LA CRISE DE L’«ETUMOS»
En Grèce ancienne, le mot «etumos» signifie : «vrai, certain, réel», puis «origine d’un mot». Aujourd’hui, selon une
acception largement reçue, la recherche d’un étymon consiste à chercher la racine d’un mot dans une autre langue ;
par exemple, le mot français «instruire» a pour étymon le mot latin «instruere». En Grèce ancienne, «[l’]etumos»
s’entend plutôt de qui fait qu’un vocable est autre chose que seulement un bruit fait avec la bouche. Bref, «etumos»,
étroitement associé à «eteos», lui-même dérivé du verbe «einai», en français le verbe «être», évoque une connais-
sance vraie et certaine de l’être, qu’expriment des mots.
Les Modistes, ces grammairiens qui, souvent, étaient aussi logiciens, divisaient d’ailleurs leur sujet d’étude en «ety-
mologia» et en «dyasynthetica». En «etymologia», sont étudiés les «modi significandi», les mesures du signifier,
qu’on distingue des «modi intelligendi» et des «modi essendi». «Modus» se traduit ici par «mesure». Le «modus es-
sendi» mesure le «modus intelligendi» qui, lui-même, mesure le «modus significandi». (Voir l’exposé de Thomas
d’Erfurt reproduit en annexe)
En Ionie, au VIe siècle avant J.C. et au début du Ve, surviennent les premiers sages. D’abord, Thalès, Anaximandre
et Anaximène , tous de Milet. Puis, Héraclite d’Éphèse pour qui : «Ce qui est réel, ce n’est pas l’être mais le devenir :
il n’y a de réel que le changement». À la même époque, arrivent les Éléates. D’abord, Pythagore de Samos. Puis,
Parménide d’Élée pour qui : «Il n’y a de réel que l’être». Enfin, Zénon d’Élée pour qui : le mouvement est impossible.
Au milieu du Ve siècle avant J.C., chez les sages, l’exploration de l’«etumos» donne ainsi lieu à une division :
1) il n’y a de réel que le devenir ;
2) il n’y a de réel que l’être.
À la fin du Ve siècle avant J.C., qui est le siècle de Périclès, arrivent les Atomistes, pour qui le mouvement est réel,
mais le réel est aussi de l’être : les atomes. Pensons à Leucippe, Démocrite, Empédocle, Anaxagore.
À la même époque, surviennent les Sophistes. Nommons, d’abord, Protagoras, un ami de Périclès, pour qui
«l’homme est la mesure de toutes choses, de celles qui sont, qu’elles sont, ; de celles qui ne sont pas, qu’elles ne
sont pas». Et «le vrai est ce qui paraît à chacun». Nommons, ensuite, Gorgias, pour qui il faut admettre que «le non-
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