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États quantiquesduneutron
dansle champ de pesanteur :
unlaboratoirepour létude
de lagravitation
Konstantin Protassov
protasov@lpsc.in2p3.fr
Laboratoiredephysiquesubatomiqueetde cosmologie (LPSC),UMR 5821,UniversitéJoseph Fourier/CNRS/Institut
NationalPolytechnique,Grenoble
Létude de lagravitation danslessystèmesmicroscopiquesest ungrand défi exrimentaletunexcellent
laboratoirepour testerlesthéoriesquantiquesmodernes.La couverterécentedesétats liésduneutron dans
le champ de pesanteur représenteunpasimportantdanscettevoie.
agravitation est certainement,parmi toutesles
interactionsde lanature,laplus universelle,laplus
évidenteet,paradoxalement,laplus malconnue
exrimentalement.Tous lescorpsmatérielsainsiqueles
photonssontsensiblesàcetteforce,maissicetteinter-
action est bien étudiée pour lesobjets macroscopiques,
elle lest beaucoupmoinsdansle monde microscopique.
Onlecomprend assezfacilementcarcetteinteraction est
trèsfaible. Unexemple parlantde lafaiblesserelativedela
gravitépourraitêtrelatome dhydrogène,composéd’un
proton etd’ulectron,pour lesquelslattraction dueàla
forclectriqueest 10 40foisplus fortequecelle dueàla
gravitation. Deplus,dansle monde microscopiqueelle est
égalementconcurrencée pardeux autresinteractions
forteetfaible –quisontdesinteractionsàcourteportée.
La deuxième raison de notrecompréhension incom-
plètedelagravitation est plutôtdordreconceptuel :nous
avonstoujours beaucoupdemalàlintégrerdanslesthéo-
riesquantiquesmodernesetàconstruireune théorie qui
unifie lesquatreinteractionsfondamentales.Nous ne
sommespasen mesurededonnerune formulation parfai-
tementcohérentedelathéorie quantiquedelagravita-
tion :laraison essentielle tientàcequelagéométrie de
lespace-tempstientlieudinvariantstructurel pour la
théorie quantiquedeschampstandisqu’elle est lavariable
dynamiquedelarelativitégénérale. Au-delàdesdifficultés
techniquesde construction desmodèles,le problème cen-
tralsetrouvedoncdansune radicale divergenceconcep-
tuelle queles«astuces»usuellementemployéesen
physiquedeshautesénergiesne permettentpasde lever.
Cest pourquoi toutenouvelle exriencepouvantaborder
lagravitation dansle monde microscopique–lemonde de
lacaniquequantique–susciteunintérêtparticulier.
La signaturelaplus explicited’unphénomène quanti-
queest son caractèrediscretet,en particulier,unsystème
quantiquedoitprésenterdesénergiesne pouvantprendre
quedesvaleurs bien définies.La faiblessedelinteraction
gravitationnelle rend ladifférenceentredeux énergies
quantiquepermisestrèsfaible,etainsitrèsdifficilement
tectable.
Danslaconception d’une exriencequicherche àmet-
treevidencedesphénomènesquantiquespour unsys-
tème gravitationnel,le problème majeur restelacessité
de s’affranchirde linteraction coulombienne. Cettecondi-
tion imposed’utiliserdesparticulesneutres.Aujourdhui,
lesphysicienssaventbien maîtriseretmanipulerlesato-
mesneutresetlesneutrons,excellents candidats pour ce
type détudes.Malheureusement,malgréleur neutralité
électrique,lesatomesdemeurentsensiblesàune interac-
tion électromagnétiquedueàleur polarisabilité.
Lautrecandidat,le neutron,est parfaitementneutre.
Deplus,sadurée de vie (de lordredequinzeminutes)est
suffisammentlonguepour permettresamanipulation.
Cependant,saneutralitécrée unautreproblème :un
neutron issu d’une fission nucaireaune fâcheuseten-
danceàs’échapper.Ilpossède une grande vitesseetpénè-
treainsifacilementdépaissescouchesde matre. Pour
lapprivoiser,il faut le «ralentir»etle «canaliser»,afin de
produiredesneutronsde trèsbassnergie appelésneu-
tronsultrafroids(UCN, voirencadré ). Cesneutronspou-
vantêtreconfinésdansdespiègesmatériels,il est possible
détudierleur comportementdansle champ gravitationnel.
Système exrimental
Lidée de fairerebondirdesneutronsultrafroidsau-
dessus d’unmiroir,pour étudierleur comportement
dansle champ de pesanteur,aétésuggérée pardeux phy-
siciensduJointInstitut forNuclearResearchdeDubna
(JINR),VladislavLouschikovetAlexanderFrank,au
but desannées70.Lemouvementduneutron sur un
miroirparfaitsesépareendeux mouvements indépen-
dants :le mouvementhorizontallelong dumiroiretle
L
États quantiquesduneutron dansle champ de pesanteur :unlaboratoirepour létude de lagravitation
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mouvementvertical,selon laxez.Silepremierest un
mouvementlibre,le deuxième ne lest pas:le neutron
resteconfiné entrelemiroird’uncôtéetle champ de
pesanteur de lautre,quilempêche de monterindéfini-
ment.Cedeuxième mouvementseraaucentredenotre
intérêt.
Cetexerciclémentaired’une balle quirebonditsur
une surfaceest bien connuen physique:en fonction de
son énergie,laballe vamonteràune hauteur plus ou
moinsgrande.
La caniquequantiquepréditunrésultatbeaucoup
moinstrivial. Elle affirme quelénergie d’unsystème
confiné ne possède quedesvaleurs discrètes(quanti-
fiées). Dansnotrecas,celaveut direquelénergie duneu-
tron ne possède quecertainesvaleurs bien définies
correspondantaumouvementvertical. Enparticulier,la
Neutronsultrafroids
Encadré 1
Leterme «neutronsultrafroids»(en anglais«ultracold
neutrons»–UCN)aétéintroduitaubut desannées70
parIlyaFrank (physicien théoricien,prixNobel pour lexpli-
cation de leffetCerenkovetdirecteur dulaboratoireoùla
couvertedesUCN aétéfaite) etAlbert Steyerl(physicien
exrimentateur,undespremiers àétudierlesUCN)pour
signerune infime partie desneutronsproduits dansun
réacteur nucaire. La caractéristiqueprincipale quidistin-
guecesneutronsde tous lesautresest leur interaction avec
lamatre:ilssonttellementlents qu’ilsne peuventpas
pénétrerdanslamatre. Cesneutronssontréfléchisparla
surfacedelaplupart desmatériaux.
Lesneutronsnaissentdansunréacteur,lors d’une fis-
sion desnoyaux d’uranium,avecde trèsgrandesvitessesde
lordrede20 000 km/s.Maisilsentrenttrèsrapidementen
collision avecle milieuenvironnantcomposé,parexemple,
de graphiteoudeau.Lechoixde cesmatériaux (appelés
modérateurs)est dictésurtout parleur capacitéàralentirles
neutrons(modérerleurs vitesses). Comme une boule de
billardsur une table de jeucouvertedautresboules,unneu-
tron issu d’une fission entreencollision élastiqueavecles
noyaux de carbone (pour lesréacteurs àgraphite),perdson
élanenquelquesdizainesde collisionsetcontinuesacourse
avecdesvitessesbeaucoupplus faibles.Lécrasantemajorité
desneutronsontainsidesvitessesde lordrede2km/s.
Cependant,on trouvedesneutronsdesvitessesbeaucoup
plus petitesoubeaucoupplus grandesquecettevaleur.Les
neutronstrèslents (UCN)ontdesvitessesextrêmementfai-
bles(de lordred’une dizaine de m/s)parrapport àlaplupart
de leurs confrèresetne représententqu’une partie infime,
de lordrede10 –11,dunombretotaldesneutronsdansun
réacteur.Onpeut direquelesneutronsavecdesvitessesde
lordrede2km/s ontune températureambiantedelordre
de 30 °Cou300 Ktandisquelesneutronsavecdesvitesses
de lordrede10m/s ontune températureeffectivedelordre
d’unmillikelvin !
La proprtédesUCN dêtreréfléchisàlasurfacedela
matrepeut paraîtrtonnante,surtout queleneutron aété
couvert en 1932 grâceàsacapacitéàpénétrerde trèsépais-
sescouchesde matre. Cest pourquoi le stockage desneu-
tronsdansunvolume,cessairepour augmenterladurée
dobservation danslesexriences,paraissaitalors inimagi-
nable. Cest en 1959 queYakovZeldovichasupposéle
contraireetqu’il aformulé lesconditionspour quecela
puisstreréalisé. Ilacomprisen particulierque,même si
lessurfacesde volume de stockage sontàtempérature
ambiante,lesUCN stocsne serontpasréchaufféslors des
collisionscontrelesparois.Maisil afalluattendrepresque
une dizaine dannéesavantquelexistencedecesneutrons
soitmiseevidenceen1968parungroupe de chercheurs
duJINR de Dubna.
Cetteexrienctaittrèsdifficile àréaliser:le nombre
totaldesUCN dansunréacteur nest pastrèsgrand,mais
surtout il faut les«séparer»detous lesautresneutrons.
Même aujourdhuicettetâche nest pasaisée. Dansle
monde,il nexistequepeude réacteurs auprèsdesquelson
puissefairedesexriencesavecdesUCN.Leplus grand
flux dUCN est obtenuauprèsduréacteur de lInstitut Laue
Langevin (ILL)àGrenoble,quigarde lasuprématie mon-
diale dansle domaine.
La proprtédinteraction desUCN aveclamatre
trouveson explication naturelle dansle cadredelacani-
quequantiquequidécritdesparticulescomme desondes.
Comme lalumière,ilspeuventêtrecaractérisésparune lon-
gueur donde ditededeBroglie. Cettelongueur est inverse-
mentproportionnelle àlavitesseduneutron etdéfinit«sa
taille ». Unneutron quis’approche de lasurfacedela
matreavecune trèsfaible vitessepossède une taille
énorme beaucoupplus grande queladistanceentrelesato-
mesvoisins.Ilnevoitpasdatomesdistincts,il interagit
simultanémentavecungrand nombredatomesetil est
réfléchi àlasurfacedetous lesmatériaux (àquelquesexcep-
tionsprès). Nous pouvonsiciconsidérerquecettediffusion
est élastique. Cecisignifie qu’unUCN néchange pasdéner-
gie aveclasurfacedesmatériaux.Ilrestetoujours àtrès
bassetempératuremême silesmurs dupiège danslequel il
setrouvesontàlatempératureambiante.
Cetteproprtéest caractéristiquedesneutronssuffi-
sammentlents.Dèsquelon augmentelavitesseduneu-
tron,il pénètredanslamatre. Onintroduitlanotion de
vitesselimited’unmatériau,dépendantde lacomposition
chimiqueetde ladensité. Cettevitesselimitséparles
UCN desautresneutrons.Pour laplupart desmatériaux,elle
est de lordrede5-10m/s etelle correspond àune énergie
cinétiqueduneutron de lordredequelquesdizainesde neV.
La possibilitépour lesUCN dêtrestocsdansunpiège
matériel ouvrelavoie àtouteune série de nouvellesexrien-
cesdanslesquellesle tempsdobservation est de lordrede
quelquescentainesde secondes(proche de ladurée de vie du
neutron) parrapport àlafraction de seconde,caractéristique
desexriencesaveclesneutronsplus rapides(le temps
cessaireàunneutron ayantune vitessedequelqueskm/s
pour traverserune installation exrimentale d’une longueur
de quelquestres). Parmi cesexriences,nous ne citerons
quelaplus fondamentale :lamesurelaplus précisedela
durée de vie duneutron est faiteaujourdhuiaveclesUCN.
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États quantiquesduneutron dansle champ de pesanteur :unlaboratoirepour létude de lagravitation
caniquequantiqueinterditauneutron davoirune
énergie nulle :il luiest impossible de sereposersur la
surfacesansbouger.
Lesénergiesdiscrètespermisespeuventêtrefacile-
mentcalculéesen utilisantléquation de Schrödinger.Le
potentiel ausein duquel le neutron est confiné est repré-
sentésur lafigure1.
D’uncôté(z=0),on voitle miroirquireprésenteun
potentiel infini,unmur infranchissable. Delautre,le
champ de pesanteur crée le potentiel habituel V ( z)= mgz ,
g=9 , 8m / s 2étantlaccélération de lagravité. Lénergie
minimale permise–lénergie de létatfondamental– est
extrêmementfaible,maisnon nulle :
avec
oùest laconstantedePlancketz0
léchelle de longueur caractéristique. La constante2,34est
obtenueparlacondition dannulation de lafonction
donde sur le miroir(lessolutionsanalytiquesde léqua-
tion de Schrödingerde notreproblème sontconnues,ce
sontdescasparticuliers desfonctionsde Bessel quipor-
tentle nom de fonctionsdAiry).
Pour serendrecomptedelafaiblessedecettnergie
E 0 ,on peut rappelerquelesneutrons«naissent»dansle
réacteur avecdesénergiesde lordrede210 6eVetse
«refroidissent»jusqu’àlatempératureambiantequicor-
respond à0,025eV.MêmeslesUCN ontdesénergiesbeau-
coupplus grandes(de lordrede10 7eV)quecettnergie
quantique,eton comprend trèsfacilementpourquoi le tra-
vail exrimentaldanscesconditionsreprésenteunchal-
lenge considérable etcessiteune grande ingéniosité. En
revanche,léchelle spatiale duproblème z 05 , 87µ mse
trouvetrèsproche deséchellesdumonde macroscopique–
etceciest extraordinaireenmécaniquequantique.
Sur lamême figure,nous avonsreprésentéleséner-
giesE nde quelquesautresétats (dits états excités)ainsi
quelespositionsdespoints de rebroussementdusystème
ξ
n= E n / mg,quicorrespondentàlahauteur maximale que
peut atteindreune particule classiquedénergie E n .Les
hauteurs z>
ξ
nne sontpasaccessiblesàune particule clas-
sique,maisune particule quantiquepeut ypénétrerpar
effettunnel. Pour illustrercephénomène,sur lamême
figure,nous présentonslescarrésdesfonctionsdonde
ψ
n ( z )duneutron pour lesquatrtats de plus bassner-
gie. Ilsdonnentdirectementlaprobabilitédeprésencedes
neutronsdanslesdifférentespartiesde lespace. Entre0et
ξ
n ,lafonction donde possède desmaximaetdesminima
etelle décrtrapidementpour z
n .
Lesénergiesdesquatrepremiers états sontégalesres-
pectivementà1,4;2,5;3,3et4,1peV.Onpeut voirqueces
niveaux dénergie serapprochententreeux (ladifférence
dénergie diminue) avecle nurodétat.Pour lespoints
de rebroussement,on obtientlesvaleurs 13,7;24,0;32,4et
39,9micronsrespectivement.Lesniveaux serapprochent
et,danslalimiteclassique,établissentuncontinuum.
Cetteforme de fonction donde adonné lidée de la
thode quiapermisdobserverlesétats quantiques
pour lapremièrefois.Ilfaut mesurerlatransmission des
neutronsàtravers une fenttroiteformée parle miroir
horizontalbien poli etunautremiroirpourvu d’une cou-
che de gadolinium,labsorbeur,capable dabsorberles
neutronsavecune grande efficacité(figure2 ). Ce
deuxième miroirdoitêtreparfaitementparallèle aupre-
mieretsesitueàune distancevariable Δ zde celui-ci.
Silabsorbeur setrouveplus haut quelepointde
rebroussement,alors il ne «touche »paslafonction
donde etlesneutronspeuventpasseràtravers lafente
sanspertes.Siladistanceentrelemiroiretlabsorbeur Δ z
diminue,lafonction donde duneutron
ψ
n ( z)commence
àpénétrerlabsorbeur etlaprobabilitédeperteaugmente
trèsrapidement.SiΔ zdevientplus petitquelataille carac-
téristiquedelafonction donde de létatfondamental,
alors lafentedevientnon transparentepour lesneutrons.
Figure1Puits dupotentiel oùle neutron est confiné :infini en zéroàlasur-
facedumiroiretlinéaireenz( V=mgz )pour zpositif. Onprésentgalement
lesniveaux dénergie permisetlescarrésdesfonctionsdonde
ψ
2 ( z )corres-
pondantesquidonnentlaprobabilitédeprésenceduneutron aupointz .
Emgz
00
12
23414
14 1014 10
=≈
=⋅ =⋅
,,
,,
peV
eV–– 31J
zmg
02213
2587=≈(/()),
/
(
µ
m
(=⋅ 6671034
,Js
Figure2Leschémade principe de lexrience. Degauche àdroite:les
lignesgrassesverticalesreprésententle collimateur dentrée (1) ;lesflèches
montrentdestrajectoiresclassiquesdesneutrons(2)entrelecollimateur et
lafenteformée parle miroirpoli (3)etlabsorbeur (4). Leslignes(5) illus-
trentle mouvementquantiqueau-dessus dumiroiretle carrérouge (6)
représenteledétecteur de neutrons.
États quantiquesduneutron dansle champ de pesanteur :unlaboratoirepour létude de lagravitation
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Leschémade lexrienceréalisée auprèsduréacteur
de lILL àGrenoble parValery Nesvizhevskyetsescolla-
borateurs est présentésur lafigure2 .Lexrienceconsis-
taiten lamesureduflux dUCN avecune vitesse
horizontale de lordrede5à10mparseconde àtravers la
fenteentrelemiroiretlabsorbeur.Unsystème de colli-
mation avantlinstallation permetde préparerun
«faisceau»deneutronshomogène en hauteur.
Soulignonslesconditionsparticulièrementcontrai-
gnantesauxquellescetteexriencedoitsatisfairepour
protégercesystème contretouteperturbation quipuisse
truirelesétats quantiques.Leflux dUCN, comme nous
le verronsplus tard,est trèsfaible etimposeune trèsforte
protection de lensemble de linstallation contrelesneu-
tronsparasitesqui,aprèsmultiplesdiffusions,peuvent
donnerunimportantbruitde fond.
Unautretype descontraintesfortessontdescontrain-
tesoptiquesetcaniques.Lemiroir(d’une longueur de
10cm) doitêtredetrèsbonne qualité–sinon larugositéde
lasurfacevacréerdesperturbationschaotiquesintrodui-
santdestransitionsentrelesdifférents niveaux etlesren-
dantinséparables.La distanceentrelemiroiret
labsorbeur doitêtreajustée etmesurée avecune très
grande précision,de lordrede1micron,pour toutelasur-
facedelabsorbeur.Lesvariationsdesconditionsextérieu-
resreprésententune sourcemajeuredeperturbations.
D’une part,le système doitêtreprotégé desvibrations
(bruitsismique,activitéhumaine –mouvementdupont
roulantdanslasalle exrimentale,travail permanentdes
pompesàeauduréacteur outout simplementdéplace-
mentdesexrimentateurs autour de linstallation).
Dautrepart,il faut concevoirunsystème de nivellement
pour «suivren permanenceladirection de laccéléra-
tion duchamp gravitationnel afin quelemiroirluisoittou-
jours perpendiculaire. Unexrimentateur quis’approche
de linstallation introduit,parexemple,une modification
duchamp gravitationnel nuisible pour le système étudié.
Lesoleil,quisedéplaceaucours de lajournée,chauffe le
timentduréacteur etintroduitdesvariationspermanen-
tesduniveaudusol de lasalle exrimentale.
Lexriencedoitsedéroulersous vide carlesinter-
actionsélastiques(diffusion sur lesatomesde lair)etiné-
lastiques(absorption desneutronsparlesatomes
dhydrogène de leau)fontdisparaîtredesUCN sur de très
courtesdistances.Deplus,leschampsmagnétiquespara-
sites(champ terrestre,champscréesparlesmoteurs des
pompesàvide) aveclesquelslesneutronsinteragissent
parlintermédiairedeleur momentmagnétiquepeuvent
perturberle système quantique.
Découverteexrimentale
etpremièresétudesdusystème
Comme nous lavonsdit,lesmouvements horizontaux
etverticaux duneutron peuventêtreconsidéréscomme
indépendants.Lemouvementhorizontal,avecune vitesse
moyenne de lordrede5à10m/s,obéitaux loisclassiques
tandisquelemouvementverticalavecdesvitessesde
lordredequelquescentimètresparseconde etdesénergies
de lordredequelquespeVest unmouvementquantique.
Cemouvementquantiquedevraitsemanifesterdans
le comptage dunombredeneutronsN(Δ z)quipassentà
travers lafenteenfonction de son ouverture. Sansmême
fairedecalculs,on peut s’attendre,en raisonnantdansun
cadrequantiquetecterune fonction «enescalier». Si
ladistanceentrelemiroiretlabsorbeur est inférieureàla
taille de lafonction donde de létatfondamental(égale,
grossomodolavaleur de laposition dupointde rebrous-
sement),aucunneutron ne passeàtravers cettefente. En
revanche,squelabsorbeur dépasselahauteur dupoint
de rebroussement,létatpeut «passer». Ceraisonne-
mentrestevalable pour tout étatquantique. Cettefonc-
tion N (Δ z)représentelenombredétats permisparla
caniquequantiquepour une ouverturedelafentedon-
née. Ilest clairégalementquelafonction «enescalier»
attendueseralissée parlarésolution spatiale quinest
bien sûr jamaisparfaite. Notonsquelacaniqueclassi-
queprévoituntout autrecomportementsansaucun
changementde régime.
Lesrésultats exrimentaux présentéssur lafigure3
montrentclairementladifférenceentrelecomportement
prévu parlacaniqueclassique(ligne noire) etlobser-
vation exrimentale quisuitfidèlementle comporte-
mentquantiqueescompté(ligne rouge). Enparticulier,
on voitexplicitementquelafenteentrelemiroiret
labsorbeur nest absolumentpastransparente(le flux est
égalàzéroaubruitde fond près)tantqueson ouverture
est inférieureàapproximativement15 microns(lavaleur
préditeparlacaniquequantique–laposition dupre-
mierpointde rebroussement). Cesdonnéesmontrent
explicitementle comportementquantiquedusystème et
représententainsilacouvertedelétatfondamental.
Lesétats excitésne semanifestentpasd’une fon
aussispectaculairequelétatfondamental:lafonction en
Figure3Flux de neutronsobtenulors de lapremièreexrienceàtravers la
fenteentrelemiroiretlabsorbeur en fonction de leur écart.La ligne rouge
représentelescalculsde mécaniquequantique. La ligne noiredonne le com-
portementclassique.
21
États quantiquesduneutron dansle champ de pesanteur :unlaboratoirepour létude de lagravitation
escalierest lissée parlarésolution exrimentale. Souli-
gnonsquecetterésolution est largementdominée parles
proprtésquantiquesdusystème lui-même. Lexplication
de cephénomène nécessiteuntraitementquantiqueplus
sophistiqué(courberouge) etelle est dueàleffettunnel
de labarrregravitationnelle (lexplication détaillée de ce
phénomène sort ducadredecetarticle).
Pour mentionnerencoreune foisladifficultéd’une
telle exrience,soulignonsqueletaux de comptage reste
particulièrementfaible :lafigure3représenteune semaine
de prisededonnéesauprèsduréacteur quiale flux de
neutronsle plus importantaumonde. Leproblème de la
statistique(nombredévénements tectés)resteundes
problèmesmajeurs danscetype détudes.
Cettnon visibilité»desétats excitésnous pousseà
proposerdautresthodespour étudierlesproprtés
desétats quantiqueset,en particulierprofiterdufait
quelesdimensionsspatialesdesfonctionsdonde sont
vraimentspectaculairementgrandesparrapport aux sys-
tèmesatomiques.
La taille micrométriquedesfonctionsdonde suggère
de lesphotographierdirectement.Pour cela, on remplace
dansle dispositif précédentle compteur dUCN parun
tecteur sensible àlaposition,obtenude lamanièresui-
vante(figures4et5 ):on déposeune trèsfine couche d’ura-
nium-235enrichi sur une plaquedeplastique. Quand un
neutron ultrafroid réagitavecle noyaud’uranium,il pro-
voquesafission. Undesproduits de fission entredansle
plastiqueetylaisseune traceendétruisantlastructuredu
matériau.Ilresteàenleverlacouche d’uraniumetàve-
lopper«laphot–limmergerdansune solution chimi-
queadaptée pour rendrelestraceslaisséespardes
produits de fission plus visibles.Une telle méthode per-
metdobtenirune précision sur laposition dimpact(la
position oùunneutron aprovoquéune fission) de lordre
dumicromètre–une résolution suffisantepour permet-
tredevoirlesfonctionsdonde etsurtout leur variation
spatiale (rappelonsquelecarrédelafonction donde four-
nitdirectementlaprobabilitédeprésenceduneutron à
une hauteur donnée).
Lerésultatd’une telle «phot,prisedansdes
conditionsunpeuparticulières,est montrésur lafigure6.
La scificitédecettephotoréside dansle choixdesfonc-
tionsdonde :on apréparéunmélange de plusieurs états
quantiquesde sortequelétatfondamentalsoitfortement
supprimé (lidéalseraitde ne sélectionnerqu’unseutat,
maisle flux de neutrons,même celuifourni parle réac-
teur de lILL, est tellementfaible qu’il ne laissepasbeau-
coupdechancedetrouverle signalparrapport aubruit).
Pour supprimerle premierétatquantique,on oblige
lesneutronsàdescendreune marche descalierd’une
hauteur de 15 microns–lataille de lafonction donde de
létatfondamental. Lors dupassage d’unmiroiràlautre
formantcettemarche descalier,lesneutronsne peuvent
paspeuplerlétatfondamentalensortie. Cettesuppres-
sion dupremierétatquantiquepermetde résoudreles
variationsde lafonction donde.
Figure4Ledétecteur de position de neutron. Ilconsisteenune couche
d’uraniumenrichi déposésur une feuille de plastique.
Figure5Lestraceslaisséesparlesproduits de fission desnoyaux d’ura-
niumdansle plastiqueaprèsveloppement.
Figure6La probabilitédeprésencedeneutron dansle champ de pesan-
teur,mesurée parle détecteur sensible àlaposition de trèshauterésolution.
La courbethéoriquereprésentelescalculsaveclesnombresdoccupation des
états quantiquesmesurésdirectementparcomptage desneutrons.
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