Ressources minérales potentielles des grands fonds océaniques

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Ressources minérales potentielles des grands fonds océaniques – Intérêt économique et implications géopolitiques
Yves Fouquet, Joël Etoubleau, Georgy Cherkashov, Nikolay Bortnikov
Fumeurs actifs dans le basin de Lau (Iles Tonga – Sud ouest Pacifique )
Les cheminées sur la gauche sont principalement constituées de sulfure de zinc et de cuivre et fortement concentrées en or.
Copyright Ifremer
État des connaissances
L'océan couvre 71% de la terre, et 60% est plus profond que 2000 m. Cet énorme domaine est encore relativement inconnu. Depuis trente ans, les explorations scientifiques ont identifié divers types de concentrations minérales que nous commençons seulement à apprécier pour leur intérêt économique. Les ressources minérales océaniques peuvent un jour devenir critiques pour les besoins mondiaux en matière première.
En domaine continental, beaucoup de gisements fortement concentrés et faciles à découvrir ont déjà été exploités. Les nouveaux dépôts seront plus profonds et auront des concentration en moyenne plus faible. Ils peuvent de plus être situés dans des pays instables ou à très grande distance des zones d'utilisation. Par exemple, la teneur des gisements de cuivre exploités sur les continents a progressivement diminué de 3% environ à 0,5% en un siècle. Ceci implique une augmentation de la taille des dépôts économiquement intéressants. Une conséquence est une augmentation en coût énergétique nécessaire à leur exploitation et une forte hausse de l'impact sur l'environnement.
Certains dépôts océaniques (sulfures polymétalliques) sont extrêmement riches et tous se trouvent directement sur le plancher océanique. En cas d'exploitation, ceci réduira au minimum les incidences sur l'environnement. En outre, contrairement aux installations minières terrestres, les installations spécifiques sur un navire sont déplacée extrêmement plus facilement. Ainsi, les petits dépôts très riches en métaux et qui ne seraient jamais exploités sur terre, pourront avoir un intérêt économique.
Actuellement, on distingue 8 groupes de matières premières dans les océans : Type
Localisation Matière première exploitable
Profondeur
Statut minier
Intérêt économique
1- Sel
côtier
sel
rivage
opérationnel
modéré
2- Sables et graviers
littoral
sable et gravier
peu profond
opérationnel
élevé
3- Diamants
marge continentale
diamants
< 250 m
opérationnel
élevé
4- Placer marins
plages, eaux peu
profondes
étain, or, chrome, zirconium, terres rares,
titane
peu profond
opérationnel
modéré
5- Phosphates
eaux peu profondes et
anciens volcans
phosphate
peu profond à profondeur moyenne
non opérationnel
faible
6- Nodules
grandes plaines abyssales
cuivre, cobalt, nickel
4500 à 5500 m
ressources potentielles
modéré
7- Croûte de manganèse
Anciens volcans
intraplaques
cobalt, cuivre, platine
1000 à 2500 m
ressources potentielles
modéré à élevé
8- Sulfures
hydrothermaux
rides volcaniques
cuivre, zinc, argent, or,
cobalt, plomb
1000 à 4000 m
ressources potentielles
élevé
Sulfures polymétalliques hydrothermaux
Des dépôts fortement concentrés en métaux se forment sur le plancher océanique quand les fluides hydrothermaux (350°C) sont rapidement refroidis au contact de l'eau de mer (2°C). Ce type de dépôt se localise typiquement le long des 60 000 kilomètres des dorsales océanique, lieux d'une intense activité volcanique et tectonique. Les premières minéralisations associées à des saumures chaudes (70°C) ont été observées en 1962 à l'axe de la mer Rouge.
Les premiers fumeurs noirs (350°C) ont été découverts sur la dorsale du Pacifique Est en 1977. Après 30 ans d'exploration, environ 150 sites hydrothermaux sont connus dans les océans indiquant des processus très actifs d'extraction, de transport et de concentration des métaux. De fortes différences de tailles et de compositions existent entre les sites. Ces différences sont contrôlées par des processus physique (ex : variation de la température d'ébullition selon la profondeur), et surtout par la nature des roches traversées par les circulations hydrothermales (roches volcaniques variées, roches du manteau, sédiments).
Ce type de minerai est bien connu dans les gisements fossiles exploités à terre et formés sous la mer au cours le temps géologiques. Une partie importante du cuivre, du zinc, de l'argent et l'or sont produits à partir de ce type de gisements, dont certains concentrent également le cobalt et le baryum. En raison de l'augmentation de la température d'ébullition avec la profondeur, les fluides les plus profonds ont une plus grande capacité à transporter les métaux. Dans l'océan actuel, les dépôts les plus riches se trouvent entre 1000 et 4000 m de profondeur de l'eau.
L'envolée du cours des matière première et des métaux (près de 350% en 3 ans pour le cuivre et le zinc) a fortement relancé l'exploration pour de nouveaux gisements. Les domaines océaniques ne sont pas absents de ces explorations. L'intérêt à court terme porte sur les minéralisations très riches telles que les minéralisations sulfurées hydrothermales.
L'industrie commence à s'intéresser à ces dépôts depuis seulement quelques années. La compagnie Nautilus réalise des travaux intensifs d'évaluation des ressources au nord de la Papouasie par des profondeurs de près de 2000 m. Elle vient de déposer des demandes de permis autour des îles Fiji et des Iles Tonga. Une seconde compagnie, Neptune Minéral, se focalise sur le nord de la Nouvelle Zélande. Le Japon a mené des investigations poussées pour évaluer des minéralisations hydrothermales riches en cuivre et plomb dans ses eaux économiques. La Russie soutient un important programme d'exploration et d'inventaire des ressources minérales hydrothermales le long de la dorsale Atlantique. Enfin, la Chine (Comra) lance un programme d'explorations pour rechercher les ressources minérales des grands fonds. L'envolée du cours des matière première et des métaux (près de 350% en 3 ans pour le cuivre et le zinc) a fortement relancé l'exploration pour de nouveaux gisements. Les domaines océaniques ne sont pas absents de ces explorations. L'intérêt à court terme porte sur les minéralisations très riches telles que les minéralisations sulfurées hydrothermales.
L'industrie commence à s'intéresser à ces dépôts depuis seulement quelques années. La compagnie Nautilus réalise des travaux intensifs d'évaluation des ressources au nord de la Papouasie par des profondeurs de près de 2000 m. Elle vient de déposer des demandes de permis autour des îles Fiji et des Iles Tonga. Une seconde compagnie, Neptune Minéral, se focalise sur le nord de la Nouvelle Zélande. Le Japon a mené des investigations poussées pour évaluer des minéralisations hydrothermales riches en cuivre et plomb dans ses eaux économiques. La Russie soutient un important programme d'exploration et d'inventaire des ressources minérales hydrothermales le long de la dorsale Atlantique. Enfin, la Chine (Comra) lance un programme d'explorations pour rechercher les ressources minérales des grands fonds. Elle vient de découvrir (mars 2007) un premier site hydrothermal dans l'océan Indien.
Tous les permis déposés ont été déposés sur des champs hydrothermaux découverts au cours de campagnes scientifiques. Ces travaux impliquent des recherches scientifiques amont visant à comprendre la diversité et le fonctionnement des systèmes, les contrôles géologique conduisant à la formation des dépôts les plus riches et les plus gros, et le lien avec les communautés biologiques et bactériennes inféodées aux sources hydrothermales actives.
En 2006, la compagnie australienne Nautilus a consacré quatre mois de campagnes pour évaluer les dépôts sulfurés associés au volcanisme sous-marin dans le bassin de
Manus, dans les eaux économique de la Papouasie. Au cours de ces campagnes, des opérations de cartographie, de prélèvements d'échantillons à l'aide d'un ROV, et d'opération de géophysique visant à estimer le volume des dépôts, ont été effectuées. Deux mois de campagnes (4 millions de dollars) ont été consacrés à des forages pour évaluer la composition des dépôts. Les résultats indiquent des minéralisations particulièrement riches en cuivre et or.
A l'issue de ces travaux, fin 2006, la compagnie Nautilus vient d'annoncer la mise en construction d'un navire de 190 m (le Jules Verne). L'objectif est de lancer
l'exploitation des gisements du bassin de Papouasie à partir de 2009. Cette exploitation constituera ainsi la première opération mondiale d'exploitation minière dans les grands fonds. Les gisements du bassin de Manus se situent à des profondeurs proche de 2000 m.
En parallèle, au début du mois de janvier 2007, 18 nouveaux permis d'exploration viennent d'être déposés sur les sites hydrothermaux à l'ouest de îles Fiji et près des îles Tonga. Le choix des zones est basé sur la découverte de ces sites au cours des années 90 dans le cadre de coopérations franco-Japonaise et franco-allemande.
Cheminée riche en minéraux de cuivre (jaune ) formé à partir d'un fluide de 350° C.
Bassin de Lau - sud-ouest Pacifique
Copyright Ifremer – campagne Nautilau
Un point important concerne la législation dans les eaux nationales et internationales et la coordination des actions industrielles et de l'exploration scientifique menées sur les mêmes zones. L'ISA (International Seabed Authority ) mène actuellement une réflexion et une analyse pour réguler une exploitation éventuelle de ces ressources hydrothermales (minérales et biologiques) dans les eaux internationales.
Les dépôts connus sont à différents niveaux d'investigations scientifiques. Considérant que seuls quelques pourcentages de l'océan profond ont été explorés, il est nécessaire de continuer les investigations scientifiques visant à comprendre les processus géologiques, chimiques et biologiques contrôlant la formation, la taille et la diversité de ces minéralisations. Un autre aspect concerne les études d'impact. La définition d'un état de référence biologique visant à comprendre l'impact des exploitations éventuelles sur l'activité biologique des grands fonds est une étape importante de l'arrivée de l'industrie dans les grands fonds.
Toutes ces recherches ne pourront être menées par un seul pays. Les coopérations sont importantes. L'Europe devra se positionner du point de vue géopolitique par rapport aux autres grands pole mondiaux, et financer enfin des recherches dans les eaux internationales au lieu de se restreindre, comme c'est le cas actuellement, à ses seules eaux économiques.
Actions durant Serpentine
Les actions de la campagne Serpentine s'intéressent plus particulièrement aux dépôts associés aux roches du manteau. Les résultats obtenus au cours de la campagne confirment que ces dépôts sont particulièrement riches en cuivre et zinc par rapport aux dépôts associés aux roches volcaniques. La découverte du site le plus profond connu dans les océans permettra également de mieux comprendre l'influence de la pression sur le dépôt des métaux. Enfin, l'exploration du site Krasnov , le plus gros dépôt de sulfures massif actuellement connu dans les océans, et la réalisation des cartes bathymétriques haute résolution, nous permettra d'avancer sur la compréhension du lien entre les activités volcaniques et tectoniques, et la formation des accumulations sulfurées les plus riches et les plus importantes.
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