les dossiers du Loss Prevention Unit les éoliennes on shore réinventons l’assurance Le 19 septembre 2010, en France, dans la Drôme, une éolienne s’emballe et prend feu suite à un fort coup vent sur le secteur. L’origine de ce sinistre est attribuée au frein automatique hydraulique qui n’aurait pas rempli sa fonction. Pour quels motifs ? Il est probable qu’un composant électronique n’était pas convenablement connecté et n’enregistrait donc pas les données réelles. Cette anomalie, suivie de la surchauffe des composants mécaniques, a provoqué l’incendie de la nacelle. En outre, les fortes vibrations qui en ont résulté, subies par l’installation, ont gravement endommagé la fondation de la tour. Le remplacement de l’éolienne va prendre de nombreux mois. Le préjudice matériel total est de 4.700.000 EUR, à majorer des pertes d’exploitation. Cet exemple démontre que ce nouveau type de production d’énergie engendre de nouveaux risques et des sinistres plus importants qu’on ne pourrait imaginer. Mais qu’est ce qu’une éolienne et quels sont ces risques ? Ce cahier devrait permettre d’y voir plus clair. Qu’est-ce qu’une éolienne ? Une éolienne est un équipement qui transforme l’énergie cinétique du vent en énergie mécanique et ensuite électrique. Ce cahier se rapporte aux éoliennes de moyenne et grande puissance - les plus exploitées industriellement - et qui sont généralement des modèles à axe horizontal. Une éolienne se compose essentiellement des éléments suivants : • le mât qui place le rotor à une hauteur suffisante pour permettre sa rotation dans une zone de vent plus fort et plus régulier qu’au sol. Il supporte la nacelle et le rotor. Le mât abrite parfois une partie des équipements électriques/électroniques et toujours les câbles transportant l’électricité vers le réseau. Fait de métal ou de béton post-contraint, il est fixé sur une fondation en béton fortement armé, elle-même souvent ancrée au sol par des pieux. • la nacelle, montée au sommet du mât et qui abrite les composants mécaniques, hydrauliques, pneumatiques et électriques/électroniques. La nacelle pivote selon la direction du vent. • le rotor (A), composé de plusieurs pales (en général 3) et du nez de l’éolienne, est fixé à la nacelle. Le rotor entraîné par l’énergie cinétique du vent convertit celle-ci en énergie mécanique. Les pales empruntent les technologies de l’aéronautique et sont actuellement fabriquées à partir de matériaux composites (résine polyester et fibres de verre ou de carbone). • le générateur (B) qui transforme l’énergie mécanique produite par le rotor en énergie électrique. La vitesse de rotation du rotor (12 à 16t/min) est cependant insuffisante pour le bon fonctionnement du générateur (1.500 à 2.000 t/min). Un système mécanique, le multiplicateur (C) est dès lors intercalé entre le rotor et le générateur. • des éléments annexes comme : • le convertisseur (D) électronique de puissance qui ajuste la fréquence du courant produit par l’éolienne à celle du réseau électrique auquel elle est raccordée (50 Hz en Europe) tout en permettant au rotor de l’éolienne de tourner à vitesse variable en fonction de la force du vent ; F A B D C E image © Repower Systems SE • le transformateur (E) de puissance situé dans la nacelle ou en partie basse du mât, qui permet de porter la tension de l’électricité produite par le générateur (600 à 1.000 V) à la tension du réseau (15 à 30.000 V). Un poste de distribution au sol destiné à injecter l’énergie électrique produite dans le réseau, complète l’installation. L’éolienne est dotée de systèmes automatiques qui permettent notamment : • d’orienter le rotor perpendiculairement à la direction du vent afin d’en extraire le maximum de force motrice (yaw system) ; • de modifier l’angle d’incidence des pales (pitch) par rapport au vent afin, d’une part, d’optimiser la vitesse de rotation du rotor et donc la récupération d’énergie, mais aussi de ralentir celui-ci en cas de vents trop violents ; • d’arrêter complètement la rotation du rotor par un frein automatique (F). Grâce à ces automatismes et à un système de supervision à distance, la sécurité de fonctionnement de l’éolienne est assurée en continu car elle peut être arrêtée automatiquement et très rapidement en cas de nécessité. La plage de fonctionnement, en vitesse de vent, varie de 15 à 90 km/h (voire 120 km/h). Pour la plupart des éoliennes, au-delà de 90 km/h, des problèmes de sécurité mais aussi d’usure ou de fatigue anormale apparaissent. Une éolienne se caractérise essentiellement par sa puissance exprimée en MW qui est en relation directe avec sa hauteur et surtout le diamètre des pales. S’il y a encore peu de temps, on parlait d’éoliennes de 1,5 à 2 MW, aujourd’hui, on construit couramment des modèles de 5 à 7 MW avec un diamètre de pale de plus de 100m. Le coût de construction et d’installation de telles machines suit bien entendu la même tendance. Quels sont les principaux types de sinistre ? Dans ce dossier, seuls les dommages aux installations et leurs pertes consécutives sont traités à l’exclusion notamment des dommages aux personnes et aux tiers. En fréquence, la première cause de sinistre est la perte de tout ou partie d’une pale occasionnée soit : • par une faiblesse de la structure de la pale ou de sa fixation au moyeu, • par une mise en survitesse de la machine. La survitesse, causée par une défaillance du système de sécurité par vent violent, amène rapidement des contraintes inacceptables au sein des pales et de leur fixation au moyeu. Les accidents de pales peuvent être limités à l’éjection d’un morceau de pale. Mais, du fait des contraintes et vibrations violentes qui en résultent, l’ensemble des pales et de la nacelle peut se trouver déséquilibré et entraîner la ruine de la machine. La foudre constitue une deuxième cause d’incidents. Le mât lui-même, malgré ses protections, peut être foudroyé avec des conséquences, en général, sur tout le matériel électrique et être à l’origine d’un incendie. Les pales qui se chargent d’électricité statique peuvent être également foudroyées. Ce phénomène entraîne parfois l’explosion de la pale, constituée essentiellement d’une enveloppe creuse en matériau composite. L’échauffement anormal des parties mécaniques, par suite d’une défaillance des systèmes de lubrification ou de refroidissement, ou encore en raison d’une «survitesse» du rotor engendrant une vitesse de rotation inacceptable pour la génératrice ou le multiplicateur, peut conduire à des sinistres majeurs tout comme la surchauffe du système de freinage d’urgence voire la production d’étincelles. L’association avec des fuites d’huiles accidentelles sera de nature à provoquer un important risque d’incendie. Les conditions atmosphériques peuvent également engendrer des incidents comme la formation de couches de givre sur les pales entraînant la chute ou le jet de blocs de glace ou encore générant des balourds pouvant endommager tout ou partie de la structure. Enfin, le non-respect des règles d’exploitation et de maintenance (insuffisance des points contrôlés, fréquence trop faible, manque de contrôle après travaux, …) est également à l’origine de plusieurs sinistres. La période de maintenance est aussi une période critique. Ainsi, les travaux à point chaud, la manipulation des huiles, la mise hors circuit de dispositifs de sécurité sont autant de sources d’aggravation. Dommages matériels Les principaux dommages possibles sont le bris (du mât, des pales, des machines tournantes), l’incendie, les désordres aux fondations - causés notamment par la tempête, le givre, la foudre, l’action de l’électricité et la surchauffe. Les éoliennes se distinguent des autres installations de production d’énergie – traditionnelles ou alternatives – par le fait qu’elles sont exposées à un risque élevé de perte totale. Les raisons de cette vulnérabilité résident entre autres dans un(e) : • forte concentration de valeur dans la nacelle, • concentration de sources d’inflammation potentielles dans la nacelle, • exposition directe aux phénomènes naturels (foudre, tempête, grêle, gel,…) • fonctionnement automatisé sans présence humaine et piloté à distance • impossibilité de lutter manuellement contre le feu étant donné, entre-autres, les difficultés d’accès (situations isolées, hauteur) Quelles que soient la nature et l’importance du sinistre, la reconstruction peut générer des frais aussi élevés que les coûts initiaux, voire même les dépasser. Pertes d’exploitation Les dommages matériels évoqués entrainent généralement de longues périodes d’arrêt des installations avec des conséquences financières importantes. D’autres facteurs influencent le délai d’interruption notamment : • l’accord des autorités locales, • la proximité du fabricant et du réparateur, • l’accès pour les engins de manutention, • l’évolution rapide de la technologie rendant le remplacement de certains composants difficile voire impossible. Quelles sont les principales mesures de prévention ? Les mesures de prévention s’appliquent tant aux éoliennes qu’à leurs équipements connexes (cabine d’injection sur le réseau, câbles de raccordement, …). Le tableau synoptique en dernière page brosse un large mais non-exhaustif panorama des mesures de prévention liées aux principaux risques. Parmi celles-ci, attirons l’attention sur certaines mesures matérielles telles que : • l’emploi de matériaux non inflammables et d’huiles avec un point d’éclair élevé ; • le placement d’un système de détection d’incendie rapide le plus généralisé possible et couvrant au minimum l’ensemble des points critiques (tels que les armoires de commandes, le convertisseur, le générateur, le transformateur, les faux-planchers avec câbles et conduites…). Ces systèmes devront entraîner la transmission de l’information vers l’extérieur (centrale de surveillance) ainsi que les asservissements adéquats en vue de mettre l’éolienne en sécurité ; • le placement de systèmes d’extinction automatique protégeant l’ensemble de la nacelle ou au minimum les éléments critiques cités au point précédent. Les principes de transmission et d’asservissement seront similaires à ceux de la détection ; • la protection appropriée contre la foudre au niveau de la nacelle et des pales ainsi que des principaux appareils électriques. De bonnes mesures matérielles ne sont rien sans un bon monitoring et un contrôle permanent des paramètres principaux (température de l’huile, l’intensité du courant, …) avec un arrêt automatique du rotor et une déconnexion complète du système d’alimentation électrique. La qualité et la fréquence adéquate de la maintenance préventive des éoliennes participent aussi dans une grande mesure à la sécurité et à la préservation des équipements. La maintenance prévisionnelle est généralement réalisée selon les prescriptions des constructeurs mais peut éventuellement dépasser ces impositions (en temps ou en nature) afin d’accroître la sécurité de fonctionnement. Elle doit porter au minimum sur l’analyse des huiles, l’analyse vibratoire des équipements tournants, l’analyse thermographique et les contrôles électriques • analyse des huiles : les éoliennes présentent des besoins importants en lubrification. L’analyse des huiles permet de détecter des anomalies telles que l’usure par abrasion, la contamination par des particules internes ou externes à l’éolienne. • analyse vibratoire : les machines tournantes que sont les éoliennes sont exposées à des contraintes importantes pouvant engendrer à terme des vibrations anormales menant à des pannes graves ou des ruptures de matériaux. Ces vibrations peuvent se transmettre à toute la structure et même affecter les fondations. Les principaux défauts mis en évidence par l’analyse vibratoire sont le déséquilibre des lignes d’arbre, la dégradation des accouplements et l’usure des roulements. • thermographie : elle permet de détecter durant le fonctionnement normal de l’éolienne des surchauffes d’origine mécanique (rotor, multiplicateur, arbre lent) ou d’origine électrique (moteur, alternateur, tableaux, transformateur, condensateurs, câbles…). Conclusion Avec l’apparition des règlements et des normes (ex. : Guidelines CFPA-Europe, IEC-61400-1,…), on peut penser que les éoliennes actuelles sont plus « sécurisées » que celles de la première génération. Toutefois, la probabilité d’un sinistre majeur reste bien réelle et souligne la nécessité d’analyser rigoureusement chacun des projets et de les évaluer selon des critères d’assurance. L’introduction de mesures de prévention telles que précitées et de gestion des risques peut réduire considérablement la fréquence ou l’importance du sinistre. On peut regretter que la plupart des mesures de protection et/ou prévention soient souvent des options non prévues dans les offres de base des constructeurs. Elles devraient être intégrées dès le départ de l’étude. En effet, la compacité et la complexité des installations rendent toutes modifications ultérieures difficilement réalisables. Revue des risques et des mesures de prévention Période de montage - essais Risques potentiels Mouvements du sol Environnement (végétation, bâtiments existants) Situation géographique (zones sismiques, inondables, tornade, foudre, sel, gel, ..) Constructeur / monteur Câbles et équipements vers réseau Vandalisme Protections possibles Essais de sol au niveau de la fondation, stabilisation et/ou empierrement des accès pour les engins de chantier Création d’une zone dégagée adaptée aux dimensions des pales Vérification de la cartographie de la zone Vérification des références de chantier selon la complexité du montage (pales en un ou plusieurs éléments par ex.) Limiter les biens à monter à une seule journée de travail - Limiter la longueur de la fouille ouverte Analyse de l’étude d’incidence Période d’exploitation : risques externes Risques potentiels Environnement (végétation, incendie) Situation géographique (zones sismiques, inondables, …) Tempête Grêle Gel / glace Foudre Corrosion (environnement salin - d’origine électrique) Heurts d’aéronefs + d’oiseaux Heurts de véhicules terrestres Vandalisme/Attentat (dommages aux pales et à la cabine) Travaux de maintenance et de réparation Rupture du réseau électrique public Mesures de prévention Sols rendus non combustibles par l’entretien des abords dans un périmètre de sécurité fixé en fonction du diamètre du rotor Vérification de la cartographie de la zone, protection du matériel au pied de la tour (surélevé ou placé en nacelle) Orientation des pales : système actif de réglage de l’angle d’incidence des pales (pitch), qualité des pales (matériaux utilisés), débrayeur, sécurité de fonctionnement en mode tempête. Vitesse maximale des vents prise en considération pour le dimensionnement Nature des matériaux utilisés pour les pales Chauffage des pales, mesurage en continu du balourd avec dispositif d’arrêt automatique Evaluation des risques maximum possible selon la norme IEC 62305. L’étude des risques doit englober la nacelle, les pales, les installations au sol en ce compris les raccordements au réseau. Choix des matériaux (acier, matériau composite) / système évitant la présence d’humidité dans les équipements techniques / protection cathodique Zones d’approche aérienne, suivi ornithologique Consignes d’exploitation des sites/terrains proches - clôtures Alarme intrusion et protections mécaniques des accès aux équipements Permis de feu, formation du personnel, moyens de première intervention, présence et contrôle d’un engin de levage incorporé Fonctionnement en court-circuit possible pendant les microcoupures (2 à 3 sec) Déconnexion / arrêt / redémarrage / reconnexion automatique en cas de coupure prolongée Alimentation de secours des équipements de régulation / contrôle Période d’exploitation : risques internes Risques potentiels Incendie Electricité – Explosion d’origine électrique Surtensions de foudre Phénomènes électromagnétiques Courants parasites (harmoniques, …) Bris hydraulique et mécanique (échauffement, fuite) Vibrations Matériaux utilisés Système de refroidissement Système de lubrification Manque de surveillance Manque de maintenance Vieillissement de l’installation Emballement (déficience du système de freinage) Synchronisation avec le réseau Mesures de prévention Moyens de 1ère intervention, dispositif de détection automatique d’incendie, dispositif d’extinction automatique conforme (CO2 , gaz inerte, water spray, …), asservissements adéquats (mise en sécurité de l’éolienne), compartimentage coupe-feu (ex. transfo) Contrôle annuel par Organisme Certifié (HT, BT, calibre du disjoncteur principal, diélectrique, examen thermographie) Type de transfo et de condensateurs (secs, huile) – Qualité de l’isolation des câbles électriques Protection générale d’entrée (éclateurs) complétée par une protection « fine » au niveau des différents équipements Protection et compatibilité électromagnétiques des organes de régulation et de détection Présence de filtres Analyse des huiles, rétention, choix de l’huile Mesure en continu au niveau du rotor, des pales, du multiplicateur, du générateur, du mât,…- surveillance de la délamination des pales, fiabilité des fixations des câbles et canalisations Comportement au feu (plastiques, isolants, …), qualité des câbles (dégâts de fumées …) Contrôle des températures ambiantes et locales – vérification de l’efficacité du système de ventilation forcée Mesure en continu des pressions, températures et niveaux Télésurveillance (controlroom) : vers qui, procédure d’intervention, délai d’intervention, permanence 24h/24 ? Contrat de maintenance et sa portée, vérification de l’état des pales, contrôle des soudures, post-contrainte, verticalité, mesure de vibrations Age du matériel et upgrades éventuels Mise en sécurité rapide (inclinaison des pales et orientation du rotor) + alimentation électrique de secours du frein mécanique Mise en puissance progressive en maintenant des gradients de puissance admissibles 800.03.75 - 01-2012 E.R. Camille Gillon, AXA Belgium SA, Blvd du Souverain 25 - 1170 Bruxelles www.axa.be AXA Belgium, S.A. d’assurances agréée sous le n° 0039 pour pratiquer les branches vie et non-vie (A.R. 04-07-1979, M.B. 14-07-1979) Siège social : boulevard du Souverain 25 - B-1170 Bruxelles (Belgique) Internet : www.axa.be – Tél. : (02) 678 61 11 – Fax : (02) 678 93 40 N° BCE : 0404.483.367 RPM Bruxelles