L’évolution des idées de Lamarck à Darwin Lorsque Lamarck meurt à 85 ans en 1829, Charles Darwin (1809-1882) n’a que 20 ans et n’a pas encore fait son voyage à bord du Beagle (1831 à 1836). Le livre où il relatera son expédition autour du monde ne sera publié que 10 ans après la mort de Lamarck. Son célèbre livre « De l’origine des espèces » publié 30 ans après la disparition de Lamarck, en 1859, ne le sera que parce qu’un autre naturaliste anglais, Alfred Russel Wallace (1823-1913) , lui a écrit et exposé le résultat de ses réflexions qui aboutissent aux mêmes conclusions sur l’évolution des espèces. Papillons de Maurienne Et des vallées de Suse et Sangone Wallace contribua au développement des idées évolutionnistes qui aboutirent à la classification phylogénétique du vivant (seconde moitié du XXe siècle). Ainsi, voyons-nous maintenant ces excroissances des ailes postérieures des porte-queues comme une innovation, qui, à un moment donné, a permis aux imagos qui en étaient pourvus d’être moins attrapés par les prédateurs. Génétiquement, ils contribuèrent plus souvent aux descendances de leur espèce. Ce n’est donc pas de leur volonté, mais du résultat de leur moindre prédation qu’ils contribuèrent à la présence de ces excroissances. Statue de Darwin au British Natural History Museum de Londres Les feuillets d’information des Papillons de Maurienne et des vallées de Suse et Sangone La Dauphinelle (Association loi 1901) 22 avenue Jean Jaurès 73500 Modane – 04 79 20 58 81 Courriel : [email protected] Directeur de publication : Guido Meeus Ces feuillets assurent le suivi du projet et l’information entomologique. Ont participé à ce numéro : Sylvie Besnard, Gilles Besnard, Guido Meeus et Sylvie Ries – Photos : Guido Meeus sauf précision Les grands porte-queues : 2 - le flambé Remerciements à nos partenaires financiers 2014. Feuillet d’information Numéro 10 - Avril 2015 Un autre grand voilier, le flambé, il podalirio L’histoire du papillon qui volait à l’envers ! Iphiclides podalirion (L.innaeus, 1758) Les chenilles de flambé se nourrissent de prunellier, appelé également épine noire (Prunus spinosa) et de cerisier de Sainte Lucie (Prunus mahaleb). D’autres plantes de la famille des Rosaceae sont citées : prunier, pêcher, amandier, etc. Tout d’abord noires et semblables à une déjection, ces chenilles deviennent vertes comme les feuilles du prunelier. Elles sont homochromiques (de la même couleur que leur support). Les suisses ont montré qu’il peut y avoir deux générations de flambé en fonction de la latitude. La chrysalide de la génération estivale se fixe dans le feuillage, tandis que celle qui passe l’hiver se trouve souvent au pied de l’arbuste. ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ Le graphe ci-dessous présente les 440 observations suivant la date et l’altitude en Maurienne et dans les vallées de Suse et Sangone. Y a-t-il deux générations en fond de vallées et une seule plus haut ? Nous allons continuer les observer pour vérifier ou infirmer cette hypothèse. Ci-dessus la localisation, fin 2014, des observations d’imagos de flambé. Elles sont localisées en fond de vallée, pour la plupart en-dessous de 1500m d’altitude. Ci-contre : le nombre d’observations tout les 500m de dénivelé. Ci-dessous, à droite, un imago vient pomper de l’eau et des sels minéraux ; à droite, une chenille (Photo d’Abrahami sur le site wikipedia à l’article sur le flambé sous licence Creative Commons) Je réalisais à l’époque des animations pour la classe de La Chapelle en Valgaudemar (Hautes-Alpes). Nous observions la nature au fil des saisons. Au printemps, un élève d’une dizaine d’années me dit « Guido, j’ai vu un papillon qui volait à l’envers ! ». Éclat de rire général, stupeur de l’institutrice, et surprise de ma part. En effet, dite telle quelle, la phrase était, pour le moins, saugrenue. Je le pris au sérieux car j’avais appris que notre cerveau d’humain, lorsqu’il n’arrive pas à donner une explication rationnelle, nous transmet ce qui est le plus approchant. Je lui demandai donc de me décrire en détail ce qu’il avait vu. Bon observateur, il me décrivit un grand imago (adulte) de papillon dans les tons blanc-jaunâtre avec de grandes rayures noires. Il m’expliqua qu’il avait vu les yeux et les antennes. Mais là où cela ne collait plus était que les yeux et les antennes étaient à l’arrière du papillon qui volait. Il en avait donc conclu que le papillon volait à l’envers ! Je reconnus rapidement le flambé (Iphiclides podalirius) qui a la particularité d’avoir sur les ailes postérieures deux grandes ocelles et deux extensions fines semblables à de grandes antennes ! Ces leurres dont les individus qui en étaient pourvus furent moins que d’autres mangés par les prédateurs ont perduré dans l’espèce. En effet, un jeune oiseau inexpérimenté fait la même analyse que notre élève et se précipite pour attraper la tête de l’insecte…. Et repart avec uniquement deux bouts d’ailes ! L’imago, l’adulte de papillon a perdu une partie de ses ailes mais est resté en vie. Cette évolution est visible chez de nombreuses espèces, le machaon, plusieurs espèces de thècles, l’azuré de la luzerne et le bien nommé azuré porte-queue. Guido Meeus