connectivité de ces diffé-
rentes régions sont également rapportées : soit
en montrant des anomalies dans l’orientation des
fibres de substance blanche de la région temporo-
pariétale gauche lors d’étude en tenseur de diffu-
sion (connectivité anatomique), soit en montrant
une connectivité altérée entre la région temporo-
occipitale gauche et les aires du langage (temporo-
pariétale ou frontale) lorsqu’on compare des
dyslexiques et des normo- lecteurs (connectivité
fonctionnelle). Les études en imagerie fonction-
nelle ayant contrôlé le niveau d’expérience pour la
lecture ou ayant étudié des jeunes enfants à risque
de dyslexie compte tenu des antécédents chez
leurs parents montrent que le défaut d’activation
des régions temporo- pariétales gauches apparaît
comme facteur causal, préexistant à l’apprentis-
Dyslexie et trouble de l’acquisition de la coordination 3
sage de la lecture, et non comme la conséquence
d’un défaut d’exposition à la lecture.
L’hypothèse du rôle causal de facteurs
génétiques dans ces anomalies cérébrales est
soutenue par la fréquence des antécédents dans les
familles (fratrie et parents au 1er degré) d’enfants
présentant une dyslexie développementale, par
les études de concordance menées chez les paires
de jumeaux mono- et dizygotes et par les études
de linkage. Plusieurs gènes ont été individualisés
(six à ce jour) dans la dyslexie développemen-
tale, impliqués pour plusieurs d’entre eux dans
les processus de la migration neuronale, pouvant
rendre compte ainsi des ectopies neuronales
retrouvées en particulier au niveau hémisphérique
gauche dans le cerveau des sujets dyslexiques et
par voie de conséquence expliquer le dysfonc-
tionnement de ces mêmes régions. Il s’agit toute-
fois d’une hérédité complexe avec un phénotype
clinique modulé par des facteurs environnemen-
taux.
Dyslexie et vision
Malgré la cohérence de la théorie phono-
logique, elle peut difficilement rendre compte de
l’ensemble des faits constatés dans la dyslexie
développementale dont celui de l’hétérogénéité [8].
Plusieurs facteurs participent à cette hétérogénéité
et en particulier l’existence de plusieurs sous-
types de dyslexie avec notamment des enfants qui
ne présentent pas d’atteinte de leurs processus
phonologiques.
De nombreuses données plaident pour l’exis-
tence de difficultés de traitement visuel associées
à la dyslexie développementale, permettant de
rappeler que la dyslexie a d’ailleurs était initia-
lement décrite par Morgan en 1896 comme
une « cécité verbale congénitale ». L’acte de
lire implique plusieurs processus de différents
niveaux dans le traitement visuel : des proces-
sus de bas niveaux impliquant des phénomènes
perceptifs et oculomoteurs, et des processus de
plus haut niveau impliquant notamment des
processus attentionnels. Un certain nombre de
constatations chez les sujets dyslexiques ont
suggéré un dysfonctionnement du système
magnocellulaire (théorie magnocellulaire) : en effet
une moindre sensibilité aux stimuli visuels faible-
ment contrastés (faibles fréquences spatiales) ou
en mouvement (hautes fréquences temporelles) a
été mise en évidence chez les sujets dyslexiques
en utilisant notamment une tâche de détection de
mouvement (RDK, Random Dot Kinematograms).
Des données neuro- anatomiques et fonctionnelles
ont été également mises en avant pour soute-
nir cette hypothèse. Cette hypothèse concernant
la modalité visuelle a été étendue à la modalité
auditive dans le cadre d’un déficit magnocellu-
laire amodal : les sujets dyslexiques présentant
également des difficultés dans le traitement des
signaux acoustiques caractérisées par des transi-
tions temporelles rapides pouvant être à l’origine
de l’altération des représentations phonologiques,
reprenant ainsi les travaux anciens de l’équipe de
Paula Tallal et donnant une explication à l’asso-
ciation de troubles phonologiques et visuels chez
les sujets dyslexiques. Toutefois, le principal
argument contre cette hypothèse explicative de la
dyslexie est que ce déficit ne concerne qu’un sous-
groupe limité de patients.
Par ailleurs, de façon incontestable, des anoma-
lies oculomotrices ont été mises en évidence chez
les sujets dyslexiques avec un nombre plus impor-
tant de saccades dans le sens de la lecture ou de
saccades régressives, ainsi que des fixations en
plus grand nombre et de durée plus longue. Mais
les travaux de deux équipes de recherche indépen-
dantes [9, 10] suggèrent que ces anomalies sont
secondaires au trouble de la lecture et non primi-
tives : il n’est pas constaté de différence pour le
temps et le nombre de saccades ou de fixations
lorsque l’on compare des sujets dyslexiques à des
sujets contrôles dans une tâche de recherche de
cible n’impliquant pas la lecture. Un argument
supplémentaire contre le rôle causal des troubles
oculomoteurs est l’absence de trouble de la lecture
chez des enfants présentant un trouble significa-
tif de l’oculomotricité rencontré dans certaines
pathologies malformatives. Des difficultés au
niveau de l’accommodation ou une insuffisance
de convergence sont rapportées dans la popula-
tion et plus fréquemment chez les enfants présen-
tant des difficultés de lecture en général : elles
peuvent induire une fatigue lors d’une fixation
prolongée mais n’interfèrent pas avec l’identifica-
tion des mots [11].
Depuis les années 2000, les travaux convergent
pour mettre en évidence l’existence d’un déficit
de l’attention visuelle chez certains dyslexiques.
Il ne s’agit pas d’un trouble général de l’atten-
tion et ces difficultés d’attention s’observent en
l’absence d’un trouble déficit de l’attention avec
ou sans hyperactivité (TDA/H). Ce trouble visuo-
attentionel regroupe deux entités distinctes : un
trouble impliquant les systèmes de l’orientation
visuospatiale [12] et un trouble de l’empan visuo-
attentionnel [13].
Les travaux de l’équipe italienne d’Andrea
Facoetti [12] ont montré l’existence chez les sujets
dyslexiques d’une lenteur dans le déplacement de
leur attention d’un point de fixation vers une cible
et un déficit de focalisation attentionnelle. Leur
4 Traitement de l’amblyopie et du strabisme + Divers
attention est déployée de façon plus diffuse expli-
quant l’absence d’effet excentricité de la cible :
les temps de réponse sont équivalents entre les
cibles les plus proches et celles les plus éloignées
du point de fixation. Ces troubles de l’attention
visuelle coexistent avec les difficultés phonolo-
giques précédemment décrites, ce qui a permis
de suggérer un trouble amodal du déplacement
attentionnel concernant les modalités auditives
et visuelles. Les auteurs retrouvent une corréla-
tion entre l’existence d’un déficit du déplacement
attentionnel et la lecture de logatomes. Finalement
ces travaux vont dans le sens d’une hypothèse
de déficits cognitifs multiples à l’origine de la
dyslexie : déficit des processus phonologiques
et déficit de l’attention visuospatiale retrouvés
comme facteurs prédictifs des futures capacités de
lecture lorsque ces capacités sont évaluées chez
les prélecteurs. L’altération des capacités d’atten-
tion visuospatiale suggère l’implication de la voie
visuelle dorsale et relance l’hypothèse magnocel-
lulaire.
Les travaux de l’équipe française de Sylviane
Valdois [13], font appel au modèle multi- traces
de lecture experte qui postule l’existence d’une
fenêtre visuo- attentionnelle permettant de lire
de façon globale les mots familiers ou connus
et de basculer en mode analytique par réduc-
tion de la fenêtre visuo- attentionnelle lors de la
lecture de mots inconnus ou de logatomes. Sur
le plan cognitif, l’empan visuo- attentionnel lors
de la lecture est le nombre d’unités orthogra-
phiques distinctes qu’un sujet peut traiter simul-
tanément dans une séquence de lettres. À partir
de l’étude de cas uniques puis sur des popula-
tions plus larges d’enfants français ou anglais
dyslexiques, les auteurs montrent l’existence de
sujets dyslexiques sans trouble phonologique
mais présentant une limitation de leur empan
visuo- attentionel déterminé par des tâches
spécifiques (tâches de report global et partiel).
Ainsi une réduction modérée de l’empan visuo-
attentionnel se traduira par un profil de dyslexie
de surface (difficultés à lire les mots irréguliers
mais respect de la lecture de logatomes), mais il
découlera d’une réduction plus importante de
cet empan un profil de dyslexie de type mixte
avec des difficultés pour la lecture de mots
irréguliers mais également de logatomes. Ce
trouble est corrélé à leur niveau de performance
en lecture et en particulier de vitesse de lecture.
Au niveau cérébral, les tâches de report mobili-
sent les régions pariétales supérieures de façon
bilatérale. Comparés à des sujets contrôles, les
sujets ayant une dyslexie visuo- attentionnelle
présentent un défaut d’activation du lobule
pariétal supérieur.
Prises en charge
La prise en charge dans la dyslexie développe-
mentale reposera sur au moins quatre principes.
Le premier principe est l’identification de la
dyslexie puisque toute difficulté de lecture n’est
pas synonyme de dyslexie. Poser un diagnos-
tic permettra à l’enfant et sa famille de mieux
comprendre les raisons des difficultés d’appren-
tissage et de diminuer l’anxiété initialement
générée chez l’enfant par l’incompréhension de
la part de l’entourage scolaire et familial face
à son échec scolaire et/ou ses difficultés. Le
deuxième principe est de corriger tout facteur
aggravant surajouté, comme par exemple un
trouble de la réfraction ou une insuffisance de
convergence, même s’il ne s’agit pas des facteurs
causaux de la dyslexie. Le troisième principe
est l’identification des facteurs cognitifs, isolés
ou associés entre eux, responsables du déficit
dans l’identification des mots qui caractérise la
dyslexie : déficits des processus phonologiques,
limitation de l’empan visuo- attentionnel ou
troubles attentionnels visuospatiaux. L’inden-
tification des processus cognitifs en cause est
réalisée lors des bilans orthophoniques et/ou
neuropsychologiques demandés par le médecin
afin de proposer des prises en charge rééduca-
tives adaptées. Les praticiens doivent être parti-
culièrement vigilants quant à la co- occurrence
des troubles qui peuvent justifier des prises en
charge multiples impliquant une coordination
de l’intervention des différents professionnels,
afin d’atteindre une efficacité optimale des
rééducations. Enfin le quatrième principe sera
d’aménager autant que possible l’environnement
pédagogique de l’enfant, cela passant par un lien
étroit entre les systèmes de santé et d’éducation,
à l’intersection desquels se situent les parents et
le médecin scolaire.
En matière de rééducation, la question de la
validité des méthodes rééducatives est soulevée
dans une optique de politique de santé publique:
dans ce cadre le praticien doit être informé des
méthodes ayant fait l’objet d’études et d’une
éventuelle validation aux yeux de la communauté
scientifique. Concernant la dyslexie développe-
mentale, de nombreux travaux ont montré l’effi-
cacité des méthodes de prise en charge basées
sur les processus phonologiques. Il s’agit d’un
entraînement explicite de la conscience phono-
logique et d’un travail systématique au niveau
de l’analyse phonétique des mots. Cette prise en
charge doit également comprendre des exercices
de lecture en proposant des textes de difficulté
croissante avec un travail sur l’accès au sens. Ces
méthodes sont d’autant plus efficaces qu’elles
Dyslexie et trouble de l’acquisition de la coordination 5
concernent des enfants jeunes, que l’entraîne-
ment est intensif (plusieurs séances par semaine),
administré en relation duelle ou en groupe de
petit effectif. Les effets positifs sont plus marqués
sur les capacités de lecture en termes d’exacti-
tude que de vitesse, qui reste souvent en deçà
des attentes pour l’âge malgré la rééducation.
Parmi les facteurs pronostiques à long terme
individualisés et indépendants du traitement, le
niveau de langage de l’enfant est l’un des plus
importants. L’effet des remédiations montre au
niveau cérébral une normalisation des activa-
tions de l’hémisphérique gauche avec des gains
de compétences qui se maintiennent au moins 1
à 2ans après la fin de la rééducation. Les autres
pistes rééducatives existant à ce jour n’ont pas
montré de résultats suffisamment convaincants
pour être proposées de façon systématique, qu’il
s’agisse de méthodes de rééducation basées sur
les entraînements intensifs avec de la parole
modifiée dans l’hypothèse d’un déficit du traite-
ment temporel des signaux acoustiques comme le
programme FastForWord, des traitements visuels
tels que le port de verres colorés ou prismes, des
traitements basés sur la motricité tels que les
rééducations vestibulaires ou la reproduction de
réflexes primaires.
Néanmoins certaines rééducations reposant sur
des bases théoriques solides (déficit de l’atten-
tion visuospatiale) pourraient être soutenues
dans les années à venir par des travaux montrant
leur efficacité. Ainsi l’équipe de Facoetti [14] a
rapporté récemment l’effet positif de l’utilisa-
tion des jeux vidéo d’action (entraînement de la
voie magnocellulaire dorsale) sur les capacités
de lecture des enfants dyslexiques. Ces résul-
tats restent à préciser et à confirmer. En accord
avec les travaux de l’équipe de Valdois, notre
équipe a évalué l’effet d’un entrainement multi-
modal (phonologique et visuo- attentionnel) au
niveau cognitif et cérébral avec la méthode des
potentiels évoqués. Ces travaux sont en faveur
de l’efficacité d’une telle méthode de rééduca-
tion combinée pour améliorer les capacités de
reconnaissance visuelle du mot chez l’enfant
dyslexique [15].
L’efficacité des adaptions pédagogiques est
rarement évaluée. Néanmoins Zorzi et al. [16] ont
montré récemment l’amélioration de la lecture
chez les enfants dyslexiques en augmentant
l’espace inter- mots dans un texte, ce qui a pour
but de réduire l’effet de « crowding » (difficulté
à reconnaître une cible dans le champ visuel
périphérique du fait de la présence d’autres objets
dans son voisinage) observé chez les dyslexiques,
et de leur permettre d’améliorer leur focus atten-
tionnel sur certaines lettres.
Trouble d’acquisition
de la coordination (TAC)
[17, 18]
Définitions
Les enfants présentant un TAC ont des difficultés
importantes et persistantes dans les activités de la
vie quotidienne du fait de déficits dans l’acquisi-
tion et l’exécution d’habiletés motrices coordon-
nées qui se traduisent par de la « maladresse »
(laisser tomber ou heurter des objets), de la
lenteur ou de l’imprécision dans l’exécution
de ces habiletés (utilisation des objets usuels et
du matériel scolaire, pratique du vélo ou d’une
activité sportive). Ce défaut d’acquisition n’est
pas dû à une affection neurologique (par exemple
paralysie cérébrale ou dystrophie musculaire), ne
renvoie pas à un trouble du développement intel-
lectuel ni à un déficit visuel, et apparaît malgré
des stimulations et des occasions d’apprentissage
adéquates. Ce syndrome d’origine développe-
mentale est une cause fréquente des symptômes
d’apraxie ou de dyspraxie motrice, symptômes
pour lesquels existent d’autres étiologies à côté du
TAC et notamment l’infirmité motrice cérébrale
[19]. L’apraxie est l’impossibilité de coordonner
des activités complexes pour atteindre un but
même si chacune des composantes de ces activités
peut être réalisée isolément de façon correcte. La
distinction entre apraxie et dyspraxie reposerait
alors sur un degré de sévérité.
Les difficultés motrices, qui affectent aussi bien
la motricité fine que globale, ont des répercus-
sions sur les activités de la vie quotidienne, les
apprentissages scolaires et les jeux. Elles s’accom-
pagnent souvent de difficultés émotionnelles et
interpersonnelles (victimisation, baisse de l’estime
de soi et du sentiment d’efficacité personnelle) et
peuvent avoir des conséquences psychopatholo-
giques (dépression, anxiété), d’autant plus qu’elles
perdurent jusqu’à l’âge adulte pour environ la
moitié des enfants diagnostiqués.
Les enfants TAC présentent un risque aggravé
de difficultés cognitives (attention et mémoire de
travail), d’hyperactivité, de troubles des appren-
tissages (lecture, orthographe), de difficultés dans
les habiletés sociales et non verbales [20]. Selon les
études, on peut estimer que près de 40 à 60% des
sujets dyslexiques ou des sujets TAC présentent
la double association dyslexie et TAC. La revue
récente de l’EACD [17] rappelle que le TAD/H est
associé au TAC dans 50% des cas. Les enfants TAC
s’engagent moins dans des activités physiques et
sportives, avec des répercussions sur la forme
1 / 10 100%

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