Poly - Morale sociale et politique

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Morale sociale, économique et politique
Introduction à la doctrine sociale de l'Eglise
Pourquoi une doctrine sociale de l'Eglise ?
Pour des raisons historiques, on se méfie de l'impact des religions sur l'Etat. L'Eglise a dû
défendre sa place sociale. Il y a encore quelques résidus de cela qui empêchent de
comprendre la DES (doctrine économique et sociale de l'Eglise).
L'autre raison, plus grave, d'ordre faussement spirituel serait de dire que l'Eglise doit se
cantonner à la sanctification des âmes, mais le monde et la politique sont mauvais, occasion
de péché. Le problème, c'est que la religion, autant que le sexe et la politique est souvent
occasion de péché (cf. Parabole du pharisien et du publicain).
1/ Immanence et sacramentalité. Dieu a une présence immanente dans le monde.
L'Eglise exerce un service sacramentel dans le monde. "Tout a été créé par lui et pour lui". Le
service diaconal de la prédication et de la sanctification : faire découvrir à toute chose que
Dieu l'habite. En toute relation, Dieu est présent. Mais il y a une infirmité de l'immanence
par rapport à la sacramentalité. Il faut faire connaître à l'homme la présence de Dieu. Service
diaconal. La façon dont nous connaissons notre Père doit nous pousser à le faire connaître et
non à en tirer de la gloire (pharisaïsme) !
2/ Le combat spirituel social. La massification anonyme diabolisante est bien l'opposé
du projet personnaliste de Dieu et des fils de lumière. Réduire les personnes à des numéros
interchangeables est bien opposée à Dieu. La DSE est une anthropologie théologique qui
peut critiquer toute organisation sociale. Le Christ a vécu le combat spirituel au désert, mais
aussi dans la société de son temps (accusations, violences…).
I. Une certaine ressemblance
CEC 1878 (cf GS 24) : "Tous les hommes sont appelés à la même fin, Dieu lui-même. Il existe
une certaine ressemblance entre l'union des personnes divines et la fraternité que les
hommes doivent instaurer entre eux, dans la vérité et l'amour". L'amour du prochain est
inséparable de l'amour pour Dieu". Le concept de "personne" est un concept théologique
avant d'être philosophique. Chaque personne divine n'a pas besoin des autres pour être
Dieu (elle est pleinement Dieu)(de même moi, je suis un homme, indépendamment des
autres). Cependant, chaque personne divine est pleinement Dieu qu'en relation avec les
autres personnes divines (de même, je suis pleinement un homme en relation avec les
autres).
Socle théologique personnaliste et trinitaire de la DES. 2 piliers trinitaires : distinction et
union. Le modalisme a hypertrophié l'union : une seule entité divine qui a 3 visages (atrophie
de la distinction). Socialisme "pur" : le sujet de l'histoire, c'est la société. Nous dirons que la
société doit être organisée pour que les sujets de l'histoire soit les personnes. Trithéisme : il
y a trois dieux. Hypertrophie de la distinction. L'individualisme libéral lui correspond dans la
1
société. L'homme n'est plus une personne mais un individu (entité dans un ensemble
indivisible). Une personne, c'est un individu plus des relations. Dans la Trinité, pas de
protection entre elles car l'amour ne sera pas occasion de main mise, d'étouffement.
Une bonne société humaine doit encourager l'union, sans oublier la distinction. Union pour
la distinction et la distinction pour l'union. La massification anonyme conduit toujours à la
dictature. On observe la condensation de tout en un seul homme. Chez les chrétiens, Dieu
est à la fois tout-puissant et kénotique. Il est libre de sa toute-puissance. L'agir de diaconie
sociale (pas seulement de la charité sociale) est ce qui rendra leur prédication
compréhensible.
II. Un amour tempéré, mais non modéré, de la société
Nous avons une mauvaise compréhension de la passion politique. Passion : vif intérêt qui
peut être occasion de péché. Après la religion qui est la première passion, c'est le sexe, puis
la politique. Mais la passion demande à être évangélisée. La religion a pour objet le bien
premier pour lequel il ne faut pas être modéré car c'est Dieu ! Par contre, le sexe comme la
politique doit être objet de passion tempérée. Nous devons honorer la sexualité, et la
politique au sens où ce sont des lieux reflets de Dieu.
C'est un défi à l'Incarnation de dire que nous ne devons pas aimer les biens seconds. Ce sont
des moyens de découvrir le Dieu invisible, chemins, pédagogies vers le bien premier.
III. Les principes de la DSE
a. Le bien commun - CEC
1906 Par bien commun, il faut entendre "l'ensemble des conditions sociales qui
permettent, tant aux groupes qu'à chacun de leurs membres d'atteindre leur
perfection, d'une façon plus totale et plus aisée" (GS 26 cf. GS 74).
La société est à la fois entraîneur (dimension d'exhortation) et arbitre.
On appelle "socialisation" l'interdépendance croissante des sociétés entre elles et de la
société sur les personnes. L'inverse du bien commun ne date que de Jean-Paul II : les
structures de péché (1987 – Sollicitudo Rei Socialis). Structure sociale qui induit les hommes
à faire le mal à leur tour (ex : mafias, blocs est-ouest).
Le contenu du bien commun :
- droits de l'homme (dignité). Le concept de droit de l'homme a émergé dans un
contexte d'opposition à l'Eglise. En 1963, Pacem in terris reconnaît ce qu'il y a de bon
dans les droits de l'homme. Centralité de la personne humaine.
- le développement. L'objet de l'Etat est de permettre à chacun de parvenir à la
perfection morale et spirituelle.
- paix : à la fois intérieure et extérieure. Seul l'Etat a le monopole de la violence.
CEC :
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Le bien commun intéresse la vie de tous. Il réclame la prudence de la part de chacun,
et plus encore de la part de ceux qui exercent la charge de l'autorité. Il comporte trois
éléments essentiels:
1907 Il suppose, en premier lieu, le respect de la personne en tant que telle. Au nom
du bien commun, les pouvoirs publics sont tenus de respecter les droits
fondamentaux et inaliénables de la personne humaine. La société se doit de
permettre à chacun de ses membres de réaliser sa vocation. En particulier, le bien
commun réside dans les conditions d'exercice des libertés naturelles qui sont
indispensables à l'épanouissement de la vocation humaine : "ainsi : droit d'agir selon
la droite règle de sa conscience, droit à la sauvegarde de la vie privée et à la juste
liberté, y compris en matière religieuse" (GS 26).
1908 En second lieu, le bien commun demande le bien-être social et le
développement du groupe lui-même. Le développement est le résumé de tous les
devoirs sociaux. Certes, il revient à l'autorité d'arbitrer, au nom du bien commun,
entre les divers interêts particuliers. Mais elle doit rendre accessible à chacun ce dont
il a besoin pour mener une vie vraiment humaine: nourriture, vêtement, santé,
travail, éducation et culture, information convenable, droit de fonder une famille,
etc. (cf. GS 26).
1909 Le bien commun implique enfin la paix, c'est-à-dire la durée et la sécurité d'un
ordre juste. Il suppose donc que l'autorité assure, par des moyens honnêtes, la
sécurité de la société et celle de ses membres. Il fonde le droit à la légitime défense
personnelle et collective. (1998 Catéchisme 1906)
La socialisation a une dynamique différente selon les sphères d'activité. On appelle
"mondialisation" cette socialisation. Elle est plus rapide au plan économique qu'au plan
politique. La mondialisation grandissante, le bien commun devient alors universel. Il faut
donc promouvoir des autorités supra-nationales et respecter les identités nationales,
culturelles.
b. La destination universelle des biens
La distinction pour l'union implique la gérance personnelle et la destination universelle des
biens. Sinon on aboutit à une inertie économique, paralysie de l'économie. Ce qui est vrai
des biens matériels est vrai aussi à propos des biens intellectuels et spirituels : gestion privée
et destination universelle. Il faut que les biens servent.
c. La subsidiarité et la participation
Les choses doivent être faites au plus près du terrain. Principe par lequel une autorité
supérieure ne doit pas faire ce que peut faire une autorité inférieure. L'Etat ne doit pas
éduquer les enfants. La subsidiarité est au service de la distinction. Dieu n'a pas voulu
exercer tous les pouvoirs.
Tout ce qui est d'intérêt public doit être traité par ceux qui ont intérêt. Transparence et
gestion commune des affaires publiques.
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1884 : Dieu n'a pas voulu retenir pour lui seul l'exercice de tous les pouvoirs. Il remet
à chaque créature les fonctions qu'elle est capable d'exercer, selon les capacités de
sa nature propre. Ce mode de gouvernement doit être imité dans la vie sociale. Le
comportement de Dieu dans le gouvernement du monde, qui témoigne de si grands
égards pour la liberté humaine, devrait inspirer la sagesse de ceux qui gouvernent les
communautés humaines. Ils ont à se comporter en ministres de la providence divine.
1885 Le principe de subsidiarité s'oppose à toutes les formes de collectivisme. Il
trace les limites de l'intervention de l'Etat. Il vise à harmoniser les rapports entre les
individus et les sociétés. Il tend à instaurer un véritable ordre international.
En France, on a du mal à respecter le PS. Le fédéralisme le respecte mieux. La monarchie
française a dû être dure face aux grands féodaux. Les Jacobins de même.
La participation est le droit et le devoir des sociétés de niveau inférieur de délibérer et
d'influencer sur ce qui les concerne dans les sociétés de niveau supérieur. La participation
fait le droit et le devoir de l'union. Tout ce qui est d'intérêt public est publiquement objet de
débat. La démocratie s'enracine là. La DES est plus large, lui donnant des fondements
théologiques. Il y a forcément du secret dans la démocratie, mais il faut une relative
transparence, pour donner aux sociétés d'ordre inférieur et aux citoyens le moyen de
s'engager.
1913 : La participation est l'engagement volontaire et généreux de la personne dans
les échanges sociaux. Il est nécessaire que tous participent, chacun selon la place qu'il
occupe et le rôle qu'il joue, à promouvoir le bien commun. Ce devoir est inhérent à la
dignité de la personne humaine.
1914 : la participation commence par le devoir d'état : éducation de la famille,
conscience dans le travail.
1915 : prendre une part active, autant que possible à la vie publique. Le désintérêt
politique est immoral.
1917 : les responsables politiques sont encouragés à attirer la confiance des citoyens.
d. La solidarité
Consentir volontairement à ce qui s'imposerait à nous sinon. Communauté de destin. La
solidarité volontaire à l'origine : se porter caution de quelqu'un qui prend un emprunt (si
problème, je paierai la dette avec lui).
Pas seulement prendre acte de la solidarité de fait des hommes les uns avec les autres, mais
il faut le vouloir. La passion de solidarité est d'autant plus forte que les personnes qui sont
proches de moi par le sang, par la nation. L'évangélisation de cette passion demande de la
rendre universelle (autre culture, autre race, tout homme). Une passion de solidarité risque
de devenir refus de la solidarité universelle.
La mondialisation comme universalité trop faible provoque des irrédentismes culturels, c'està-dire des conflits pour conserver les cultures particulières. Les nations humiliées ont
beaucoup plus de risque de se défendre.
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IV. Les "valeurs" de la DES
Anatomie (Etat, personne, corps intermédiaires, …) : on regarde les organes au repos. La
physiologie regarde l'ensemble en mouvement. Pas se limiter à l'anatomie sociale. Pacem in
Terris, 1963, encyclique testament de Jean XXIII. Il a déterminé 4 valeurs : vérité, justice,
amour, liberté.
Vérité /Le démon est le père de tout mensonge. L'ordre social le plus équilibré au niveau des
lois va sombrer s'il n'y a pas la vérité. La recherche de la vérité est une recherche sans fin. Le
mensonge est la tentation permanente de tout élément de la société. Justice / rendre à
chacun ce qui lui est dû. Vérité dans l'ordre du faire. C'est insuffisant, mais un préalable pour
la charité. Cf. Egalité républicaine. L'amour / liberté de donner à l'autre plus que ce qui lui
est dû. Relève de la gratuité. La justice est moralement coercitive. L'amour est libre. La
société ne marchera jamais sans ce devoir de générosité. Cela rejoint la participation. Ce
qu'on fait librement est plus méritoire donc nous épanouit plus. Nous sommes soumis à un
devoir de charité radical, mais dans la liberté de donner comme je veux. Dans le devise
républicaine, cela correspond à la fraternité (parallèle grossier) qui est un devoir. Espace
d'initiative. Liberté / La DES est à la fois la dernière valeur donc suprême, mais elle est
conditionnée par les autres. Pour le nominalisme, la liberté est absolue. Pour le thomisme,
elle dépend d'une certaine conception de la vérité. Je suis libre à la mesure où j'accueille un
événement qui touche l'intelligence et la volonté. Il faut accepter un réel qui préexiste à la
liberté.
V. Syndérèse et prudence (GS 44)
1. Distinction …
La DES propose la grammaire élémentaire de la vie sociale, mais n'écrit pas l'histoire à la
place des hommes. Il y a des principes et il y a le discernement. Sur le plan des principes, on
doit être solidaires. Sur le plan du discernement, on est solitaire ! Cela relève de la
conscience qui a à la fois l'ouverture vers les principes généraux. La syndérèse est l'aptitude
à attester des principes généraux de la conscience. Ma conscience atteste de la vérité de la
loi. Au niveau de la syndérèse, nous devons être solidaires. Notre conscience doit se
conformer avec le magistère. Si on est en désaccord, il faut le vivre dans l'humilité, et
chercher à se convertir.
Sur le plan du discernement, nous devons nous respecter scrupuleusement. Chacun est
solitaire dans les situations concrètes. La prudence est l'aptitude à voir ce qui est en jeu dans
une situation donnée. De façon la plus rudimentaire, c'est le bon sens, qui doit aussi être
développé. L'Eglise comme un arbitre donne la "grammaire", rappelle les règles. Cléricalisme
: volonté de pénétrer dans l'autonomie de prudence de chacun. Au contraire, les pouvoirs
sont manipulateurs de l'Eglise comme ils veulent influer sur les principes sous prétexte qu'ils
les gênent. Volonté de considérer l'Eglise comme une alliée. Refus du caractère prophétique
de l'Eglise.
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2. … et articulation
3 éléments de la DES : principes et valeurs morales fondamentales concernant la vie en
société ; la reconnaissance de la juste autonomie des réalités terrestres donc la légitimité
des autorités publiques ; la casuistique.
IV. Eglise et société : un rapport sacramentel
L'Eglise comme sacrement dévoile explicitement et donc de façon plus édifiante la présence
immanente de Dieu dans le monde. Dieu subsiste en toute chose. Mais Dieu souhaite être
reconnu. Rôle sacramentel : dévoiler ce qui est déjà. Les infidèles sont vraiment créés par
Dieu. Ils connaissent par immanence Dieu. Faire connaître au monde le Dieu qui est déjà
dans le monde est notre rôle sacramentel. La connaissance de Dieu par révélation est
beaucoup plus épanouissante que la connaissance de Dieu par déduction (raison naturelle).
1. Marturia
L'Eglise enseigne le Dieu déjà présent dans le monde. Quand l'Eglise enseigne la
ressemblance qu'il y a entre la fraternité entre les hommes et la Trinité, elle prépare une
société personnaliste qui ouvrira à la révélation du Dieu Trinité. Il y a un temps pour le
témoignage muet. Seul l'amour nous dit quand on doit passer du témoignage implicite au
témoignage explicite. L'agir politique des chrétiens contribue à préparer l'annonce explicite
de la Révélation. La théologie morale comme première étape d'évangélisation, présence
charitable des chrétiens au monde, présence anthropologique personnaliste, est accessible à
la raison naturelle, même non-chrétienne. Ex : présence de l'Eglise en terre musulmane. GS
16 : "Par fidélité à la conscience, les chrétiens, unis aux autres hommes, doivent chercher
ensemble la vérité et la solution juste de tant de problèmes moraux que soulèvent aussi bien
la vie privée que la vie sociale".
2. Diaconia
Option préférentielle pour les pauvres. Ex : service "gratuit" de l'enseignement en Inde (2,8
% de chrétiens ; 20% de l'enseignement donné par l'Eglise catholique). L'Eglise manifeste
l'amour gratuit de Dieu, sans se préoccuper de la réponse parfois ingrate. L'option
préférentielle pour les pauvres ne date que de JP II mais elle est implicite dès Rerum
Novarum (encyclique de Léon XIII sur la condition des ouvriers). On va juger de la Révolution
industrielle quand on va regarder ce qu'elle produit dans la société et notamment sur les
plus pauvres.
3. Liturgia
3ème rapport sacramentel de l'Eglise au monde. Par la liturgie, l'Eglise anticipe, célèbre déjà,
dans l'ordre du symbole, dans une visibilité partielle, la gloire que lui confère l'adoption en
Celui qui est déjà pleinement en gloire. Ontologiquement, nous sommes déjà au terme ;
phénoménologiquement, nous sommes encore en chemin. La liturgie est publique, mais il
existe une pluralité de participation à la liturgie. La liturgie est un bien des pauvres. Là est
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dite de façon symbolique la dignité humaine. La liturgie socialise, donne de l'espérance par
le seul effet de la fête qu'elle réalise, donne de la dignité. "Faisons la fête, et nous nous
découvrirons dignes".
Notre moment culturel en matière sociale
I. Désenchantement…
Le moment où nous sommes est parcouru par un sentiment de désenchantement :
nous avons la gueule de bois après l’ivresse idéologique. Ce qui galvanisait le tiersmondisme, le socialisme à visage humain… tout ça s’est effondré. Aujourd’hui : marécage. Ce
qui est aussi dommageable que l’hypertonie idéologique antécédente. Il y a des gens, qui, à
20 ans, sont vieux : crise de l’espérance : leitmotiv des dernières années de pontificat de JP
II : disqualification du passé et incapacité de se projeter dans l’avenir. Ce rapport au passé
était déjà en crise avec les progressismes ; mais la crise du rapport à l’avenir est nouvelle. La
sécularisation : horizontalisation de l’espérance en espoir. L’espérance a pour objet ultime
notre salut éternel ; nous sommes en lien dès aujourd’hui avec l’Éternel, donc la vie
éternelle est déjà commencée. L’espérance éternelle doit s’exprimer dans un espoir. Dans
un premier temps, la sécularisation horizontalise l’espérance en espoir (qui est de l’ordre de
la simple santé naturelle). La sécularisation arrive avec le doute sur l’existence de Dieu et
donc de la vie éternelle ; elle est le processus historique enclenché par les « Lumières », qui
tend à comprendre le monde sans le sacré, sans le divin : tout réduire ‘au siècle’. Elle aboutit
à l’investissement passionnel normalement engagé vers Dieu dans le siècle. L’intempérance
inhérente à l’attachement à Dieu se reporte vers l’histoire avec cette idée du progrès
automatiquement bienfaiteur. La sécularisation qui ne se confond pas tout à fait avec la
modernité, est le mode moderne de la culture française, notamment. La présence de la
communauté religieuse, perçue comme excessive, est en voie d’extinction (de même en
Tchéquie, au Québec, en Russie…). La sécularisation aboutit à une idolâtrie du progrès qui
donne le progressisme radical qui fait considérer toute spéculation métaphysique ou
religieuse comme un divertissement accessoire. On a cru, jusque dans les années 70/80 que
le progrès était automatiquement bienfaiteur. On a commencé à ne plus y croire au moment
où ça triomphait. La modernité et donc la sécularisation a commencé à flancher avec
Dachau ; mais on a mis du temps à s’en rendre compte. La sagesse humaine sans Dieu, ça ne
marche pas. Puis il y a eu Hiroshima, les manipulations génétiques, les menaces
écologiques… Le progrès est perçu comme ambivalent, il n’est plus perçu comme
automatiquement bienfaiteur d’où un épuisement de la sécularisation et donc le brouillard.
Ce désenchantement se traduit par une défection dans l’engagement syndical et
politique, l’abstention électorale, l’absence de grand dessein politique et social, la réduction
de la politique aux personnes. Il y a la possibilité de réactivation des grands desseins d’hier :
néo-républicanisme (Chevènement), néo-communisme (Laguiller), néo-nationalisme (Le
Pen). Mais tout ça se fait dans l’aigreur. Le ton de ces restaurateurs est amer, vindicatif.
Ecclesia in Europa, 1999, 7-8. La perte de la mémoire : le ‘temps œuf’ (Guillebeau1) à
1
Le goût de l’espérance, Seuil, 2003.
7
distinguer du temps sablier : normalement, nous sommes poussés par le passé et happés par
l’avenir (= temps sablier) ; en ce moment : vivons pleinement le moment présent en s’y
limitant (= temps œuf) : nécessité morale de rechercher les émotions fortes (débauchés de
tout genre). Culture du moment présent dans un ressenti très fort : morale de la
désespérance : légitimation de la jouissance. La perte de la mémoire, de l’héritage,
accompagné d’une sorte d’agnosticisme pratique, fait que beaucoup d’européens donnent
l’impression de vivre sans terreau spirituel comme des héritiers qui ont dilapider l’héritage.
Cette perte de la mémoire s’accompagne d’une peur d’affronter l’avenir. « Face à l’avenir,
on ressent plus de peur que de désir » ; c’est un vieillard de 80 ans qui affirme cela pour
secouer les jeunes ! C’est là qu’est l’incapacité de s’engager radicalement et dans la famille
(n°8) et dans la vie consacrée.
Ce moment peut nous donner l’occasion d’aller au cœur de la foi : nous ne pouvons
pas faire seulement du marketing religieux dans l’évangélisation. Cette désespérance nous
touche nous aussi. Il faut que nous creusions profond pour voir en quoi la gloire du Christ
ressuscité qui vient vers nous transforme et dépasse l’aménagement de cette terre. Nous
avions un Etat médiéval statique : on ne pouvait pas imaginer que le monde puisse bouger ;
les grandes découvertes du 16ème ont fait advenir la modernité : le monde ne aller que de
mieux en mieux ; cela s’amenuise en ce moment. Le monde n’est pas un décor qui serait
étranger à notre salut mais il nous suit dans notre salut, il sera transfiguré. Il faut reprendre
cette idée juste d’une évolution du monde : il sera récapitulé en Christ.
II. … lendemain d’utopies séculières aujourd’hui dépassées
1. Un contexte historique euphorique…
Il faut voir d’où on vient : nos anciens (générations des années 20/30) sont les témoins d’un
contexte historique euphorique. Elle a tenu en certains domaines jusqu’aux années 75/80
grâce à la victoire de la deuxième guerre mondiale. Actuellement, une des raisons pour
lesquelles la démographie est un peu moins mauvaise chez ces vainqueurs vient du fait qu’ils
se sont aperçus de l’échec de la modernité un peu plus tard. Les Occidentaux ont gagné la
guerre froide que dans les années 75 ce qui n’est apparu que plus tard. Les années 75/85 ont
été radieuses dans la fin du conflit USA/URSS, hypertonique sur le plan de l’espérance :
croissance qui est celle de la Chine aujourd’hui. On est passé d’une société
bourgeoisie/classe ouvrière à une société des classes moyennes. Une confiance euphorique
en l’avenir animait toutes les classes de la société. Ce contexte portait en lui la rupture avec
le passé qui était obscurantiste. Le marxisme a eu, notamment dans l’intelligentsia
universitaire et dans les milieux chrétiens, un succès qui répondait à un besoin subjectif. Il
fallait être de mauvaise foi pour ne pas voir que le communisme soviétique était odieux et
pourtant tant d’hommes et de femmes ne l’ont pas vu parce que le progressisme marxiste
correspondait à la demande psychologique du moment : cette volonté de marginaliser le
discours religieux avoué. Le marxisme est un moment culturel, un discours religieux
inavoué : ‘horizon indépassable de la culture contemporaine’ selon Sartre !
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2. … mutation de l’expérience chrétienne…
On a alors tenté de penser la foi chrétienne dans un monde en mouvement. Prendre en
compte le fait que le monde change. GS 36-39. Nous avons à penser culturellement ce qui
est pensé individuellement. Quand le Christ est mort et ressuscité, il est passé à une
humanité glorieuse : changement d’état d’humanité ; nous croyons que le cosmos dans son
ensemble va passer aussi à un nouvel état. Mais quelle relation y a-t-il entre les progrès et la
mutation pascale ? On ne peut pas identifier le progrès avec le passage eschatologique. On
ne peut pas penser la glorification personnelle comme couronnement de notre vertu : il faut
la présence de la Croix ; il faut la réception d’un salut. Penser la foi dans un monde en
mouvement, cela est rendu possible par la crise du ‘progrès’. Paul VI, le 7 décembre 1965 : le
bon Samaritain = spiritualité du concile par rapport au monde moderne en crise. Nous
pouvons aujourd’hui aborder la question du combat spirituel dans le progrès qui n’est plus
menaçant, qui n’est plus l’alter ego du christianisme. La crise détrône le progrès comme
alternative au christianisme.
3. … après un long affrontement…
Il nous faut recevoir spirituellement l’enseignement du magistère aujourd’hui. Nous n’avons
pas à disqualifier Grégoire XVI et Pie IX sous prétexte d’une réception de Vatican II. Il faut
expliquer hier par avant-hier. Si il y a eu changement à Vatican II ce n’est pas à cause d’un
changement de doctrine mais d’une nouvelle disposition de l’homme moderne : homme
blessé, il peut recevoir les soins du bon Samaritain. Il faut éviter de dire que le changement
est une rupture. Lire le concile à la lumière de la Tradition sans réduire ce qu’il y a de
nouveau dans Vatican II. Il a pris acte d’un changement substantiel qui, juste avant lui était
hostile.
Le monde moderne est effectivement le blessé sur le bord de la route… mais va-t-il accepter
les soins du bon Samaritain ? Caricatures et percussions sont signes de l’intérêt que nous
suscitons. Nos persécuteurs contribuent à l’avènement du Royaume de Dieu (GS) : selon les
Écritures, c’est ainsi que cela doit s’accomplir. La réception de l’Évangile ne peut aller sans
une phase de refus qui peut, qui doit devenir felix culpa. Nos persécuteurs = cette partie de
nous-mêmes qui refuse l’Évangile… mais la résistance est l’avant-dernière étape de l’histoire
du salut. La résistance est un signe de vulnérabilité … derrière, il y a des merveilles. L’homme
ne peut pas vivre sans espérance.
III. La spiritualité du Bon Samaritain
Nous travaillons pour la gloire de Dieu et le salut du monde, pas pour remplir nos églises.
Jésus est nul comme pasteur ; le jour de sa première messe, il n’y avait pas grand monde…
Pas de visée trop courte dans la mission. EIE, 10 et 21.
Les soins que nous avons à donner situent relativement la réponse à la question du
désenchantement dans une réalité beaucoup plus large. L’urgence première : resituer
l’espoir humain dans une dimension éternelle. Il est possible de faire émerger dans la
génération des 15/30 ans des croyants équilibrés pour demain.
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Survol de la doctrine sociale de l'Eglise
De l'anathème au dialogue-mission sacramentelle
La modernité, émergence du sujet face, voire contre son environnement, apparaît sur les
ruines de la chrétienté médiévale.
I. Le temps des affrontements : de Grégoire XVI à Pie IX
Grégoire XVI (1862) : la Pologne catholique succombe aux pressions. Félicité de Lamenais
veut défendre la nation polonaise. Exaltation de la fraternité universelle anti-hiérarchique. Il
cherche à faire une synthèse théologique, révolutionnaire, anti-hiérarchique. Il sera
condamné pour son Parole d'un croyant. (Son frère, fondateur des Frères des Ecoles
chrétiennes, est bienheureux).
Pie IX avec Quanta Cura. Le syllabus est l'acmé de l'affrontement politique, philosophique et
religieux. L'autorité de l'Eglise veut réguler le corps social. La France est alors la première
puissance mondiale, sur le plan culturel notamment. On aboutit à la "guerre des 2 Frances",
notamment dans les affaires de la laïcité.
II. Essai vain d'entrisme2
1. DES commence avec Rerum Novarum de Léon XIII.
A partir de la mort de Pie IX (1878), il y a une radicalisation de la laïcité en France. Le
ralliement de 1890 où le cardinal Lavigerie disait qu'on peut être un bon chrétien et un bon
républicain est considéré par certain comme un scandale. Le pape Léon XIII ne veut pas
s'enfermer dans l'affrontement contre la modernité. Il faut passer de l'affrontement des
idées à l'amour des personnes.
Mise en route qui s'avérera vaine. Ce n'est qu'en 1950 que la modernité n'a vraiment
triomphé. Le sens critique, la volonté de s'ériger contre la société, la religion est apparu très
progressivement.
1891, Rerum Novarum : document évangélique au sens où il relève de l'option préférentielle
pour les pauvres (on regarde la position des ouvriers dans la révolution industrielle) sur une
réalité pourtant prometteuse au plan économique. C'est la sortie de l'opium du peuple. C'est
une réalité sociale nouvelle (décuplement de la puissance industrielle). L'Eglise aborde la
révolution industrielle à partir de la condition ouvrière. On regarde ceux qui en pâtissent le
plus.
C'est politique aussi. Car on est en confrontation avec le monde. Dénonciation aussi du faux
remède du communisme. Le personnalisme chrétien va s'affronter à la massification
anonyme.
L'individualisme c'est un personnalisme sans la charité. La massification anonyme est la
destruction de l'individu (purement diabolique). Or l'individu + charité = personne.
Il y a légitimité de la propriété comme substrat de la responsabilité personnelle. Propriété
limitée par la destination universelle des biens. Légitimité des associations professionnelles.
2
Entrisme : Fait d’entrer dans un parti politique dont on n’approuve pas le programme, pour en modifier
l’orientation ou, plus souvent, pour y gagner des membres favorables à une scission.
Méthode trotskiste de pénétration, de subversion, d'infiltration.
10
On réunit par branches (tous les maçons…) verticales, mais aussi horizontales (soit les
patrons, soit les ouvriers). Ce point a fait passer Léon XIII pour le "pape rouge", permission
d'un contre-pouvoir au libéralisme. Le contrat ne légitime pas le salaire (un salaire qui ne
permet pas de vivre est inique). Le rôle de l'Etat est de veiller au bon fonctionnement du
corps social. Aider les plus faibles.
Mise en place d'un "capitalisme rhénan". L'Allemagne est catholique à l'Ouest comme la
France de l'Est. Le capitalisme anglo-saxon est plus libéral. La DES a eu une efficacité
honteuse dans ce sens là : bien des non-chrétiens ont pillé l'enseignement de l'Eglise (socialdémocratie par ex qui mettra de plus en plus de personnalisme dans son vin "massifiant" ;
convergence d'intérêt entre le socialisme rose et la DSE).
Au niveau politique, Rerum Novarum est un succès (influence considérable) qui s'est diluée
(pas de pré-éminence de l'Eglise dont nous avons la nostalgie). De la part de la papauté,
abandon de la partie politique. Cf. Quas primas, 1925 : instauration de la fête du Christ Roi
avec la requête que les autorités sociales viennent reconnaître la royauté du Christ.
Echec extérieur mais triomphe moral. Nos idées sont passées en partie, même si on ne
reconnaît pas la paternité de nos idées. Echec de la politique de Pie XI. Les intégristes nous
prennent pour des traîtres.
L'entrisme politique a un peu marché avec la démocratie chrétienne en Italie en 1945. Mais
ça n'a pas duré.
2. Quadregimo Anno, 1931 – la subsidiarité
Un consensus des théologiens moralistes et des hommes politiques chrétiens qui est repris.
III. Face aux périls
Les drames de la 2nde guerre mondiale manifestent l'éclipse de la raison. Face aux
totalitarismes bruns et rouges, on crie "à la folie".
1. Mit brennenger Sorge
"Avec un souci brûlant", encyclique contre le nazisme, 1937, XX. Les attributs du Christ
comme homme nouveau sont attribués à la race arienne. Prétention de rédemption par le
nazisme.
2. Divini redemptoris (1937)
Contre le communisme, intrinsèquement pervers.
3. Radio-message de 1941 de Pie XII
Noël, 60ème anniversaire de Rerum Novarum. Contexte de censure quasi-absolue. Pas
d'imprimerie possible. Synthèse de la DES qui semble intemporelle. Discours non-relatif à la
situation dramatique. Il ne s'agit plus d'entrisme, on ne rentre pas dans la société qui devient
trop folle. L'Eglise a renoncé à ce que sa royauté sociale soit reconnue socialement. On
renonce à la chrétienté formelle, aux Etats catholiques.
11
IV. De l'Europe à la mondialisation
Après la 2ème guerre mondiale, le déclin de l'Europe commence. Le discours jusqu'à là était
raciste. L'Eglise ne s'est pas levée contre ce "racisme naturel" européen. L'Eglise, dans son
silence qu'on peut considérer comme regrettable a quand même gardé le cap, par le
baptême des non-blancs. Tous les hommes sont égaux devant Dieu.
1. Mater et Magistra, Jean XXIII, 1961
70ème anniversaire de RN. Dans la phase préparatoire de Vatican II. Il y a des signes des
temps comme la décolonisation, la reconnaissance de la dignité de la femme (acteur et sujet
politique), la question du sous-développement (le Tiers-mondisme apparaît). L'Eglise ne
partira pas avec les colons. Image héroïque du cardinal Duval, évêque d'Alger, qui reste sans
peuple.
2. Pacem in terris, Jean XXIII, 1963
L'Eglise reconnaît les droits de l'homme. Scandale chez certains traditionalistes ! Formule
empoisonnée. Mais le venin est parti (dans la déclaration de l'ONU de 1947 par rapport à
1789). L'Eglise a toujours accueilli dans sa culture des éléments extérieurs (cf. GS 44). On
parle des valeurs de la DES. Appel à considérer le bien universel au plan mondial.
3. Vatican II
L'homme moderne est le malade sur le bord du chemin (cf. parabole du bon samaritain).
Présence à un homme moderne blessé. Cf. GS dont le plan est significatif.
Dignitatis Humanae, n°3 clôt l'idée d'Etat catholique. Il y a une telle autonomie des réalités
terrestres qu'on ne peut pas considérer l'Etat qui fasse la cohésion sociale sur le plan
religieux. L'Etat laïc n'est pas le laïcisme qui est rejet des croyants.
4. Populorum progressio, Paul VI, 1967
Le progrès des Peuples : le développement doit être intégral (tout l'homme) et solidaire. Le
développement économique est illusoire sans développement culturel (ex : argent donné
aux pays africains pré-modernes) et spirituel (en Occident).
5. Octogesimo Adveniens, Paul VI, 1971
Lettre au cardinal Roy (Québec). Mise en garde contre l'adhésion aux idéologies. Les utopies
sont saines si on les considère comme utopies. Derrière critique au communisme dur. On
distingue les différents niveaux de socialismes : le socialisme modéré est une option
pragmatique acceptable pour des chrétiens.
6. Iustitia in mundo, Exhortation post-synodale, 1971
V. L'enseignement de Jean-Paul II
Un non-italien. Les italiens ont un génie du compromis que ce pape polonais n'avait pas !
12
1. Redemptor hominis, 1979
Encyclique programme : "L'homme est la route de l'Eglise". Lien entre l'homme et la
création. Début du souci écologique. Si l'homme est sauvé, la création sera sauvée.
2.Dives in misericordia, 1980
"Le plus grand droit est la plus grande injustice… si le droit n'est pas habité par la charité".
Pas de charité sans justice préalable.
3. Laborem exercens, 1981
Le travail est à la fois objectif et subjectif. Clé de compréhension de l'homme.
Personnalisme, comme spiritualité du travail. Primat du travail sur le capital.
4. Sollicitudo rei socialis, 1987
Reprise de la question du développement. "Option préférentielle pour les pauvres" reprise
pour la première fois dans une encyclique. Discours sur les "structures de péchés" qui sont
les institutions sociales issues de péchés et favorisant le péché.
Déclin de l'idée de "progrès" qui est à la source d'asservissement, de danger écologique.
5. Centesimus Annus, 1991
Après la chute du Mur (1989). L'athéisme d'Etat est débilitant au niveau moral, devenant un
athéisme culturel. Aliénation de l'activité économique par complexification. Evolution des
moyens de développement : terre, capital, maintenant l'homme lui-même avec ses capacités
d'apprendre. On passe d'une économie caractérisée par le scandale de l'exploitation, de la
domination à une économie marquée par le scandale de l'exclusion.
Benoît XVI : 2ème partie de Deus caritas est traite de la DES : place de la charité dans l'Etat.
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Quelques objections – tentations contre la DSE
I. Morale et efficacité (utilitarisme)
Nous sommes fascinés par la science. Le développement technologique est bon, mais
l'occasion d'un attachement désordonné. Utilitarisme : on ne jugerait un agir qu'en fonction
de son impact visible. C'est assez cynique. Il se scinde en proportionalisme et
conséquentialisme. C'est en fonction de la répercussion de l'agir sur l'homme, qu'est-ce que
l'acte a pour conséquence sur l'acteur ? Le catholicisme prend à contre-pied le culte de
l'efficience moderne. Qu'est-ce qui dans ma vie va permettre de développer mes capacités
d'aimer, ma vertu ? L'efficience a une importance seconde. Une fois que des actes sont bons,
je choisirai ensuite le plus efficace. L'ensemble de la DES (par exemple sur le développement
économique) doit contribuer au développement de la capacité d'aimer des personnes. On va
s'intéresser aux personnes.
1. Alibi technocratique
Finalement, l'Eglise n'y connaît rien en médecine, en politique, en défense. Nous sommes
des techniciens, des spécialistes. Il n'y a pas de discours propres que les chrétiens peuvent
tenir sur des questions qui relèvent avant tout de la compétence. Il n'y aurait pas d'enjeux
moraux derrière tous ces domaines.
2. Simplisme idéologique
Faire de la DES une tiers-idéologie. Etant donnée qu'elle est personnaliste, et qu'on a en face
de nous le communisme et le libéralisme. On réduirait la DES à n'être qu'une idéologie parmi
d'autres, un genre de centrisme. Non, c'est une anthropologie morale théologique plus
fondamentale. 3 niveaux : 1/ anthropologie. 2/ stratégie. Les mouvements politiques
essaient de capter la bénédiction que porte la DES. 3/ tactique (au jour le jour). La morale de
l'efficacité (toujours à cours terme) s'oppose à l'efficacité de la morale.
II. Egalités et inégalités
Un des ressorts de l'activité politique est le scandale bon et légitime contre les inégalités. En
même l'égalitarisme a provoqué un nivellement de tout engagement politique finalement.
Ex : en URSS, émergence d'une nomenklatura. On peut parler de l'égalité comme ce qu'il y a
de mieux et de pire à la fois (comme la langue du corps).
CEC 1934
Créés à l'image du Dieu unique, dotés d'une même âme raisonnable, tous les
hommes ont même nature et même origine. Rachetés par le sacrifice du Christ, tous
sont appelés à participer à la même béatitude divine: tous jouissent donc d'une égale
dignité.
1935 L'égalité entre les hommes porte essentiellement sur leur dignité personnelle
et les droits qui en découlent:
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Toute forme de discrimination touchant les droits fondamentaux de la personne,
qu'elle soit fondée sur le sexe, la race, la couleur de la peau, la condition sociale, la
langue ou la religion, doit être dépassée, comme contraire au dessein de Dieu (GS
29).
1936 En venant au monde, l'homme ne dispose pas de tout ce qui est nécessaire au
développement de sa vie, corporelle et spirituelle. Il a besoin des autres. Des
différences apparaissent liées à l'âge, aux capacités physiques, aux aptitudes
intellectuelles ou morales, aux échanges dont chacun a pu bénéficier, à la distribution
des richesses (cf. GS 29). Les "talents" ne sont pas distribués également (cf. Mt 25,1430 Lc 19,11-27).
1937 Ces différences appartiennent au plan de Dieu, qui veut que chacun reçoive
d'autrui ce dont il a besoin, et que ceux qui disposent de "talents" particuliers en
communiquent les bienfaits à ceux qui en ont besoin. Les différences encouragent et
souvent obligent les personnes à la magnanimité, à la bienveillance et au partage;
elles incitent les cultures à s'enrichir les unes les autres :
Je ne donne pas toutes les vertus également à chacun ... Il en est plusieurs que je
distribue de telle manière, tantôt à l'un, tantôt à l'autre ... A l'un, c'est la charité; à
l'autre, la justice; à celui-ci l'humilité; à celui-là, une foi vive ... Quant aux biens
temporels, pour les choses nécessaires à la vie humaine, je les ai distribués avec la
plus grande inégalité, et je n'ai pas voulu que chacun possédât tout ce qui lui était
nécessaire pour que les hommes aient ainsi l'occasion, par nécessité, de pratiquer la
charité les uns envers les autres ... J'ai voulu qu'ils eussent besoin les uns des autres
et qu'ils fussent mes ministres pour la distribution des grâces et des libéralités qu'ils
ont reçues de moi (S. Catherine de Sienne, dial. 1,6).
L'égalité entre les hommes porte sur l'égalité de dignité et des droits qui en découlent, non
pas sur leur capacité. Tout homme est capable de relation avec Dieu : fondement de sa
valeur infinie, de sa dignité. Il y a des droits relatifs à cette dignité fondamentale : sécurité,
développement des capacités. Les capacités visibles socialement (initiative, autorité,
production, art, et l'étude).
L'inégalité est voulue par le Créateur pour que les hommes se mettent au service les uns des
autres. Que la libéralité de Dieu soit manifestée par la libéralité des riches. Il faut respecter
l'inégalité de talents. Vouloir l'égalité à tout prix annihile la dignité de l'homme. La richesse
des riches est légitime mais elle est grevée d'un devoir de partager. Les richesses sont au
service de la communauté. Si le riche ne met pas sa richesse au service de ses frères, il
manifeste la stérilité de son cœur.
Le service social ne peut pas être conforté par l'honneur. Les responsables doivent être
entourés d'un respect (titulature, uniformes, déférence). L'honneur est dû au service rendu
et non pas aux personnes. "Père" est un titre lié au service sacerdotal, pas à la personne.
Important pour ne pas tomber sous prétexte d'égalitarisme social à un nivellement de toute
fonction sociale.
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Culture
L'Election type est celle d'Israël par rapport aux autres cultures. C'est un péché grave de la
part d'Israël de ne pas comprendre que l'élection de Dieu est au service de l'ensemble de
l'humanité. L'élection est source de devoir et de service, jamais source d'orgueil.
Le Seigneur choisit "n'importe qui" (au sens où ça ne relève pas des qualités de chacun) en
vue de manifester la pédagogie de l'élection.
16
Les différents secteurs de réflexion de la DGSE
Principes : anatomie (bien commun, destination universelle des biens, subsidiarité,
participation). Valeurs : physiologie (ce qui meut le corps / vérité, justice, amour, liberté).
Secteurs : famille, travail, économique, politique, environnement, paix. Les principes
soutiennent les valeurs qui se déploient dans les secteurs.
La famille est l'un des piliers de l'ordre social, elle est la défense des pauvres. Les riches
auront toujours moyen de compenser leurs problèmes familiaux. Après la famille, vient le
travail : lieu où l'on produit et échange les biens économiques matériels et intellectuels.
Famille et travail : 2 lieux fondamentaux hiérarchisés où l'homme s'épanouit.
L'économie (relative à sa finalité) est le moyen matériel de donner les biens de telle façon
que l'homme puisse s'épanouir.
Politique : il n'y a de communauté politique que si on veut vivre ensemble. Il faut consentir à
renoncer à une partie de sa volonté pour la remettre dans les mains des dirigeants. Il y a des
sentiments nationaux, sentiments d'appartenir à des entités culturelles. Nation :
communauté culturelle et politique sur un territoire donné qui a une certaine histoire et un
certain projet. L'Etat exprime la volonté du peuple dans une démocratie. Lui seul a le
monopole de la violence. Les citoyens doivent renoncer à leur violence pour la remettre
dans les mains de l'Etat à travers la police et l'armée. International : les relations entre les
nations doivent être régulées.
L'environnement : répercussion sur le cosmos. Il y a une politique cosmique : comment
allons-nous gérer la planète terre ? Politique nationale et internationale.
Paix : but et condition sine qua non de l'ensemble. Partout, particulièrement sur le plan
international, il y a une agressivité qu'il faut gérer. On peut penser que les Etats de droit
arrivent à gérer leur agressivité.
17
La famille, cellule vitale de la société
I/ Situation du problème
Mutation anthropologique. Nous vivons en ce moment une délocalisation du corps,
n’étant plus attaché à une terre donnée. Il y a eu une disqualification de la famille. Mais il
reste une demande de reconnaissance. Autrefois, il ne faisait pas de doute que la famille
était nécessaire : on ne pouvait pas vivre ensemble sans se marier. La délocalisation a abouti
a l’inouï dans l’histoire de l’humanité : on s’est mis en ménage avec n’importe qui pour un
temps plus ou moins long. Nous sommes passés d’une situation d’institutionnalité à une
situation de demande personnaliste. Ce sont les gens qui ne se sentent pas reconnus dans
leur dignité personnelle qui demandent à être mariés (homosexuels). La demande émane
des personnes et non de la société. Ce n’est plus la société qui impose mais la personne qui
demande : perte de la grammaire élémentaire. Nous passons du statut d’héritier (famille =
structure imposée) à celui d’inventeur (mariage = demande). L’état, en France, a un cran de
retard : il a accompagné la dislocation de la famille et des institutions, sciant la branche sur
laquelle il était assis. Nous revenons à une certaine demande institutionnelle aujourd’hui. La
cerise sur le gâteau, ce sont les homosexuels. Dans les années 90, ils voulaient choquer le
bourgeois, aujourd’hui, ils sont typiques de cette demande institutionnelle. Le balancier de
la désinstitutionnalisation revient vers l’institutionnalisation. Le dialogue intergénérationnel
est fondamental dans l’étape actuelle : on ne retrouvera pas le mariage tel qu’il était vécu
avant : l’histoire n’est pas un balancier mais une spirale. C’est l’homme qui doit trouver de
l’intérieur l’institution qui l’aidera à réguler ses affects. Rentrer dans une institution :
accepter d’être émondé pour porter du fruit.
II/ Qu’est-ce qu’une institution ?
•
•
•
C’est une situation juridique comportant des droits et des devoirs :
dans laquelle on est rituellement installé (on ne se marie pas, on est installé dans le
mariage par une institution ; on n’est pas maître des institutions ; elle vient casser la
toute-puissance ;
elle demande par elle-même des vertus correspondant à la responsabilité sociale confiée
(être marié demande d’être chaste et bon éducateur) ;
mais l’institution ne garantit pas ces vertus ; elle ne donne que le cadre, elle ne peut pas
être vertueuse à ma place ; un sentiment de toute-puissance est portée à la société, cela
conduit à la ruine morale ; la société laisse chacun devant ses responsabilités.
III/ Mutation anthropologique et ‘refonte’ religieuse de la famille
Nos frères intégristes nous reprochent d’avoir changé de doctrine à Vatican II. De fait, il y a
un changement dû à l’apport du personnalisme. Jusque dans les 70’s, il était impensable
pour les gens de vivre ensemble hors mariage. À ce moment-là, ce qui allait de soi est
devenu rétro… L’Église, avant Vatican II, développait l’institution sociale du mariage. Pour la
société, l’institution a pour but premier la procréation. La richesse d’un pays, ce sont ses
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enfants. Le mobile des acteurs, d’un point de vue personnaliste, c’est bien d’abord l’union,
l’amour mais c’est aussi d’avoir des enfants : la maturité d’un amour hétérosexuel inclut le
désir d’enfant, présence d’un tiers dans l’amour. Au niveau de l’opus operantis (l’œuvre des
opérants), l’union est en premier ; au moment où se mûrit l’amour, le désir d’enfant
apparaît, comme ouverture de l’amour à l’autre (tout amour est trinitaire), il apparaît
comme une vérification a posteriori, de l’amour vécu, mais le conjoint est aimé d’abord pour
lui-même. Du point de vue de la société, c’est les enfants qui importent avant tout.
Une société de subsistance ne peut pas ne pas mettre la survie des personnes avant la survie
du groupe. L’individualisme, qui apparaît après, est un luxe de riche. Une société de
subsistance contraint à la solidarité. L’érotisme dans le mariage est un luxe pour riche ; dans
la société de subsistance, le plaisir passe après la nécessité d’avoir des enfants. L’opulence
qui arrive dans les années 60’s change tout. Vatican II qui évoque le mariage comme
communauté de vie et d’amour, est tout à fait au point par rapport à son époque : visée
personnaliste (au lieu d’une visée institutionnaliste). Il n’y a pas eu altération de
l’enseignement mais on est passé d’un appui sur l’unique jambe gauche, à un équilibre entre
les deux. On est passé du souci prioritaire de la société au souci prioritaire de la personne.
IV/ Conséquences en DSE
Familiaris consortio (1981) : la société doit favoriser l’épanouissement familial des
personnes. La famille est le premier lieu de socialisation. Étant donné que l’on est en
situation d’opulence, nous sommes passés à un personalo-centrisme ; donc, ça ‘frotte’ en ce
moment. Il y a une forme de vie domestique qui favorise l’épanouissement du plus grand
nombre, cette forme doit être mise en avant par la société (si elle veut subsister…) et ne pas
tout mettre au même niveau : mariage, pacs, mariage homosexuel, familles
monoparentales… Il ne faut pas favoriser ce qui, de soi, n’est pas épanouissant. Bien
commun : ensemble des circonstances qui permettent de parvenir à sa perfection.
La famille est le premier lieu de socialisation : la société a intérêt à ce que les familles se
portent bien. Le premier lieu chronologiquement et psychologiquement d’apprentissage de
l’altérité, c’est la famille. La carence familiale aboutit à une désocialisation grave. La famille
est la meilleure protection des plus faibles. C’est ce qui devrait sous-tendre l’ensemble de la
législation sociale, familiale, éducative (responsabilité des parents : principe de subsidiarité),
relative au travail (aménagement de telle façon que les femmes, plus impliquées dans la
transmission de la vie, puissent parvenir à travailler)…
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Le travail humain
Pas de définition dans le Compendium de la DSE. C’est une activité libre et rémunérée
finalisée par la production et l’échange de biens et de service. Il est à différencier du
loisir qui est une activité libre finalisée par la détente ou la culture personnelle. Il est à
distinguer des contraintes de la vie : biens primaires : m’habiller de mon bel habit marron et
blanc, faire mon ménage à Blagnac tous les vendredis, etc. Il est à distinguer de la prière,
relation immédiate avec Dieu.
I/ Données bibliques
Le comble du don, c’est de participer à l’acte de donner en étant non seulement bénéficiaire
mais coopérateur de l’acte du don. Travail = participer à l’acte de création. C’est n’est pas
une punition. C’est, comme la sexualité, antérieur au péché. C’est qui est conséquent au
péché, c'est la peine qui est liée au travail. Le travail est un bien second à travers lequel il
faut aimer Dieu. C’est un bien second susceptible d’être idolâtré (comme tous les biens
seconds). Le Seigneur a mis un interdit ascétique : tu ne travailleras pas le jour du Shabbat
(tu mangeras ton pain de Shabbat et tu en passeras toujours un bout à ton frère carme…). Le
repos sabbatique : abandonner le bien second pour le bien premier, renoncer au don pour le
donateur (apprentissage de la mort). Pour nous autres, chrétiens, un autre argument de vrai
tempérance : Jésus, l’homme parfait, a travaillé. Jésus parle souvent du Royaume de Dieu
avec des paraboles relatives au travail. Le travail est un lieu d’élucidation du mystère de Dieu
et du mystère de l’homme. C’est le second lieu d’édification de l’homme et de mise à jour de
son mystère, après la famille. C’est aussi un devoir de travailler (1 Th 4, 11).
II/ Valeur prophétique de Rerum novarum (1891)
Nous sommes déjà en post-modernité. La modernité n’a touché la masse qu’à partir de la
révolution industrielle. Le lien de la personne à la terre a été rompu. La modernité touche les
élites à la Renaissance, la société politique à la Révolution, la masse à l’industrialisation.
Rerum novarum n’a pas parlé de la révolution industrielle au sujet de la condition des
ouvriers : option préférentielle pour les pauvres. On va essayer de voir ce que cela donne.
Aujourd’hui, nous vivons une mutation aussi importante que ce du 19ème. Sollicitudo rei
socialis (1987) : aujourd’hui : place prépondérante non plus de la terre, ni des biens, mais
des services (qui sont délocalisés). Par les moyens de communication moderne, nous
arrivons à une délocalisation sensorielle (ce qui rend très dangereux l’utilisation des
ordinateurs par les petits religieux en blanc et marron). Ces services demandent des
techniques qui exigent une capacité particulière (non requise pour les p’tits blancs/marrons,
quoi qu’on en dise…).
20
III/ Dignité du travail
1. Dimension objective
Le travail comporte une dimension objective : travail à faire et une dimension subjective :
l’engagement de la personne dans son travail. Ce n’est pas la grandeur et la beauté du travail
à faire qui va le rendre moral mais le fait qu’il est édifiant pour la personne. Si l’objet est
bon, si les conditions de travail sont injustes, le travail devient immoral. Le subjectif
l’emporte sur l’objectif. La personne humaine, avec son travail, est en relation avec la
nature, il collabore avec la nature, avec les autres, avec soi-même (ascèse personnelle :
occasion de la peine), avec Dieu (à travers tout cela). Le travailleur travaille et il est
rémunéré après ; son travail n’est pas une marchandise.
LE 6 : Pour continuer notre analyse du travail liée à la parole de la Bible selon laquelle
l'homme doit soumettre la terre, il nous faut maintenant concentrer notre attention
sur le travail au sens subjectif, beaucoup plus que nous ne l'avons fait en nous
référant au sens objectif du travail: nous avons tout juste effleuré ce vaste problème
qui est parfaitement connu, et dans tous ses détails, des spécialistes des divers
secteurs et aussi des hommes mêmes du monde du travail, chacun dans son
domaine. Si les paroles du Livre de la Genèse auxquelles nous nous référons dans
cette analyse parlent de façon indirecte du travail au sens objectif, c'est de la même
façon qu'elles parlent aussi du sujet du travail; mais ce qu'elles disent est fort
éloquent et rempli d'une grande signification.
L'homme doit soumettre la terre, il doit la dominer, parce que comme "image de
Dieu" il est une personne, c'est-à-dire un sujet, un sujet capable d'agir d'une manière
programmée et rationnelle, capable de décider de lui-même et tendant à se réaliser
lui-même. C'est en tant que personne que l'homme est sujet du travail. C'est en tant
que personne qu'il travaille, qu'il accomplit diverses actions appartenant au
processus du travail; et ces actions, indépendamment de leur contenu objectif,
doivent toutes servir à la réalisation de son humanité, à l'accomplissement de la
vocation qui lui est propre en raison de son humanité même: celle d'être une
personne. Les principales vérités sur ce thème ont été rappelées dernièrement par le
Concile Vatican II dans la constitution Gaudium et spes, en particulier par le chapitre I
consacré à la vocation de l'homme.
Ainsi la "domination" dont parle le texte biblique que nous méditons ici ne se réfère
pas seulement à la dimension objective du travail: elle nous introduit en même temps
à la compréhension de sa dimension subjective. Le travail entendu comme processus
par lequel l'homme et le genre humain soumettent la terre ne correspond à ce
concept fondamental de la Bible que lorsque, dans tout ce processus, l'homme se
manifeste en même temps et se confirme comme celui qui "domine". Cette
domination, en un certain sens, se réfère à la dimension subjective plus encore qu'à
la dimension objective: cette dimension conditionne la nature éthique du travail. Il
n'y a en effet aucun doute que le travail humain a une valeur éthique qui, sans
moyen terme, reste directement liée au fait que celui qui l'exécute est une personne,
un sujet conscient et libre, c'est-à-dire un sujet qui décide de lui-même.
21
Cette vérité, qui constitue en un certain sens le noyau central et permanent de la
doctrine chrétienne sur le travail humain, a eu et continue d'avoir une signification
fondamentale pour la formulation des importants problèmes sociaux au cours
d'époques entières.
L'âge antique a introduit parmi les hommes une différenciation typique par groupes
selon le genre de travail qu'ils faisaient. Le travail qui exigeait du travailleur l'emploi
des forces physiques, le travail des muscles et des mains, était considéré comme
indigne des hommes libres, et on y destinait donc les esclaves. Le christianisme,
élargissant certains aspects déjà propres à l'Ancien Testament, a accompli ici une
transformation fondamentale des concepts, en partant de l'ensemble du message
évangélique et surtout du fait que Celui qui, étant Dieu, est devenu en tout
semblable à nous (11), a consacré la plus grande partie de sa vie sur terre au travail
manuel, à son établi de charpentier. Cette circonstance constitue par elle-même le
plus éloquent "évangile du travail". Il en résulte que le fondement permettant de
déterminer la valeur du travail humain n'est pas avant tout le genre de travail que
l'on accomplit mais le fait que celui qui l'exécute est une personne. Les sources de la
dignité du travail doivent être cherchées surtout, non pas dans sa dimension
objective mais dans sa dimension subjective.
11- He 2,17 Ph 2,5-8
Avec une telle conception disparaît pratiquement le fondement même de l'ancienne
distinction des hommes en groupes déterminés par le genre de travail qu'ils
exécutent. Cela ne veut pas dire que le travail humain ne puisse et ne doive en
aucune façon être valorisé et qualifié d'un point de vue objectif. Cela veut dire
seulement que le premier fondement de la valeur du travail est l'homme lui-même,
son sujet. Ici vient tout de suite une conclusion très importante de nature éthique:
bien qu'il soit vrai que l'homme est destiné et est appelé au travail, le travail est
avant tout "pour l'homme" et non l'homme "pour le travail". Par cette conclusion, on
arrive fort justement à reconnaître la prééminence de la signification subjective du
travail par rapport à sa signification objective. En partant de cette façon de
comprendre les choses et en supposant que différents travaux accomplis par les
hommes puissent avoir une plus ou moins grande valeur objective, nous cherchons
toutefois à mettre en évidence le fait que chacun d'eux doit être estimé surtout à la
mesure de la dignité du sujet même du travail, c'est-à-dire de la personne, de
l'homme qui l'exécute. D'un autre côté, indépendamment du travail que tout homme
accomplit, et en supposant qu'il constitue un but parfois fort absorbant de son
activité, ce but ne possède pas par lui-même une signification définitive. En fin de
compte, le but du travail, de tout travail exécuté par l'homme fût-ce le plus humble
service, le travail le plus monotone selon l'échelle commune d'évaluation, voire le
plus marginalisant reste toujours l'homme lui-même. (1981 Laborem exercens 6)
22
2. Rapport capital / travail
Une des façons dont s’exprime la dignité du travail, c’est le lien entre le capital qui est un
moyen et le travail qui est une fin. C’est le travail qui est à l’origine du capital. Le capitalisme
est bon car il est nécessaire qu’il y ait une décision sur une accumulation importante de
capital. Au moment de la mise en place de l’industrie, le capitalisme ne se justifiait que par la
nécessaire unité de décision sur une masse importante de capital. Mais le capitaliste doit
bien distinguer les biens sociaux de l’entreprise de ses biens personnels. Le capital est la
création pré-travaillée par d’autres dont la valeur socialisée demande une unité de décision ;
les capitalistes sont les décideurs. L’unité de décision est fondamentale. Les capitalistes
doivent savoir qu’ils ont entre les mains le fruit du travail des autres. Cette nécessaire
répartition des rôles est source de conflits. Le conflit n’est pas moteur de l’histoire mais il est
inévitable. Le travail est donc une participation. Fruit du travail : rémunération +
accumulation du capital de l’entreprise. Morale du conflit du travail : syndicats, négociations,
grêves…
La richesse des riches n'est légitime que s'ils mettent leur richesse au service des pauvres.
CA 32 : Mais, à notre époque, il existe une autre forme de propriété et elle a une
importance qui n'est pas inférieure à celle de la terre : c'est la propriété de la
connaissance, de la technique et du savoir. La richesse des pays industrialisés se
fonde bien plus sur ce type de propriété que sur celui des ressources naturelles.
On a fait allusion au fait que l'homme travaille avec les autres hommes, prenant part
à un « travail social » qui s'étend dans des cercles de plus en plus larges. En règle
générale, celui qui produit un objet le fait, non seulement pour son usage personnel,
mais aussi pour que d'autres puissent s'en servir après avoir payé le juste prix,
convenu d'un commun accord dans une libre négociation. Or, la capacité de
connaître en temps utile les besoins des autres hommes et l'ensemble des facteurs
de production les plus aptes à les satisfaire, c'est précisément une autre source
importante de richesse dans la société moderne. Du reste, beaucoup de biens ne
peuvent être produits de la manière qui convient par le travail d'un seul individu,
mais ils requièrent la collaboration de nombreuses personnes au même objectif.
Organiser un tel effort de production, planifier sa durée, veiller à ce qu'il corresponde
positivement aux besoins à satisfaire en prenant les risques nécessaires, tout cela
constitue aussi une source de richesses dans la société actuelle. Ainsi devient
toujours plus évident et déterminant le rôle du travail humain mâtrisé et créatif et,
comme part essentielle de ce travail, celui de la capacité d'initiative et d'entreprise
(70).
Il faut considérer avec une attention favorable ce processus qui met en lumière
concrètement un enseignement sur la personne que le christianisme a constamment
affirmé. En effet, avec la terre, la principale ressource de l'homme, c'est l'homme luimême. C'est son intelligence qui lui fait découvrir les capacités productives de la terre
et les multiples manières dont les besoins humains peuvent être satisfaits. C'est son
travail maîtrisé, dans une collaboration solidaire, qui permet la création de
communautés de travail toujours plus larges et sûres pour accomplir la
transformation du milieu naturel et du milieu humain lui-même. Entrent dans ce
processus d'importantes vertus telles que l'application, l'ardeur au travail, la
23
prudence face aux risques raisonnables à prendre, la confiance méritée et la fidélité
dans les rapports interpersonnels, l'énergie dans l'exécution de décisions difficiles et
douloureuses mais nécessaires pour le travail commun de l'entreprise et pour faire
face aux éventuels renversements de situations.
L'économie moderne de l'entreprise comporte des aspects positifs dont la source est
la liberté de la personne qui s'exprime dans le domaine économique comme en
beaucoup d'autres. En effet, l'économie est un secteur parmi les multiples formes de
l'activité humaine, et dans ce secteur, comme en tout autre, le droit à la liberté
existe, de même que le devoir d'en faire un usage responsable. Mais il importe de
noter qu'il y a des différences caractéristiques entre ces tendances de la société
moderne et celles du passé même récent. Si, autrefois, le facteur décisif de la
production était la terre, et si, plus tard, c'était le capital, compris comme l'ensemble
des machines et des instruments de production, aujourd'hui le facteur décisif est de
plus en plus l'homme lui-même, c'est-à-dire sa capacité de connaissance qui apparaît
dans le savoir scientifique, sa capacité d'organisation solidaire et sa capacité de saisir
et de satisfaire les besoins des autres. (1991 Centesimus annus 32)
3. Travail titre de participation
4. Rapport du travail / propriété
Si la propriété (biens à destination sociale : logements, bien culturels…) n'est pas utilisée
dans la dynamique de la destination universelle des biens, elle perd sa légitimité. La
propriété peut être publique. Il y a des circonstances où la collectivité peut devenir
propriétaire quand il s'agit de biens à utilité sociale immédiate.
5. Le droit et le devoir au repos
Le repos est le symbole de la non-adulation de ce bien second qu'est le travail. Shabbath –
dimanche. Joie, recueillement, gratuité, détente. Des relations humaines non-marchandes.
IV. Droit au travail
1. Le travail
Le développement personnel implique une activité valorisante et valorisée. Le chômeur est
atteint dans sa dignité. Le travail est nécessaire à notre relation à la création, à Dieu, à nousmêmes. Les différents partenaires sociaux (Etat, société civile, entreprises) doivent tous faire
ce qui est en leur pouvoir pour éradiquer le chômage. Libéralisme anglo-saxon : diminuer le
prix du travail pour avoir moins de chômage (risque de ne plus pouvoir vivre de son travail :
"poor worker"). Capitalisme rhénan (France-Allemagne, socio-démocratie) : on ne diminue
pas le prix du travail, mais on accepte un haut taux de chômage (exclus). Le chômage de
masse aboutit chez le tiers à la perte de la capacité de travailler.
Le travail au plein emploi est un devoir moral pour tous les acteurs sociaux.
2. Rôle de l'Etat et de la société civile
La politique de l'emploi doit respecter le principe de subsidiarité. L'Etat ne peut pas gérer
toute l'économie. Ce n'est pas "laisser faire", un laxisme. Il s'agit aussi de soutenir,
24
d'encourager. L'Etat doit susciter des activités économiques de façon artificielles selon les
lois du libéralisme, mais de façon la moins longue possible. Cela demande une collaboration
internationale. L'intervention de l'Etat doit être négociée au niveau international. Projet d'un
SMIC européen. Il y a des signes positifs de collaboration qui doit être de type fédéral (on
part de la base, d'unités autonomes). La France devra bien un jour changer son système
(délégation à partir d'un pouvoir central fort) pour un système fédéral.
3. Famille et droit au travail
Lien entre droit au travail et structure familiale de la société. Lutter contre deux erreurs : 1/
une conception privatiste de la famille. Pour se développer, un homme doit coordonner sa
vie de travail et sa vie familiale. La fiscalité et les allocations familiales permettent
finalement que 2 personnes qui font le même travail n'ont pas le même revenu. Mais on n'a
pas encore pensé une adaptation des tâches selon la situation familiale. Influence des idées
marxistes qui considèrent le travailleur comme pur outil de production. On devra payer des
flics, des juges, des prisons… pour ne pas avoir soutenu la famille.
4. Femmes et droit au travail
"Génie féminin" évoqué par la DES. On donne exactement les mêmes postes aux hommes et
aux femmes. Or les femmes sont moins "sûres" à cause de la maternité. Donc on paye les
femmes moins cher car elles coûtent plus.
Femmes : qualité d'attention aux personnes. L'homme vient "casser" de l'extérieur la
relation fusionnelle entre la femme et l'enfant. On ne peut pas lui demander la même
attention !
L'égalité de revenu implique l'égalité de travail. Il faudrait arriver à un certain salaire féminin
ou familiale. Mettre au monde des enfants, c'est contribuer à l'enrichissement de la société.
Il faudrait "déprivatiser" la famille.
5. Travail des enfants
Le travail d'enfants doit être condamné. Cependant pour certains pays il faut en sortir
progressivement.
6. Migration et travail
Les mouvements de populations dues à des manques et à des besoins dans certaines zones
géographiques doivent être considérés d'abord positivement. Ces migrations peuvent être
régulées par un travail de développement dans les pays d'émigration. La régulation à partir
du sud est beaucoup plus galèreuse !
7. Monde agricole
Il existe toujours ! Pour intégrer le monde agricole au niveau de vie du monde industriel, on
a subventionné jusqu'à aujourd'hui. 2 effets pervers : 1/ articifice des prix. 2/ une activité qui
n'est plus régulée par l'offre et la demande.
Pas d'autres solutions que de payer notre nourriture beaucoup plus cher pour faire vivre nos
agriculteurs.
Les codes internationaux stipulent qu'une ère géographique donnée peut avoir une "sécurité
alimentaire". Elle doit pouvoir subvenir à ses besoins. Les produits extérieurs ne viennent
qu'en supplément. Ce n'est pas du protectionisme qui est l'autarcie complète. Il ne peut y
avoir de commerce équitable que entre égaux. Il faut que les différentes ères sociopolitiques aient leur égalité. Après ils peuvent échanger.
25
Transports : on pensait jusqu'à 10-15 ans que les transports seraient de moins en moins
cher. Mais il faudra changer d'énergie. On a des stocks pour vivre longtemps, mais trop
polluants. Les informations seront de moins en moins chères, mais pas les transports.
V. Droit des travailleurs
Le salaire doit faire vivre le travailleur, selon le capitalisme rhénan. On n'a pas vraiment de
travailleur pauvre. Dans une société d'opulence, qu'est-ce qui est nécessaire ? Palier du SMIC
? Le droit de grève est l'ultime recours : pour la grève, il faut que le motif soit grave et
persistant (théologie augustinienne de la "guerre juste").
VI. Solidarité entre travailleurs
Les syndicats sont importants. 2 objectifs : 1/ internationaliser la solidarité ouvrière. 2/
éviter le corporatisme.
VII. Les res novae de notre temps
Une mondialisation qui peut être illusoire si elle n'est pas unie en Christ. Ne pas confondre
l'uniformité technique et l'unité du genre humain. Rien n'est automatique.
Compendium 311. Fragmentation de l'espace-temps : le "corps éclaté".
Mondialisation de l'économie : le capitaux traversent la planète comme l'éclair.
26
2ème partie du cours de Doctrine sociale de l'Eglise
Chapitre I – Présentation de la doctrine sociale de l'Eglise
et les défis du 21ème s.
Une tension fondamentale entre bien personnel et bien commun
La DSE est en travail dans une tension entre bien personnel et bien commun.
Historiquement les papes sont allés du bien personnel au bien commun. Jean-Paul II a tout
renversé : l'homme est un être communautaire, social. Un être pour l'autre, par l'autre. Les
papes sont aussi partis d'une défense légitime et mesurée de la propriété privée vers le
propos sur la destination universelle des biens. On défend et on cadre (fin 19ème s.). on
finalise la propriété privée par la destination universelle des biens. Avec Jean-Paul, on
inverse encore. Principe de solidarité : il y a une solidarité intrinsèque entre tous les
hommes. Il doit y avoir un principe de répartition, de partage qui légitime la liberté
d'initiative, la propriété privée. Avec Jean-Paul II, on part de la collectivité pour aller à
l'individu. Fondement anthropologique : l'homme est un être pour l'homme (5ème inclination
de la loi naturel).
En psychologie sociale, il est question de la tension entre l'individu et le groupe. Aujourd'hui
dans la société post-moderne, l'homme est comme délié du groupe.
Si on prend la carte du monde aujourd'hui. 2 types d'anthropologie. Communautaire : sudest asiatique, Afrique, Amérique du Sud. Individualiste : Europe, Amérique du Nord. On
insiste soit sur l'individu, soit sur le groupe. A travers le néo-libéralisme qui porte la
mondialisation, on insiste sur l'individu.
Cf. Analyse de M. Campdessus
I. Sortir d'une dépression larvée
Le monde va mieux. Dans une société vieillissante, le sentiment critique, la dépression
augmente. Le monde a changé, il change. Il n'a jamais autant changé qu'au 20ème s. La mise
en œuvre de la globalisation par internet notamment va très vite, plus vite que nos idées.
Difficulté à maîtriser notre destin personnel, sentiment d'inquiétude qui peut prendre la
forme d'un scepticisme. On ne regarde que les mauvaises nouvelles. Et pourtant,
globalement, tout va mieux. Le monde va bien mieux.
La démocratie a progressé : Amérique du Sud, chute du communisme. La liberté personnelle
a gagné du terrain. L'homme a pris conscience de lui-même, de son pouvoir, de ses droits.
Logique de développement. Ex : en 20 ans l'Egypte a repoussé l'analphabétisme de 30 %.
Lien entre culture et démocratie. Certes, le développement ne se fait pas de façon égalitaire.
Accès aux soins. Grâce à l'OMS, et l'UNICEF, en 30 ans, le Mexique a gagné en espérance de
vie autant que la Suède en 150 ans. Lutte contre le paludisme au Sri Lanka.
27
Plan moral. En 1991, Ratzinger disait : si on est tous d'accord sur le progrès, en quoi le
progrès serait la première question ? La première question, c'est la finalité de ce progrès !
Plan économique et social : le développement a fait avancé presque tous les pays. Depuis 40
ans, il y a une croissance globale. Petite en Occident, grande dans des pays en voie de
développement (Chine : entre 8 et 10 %). Globalement, la peine des hommes et des femmes
diminue. La science et la médecine progressent. Des libertés nouvelles sont reconnues et
vécues. Globalement, on avance. 1 homme sur 3 : 1 dollar par jour au Brésil, en Indes. On
peut parler de fracture sociale en Europe, mais "d'abîme social" dans d'autres continents.
L'optimisme foncier doit être une hygiène mentale.
Souvent, le bouc-émissaire de ce qui ne va pas dans le monde est la mondialisation.
Pourtant, la raison fondamentale du travail des enfants (et des sévices), c'est le sousdéveloppement. La bonne nouvelle, c'est la prise de conscience générale de non-tolérance
de la souffrance des enfants. Hier encore, c'était la règle. L'élément nouveau, ce n'est pas la
souffrance, mais le refus de l'accepter. De même pour l'exploitation sexuelle des enfants
(tourisme sexuel, pédophile). Souci planétaire qui favorise l'émergence d'un droit pénal
mondial.
Sur le plan politique, des choses avances. Procès aux dictateurs : Pinochet, Milosévitch,
Saddam Hussein.
Les peuples repus ou fatigués n'ont pas d'espérance. Le pessimisme va de pair avec la
vieillesse, pb de démographie.
II. Limites de ces grands progrès
1. Défi social
"Le grand espoir" est-il encore transposable au 21ème s. ? Le progrès social n'est plus au
rendez-vous. Le nombre des pauvres augmente. Problème de cohésion sociale. En Europe,
de nouvelles pauvretés : migrants qui lavent les vitres. USA, 50 % des jeunes noirs n'ont pas
de travail.
Progrès économique n'implique pas progrès social. Un nouveau spectre qui hante les
sociétés occidentales. Le niveau de vie augmente, mais le stress et l'angoisse aussi.
Sentiment d'insécurité. Extension de la drogue, de l'incivilité, violence, …
"Economie sociale de marché" : l'économie de devrait pas être séparée de la cohésion
sociale. Essai durant la 2ème moitié du 20ème s. Vers les années 80, on est entré dans une
économie anti-sociale de marché.
Le défi social : socialiser la mondialisation.
2. Défi politique
Divergence fondamentale entre une économie qui se mondialise et une politique qui
demeure encore territoriale. Contre-exemple : construction de l'Europe politique (pour
l'instant, refus de la Constitution européenne). Une fragmentation politique du monde. Le
principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes a conduit à la multiplication des états
souverains. Problème des Etats tampons (Liban, Slovénie). Même une régionalisation du
politique. Le grand problème à venir : la Chine qui explose économiquement, concentré dans
28
le Sud-est. Déplacement des populations. Il y a beaucoup de manifestations en Chine.
Mondialisation qui provoque des revendications.
Divergence entre une économie globalisée et une politique fragmentée. La mondialisation
accélère les phénomènes de repliement nationaliste et identitaire. Plus ces souverainetés
sont revendiquées, plus l'économie les bafoue. Inadéquation économique et politique.
L'espace mondial est en partie vide.
Le bien commun des nations n'est pas la somme des intérêts particuliers. De même le bien
commun du monde n'est pas la somme des biens communs particuliers des nations. Il y a un
bien commun universel qu'il faut définir, servir, réfléchir.
4 solutions imaginables : 1/ renoncer au politique, solution néo-libérale. Inconvénient :
s'accommoder du fatalisme des injustices. 2/ projet souverainiste : illusion. Comment créer
une entité politique mondiale qui gèrerait tous les flux. 3/ voir plus grand. Sens des
organisations supra-nationale comme l'Europe. Intéressant mais insuffisant. 4/ création
d'une gouvernance mondiale : là doit se situer l'objectif. Institution d'une démocratie
participatrice. Pour prendre le même rythme que l'économie. Retrouver un équilibre entre la
globalisation économique et la fragmentation du politique. L'enjeu est la cohésion sociale
mondiale.
Il faut un service mutel entre gouvernance mondiale et gestation mondiale de l'économie. Le
principe de subsidiarité repose sur le principe social et anthropologique de la libre initiative.
3. Défi anthropologique : le respect de la personne humaine
La personne peut être amenée au rang de pur instrument. L'homme pris comme moyen et
non comme fin. JP II : l'homme est le centre et le sommet de la DSE. La personne est la fin. Il
faut être clair : dans l'histoire, l'instrumentalisation de l'homme évolue. Aujourd'hui, elle vise
l'homme au plus intime de son identité. Menace violente.
3 formes d'instrumentalisation possibles : 1/ politique : le drame principal du 20ème s. 1ère
guerre mondiale : homme-chair à canon. Idéologies totalitaires : l'homme, atome
négligeable dans le grand tout de l'Etat. 2/ économie : l'homme réduit à une force de
production (prolétaire, immigré, séminariste). 3/ la science : l'instrumentalisation de
l'homme par la science a rejoint l'économique. Génétique, neuro-science. La science du
vivant devient capable d'intervenir sur l'homme lui-même. Possibilité de travailler sur le
clonage thérapeutique mais à partir de cellules souches adultes.
Où va-t-on ? La question du référentiel se pose. Pour l'Eglise, c'est la Loi naturelle. Inclination
au bien, vérité, union sexuelle et éducation, défense (auto-défense), vie à la société (désir de
la communion). Il faut l'actualiser.
Faire le lien entre loi naturelle, droit naturel et problèmes de société.
Débat au plan social entre culture qui change en permanence et une nature qui demeure.
Comment la nature humaine est capable de s'enrichir de la culture ? Comme la culture peutelle servir la nature humaine ?
29
Autorité politique et démocratie
I. L'autorité politique
L'autorité politique est nécessaire. Toute société a besoin d'un chef. Pas de génération
spontanée. Il faut un ordre propre à la génération. Elle doit garantir la vie ordonnée droite
de la communauté sans se substituer à la libre activité des individus, initiative des membres.
Tension positive entre bien commun et bien personnel. Pas substitution, mais mise en ordre,
discipline, orientation. Tutelle, direction mais aussi respect. Les sujets doivent pouvoir
mettre en œuvre leur pensée et pouvoir vérifier que leur action s'insère vraiment dans le
bien commun.
L'autorité politique doit être "au service de la croissance humaine intégrale de la personne".
Intégrale : aspect dynamique d'intégration, et objectif ultime, celui du bien. L'autorité
politique doit se déployer dans les limites de l'ordre moral : la loi naturelle doit être
interprétée en fonction de la vie réelle des individus.
Le sujet de la vie politique : les personnes, l'ensemble des personnes, le peuple, détenteur
de la souveraineté. Le peuple transfert l'autorité et la contrôle. L'autorité : faire grandir en
vue du bien de la personne. Elle doit se faire guider par la loi morale, elle-même encadrée
par la loi naturelle.
Dans une communauté de personnes, il faut un ordre de relations, cadré par l'ordre naturel,
fondé ultimement sur Dieu. Valeur relative de la majorité suivant son rapport à la vérité
divine. Valeur morale située en fonction de la valeur même de l'être humain. La dignité de la
personne n'est pas relative à une majorité. Aucun Etat ne pourra jamais créer une nouvelle
dignité de la personne, ni l'abolir mais devra la servir.
L'autorité doit donc promulguer des lois "justes". La référence ultime de la DSE, ce sera la
personne humaine. Cf. Personne et acte, JP II.
Le sujet doit obéir à cette loi juste. Celui qui refuse d'obéir à l'autorité s'oppose à Dieu. La loi
civile, quand elle respecte la loi juste est comme le représentant de Dieu dans la loi civile. NB
: l'autorité politique est une médiation naturelle. Le but principal des hommes politiques : la
paix civile. Il faut toujours des compromis : espace commun où tous puissent vivre selon leur
conscience.
Un droit à l'objection de conscience : pas d'obligation d'obéir à la loi si elle est contre la
conscience morale, contre l'Evangile (CEC 2242) … Contre une loi injuste, l'homme n'est pas
obligé d'avoir un comportement injuste.
Cf. clause de conscience pour les infirmières. Le
citoyen peut ne pas obéir à la loi injuste. L'Eglise conseille la résistance non-violente. (Qui
suis-je pour me mettre à la place de la conscience de l'autre ? Lien dynamique entre liberté
et vérité. Vatican II : vérité de religion, vérité de conscience). Si on veut contester
structurellement une loi, il faudra prendre les moyens des médiations (médiation par la
raison, par les institutions).
Un refus qui constitue un devoir moral, mais aussi un droit humain fondamental. Principe de
réalité politique : on ne passe pas du noir au blanc. Par exemple, un député peut voter une
loi qui "améliore" une loi sur l'avortement.
Droit d'infliger des peines proportionnées à la gravité des délits. Le but de la peine est
toujours finalisé par la personne. Pas seulement pour l'ordre public et la sécurité des
30
personnes : elle doit servir comme "expiation" quand le coupable accepte sa peine. Objectif
double : réinsérer la personne et promouvoir une justice réconciliatrice. Faire prendre
conscience que l'acte a rompu la confiance sociale. le but ultime : la réinsertion, réorienter
sa vie en fonction du bien commun. Défendre la dignité de la personne (rappeler aux
prisonniers qu'ils sont dignes).
Ryan : autorité pour faire grandir en vue de la perfection du corps social et du bien
personnel. L'autorité renvoie à l'auteur (créativité, inventivité). On recherche une solution
pour aujourd'hui. On est aussi dans la contingence sociale. Aller de l'avant, créer, décider,
oser. L'autorité sociale doit avoir un rôle efficace (pouvoir coercitif, pouvoir de contrainte).
Limites de l'autorité : 1/ une limite en elle-même ; il faut que les décisions qu'elle prend
soient utiles au bien commun. Respect de la subsidiarité. Elle parle à des consciences et à
des libertés. 2/ limites par en-haut : cadrage de l'autorité par la loi naturelle et la loi divine.
Question de la loi juste. 3/ limites "sur le côté" : respecter le droit des autres états, droit
supra-national (ex : Europe).
L'autorité doit se mouvoir avec prudence. C'est la liberté qui décide. Elle procède de la loi de
Dieu qui parle à une conscience. Conscience reçue dans le jugement de prudence. La liberté
décide sous le faisceau vrai / conscience / bien. Le jugement de prudence accueille les
valeurs universelles pour les faire atterrir dans le concret singulier. Au plan social, la liberté
s'appelle la volonté politique.
NB : la notion d'ordre revient dans l'actualité. Point de vue sécuritaire et non pas encore
moral. La notion de valeur viendra approcher la notion "d'ordre moral". Aujourd'hui la
définition des valeurs est subjective et non pas objective.
II. La démocratie
L'Eglise a évolué sur cette question. Système politique recevable. Acceptation de la fin de la
monarchie. Système le plus adéquate pour la société d'aujourd'hui. Cf. Centessimus annus 46
:
"L'Eglise apprécie le système démocratique, comme système qui assure la
participation des citoyens aux choix politiques et garantit aux gouvernés la possibilité
de choisir et de contrôler leurs gouvernants, ou de les remplacer de manière
pacifique lorsque cela s'avère opportun. Cependant, l'Eglise ne peut approuver la
constitution de groupes dirigeants restreints qui usurpent le pouvoir de l'Etat au
profit de leurs intérêts particuliers ou à des fins idéologiques. Une démocratie
authentique n'est possible que dans un Etat de droit et sur la base d'une conception
correcte de la personne humaine. Elle requiert la réalisation des conditions
nécessaires pour la promotion des personnes, par l'éducation et la formation à un
vrai idéal, et aussi l'épanouissement de la "personnalité" de la société, par la création
de structures de participation et de coresponsabilité."
Principe de participation comme un des principes fondamentaux de la DSE. Ce qui fait la
force de la société civile dans une démocratie, c'est la petite bourgeoisie. La démocratie est
un organisme qui grandit lentement.
31
Les valeurs de la démocratie doivent être relatives aux valeurs de la personne humaine.
Recherche du bien commun comme fin et critère de régulation de la vie politique. Le
relativisme éthique porte atteinte à la réalité du bien commun, un des risques majeurs des
démocraties actuelles.
La démocratie est un système et comme telle un instrument et non une fin. Son caractère
moral n'est pas automatique. Elle n'a pas à s'ériger en forme d'absolu. EV 70 : la moralité
dépend de la fin et des moyens utilisés. Il faut que les moyens soient ordonnés à la fin.
Du point de vue des institutions
Toute démocratie se déploie dans un état de droit. Nécessité de lois, de statuts. La vie
grandit par étape, et les problèmes arrivent ! Les statuts viennent harmoniser l'espace des
relations, équilibre et tension entre charisme et bien des personnes (bien commun / bien
personnel). L'Etat de droit vient garantir au sujet la possibilité d'initiative. Rôle de l'Etat :
garantir la paix sociale, garantir l'accès au travail le plus large possible (M. Rocard).
Toute autorité politique doit rendre compte de ses actions face au peuple. Régulation du
pouvoir qui s'enracine dans le peuple, dans les personnes. Les personnes délèguent une
partie de leur liberté à des représentants. Le but des élus : s'engager à rechercher la bonne
marche de la communauté humaine dans son ensemble. Recherche active du bien commun.
Paix sociale (en France, dès qu'il y a plus d'1 million de manifestants, l'Etat recule et c'est à
son honneur).
Pratiquer le pouvoir dans un esprit de service. Modestie, patience, modération, partage,
compromis. Ne pas rechercher le prestige de la fonction, mais le service du bien commun.
Quand les élites sont corrompues, alors le système démocratique est atteint à sa racine. La
corruption politique trahit les principes mêmes de la démocratie. La corruption déforme à la
racine les institutions démocratiques. Vérifier la neutralité de l'administration. Un excès de
bureaucratisation touche aussi la démocratie en empêchant l'initiative. "L'administration,
c'est la forme d'un contenu qui existe en dehors d'elle" (Marx). C'est une question
d'équilibre.
En France, l'esprit de service se concrétise dans les services publics. Aujourd'hui, confiés
souvent à des entreprises privées avec des cahiers des charges strictes.
Accès aux charges : tous peuvent avoir accès à l'autorité. Il faut une logique de démocratie
interne aux partis. Les moyens de communication sont importants et garantissent la
démocratie. Vérifier encore que les moyens de com. sont au service du bien des personnes :
maturation, responsabilité, ouverture, service des pauvres. Personne et communauté
humaine comme mesure des moyens de com. Contrôle de ces moyens : en France, CSA pour
le contrôle des moyens télévisés.
Minnerath : démocratie comme meilleur moyen aujourd'hui pour réguler l'Etat de droit. On
part vraiment de la liberté des personnes. La vie démocratique permet la promotion de la
société civile. Valeur de la démocratie : le respect de l'autre ; tous ont même dignité et
même droit. Ma vérité se propose à la liberté des autres. Menaces sur la démocratie : 1/ la
considérer comme une valeur absolue. Il faut régulariser les mouvements sociaux,
médiatiques, éco et financiers inter-étatiques.
32
Texte de Schooyans : ne pas séparer la morale sociale de la morale personnelle. Le
problème de la démocratie, c'est qu'on sépare les 2 (relativisme éthique). On renvoie la
sphère de la morale personnelle à la sphère privée. Veritatis Splendor attaque !
33
Communauté des Nations et Paix
Monde "multi-polaire" où il faut se parler, se rencontrer. Les grandes civilisations selon
Huntington :
- civilisation occidentale, civilisation orthodoxe, civ. Africaine, hindoue, latino-américaine,
chinoise, japonaise.
Les grands lieux de tensions : le Proche-Orient (frontière entre islamique et occidentale),
entre civ. Islamique (Afrique nord) et civilisation africaine (marquée par le christianisme)
(Soudan, RCI, Ouganda).
Intégration, comme réponse aux tensions culturelles. Pour se sentir fort, les pays de même
culture s'unissent. Grandes zones d'alliance qui vont du libre échange à l'union économique.
Par ex, le MERCOSUR (marché d'Amérique du Sud). L'ASEAN (assoc. Politique de la région du
Sud-Est asiatique) + APEC : 60 % du PIB mondial. Les Etats-Unis sont tentés de se tourner
davantage vers l'Asie.
La logique nationale-nationaliste est éclatée dans le monde contemporain. Pour intégrer les
relations internationales, se développent des zones politiques, économiques. La réflexion de
l'Eglise prend aussi cela en compte. Elle propose des critères pour une bonne entente.
Rappel des principes fondamentaux de la morale sociale :
- bien commun
- destination universelle des biens
- principe de subsidiarité
- principe de participation
- principe de solidarité
Tout cela, porté par le principe fondamental de la dignité de la personne qui se déploie dans
ces principes. Ces principes sont en lien avec les valeurs fondamentales : vérité, justice et
liberté, pour atteindre le but de la vie de tout homme, la charité.
Ce qui est valable au plan des personnes physiques est valable au plan des personnes
morales. La communauté des Nations doit prendre tout cela en compte.
I – Aspects bibliques
1. Unité du genre humain
Nous sommes tous frères les uns des autres. Le Dieu d'Israël est le Dieu de l'histoire et du
Cosmos. L'être humain n'a pas été créé isolé, mais créé dans un contexte. Espace vital qui lui
assure la liberté : cf. jardin de l'Eden. Disponibilité des aliments : arbres du jardin. Contexte
de travail : commandement de cultiver. La Communauté : homme et femme il les créa. Dieu
veut garantir à l'homme les biens nécessaires à sa croissance. L'espace commun doit garantir
cette croissance. L'homme est responsable de la gestion de la création. De cette unité de
départ, était perçue une unité de langage : "même langue et même mots". Tout le monde se
parle… mais les hommes se sont divisés tournant le dos à Dieu.
Même origine : Abraham, père d'une multitude des peuples. Jésus-Christ : prototype et
fondement de cette nouvelle humanité, véritable image de Dieu en qui tout homme trouve
son achèvement. L'Eglise annonce le Christ. Le rôle de l'Eglise : rassembler les peuples pour à
34
nouveau témoigner de l'unité perdue à Babel. Pour l'Eglise, cette pleine unité se fait dans le
Christ. Cf. LG 1.
Le Christianisme ne s'arrête pas au choc des civilisations. Vocation universelle. L'Eglise est
contre le cloisonnement des civilisations, et favorise les rencontres. Langage spirituel de
"communion". On parle aussi de "communauté européenne" (cf. fondateurs de l'Europe).
La communauté mondiale, vue et pensée par l'Eglise doit l'unité voulue par le Créateur.
Egalité de dignité naturelle entre tous les hommes.
2. Règles fondamentales
Le caractère central sera toujours celui de la personne humaine. Par déplacement, la
capacité pour les personnes et les peuples de créer des relations. L'Etat ne doit pas absorber
la personne. Le but de cette construction de la communauté internationale : le véritable bien
commun universel. Pour cela, les Etats et les personnes doivent sortir d'elles mêmes.
"Personne pour". De même, pour les Etats qui sont invités à se tourner vers les autres.
L'unité de la famille humaine se construit au-delà de toute idéologie : matérialiste ou
nationaliste. Il s'agit de s'ouvrir à l'autre pour s'enrichir de sa valeur culturelle.
La coexistence entre les nations est fondée sur les autres valeurs de la personne. La
régulation des rapports entre personnes ou entre Etats doit se faire par la raison, l'équité, le
droit, la négociation, le refus de recourir à la violence, à la discrimination, à l'intimidation et
à la tromperie. Tout cela doit se passer d'abord dans un cadre juridique. C'est porté par la
conviction que le bien commun d'une nation est inséparable du bien commun de la famille
humaine entière. On n'est pas sujet de droit tout seul, mais dans un espace de droit. La
communauté internationale est fondée sur la souveraineté de chaque Etat, indépendant et
libre.
On favorise l'expression de chacun – principe de subsidiarité. La souveraineté nationale est
conçue comme le lieu de l'expression de la liberté. La souveraineté représente la subjectivité
d'une nation. La dimension culturelle acquiert une dimension particulière en tant que
résistance face à l'agression. La culture exprime la souveraineté spirituelle d'un peuple. Une
souveraineté nationale pas absolue cependant. Famille du genre humain.
Le droit international doit être fondé dans la loi morale universelle. "Grammaire entre les
peuples" : retrouver une grammaire commune. Aujourd'hui, cette grammaire, ce sont les
droits de l'homme. René Cassin, qui a écrit la charte des droits de l'homme était un juif
français. On l'a signée en 1948. on parle aussi d'un droit des peuples ("ius gentium"), ancêtre
du droit international. Il existe des principes universels antérieurs et supérieurs au droit
interne des Etats.
- l'unité du genre humain
- égale dignité de chaque peuple
- refus de la guerre pour régler les différents
- obligation de coopérer en vue du bien commun
- exigence de respecter les engagements souscrits
La tentation de recourir au "droit de la force" doit être remplacée par la "force du droit".
Pour résoudre les conflits, renoncer au rapport de force. CA 18.
Critère d'un Nouvel ordre international : La liberté et l'intégrité territoriale de chaque pays,
la protection des minorités, juste répartition des ressources de la terre, refus de la guerre,
désarmement, respect des accords, fin de la persécution religieuse. Besoin de conscience
réciproque, de confiance : geste symboliques.
35
Eléments d'organisation
GS 82. Objectif : sécurité, respect de la justice et la garantie des droits. Cette organisation
internationale ne doit pas devenir un super-Etat mondial. Donc pas d'ingérence (à part les
cas où il faut recréer un Etat de droit). Une autorité politique qui doit être règlementée par
le droit, ordonnée au bien commun et respectueuse du principe de subsidiarité.
Pacem in terris, Jean XXIII : la com. internationale ne doit pas se substituer aux Etats, ni aux
personnes. Garantir la sécurité.
Diplomatie : plus haut degré de service qu'un chrétien puisse faire à la société (Pie XII).
Objectif : paix et développement. Le droit ne suffit pas. La confiance est le climat des
relations internationales. Elle permet de dépasser les rivalités politiques pour servir le bien
commun international. Cette OI doit permettre de favoriser le développement intégral des
pays, particulièrement les pays pauvres. Mise ne place d'une plus grande solidarité.
Favoriser les pays en voies de développement, c'est profitable à tous : possibilité
d'exportation vers ces nouveaux marchés.
Une bonne OI n'est possible que si tout cela s'appuie sur des sociétés civiles fortes, avec une
réflexion qui vienne de la base (organisations non-gouvernementales, réflexion altermondialiste).
Intervention de l'Eglise
L'Eglise intervient à l'ONU comme observateur pour être neutre, au service de tous les
peuples. Service désintéressé, pour travailler au bien commun de la famille humaine toute
entière. Elle intervient aussi en favorisant le dialogue au sein des pays. Le but du Saint-Siège,
c'est de permettre un dialogue structuré et structurant.
But de cette coopération internationale
1/ Garantir le droit au développement. Empêcher toutes les formes de structures de péché
qui porteraient atteinte à la justice dans les rapports économiques et sociaux.
2/ Lutte contre la pauvreté (priorité en Afrique, option préférentielle pour les pauvres ; ex :
en Irlande, avant de voter une loi, on étudie les conséquences éventuelles de cette loi sur les
plus pauvres). Eviter que les pays se surendettent.
3/ Ne pas compromettre le droit d'un pays à la subsistance, à l'autonomie. En France, dette,
64 % du PIB.
36
L'économie et la mondialisation
Une philosophie politique du "don" : se donner les uns les autres, s'aider. Dynamique de la
confiance entre les Etats (cf. Jean XXIII, Pacem in terris). La morale sociale engage. Le
fondement naturel s'incarne de manière volontaire.
I. L'Europe
Son unification politique est aujourd'hui un peu ralentie. Les étapes parcourues :
réconciliation franco-allemande est une réalité et même un moteur pour l'Europe ; elle a
une valeur exemplaire, et même fondatrice. Audace utopique de certains hommes politiques
et chrétiens éclairés. Première fois depuis 50 ans qu'il n'y a pas eu de grande guerre et
grands Etats européens. Possibilité de construire le point de départ d'une gouvernance
mondiale. Le monde arriverait à la conviction qu'aucune nation ne peut plus gouverner seul
le monde. Le monde a besoin de se parler, de s'organiser politiquement. Europe
économique ; sur le plan diplomatique et militaire, des embryons d'organisation.
Dilemme de notre Europe : laisser l'Europe sans intégration réciproque, ou bien se
construire comme fédération dans le sens d'une économie sociale de marché (modèle
européen). Aujourd'hui cette option est menacée par l'élargissement de l'Union et par un
blocage politique. Les protections sociales, relations du travail, cohésion sociale,
humanisation de la croissance, refus des exclusions : tous ces domaines dépendent de
l'engagement des pays. Le non de la France à la Constitution européenne est une vraie
question : non à une Constitution qui ne garantit pas un lien social fort (France). 20,25 %
seulement aurait dit non à la Constitution pour des questions de souveraineté nationale.
1/ Les grands principes fondateurs européens
Eco sociale de marché / Eco anti-sociale de marché. Dans une économie sociale : intégration
des questions sociales dans l'économie. L'entreprise en pour les travailleurs et non pour le
profit d'abord. Le capital est pour les travailleurs (et donc les familles, pour le bien réel des
personnes dans un espace commun). Réduction des inégalités. L'économie favorise le
nivellement des inégalités. En Europe, les prélèvements sont assez importants. Cela ralentit
l'économie (les initiatives) mais cela permet une redistribution des richesses. Communisme :
trop de régulation, on coupe l'initiative, on tue les libertés de conscience et d'initiative. Le
bien commun absorbe le bien personnel. Il faut un équilibre entre les 2.
- Fédéralisme : l'utopie fédérale. L'Europe, c'est un choix politique. Organiser les rapports
entre le pouvoir et la personne pour que la liberté et la dignité de la personne soient
pleinement respectées. Historiquement, la réflexion du fédéralisme vient de Althusius,
Proudhon. Althusius (16ème s.), calviniste hollandais : il conçoit le fédéralisme comme moyen
de conjuguer l'autonomie de la personne et le bien commun. Subsidiarité qui doit revêtir des
formes institutionnelles. Montesquieu théorisera ce système avec plus de clarté (article
"République fédérative"). Les institutions existent pour la personne. Fédéraliser les relations
politiques, c'est prendre acte de la méfiance naturelle vis-à-vis des abus de pouvoir.
Proudhon, au 19ème s. : équilibrer le couple individu / société à la manière du couple homme
/ femme. Il faut une solution intégrée et dynamique, car l'équilibre est fragile. Ne pas
37
rechercher l'harmonie universelle qui risque de conduire au totalitarisme. Pour Jankélévitch :
gérer les désaccords de façon civilisée. Les institutions obligent au dialogue. "Le 20ème s.
ouvrira l'ère des fédérations…"
- disposition à la générosité bien comprise : philosophie du don en politique, promue par
l'Eglise. Cette générosité n'est pas perçue comme une simple injonction morale, mais
comme un renversement assumé des priorités morale, sociale et politique. L'Europe qui se
construit vise à une transformation profonde des institutions. Quitter la logique de l'intérêt
qui prévaut traditionnellement. Cette philosophie du don trouve sa réflexion de base chez
M. Mauss (Essai sur le don). Dans cette analyse, celui qui donne suscite le retour du don
("contre-don"). Renoncer au pur calcul du don, accepter de donner, de recevoir et de rendre
: tisser un lien social d'un autre ordre. Dynamique de la confiance. "Nous sommes des êtres
en dette", c'est pourquoi l'homme se donne. La dette n'est pas un dû, mais elle implique un
don. Favorisation de la convivialité. Gratuité et calcul ; économie sociale de marché qui crée
le lien social. Créer, croiser des liens. Une part de gratuité fondamentale. Elle construit
l'homme dans sa dimension humaine (donc spirituelle). Donner, recevoir, rendre.
Reconnaître la légitimité du bénéfice, du bien commun. Inverser les réflexes égoïsmes. Le
sens de l'Europe : donner et vous recevrez.
Cette logique est une façon de réguler la mondialisation : éviter qu'elle soit uniquement
libéraliste qui casse le lien social (réduction de l'individu au consommateur). Dans les
institutions, il s'agit de sceller la confiance réciproque, à travers des institutions supranationales.
- construire l'Europe de manière volontaire et durable : refus des fatalités. CE : "sui
generis", unique en son genre, dépassant les nations sans les renier. Inventivité
institutionnelle.
- place faite aux petits Etats. Refus du rapport dominant – dominés. Organisation du
continent sur la base du respect de l'identité de l'autre, de l'égalité. Egale dignité.
Importance en fonction de sa population et de son économie. Les petits Etats sont reconnus,
même s'il y a une pondération d'influence. Un cadre institutionnel très particulier fondé sur
un équilibre des pouvoirs : triangulaire (conseil des ministres composé des représentants des
gouvernement, Commission européenne (instance exécutive), Parlement (instance de
contrôle)). Tous les pouvoirs sont redéfinis.
- Exemplarité de la construction européenne : l'Europe, laboratoire pour le monde. L'Europe
voudrait retenir trois exigences : cohésion sociale, économie de marché, démocratie réelle.
On peut espérer que le passage à l'union politique favorisera l'articulation de ces 3
exigences. Pour l'instant, il y a un déficit politique.
3 missions essentielles pour l'Europe : développer son système de protection sociale,
développer son service public (santé, sécurité, éducation), participer à une gouvernance
mondiale.
38
2/ Considération de la situation de manière prospectives
- attitude volontariste. La morale implique un engagement réel des Etats. Aller de l'avant
implique la définition de son identité. Cf. Charte des droits fondamentaux adoptée en 2001.
- Identité concrète et repérable à travers l'Euro. 1ère fois dans l'histoire que plusieurs pays
s'unissent pour une monnaie commune. Une logique du passé est renversée (monnaie et
identité nationale). L'Euro aidera à l'accomplissement d'une identité qui est à construire. La
monnaie participe à ce volontarisme fondateur. La banque centrale européenne est
constituée de tous les directeurs des banques centrales nationales plus quelques uns.
Logique fédérale (dont les Anglais ne veulent pas). L'euro instaure une "communauté de
solidarité irréversible" (Evêques). L'Eglise prend acte de la nature communautaire et
solidaire de l'Europe instaurée par l'Euro.
- 2 visions de l'Europe : fonctionnaliste ou volontariste. 1ère : elle part de la constatation
que les problèmes sont trop importants pour être résolus par une seule personne, un seul
pays. Conception défensive et pragmatique de l'Europe. On règle les problèmes ensemble,
mais on reste chez soi ! Autre vision, la vision volontariste ou fédéraliste : dessein collectif,
intégration politique, philosophie du don et non individualiste. Eco sociale de marché.
- 4 conditions pratiques immédiates : 1/ place accordée au plus pauvre et reconnaître leur
droit. 2/ droits sociaux, justice (principe de solidarité). 3/ éviter les abus de domination (pb
de la concurrence déloyale au dépend du travailleur). 4/ favoriser la reconnaissance des
droits sociaux ainsi que la responsabilité directe des citoyens. (participation).
A ces conditions, l'Europe fédérale pourra articuler l'unité du genre humain, famille des
nations, communauté internationale, subsidiarité, être "pour" l'autre.
39
La destination universelle des biens
SMIC : 1254 E ; seuil de pauvreté : 645 E. RMI : 430 E. 1849 E (brut) : salaire médian. On peut
parler d'une certaine répartition des richesses pour la France. 3 Millions de pers touchent un
revenu minimum. 3,5 millions de pauvres en France ; 1 million de Rmistes. 23% de la pop
n'ont aucune épargne. 30 % ne peuvent pas se payer une semaine de vacances par an. 8 %
sont à découverts. 25 % ont du mal à se chauffer. Les pays pauvres s'enrichissent mais sont
de plus en plus pauvres par rapport aux pays les plus riches. L'écart augmente. On distingue
une pauvreté en fonction du revenu ou du patrimoine.
I. La destination universelle des biens
GS 69 :
Dieu a destiné la terre et tout ce qu'elles contient à l'usage de tous les hommes et de
tous les peuples, en sorte que les biens de la création doivent équitablement affluer
entre les mains de tous, selon le règle de la justice, inséparable de la charité (8).
Quelles que soient les formes de la propriété, adaptées aux légitimes institutions des
peuples, selon des circonstances diverses et changeantes, on doit toujours tenir
compote de cette destination universelle des biens.
Dieu a donné la terre à tout le genre humain. La richesse est un don, et non un dû. Tout
homme a droit à avoir accès au bien nécessaire pour son propre développement. La
destination universelle des biens, l'usage des biens est au principe de l'ordre éthico-social.
Droit naturel, mais aussi originaire (dès l'existence de la vie) et prioritaire (à tout système
éco). Tous les autres droits y sont subordonnés. Ils doivent servir la DUB. La DUB vise à
fonder une économie juste, former un monde solidaire. Finalité des biens à la DUB. Cf.
application de la Parabole des talents : la richesse des riches doit être au service des plus
pauvres. Prise d'initiative pour favoriser la juste répartition. 48 % des recettes de l'Etat
viennent de la TVA. La moitié des français ne payent pas d'impôt sur le revenu. Sur 100
unités de richesse en France, 44 % sera redistribués. En Europe, on peut parler de "société
sociale", "société d'économie mixte" : cohésion sociale et liberté d'entreprise.
Véritable paternité : donner les conditions d'existence ; permettre le développement
intégral de la personne sans couper à la racine la liberté d'initiative. Communisme : pour
permettre une justice sociale, on a annuler les droits civils et politiques.
Quelqu'un qui sort de la pauvreté, c'est quelqu'un qui est capable de donner. La mise en
œuvre de la DUB se fait par le travail de chacun : "dominer la terre", en faire sa digne
demeure et en partager les fruits. C'est là l'origine de la propriété privée. Elle doit favoriser
l'autonomie personnelle et familiale. Mise en œuvre de la responsabilité individuelle,
l'initiative, la créativité. La propriété privée n'est pas un obstacle à cette répartition, mais
elle en est comme un élément essentiel.
Passage de la défense du droit de propriété à la défense du droit à la propriété : passer de la
permission à l'encouragement à la propriété. Le droit à la propriété est aussi subordonné à la
DUB. J'acquiers des biens privés pour garantir un bien commun. La propriété privée n'est pas
une fin, mais un moyen. Pas de propriété exclusive : n'appartient pas qu'à lui. Propriété en
fonction de l'autre.
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Partager la culture, le savoir. Accès aux biens culturels, aussi importants que l'accès aux
biens matériels.
Quand on parle de propriété privée, ne pas se limiter à la conception occidentale. Propriété
tribale, clanique : territoire commun redonné à une tribu. Lieux où le droit coutumier
s'applique. Exemple des biens familiaux.
II. La DUB et l'option préférentielle pour les pauvres (OPP)
2 options profondément liées. JP II, SRS. OPP : profondément évangélique. Passage d'une
question locale au plan mondial. Solidarité universelle. nécessité absolue du salut de Dieu
pour tout homme ; ce salut passe par la médiation des hommes (cf. Mt 11,5). La Bonne
Nouvelle annoncée aux pauvres est le signe de la présence du Christ.
Cette OPP ne doit pas se faire à n'importe quel prix. Pb de la théologie de la liberté. Utopie
de vouloir éliminer toute la pauvreté, mais responsabilité d'aider les pauvres. CEC 1033 :
Notre Seigneur nous avertit que nous serons séparés de Lui si nous omettons de rencontrer
les besoins graves des pauvres et des petits qui sont ses frères (cf. Mt 25,31-46).
Pauvreté religieuse : l'annonce de l'Evangile, c'est donner un bien à l'autre, pour que son
besoin fondamental (être fondamentalement religieux) soit satisfait. Donner crée une
relation. On reçoit autant qu'on donne. Charité sociale.
Lien permanent entre charité et justice. Donner aux pauvres : rendre ce qui est à eux. Devoir
de justice avant le geste de charité (st Grégoire le Grand).
La vie économique sera relue, et liée à la morale. La science économique doit être liée à la
science morale. Gestion dans une dynamique de partage, de répartition. Lien intrinsèque et
nécessaire.
41
Economie et entreprise
1/ Morale et économie. 2/ Principes qui déterminent la vision de l'entreprise pour la DSE.
1/ Morale et économie
L'économie est au service de la morale sociale. "Seule la loi morale nous demande de
poursuivre dans les différents domaines le partage de nos activités afin que tout homme ait
ce dont il a besoin" (Pie XI). Subordonner toute activité économique au bien commun. Le
rapport entre morale et économie est nécessaire et intrinsèque. La distinction entre morale
et économie ne contient pas de séparation, mais une réciprocité importante. Tenir compte
des exigences mutuelles, selon les lois propres de chacune. GS : dans la vie économicosociale, promouvoir la dignité de la personne.
GS 63 : "Dans la vie économico-sociale aussi, il faut honorer et promouvoir la dignité
de la personne humaine, sa vocation intégrale et le bien de toute la société. C'est
l'homme en effet qui est l'auteur, le centre et le but de toute la vie économicosociale."
La dimension morale de l'économie permet de saisir comme des finalités inséparables
l'efficacité économique et la promotion d'un développement solidaire de l'humanité. La
morale : facteur constructif pour le bien commun et pour l'économie elle-même. La logique
d'efficacité est légitime : ne pas perdre les ressources. Mais on doit associer le bien de la
personne pour l'activité exercée.
La recherche de la production de richesses doit stimuler l'homme dans l'exercice des vertus
non seulement individuelles mais aussi sociales (solidarité, justice, partage). Cet ensemble
logique d'efficacité et logique de développement permet de lutter contre les structures de
péchés qui maintiennent le sous-développement, l'exploitation, la dégradation. L'activité
économique doit avoir pour sujet les hommes et tous les peuples. La question du droit au
travail est une vraie question (aujourd'hui en France, taux de chômage, 8,7 % - baisse liée à
certaines mesures efficaces et à la démographie : moins de jeunes sur le marché du travail).
Chacun a le devoir de s'engager pour le développement économique de tous. Devoir de
solidarité et de justice. C'est aussi la meilleure voie pour faire progresser l'humanité toute
entière.
Comment comprendre le capitalisme ?
De manière globale, l'Eglise n'est pas contre l'économie de marché.
CA 42 : Si sous le nom de "capitalisme" on désigne un système économique qui
reconnaît le rôle fondamental et positif de l'entreprise, du marché, de la propriété
privée et de la responsabilité qu'elle implique dans les moyens de production, de la
libre créativité humaine dans le secteur économique, la réponse est sûrement
positive, même s'il serait peut-être plus approprié de parler d'"économie
d'entreprise", ou d'"économie de marché", ou simplement d' "économie libre".
Mais si par "capitalisme" on entend un système où la liberté dans le domaine
économique n'est pas encadrée par un contexte juridique ferme qui la met au service
de la liberté humaine intégrale et la considère comme une dimension particulière de
cette dernière, dont l'axe est d'ordre éthique et religieux, alors la réponse est
nettement négative."
42
L'Eglise n'est pas contre le profit, si c'est au service de la personne. Le "capitalisme sauvage"
nous est proche dans nos sociétés. La logique des rapports de force permanents détruit les
faibles et durcit les forts.
Ce qui caractérise l'Europe, c'est l'économie sociale de marché : capitalisme au service du
bien social.
2/ Initiative privée et entreprise
Le travail est fait pour l'homme. La liberté de la personne est une valeur fondamentale dans
le monde du travail. Le lieu du travail doit être au service de la liberté de la personne.
Chacun a le droit d'initiative économique. La négation du droit d'initiative, ou sa limitation
réduit "la personnalité créative du citoyen". L'homme : sujet créatif et relationnel. Besoins
anthropologiques fondamentaux (selon Goya) : besoins alimentaires (logement et
nourriture), besoin sécuritaire, besoin d'appartenance, besoin de reconnaissance (le milieu
de travail aide à cela), besoin d'autonomie, besoin de créativité. Le besoin de créativité
arrive en dernier, et suppose les autres.
La dimension créative de la personne et pour la personne est un élément essentiel de
l'entreprise. Ca doit être programmé. La culture de l'entreprise doit accueillir les initiatives.
"Le rôle du travail humain maîtrisé et créatif". Pas seulement créer, mais aussi produire !
Produire en innovant, mais en commun et dans la continuité, et pour durer (cf. Pastorale). La
principale ressource de l'homme, c'est l'homme lui-même.
L'entreprise et ses fins
La fin de l'entreprise, c'est de créer des richesses pour toute la société, pas seulement pour
une classe particulière. Elle remplit donc une fonction sociale : mise en relation, mise en
valeur des capacités des personnes. Donc rôle social et moral.
Vision communautaire de l'entreprise. CA 43 : "L'entreprise ne peut être considérée
seulement comme une "société de capital" ; elle est en même temps une "société de
personnes" dans laquelle entrent de différentes manières et avec des responsabilités
spécifiques de l'Etat." Le service public, c'est le service du bien commun.
Comment susciter la coopération réelle ?
Quand il y a coopération, il y a enrichissement. Il doit y avoir un retour sur investissement.
Création de richesse. Le profit est nécessaire mais n'indique pas forcément le bon
fonctionnement de l'entreprise. La logique de profit et sa justesse sera évaluée sur :
comment elle respecte et développe la personne.
L'entreprise doit être une communauté solidaire : le profit doit être partagé. Critères pour
un partage du profit dans l'entreprise ? Ex : 1/3 pour les actionnaires, 1/3 pour les
investissements, 1/3 pour les salariés. Garder le bien social (l'entreprise) et le bien des
personnes. L'entreprise a le droit de faire des bénéfices (pas les associations) et doit donc
voir loin. Pas de critères quantitatifs définis.
L'Eglise est contre le fait de faire trop de profit (exploitation) par l'usure (le prêt). Il faut
pouvoir s'adapter rapidement. Pour cela, il faut de la trésorie, de l'argent disponible.
Le rôle de l'entrepreneur ou du dirigeant
"cum-petere" : chercher ensemble des solutions. La compétition devrait être positive :
collaborer pour faire grandir de la valeur et non pas écraser l'autre.
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Susciter la vertu individuelle ; l'entreprise conçue comme une communauté de travail. Faire
travailler des gens ensemble : principe de participation.
CA 32 : Entrent dans ce processus d'importantes vertus telles que l'application,
l'ardeur au travail, la prudence face aux risques raisonnables à prendre, la confiance
méritée et la fidélité dans les rapports interpersonnels, l'énergie dans l'exécution de
décisions difficiles et douloureuses mais nécessaires pour le travail commun de
l'entreprise et pour faire face aux éventuels renversements de situations.
Savoir motiver moralement ses employés. Importance du Comité d'entreprise. Des salariés
qui vont bien : facteur décisif de production. A la logique économique, doit s'associer la
logique sociale. favoriser le travailleur, la famille (en particulier les mères de famille).
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