Rôle et importance des satellites dans la surveillance et la compréhension des océans L’océan occupe 70% de la surface de la Terre, contient 96% de l’eau disponible, peut absorber 1000 fois plus de chaleur que l’atmosphère… et pourtant, il demeure pour une large part méconnu. Les satellites sont des instruments essentiels pour cette connaissance : ils permettent d’observer partout, en permanence, même sur les mers les plus démontées. Parmi les techniques d'observation des océans par satellite, l'altimétrie se révèle une aide précieuse. Les mesures de hauteur de mer fournies par cette technique sont le reflet de ce qui se passe depuis le fond jusqu'à la surface : courants océaniques, variations de température et de salinité, marées… Elle permet aussi de connaître la hauteur des vagues et la vitesse du vent. De plus, les applications de l’altimétrie se développent, audelà des océans, sur les lacs, les fleuves, les glaces, voire même la terre ferme. Le principe de l’altimétrie spatiale est de mesurer précisément l’altitude du satellite et la distance entre le satellite et la surface. En faisant la différence, on obtient la « hauteur de mer ». De cette hauteur et surtout de ses variations, on tire une vaste quantité d’informations sur l’océan et ses mouvements. Grâce à des systèmes comme Doris, qui donne très précisément la position du satellite, cette hauteur de mer est mesurée avec une précision de quelques centimètres. Parmi les programmes altimétriques, après Topex-Poséidon, lancé en 1992 par la NASA et le CNES, Jason1 relève depuis décembre 2001 un nouveau défi : l’océanographie opérationnelle. Jason1 assure la continuité des recherches scientifiques et le passage délicat à la mise au point d’applications : bulletins météorologiques, cartes d’aide à la navigation, surveillance en temps réel de l’océan par exemple. Jason 2 prendra le relais l’an prochain sur la même orbite que ses prédécesseurs. Ces programmes sont le fruit d’une coopération internationale initiée par le CNES et la NASA depuis plus de 25 ans et sont utilement complétés par les programmes de l’agence européenne (tel qu’Envisat, CryoSat ou les futurs Sentinels). Sur tous ces programmes, le CNES est un acteur majeur. Grâce à ces mesures continues, et à l’implication des laboratoires de recherche du monde entier, la connaissance de la dynamique océanique et des effets du réchauffement climatique progresse. De nombreuses applications ont vu le jour. Les variations du niveau de la mer La topographie de surface est variable sur de nombreuses échelles de temps et d'espace. Grâce à l’altimétrie par satellite, ces variations sont mesurées globalement et quasi instantanément avec une précision centimétrique, permettant de : > cartographier les déformations de la surface de la mer liées à la circulation océanique globale, > cartographier les grands courants marins, comme le Gulf Stream et le Kuroshio, de façon analogue à la pression atmosphérique dans le domaine de la météorologie, > suivre la variabilité océanique (tourbillons par exemple), les marées, les phénomènes saisonniers et climatiques comme « El Niño », > estimer le relief des fonds océaniques, mal connu mais d’un intérêt crucial. Mais l’enjeu majeur des missions d’altimétrie consiste à maintenir la continuité et la précision de la mesure du niveau moyen des mers. En effet, depuis le lancement de TopexPoséidon en 1992, une augmentation moyenne globale du niveau de la mer d'environ 3 mm/an a été observée (pouvant varier de ± 20 mm/an selon les régions). Cette hausse est un indicateur du réchauffement climatique. Un outil efficace pour la navigation Connaître la hauteur moyenne des vagues et la vitesse des vents de surface est un gain de temps et de sécurité pour la navigation. Ces données traitées par Météo-France sont disponibles en temps quasi réel. Les cartes marines effectuées par Jason servent ainsi d’aide à la navigation pour la Marine Nationale et l’US Navy. Les données Jason permettent également d’élaborer des outils de suivi et de modélisation des dérives en mer, résultat des actions combinées du vent, des courants de marée et de la circulation océanique. Des services sont en cours de développement pour mieux prédire le suivi des pollutions marines ou d’opérations de recherche et de sauvetage. Des prévisions climatiques à long terme Les océans jouent un rôle décisif dans l’évolution du climat, à la fois régulateur et perturbateur. Ils emmagasinent ainsi des quantités considérables de chaleur près de l’équateur qu’ils redistribuent lentement vers les pôles, via les courants marins. Jason s’insère dans le projet d’océanographie opérationnelle Mercator, lancé en 1997 et devenu un Groupement d’Intérêt Public en 2002 (partenariat entre le CNES, le CNRS/Insu, l’Ifremer, l’IRD, Météo-France et le Shom). Mercator surveille les océans en temps réel par le biais de bulletins quotidiens de l’état de la mer ; l’une de ses applications est la prévision climatique à échéance de 2 semaines. Ces données permettront de modéliser l’état dynamique de l’océan et de prévoir les tendances climatiques pour les mois ou les années à venir : sécheresse, abondance de pluie, fraîcheur ou canicule. A la clé, une meilleure compréhension des phénomènes climatiques d’envergure tels que l’élévation du niveau des mers, liée au réchauffement climatique, ou « El Niño ». Les avantages socio-économiques de ce projet sont nombreux : évaluation des variations de certaines productions associées aux événements climatiques (céréales, cacao, etc.), gestion optimisée des sources d’énergie, etc. L’aménagement du littoral Plus de 50 % de la population mondiale vit à proximité d’une côte. Ces zones sont vulnérables, notamment face à une montée des océans pouvant provoquer des inondations à répétition, une accélération de l’érosion des falaises, etc. La prévention des risques et l’aménagement du littoral sont donc essentiels, en particulier dans les atolls du Pacifique ou au Bangladesh, très peu surélevés par rapport au niveau actuel des océans. Grâce aux données Jason, l’étude des effets à court et moyen terme de la montée du niveau de la mer, des courants et marées océaniques sur ces régions est une aide précieuse pour les décideurs politiques. L’exploitation off-shore La connaissance des courants à plusieurs centaines voire milliers de mètres de profondeur est primordiale pour le secteur de l’off-shore. L’exploration pétrolière s’aventure de plus en plus loin des côtes, dans des eaux profondes, et subit parfois de très gros dégâts dus aux tourbillons sous-marins. Les données fournies par Jason permettent de mieux gérer les opérations de pompage et de dimensionner en conséquence les plateformes. Planifier certaines activités d’exploitation ou d’entretien, qui doivent se faire par mer calme, est aussi plus aisé. Contact Nicolas Picot T 05 61 28 32 53 [email protected]