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Morale sociale, économique et politique
Introduction à la doctrine sociale de l'Eglise
Pourquoi une doctrine sociale de l'Eglise ?
Pour des raisons historiques, on se méfie de l'impact des religions sur l'Etat. L'Eglise a
défendre sa place sociale. Il y a encore quelques résidus de cela qui empêchent de
comprendre la DES (doctrine économique et sociale de l'Eglise).
L'autre raison, plus grave, d'ordre faussement spirituel serait de dire que l'Eglise doit se
cantonner à la sanctification des âmes, mais le monde et la politique sont mauvais, occasion
de péché. Le problème, c'est que la religion, autant que le sexe et la politique est souvent
occasion de péché (cf. Parabole du pharisien et du publicain).
1/ Immanence et sacramentalité. Dieu a une présence immanente dans le monde.
L'Eglise exerce un service sacramentel dans le monde. "Tout a été créé par lui et pour lui". Le
service diaconal de la prédication et de la sanctification : faire découvrir à toute chose que
Dieu l'habite. En toute relation, Dieu est présent. Mais il y a une infirmité de l'immanence
par rapport à la sacramentalité. Il faut faire connaître à l'homme la présence de Dieu. Service
diaconal. La façon dont nous connaissons notre Père doit nous pousser à le faire connaître et
non à en tirer de la gloire (pharisaïsme) !
2/ Le combat spirituel social. La massification anonyme diabolisante est bien l'opposé
du projet personnaliste de Dieu et des fils de lumière. Réduire les personnes à des numéros
interchangeables est bien opposée à Dieu. La DSE est une anthropologie théologique qui
peut critiquer toute organisation sociale. Le Christ a vécu le combat spirituel au désert, mais
aussi dans la société de son temps (accusations, violences…).
I. Une certaine ressemblance
CEC 1878 (cf GS 24) : "Tous les hommes sont appelés à la même fin, Dieu lui-même. Il existe
une certaine ressemblance entre l'union des personnes divines et la fraternité que les
hommes doivent instaurer entre eux, dans la vérité et l'amour". L'amour du prochain est
inséparable de l'amour pour Dieu". Le concept de "personne" est un concept théologique
avant d'être philosophique. Chaque personne divine n'a pas besoin des autres pour être
Dieu (elle est pleinement Dieu)(de même moi, je suis un homme, indépendamment des
autres). Cependant, chaque personne divine est pleinement Dieu qu'en relation avec les
autres personnes divines (de même, je suis pleinement un homme en relation avec les
autres).
Socle théologique personnaliste et trinitaire de la DES. 2 piliers trinitaires : distinction et
union. Le modalisme a hypertrophié l'union : une seule entité divine qui a 3 visages (atrophie
de la distinction). Socialisme "pur" : le sujet de l'histoire, c'est la société. Nous dirons que la
société doit être organisée pour que les sujets de l'histoire soit les personnes. Trithéisme : il
y a trois dieux. Hypertrophie de la distinction. L'individualisme libéral lui correspond dans la
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société. L'homme n'est plus une personne mais un individu (entité dans un ensemble
indivisible). Une personne, c'est un individu plus des relations. Dans la Trinité, pas de
protection entre elles car l'amour ne sera pas occasion de main mise, d'étouffement.
Une bonne société humaine doit encourager l'union, sans oublier la distinction. Union pour
la distinction et la distinction pour l'union. La massification anonyme conduit toujours à la
dictature. On observe la condensation de tout en un seul homme. Chez les chrétiens, Dieu
est à la fois tout-puissant et kénotique. Il est libre de sa toute-puissance. L'agir de diaconie
sociale (pas seulement de la charité sociale) est ce qui rendra leur prédication
compréhensible.
II. Un amour tempéré, mais non modéré, de la société
Nous avons une mauvaise compréhension de la passion politique. Passion : vif intérêt qui
peut être occasion de péché. Après la religion qui est la première passion, c'est le sexe, puis
la politique. Mais la passion demande à être évangélisée. La religion a pour objet le bien
premier pour lequel il ne faut pas être modéré car c'est Dieu ! Par contre, le sexe comme la
politique doit être objet de passion tempérée. Nous devons honorer la sexualité, et la
politique au sens où ce sont des lieux reflets de Dieu.
C'est un défi à l'Incarnation de dire que nous ne devons pas aimer les biens seconds. Ce sont
des moyens de découvrir le Dieu invisible, chemins, pédagogies vers le bien premier.
III. Les principes de la DSE
a. Le bien commun - CEC
1906 Par bien commun, il faut entendre "l'ensemble des conditions sociales qui
permettent, tant aux groupes qu'à chacun de leurs membres d'atteindre leur
perfection, d'une façon plus totale et plus aisée" (GS 26 cf. GS 74).
La société est à la fois entraîneur (dimension d'exhortation) et arbitre.
On appelle "socialisation" l'interdépendance croissante des sociétés entre elles et de la
société sur les personnes. L'inverse du bien commun ne date que de Jean-Paul II : les
structures de péché (1987 Sollicitudo Rei Socialis). Structure sociale qui induit les hommes
à faire le mal à leur tour (ex : mafias, blocs est-ouest).
Le contenu du bien commun :
- droits de l'homme (dignité). Le concept de droit de l'homme a émergé dans un
contexte d'opposition à l'Eglise. En 1963, Pacem in terris reconnaît ce qu'il y a de bon
dans les droits de l'homme. Centralité de la personne humaine.
- le développement. L'objet de l'Etat est de permettre à chacun de parvenir à la
perfection morale et spirituelle.
- paix : à la fois intérieure et extérieure. Seul l'Etat a le monopole de la violence.
CEC :
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Le bien commun intéresse la vie de tous. Il réclame la prudence de la part de chacun,
et plus encore de la part de ceux qui exercent la charge de l'autorité. Il comporte trois
éléments essentiels:
1907 Il suppose, en premier lieu, le respect de la personne en tant que telle. Au nom
du bien commun, les pouvoirs publics sont tenus de respecter les droits
fondamentaux et inaliénables de la personne humaine. La société se doit de
permettre à chacun de ses membres de réaliser sa vocation. En particulier, le bien
commun réside dans les conditions d'exercice des libertés naturelles qui sont
indispensables à l'épanouissement de la vocation humaine : "ainsi : droit d'agir selon
la droite règle de sa conscience, droit à la sauvegarde de la vie privée et à la juste
liberté, y compris en matière religieuse" (GS 26).
1908 En second lieu, le bien commun demande le bien-être social et le
développement du groupe lui-même. Le développement est le résumé de tous les
devoirs sociaux. Certes, il revient à l'autorité d'arbitrer, au nom du bien commun,
entre les divers interêts particuliers. Mais elle doit rendre accessible à chacun ce dont
il a besoin pour mener une vie vraiment humaine: nourriture, vêtement, santé,
travail, éducation et culture, information convenable, droit de fonder une famille,
etc. (cf. GS 26).
1909 Le bien commun implique enfin la paix, c'est-à-dire la durée et la sécurité d'un
ordre juste. Il suppose donc que l'autorité assure, par des moyens honnêtes, la
sécurité de la société et celle de ses membres. Il fonde le droit à la légitime défense
personnelle et collective. (1998 Catéchisme 1906)
La socialisation a une dynamique différente selon les sphères d'activité. On appelle
"mondialisation" cette socialisation. Elle est plus rapide au plan économique qu'au plan
politique. La mondialisation grandissante, le bien commun devient alors universel. Il faut
donc promouvoir des autorités supra-nationales et respecter les identités nationales,
culturelles.
b. La destination universelle des biens
La distinction pour l'union implique la gérance personnelle et la destination universelle des
biens. Sinon on aboutit à une inertie économique, paralysie de l'économie. Ce qui est vrai
des biens matériels est vrai aussi à propos des biens intellectuels et spirituels : gestion privée
et destination universelle. Il faut que les biens servent.
c. La subsidiarité et la participation
Les choses doivent être faites au plus près du terrain. Principe par lequel une autorité
supérieure ne doit pas faire ce que peut faire une autorité inférieure. L'Etat ne doit pas
éduquer les enfants. La subsidiarité est au service de la distinction. Dieu n'a pas voulu
exercer tous les pouvoirs.
Tout ce qui est d'intérêt public doit être traité par ceux qui ont intérêt. Transparence et
gestion commune des affaires publiques.
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1884 : Dieu n'a pas voulu retenir pour lui seul l'exercice de tous les pouvoirs. Il remet
à chaque créature les fonctions qu'elle est capable d'exercer, selon les capacités de
sa nature propre. Ce mode de gouvernement doit être imité dans la vie sociale. Le
comportement de Dieu dans le gouvernement du monde, qui témoigne de si grands
égards pour la liberté humaine, devrait inspirer la sagesse de ceux qui gouvernent les
communautés humaines. Ils ont à se comporter en ministres de la providence divine.
1885 Le principe de subsidiarité s'oppose à toutes les formes de collectivisme. Il
trace les limites de l'intervention de l'Etat. Il vise à harmoniser les rapports entre les
individus et les sociétés. Il tend à instaurer un véritable ordre international.
En France, on a du mal à respecter le PS. Le fédéralisme le respecte mieux. La monarchie
française a dû être dure face aux grands féodaux. Les Jacobins de même.
La participation est le droit et le devoir des sociétés de niveau inférieur de délibérer et
d'influencer sur ce qui les concerne dans les sociétés de niveau supérieur. La participation
fait le droit et le devoir de l'union. Tout ce qui est d'intérêt public est publiquement objet de
débat. La démocratie s'enracine là. La DES est plus large, lui donnant des fondements
théologiques. Il y a forcément du secret dans la démocratie, mais il faut une relative
transparence, pour donner aux sociétés d'ordre inférieur et aux citoyens le moyen de
s'engager.
1913 : La participation est l'engagement volontaire et généreux de la personne dans
les échanges sociaux. Il est nécessaire que tous participent, chacun selon la place qu'il
occupe et le rôle qu'il joue, à promouvoir le bien commun. Ce devoir est inhérent à la
dignité de la personne humaine.
1914 : la participation commence par le devoir d'état : éducation de la famille,
conscience dans le travail.
1915 : prendre une part active, autant que possible à la vie publique. Le désintérêt
politique est immoral.
1917 : les responsables politiques sont encouragés à attirer la confiance des citoyens.
d. La solidarité
Consentir volontairement à ce qui s'imposerait à nous sinon. Communauté de destin. La
solidarité volontaire à l'origine : se porter caution de quelqu'un qui prend un emprunt (si
problème, je paierai la dette avec lui).
Pas seulement prendre acte de la solidarité de fait des hommes les uns avec les autres, mais
il faut le vouloir. La passion de solidarité est d'autant plus forte que les personnes qui sont
proches de moi par le sang, par la nation. L'évangélisation de cette passion demande de la
rendre universelle (autre culture, autre race, tout homme). Une passion de solidarité risque
de devenir refus de la solidarité universelle.
La mondialisation comme universalité trop faible provoque des irrédentismes culturels, c'est-
à-dire des conflits pour conserver les cultures particulières. Les nations humiliées ont
beaucoup plus de risque de se défendre.
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IV. Les "valeurs" de la DES
Anatomie (Etat, personne, corps intermédiaires, …) : on regarde les organes au repos. La
physiologie regarde l'ensemble en mouvement. Pas se limiter à l'anatomie sociale. Pacem in
Terris, 1963, encyclique testament de Jean XXIII. Il a déterminé 4 valeurs : vérité, justice,
amour, liberté.
Vérité /Le démon est le père de tout mensonge. L'ordre social le plus équilibré au niveau des
lois va sombrer s'il n'y a pas la vérité. La recherche de la vérité est une recherche sans fin. Le
mensonge est la tentation permanente de tout élément de la société. Justice / rendre à
chacun ce qui lui est dû. Vérité dans l'ordre du faire. C'est insuffisant, mais un préalable pour
la charité. Cf. Egalité républicaine. L'amour / liberté de donner à l'autre plus que ce qui lui
est dû. Relève de la gratuité. La justice est moralement coercitive. L'amour est libre. La
société ne marchera jamais sans ce devoir de générosité. Cela rejoint la participation. Ce
qu'on fait librement est plus méritoire donc nous épanouit plus. Nous sommes soumis à un
devoir de charité radical, mais dans la liberté de donner comme je veux. Dans le devise
républicaine, cela correspond à la fraternité (parallèle grossier) qui est un devoir. Espace
d'initiative. Liberté / La DES est à la fois la dernière valeur donc suprême, mais elle est
conditionnée par les autres. Pour le nominalisme, la liberté est absolue. Pour le thomisme,
elle dépend d'une certaine conception de la vérité. Je suis libre à la mesure j'accueille un
événement qui touche l'intelligence et la volonté. Il faut accepter un réel qui préexiste à la
liberté.
V. Syndérèse et prudence (GS 44)
1. Distinction …
La DES propose la grammaire élémentaire de la vie sociale, mais n'écrit pas l'histoire à la
place des hommes. Il y a des principes et il y a le discernement. Sur le plan des principes, on
doit être solidaires. Sur le plan du discernement, on est solitaire ! Cela relève de la
conscience qui a à la fois l'ouverture vers les principes généraux. La syndérèse est l'aptitude
à attester des principes généraux de la conscience. Ma conscience atteste de la vérité de la
loi. Au niveau de la syndérèse, nous devons être solidaires. Notre conscience doit se
conformer avec le magistère. Si on est en désaccord, il faut le vivre dans l'humilité, et
chercher à se convertir.
Sur le plan du discernement, nous devons nous respecter scrupuleusement. Chacun est
solitaire dans les situations concrètes. La prudence est l'aptitude à voir ce qui est en jeu dans
une situation donnée. De façon la plus rudimentaire, c'est le bon sens, qui doit aussi être
développé. L'Eglise comme un arbitre donne la "grammaire", rappelle les règles. Cléricalisme
: volonté de pénétrer dans l'autonomie de prudence de chacun. Au contraire, les pouvoirs
sont manipulateurs de l'Eglise comme ils veulent influer sur les principes sous prétexte qu'ils
les gênent. Volonté de considérer l'Eglise comme une alliée. Refus du caractère prophétique
de l'Eglise.
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