Assurer la veille météorologique pour protéger les personnes et les biens OMM-N° 1107 Célébration des 50 ans de la Veille météorologique mondiale Vision de l’avenir de l’OMM Assumer le rôle de chef de file au niveau mondial en matière d’expertise et de coopération internationale dans les domaines du temps, du climat et de l’eau ainsi que pour toutes les questions environnementales connexes et, par là même, contribuer à la sécurité et au bien-être des peuples du monde entier et à la prospérité économique de toutes les nations. OMM-N° 1107 © Organisation météorologique mondiale, 2013 L’OMM se réserve le droit de publication en version imprimée ou électronique ou sous toute autre forme et dans n’importe quelle langue. De courts extraits des publications de l’OMM peuvent être reproduits sans autorisation, pour autant que la source complète soit clairement indiquée. La correspondance relative au contenu rédactionnel et les demandes de publication, reproduction ou traduction partielle ou totale de la présente publication doivent être adressées au: Président du Comité des publications Organisation météorologique mondiale (OMM) 7 bis, avenue de la Paix Case postale 2300 CH-1211 Genève 2, Suisse Tél.: +41 (0) 22 730 84 03 Fax: +41 (0) 22 730 80 40 Courriel: [email protected] ISBN 978-92-63-21107-1 Illustration de couverture: Bob MacNeal NOTE Les appellations employées dans les publications de l’OMM et la présentation des données qui y figurent n’impliquent, de la part de l’Organisation météorologique mondiale, aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. La mention de certaines sociétés ou de certains produits ne signifie pas que l’OMM les cautionne ou les recommande de préférence à d’autres sociétés ou produits de nature similaire dont il n’est pas fait mention ou qui ne font l’objet d’aucune publicité. TABLE DES MATIèRES Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Des observations plus nombreuses… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 … conjuguées aux progrès de la science . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 Étendre l’échéance des prévisions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Oscillations et téléconnexions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Prévision saisonnière et climatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 Avenir de la prévision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 Ouragan Elena au-dessus NASA du golfe du Mexique et de la Floride Avant-propos Le temps et le climat ignorent les frontières. Le fait que l’Organisation météorologique internationale soit devenue en 1950 l’Organisation météorologique mondiale (OMM) reflétait donc la nécessité de renforcer la coopération à l’échelle du globe dans les domaines scientifiques considérés, le but étant de réduire les pertes en vies humaines et les dégâts matériels causés par les catastrophes naturelles et autres phénomènes extrêmes liés au temps, au climat et à l’eau, de promouvoir le développement durable en tant qu’impératif universel et de sauvegarder le climat et l’environnement pour les générations actuelles et futures. En 1960, le Conseil exécutif de l’OMM a institué la Journée météorologique mondiale pour sensibiliser l’opinion publique au rôle joué par les Services météorologiques nationaux et l’OMM, dont les activités consistent à recueillir des données d’observation météorologiques, hydrologiques et connexes, à les traiter et à les diffuser ainsi que les produits qui s’y rapportent. La date du 23 mars, qui marque l’entrée en vigueur de la Convention de l’OMM, a été retenue pour la circonstance. Pour 2013, l’Organisation a choisi pour thème de la Journée météorologique mondiale «Assurer la veille météorologique pour protéger les personnes et les biens», avec comme sous-titre «Célébration des 50 ans de la Veille météorologique mondiale». Ce thème souligne la contribution cruciale des services météorologiques au renforcement de la sécurité des populations et de leur capacité d’adaptation aux phénomènes météorologiques. Il rend par ailleurs hommage à la Veille météorologique mondiale, programme fondamental de l’OMM qui célébrera cette année son cinquantième anniversaire. Instaurée en 1963, en pleine guerre froide, la Veille météorologique mondiale est une illustration éclatante de la coopération internationale. Elle met en réseau des systèmes d’observation, des installations de télécommunications et des centres de traitement de données et de prévision afin de diffuser dans tous les pays des informations et des services essentiels se rapportant à la météorologie et à l’environnement. Comme les services météorologiques et climatologiques doivent répondre à des exigences toujours plus grandes sur le plan qualitatif et quantitatif, la Veille météorologique mondiale revêt d’autant plus d’importance en tant qu’infrastructure de base autour de laquelle s’articulent tous les programmes de l’OMM et nombre de programmes internationaux relevant d’autres organismes. Elle apporte une contribution déterminante aux différents domaines prioritaires de l’OMM, qu’il s’agisse du Cadre mondial pour les services climatologiques (CMSC) ou de la prévention des catastrophes, du Système mondial intégré des systèmes d’observation de l’OMM (WIGOS) ou du Système d’information de l’OMM (SIO), du renforcement des capacités ou de la météorologie aéronautique. Les extrêmes météorologiques ont un impact considérable sur les sept milliards d’habitants que compte notre planète, impact qui va continuer de croître avec le développement des économies et l’accroissement de la population mondiale, qui devrait atteindre le chiffre de 9,3 milliards d’habitants aux alentours de 2050. Entre 1980 et 2007, près de 7 500 catastrophes naturelles ont coûté la vie à plus de deux millions de personnes et causé des pertes économiques estimées à plus de 1,2 billion de dollars É.-U. Plus de 70 % des pertes en vies humaines et presque 80 % des pertes économiques sont imputables à des phénomènes liés au temps, au climat et à l’eau tels que les cyclones tropicaux et les ondes de tempête, les sécheresses et les inondations ou bien les épidémies et les invasions d’insectes dont ils s’accompagnent. Au fil des ans, les pertes en vies humaines ont accusé un net recul grâce aux alertes précoces diffusées par les Services météorologiques et hydrologiques nationaux, tandis que les pertes économiques sont à la hausse. Beaucoup reste à faire et peut être fait pour alléger les souffrances humaines. Le souvenir des pertes causées par les phénomènes météorologiques extrêmes en 2012 est encore vif dans les mémoires: cyclones tropicaux, fortes pluies et inondations, sécheresses, vagues de froid et de chaleur ont touché le monde entier, constituant autant de sonnettes d’alarme quant aux risques que fait courir à la société l’accentuation de la variabilité du climat et du changement climatique. La coopération à l’échelle du globe s’impose plus que jamais pour faciliter et coordonner la diffusion d’alertes précoces et de prévisions climatiques de meilleure qualité et à plus longue échéance et protéger ainsi plus efficacement les personnes et les biens. La Journée météorologique mondiale de 2013 est l’occasion de rendre ce message encore plus actuel en contribuant à relever les défis du XXI e siècle. (M. Jarraud) Secrétaire général 3 à un aéroport, en 1945 4 Time & Life pictures écoliers procédant à un lâcher de ballon-sonde Introduction L’observation du temps est une activité presque aussi vieille que le monde. Nos lointains ancêtres pouvaient anticiper dans une certaine mesure les conditions météorologiques en observant le ciel et le comportement de la faune et de la flore. Si certaines personnes continuent d’observer in situ les phénomènes naturels pour prévoir le temps qu’il fera, les remarquables progrès de la science et de la technique conjugués à la coopération internationale ont révolutionné notre approche de la météorologie et notre aptitude à produire des prévisions de qualité pour des échéances toujours plus longues. Au cours du demi-siècle écoulé, l’observation et la prévision du temps sont devenues des activités scientifiques fort complexes dont l’un des objectifs consiste à protéger les personnes et les biens de par le monde. Les progrès constants de la prévision météorologique en tant qu’activité scientifique ont permis de sauver de nombreuses vies humaines et contribué de façon considérable au développement durable. De nos jours, tout le monde tire profit des services météorologiques et climatologiques: les agriculteurs, les urbanistes, ceux qui doivent gérer des situations d’urgence ou l’approvisionnement en eau, les organisateurs d’activités en plein air, les autorités gouvernementales, etc. Les retombées de ces services se multiplieront à l’avenir au fur et à mesure que les informations fournies par les météorologues gagneront en précision et fiabilité, qu’elles deviendront plus ciblées et qu’elles porteront sur des échéances plus longues. Les techniques d’observation et de modélisation continuent d’enregistrer de formidables avancées qui aident les scientifiques à approfondir leur connaissance des processus complexes qui déterminent le temps et le climat à l’échelle du globe. Aujourd’hui, par exemple, les prévisions à cinq jour s sont aussi fiables que les prévisions à deux jours d’il y a 25 ans. Par ailleurs, météorologues et climatologues commencent à élaborer des prévisions saisonnières et à plus longue échéance en brouillant les frontières entre temps et climat via un continuum d’échéances de prévision. Pour soutenir ce processus, les communautés météorologique, climatologique et hydrologique se sont engagées à œuvrer ensemble par l’entremise de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), qui a succédé le 23 mars 1950 à son prédécesseur, l’Organisation météorologique internationale, dont la création remonte à 1873. Peu après le lancement du premier satellite météorologique, en 1960, l’Assemblée générale des Nations Unies a demandé à l’OMM d’établir un rapport sur les possibilités offertes par ce type de satellite. Sous les auspices des États-Unis d’Amérique, de l’URSS et de plusieurs autres pays, un groupe de travail a élaboré un rapport qui a conduit l’OMM à lancer, en 1963, le programme de la Veille météorologique mondiale, système de collecte, d’analyse et de diffusion de données météorologiques et d’informations connexes relatives à l’environnement qui est devenu l’épine dorsale des autres programmes de l’Organisation. La Veille météorologique mondiale a marqué le début d’une nouvelle ère fondée sur l’échange en temps réel d’informations sur le temps par les Services météorologiques et hydrométéorologiques nationaux de 191 pays Membres. Elle relie entre eux des instruments d’observation météorologique, qui recueillent les données, des systèmes de télécommunication, qui les transmettent et des centres de traitement de données qui modélisent l’atmosphère terrestre et prédisent son évolution. C’est la création de l’OMM et de la Veille météorologique mondiale, conjuguée aux derniers progrès scientifiques et techniques réalisés dans les domaines de l’informatique, des télécommunications et des satellites, qui a fait de la science et de la prévision du climat ce qu’elles sont devenues aujourd’hui. 5 Des observations plus nombreuses… Les progrès de la technique se sont accélérés au XXe siècle: les réseaux ont commencé à se multiplier, constitués de stations météorologiques à la pointe de la modernité, tant et si bien que les stations météorologiques se comptent aujourd’hui par dizaines de milliers. Ballons, aéronefs et fusées emportent des instruments dans la haute atmosphère, et un millier de navires marchands effectuent des mesures atmosphériques tandis qu’ils naviguent sur les mers, où les températures et les courants océaniques sont mesurés par un réseau mondial de bouées Argo. Grâce aux profileurs de vent, radars et systèmes de détection de la foudre, entre autres instruments de mesure, la résolution spatio-temporelle des observations météorologiques et climatologiques ne cesse de s’affiner, tandis que l’Internet et des systèmes de télécommunication de plus en plus perfectionnés assurent rapidement et au moindre coût la diffusion des données instrumentales. 6 Les satellites de télédétection utilisés à des fins météorologiques ont commencé à jouer un rôle dans les années 60 avant de se généraliser dans les années 70. Aujourd’hui, les satellites météorologiques à orbite polaire survolent chaque point de la Terre au moins deux fois par jour, fournissant à l’échelle du globe des données d’observation portant sur la nébulosité, la température, la vapeur d’eau et bien d’autres paramètres encore. Un deuxième réseau, constitué de satellites géostationnaires positionnés chacun au-dessus d’un point fixe de l’équateur, assure une surveillance permanente des systèmes météorologiques sur la majeure partie de la planète. Basés dans l’espace, dans l’atmosphère, sur terre et sur mer, ces différents systèmes fournissent ensemble une image très complète des conditions météorologiques et climatiques qui règnent sur Terre. L’avènement de l’informatique constitue une autre révolution technologique majeure. Les Services météorologiques nationaux de même que les centres régionaux et mondiaux de traitement des données ont été parmi les premiers à exploiter des ordinateurs extrêmement puissants, capables d’analyser des quantités prodigieuses de données en vue d’établir des prévisions de plus en plus fiables. La puissance de calcul des ordinateurs ne cesse d’augmenter, ce qui permet d’exploiter des modèles météorologiques et climatiques très complexes et des algorithmes d’assimilation de données capables de tirer pleinement parti du volume croissant de données satellitaires et autres données d’observation. NOAA | NASA | Denis Balibouse/REUTERS | Sirikorn Techatraibhop (Shutterstock.com) | EISCAT | David Gochis/UCAR Les bases technologiques de la prévision scientifique du temps remontent au XVIIe siècle, lorsque furent inventés thermomètres, baromètres et autres instruments de mesure. Grâce à ces innovations, le premier réseau international de stations météorologiques (11 au total réparties entre l’Allemagne, l’Autriche, la France, l’Italie et la Pologne) est mis sur pied en 1654, et en 1780, un réseau de 39 stations – 37 en Europe et deux en Amérique du Nord – voit le jour. En 1849, avec l’arrivée du télégraphe électrique de Samuel Morse, il devient possible de transmettre et d’échanger en temps quasi réel les messages d’observation météorologique qui émanent de ces réseaux. … conjuguées aux progrès de la science Le soleil est plus chaud à l’équateur que dans les régions polaires, et l’atmosphère comme l’océan réagissent à ce déséquilibre en redistribuant autour de la Terre l’énergie qu’ils ont captée. Les régimes de vents qui en résultent sont déterminés par la rotation de la Terre autour de son axe incliné, par les lois fondamentales de la physique et de la thermodynamique et par la nature non linéaire des systèmes complexes en jeu. Tout cela donne ce que nous appelons le temps. Dès les années 80, les scientifiques avaient acquis une connais sanc e approfondie de l’inf luenc e qu’exercent sur le temps les océans et la stratosphère (couche atmosphérique située au-dessus de la troposphère, siège des phénomènes météorologiques). Les océans stockent beaucoup plus de chaleur que l’atmosphère, et ce sur des périodes plus longues, et ils restituent à l’atmosphère cette chaleur, accompagnée d’humidité. Les processus stratosphériques, y compris ceux qui sont liés à la couche d’ozone, influent sur la circulation dans la stratosphère et interagissent avec les vents troposphériques. Les scientifiques ne se contentent pas d’utiliser les observations: ils étudient aussi le temps en créant des modèles mathématiques qui simulent le comportement de l’atmosphère sur une période donnée. Ces modèles de prévision numérique traitent les données d’observation météorologique relatives à la planète entière en ayant recours à des séries d’équations mathématiques qui décrivent l’évolution et l’interaction des nuages, des précipitations, des vents, des températures, de la pression et d’autres variable s mé téorologique s . Le s s cientif ique s améliorent progressivement ces modèles au fur et à mesure qu’ils approfondissent leur connaissance du système terrestre, et il incombe alors aux prévisionnistes, forts de leurs compétences et de leur expérience, d’interpréter les résultats des modèles en les adaptant au contexte local ou régional afin d’en informer le public. L’étude scientifique de la variabilité du climat et du changement climatique a fait par ailleurs d’énormes progrès au cours des décennies écoulées. Le climat est souvent défini comme étant «le temps moyen» par référence à une longue période (30 ans en général). Les climatologues s’efforcent de prévoir l’évolution du climat en étudiant les changements observés au fil des saisons, des années, des décennies ou des millénaires en ce qui concerne la température, les précipitations et les tempêtes. Le climat est modelé par les modifications et les variations naturelles et anthropiques que connaissent la surface des terres, les océans, les lacs et les cours d’eau, les glaciers et les calottes glaciaires, les forêts et les autres écosystèmes. Il est aussi influencé par l’évolution des concentrations de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre: en absorbant le rayonnement infrarouge qui est renvoyé dans l’espace par la surface terrestre réchauffée par le soleil, ces gaz déterminent les flux naturels d’énergie dans le système climatique. Une meilleure connais sance du climat aide à comprendre le temps, et vice-versa. Par exemple, si l’on parvient à mieux comprendre comment le changement climatique entraînera une modification de la configuration et de la fréquence des tempêtes et autres phénomènes extrêmes, les analyses et les prévisions météorologiques seront de meilleure qualité. Inversement, une observation plus minutieuse et une étude plus approfondie des phénomènes et des tendances météorologiques nous aideront à affiner les modèles de climat et les prévisions climatiques. 7 Étendre l’échéance des prévisions Jusqu’aux années 80, les météorologistes établissaient en général des prévisions à deux ou trois jours d’échéance. Or aujourd’hui, l’échéance des prévisions est passée à cinq voire dix jours, et celles-ci sont beaucoup plus fiables que les prévisions à plus courte échéance des décennies précédentes. On s’attend d’ailleurs à de nouvelles avancées dans ce domaine. Météorologues et climatologues collaborent de plus en plus étroitement pour améliorer leurs prévisions, le but étant d’atteindre une fiabilité et une utilité jugées encore irréalisables aujourd’hui. Cela consiste notamment à étudier les moyens de parvenir à des prévisions météorologiques et climatiques sans solution de continuité en s’appuyant sur une vision globale du continuum temps-climat. La prévision du temps et la prévision du climat ont été généralement considérées jusqu’à présent comme des disciplines scientifiques distinctes. Or la frontière traditionnelle entre temps et climat apparaît de plus en plus comme étant artificielle. CNN Weather center | Richard Griffin (Shutterstock.com) | NOAA | New Jersey Governor’s Office Par exemple, les scientifiques qui collaborent au programme THORPEX ( Expérience concernant la recherche sur les systèmes d’observation et la prévisibilité) voudraient étendre à deux semaines l’échéance des prévisions qui portent sur les phénomènes météorologiques à fort impact et tester les produits de prévision de la prochaine génération. Dix centres de prévision soutiennent l’expérience THORPEX en fournissant des prévisions d’ensemble qui consistent en au moins 20 simulations de la trajectoire potentielle d’une tempête, ce qui permet d’assigner des probabilités aux différentes trajectoires possibles. Les prévisionnistes utilisent à leur tour ces probabilités pour vérifier que les produits et les services correspondants sont utiles. L’étape suivante consistera à fournir des alertes précoces de meilleure qualité dans le cas des phénomènes météorologiques à fort impact. 8 Oscillations et téléconnexions Grâce à l’amélioration des observations et de la puissance de calcul des ordinateurs, les scientifiques sont aujourd’hui beaucoup plus à même de détecter et d’élucider les régimes et les cycles qui régissent d’une manière générale le temps et le climat. Dans les années 80 et 90, de gros efforts ont été déployés sur le plan international pour améliorer les observations et approfondir l’étude des interactions entre l’océan et l’atmosphère, et notre capacité de prévoir les régimes saisonniers, en particulier dans les régions tropicales, a beaucoup progressé de ce fait. Le plus important de ces régimes saisonniers est connu sous le nom d’El Niño/Oscillation australe (ENSO), qui résulte des interactions entre l’atmosphère et l’océan dans le Pacifique tropical. Lors d’un épisode El Niño, les températures de surface de la mer au large des côtes sud-américaines, à la hauteur du Pérou, deviennent plus élevées que la normale, et lors d’un épisode La Niña, elles accusent à l’inverse une anomalie négative. Le phénomène ENSO est corrélé par des «téléconnexions» à d’importantes fluctuations du climat observées dans le monde entier. Lors d’une anomalie El Niño par exemple, certaines régions d’Amérique du Nord connaissent en principe des hivers plus cléments alors que dans d’autres régions, le temps est plus frais et plus humide; de son côté, l’Afrique de l’Est connaît généralement une pluviosité supérieure à la normale tandis que dans le centre-sud du continent, en Asie du Sud-Est et dans le nord de l’Australie, le temps devient plus sec que la normale. Quant aux épisodes La Niña, ils entraînent souvent la sécheresse sur les franges côtières du Pérou et du Chili, et des précipitations supérieures à la normale dans le nord du Brésil de décembre à février. Les exper ts ont recensé d’autres oscillations à grande échelle qui influent sur le climat. L’oscillation nord-atlantique est une variation de la pression atmosphérique entre l’anticyclone centré sur le milieu de l’Atlantique et la dépression située à proximité de l’Arctique. Elle détermine la force et la direction des vents d’ouest ainsi que la trajectoire des tempêtes qui balayent l’Atlantique Nord. Une grande différence de pression entre les deux systèmes tend à renforcer les vents d’ouest humides qui soufflent de l’Atlantique, ce qui donne des étés frais, des hivers doux et des pluies plus fréquentes en Europe. À l’inverse, lorsque le gradient de pression est faible et que les vents sont faibles ou nuls, le temps vient plus souvent de l’est continental: les étés sont alors plus chauds et les hivers plus froids, et les précipitations sont moindres. L’oscillation nord-atlantique peut avoir aussi une incidence sur le temps qu’il fait en Afrique du Nord et dans l’est de l’Amérique du Nord. À mesure qu’on en saura plus sur la façon dont l’atmosphère, les océans et la surface des terres interagissent pour engendrer oscillations et téléconnexions, les prévisions météorologiques et climatiques gagneront en qualité, et à mesure qu’ils approfondiront l’étude du climat, les scientifiques seront mieux à même de percer les secrets des régimes climatiques à grande échelle et d’en comprendre les répercussions. Il sera alors plus facile d’anticiper et de prendre des mesures efficaces pour protéger les personnes et les biens contre les extrêmes météorologiques et climatiques. 9 Prévision saisonnière et climatique 10 A Matej Hudovernik, Andrey tiyk, Yganko (Shutterstock.com) | NASA La prévision saisonnière constitue une étape supplémentaire dans le processus de prévision. La prévision du temps à 10 jours d’échéance présuppose que l’on ait accès aux données d’aujourd’hui concernant la pression atmosphérique, la température, la direction du vent et l’humidité ainsi que les conditions estimées à la surface des terres et des océans. Les ÉTÉ NE OM UT Ces produits et services offrent la possibilité aux décideurs et planificateurs de prendre en compte des informations et des prévisions climatiques scientif iquement fondées pour que la société puisse en retirer de réels bénéfices. Comme les défis auxquels l’humanité est confrontée sont de plus en plus complexes, interconnectés et liés à la variabilité du climat et au changement climatique, les gouvernements ont entrepris de collaborer via le Cadre mondial pour les services climatologiques (CMSC ) pour se donner les moyens de met tre pleinement à profit les services climatologiques. Basée sur les résultats de ce travail de recherche collectif, l’estimation la plus récente (2007) du GIEC laisse supposer que la moyenne mondiale des températures augmentera dans une fourchette comprise entre 1,8 et 4 °C d’ici à 2100 du fait de l’augmentation des concentrations de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre présents dans l’atmosphère. Les progrès constants de la climatologie nous aideront à y voir plus clair quant aux types de risques, liés directement ou indirectement aux conditions météorologiques, auxquels les générations futures devront faire face. Les scénarios régionaux deviendront de plus en plus précis avec le temps, et les prévisions gagneront en crédibilité dans la mesure où elles seront issues de modèles complexes tournant sur des ordinateurs de plus en plus puissants. PS TEM N RI Les prévisions climatiques saisonnières à pluriannuelles sont de plus en plus utilisées pour fournir des informations utiles à la prise de décisions concernant la gestion des risques de catastrophes, la santé, l’agriculture, la pêche, les ressources en eau, le tourisme, les transports et autres secteurs sensibles aux conditions météorologiques. Un nombre croissant de gouvernements, d’organismes et d’entreprises se fondent sur leur expérience en matière de diffusion d’informations générales sur le temps et le climat pour passer au stade suivant, à savoir fournir des produits et des services météorologiques et climatologiques sur mesure, c’est-à-dire conçus pour répondre à des besoins précis. La prévision du temps et les risques météorologiques auxquels sont exposés les personnes et les biens seront de plus en plus déterminés par le changement climatique, qui est d’ores et déjà une réalité. Les études révèlent en effet que les moyennes de températures et de précipitations sont déjà en train d’évoluer partout dans le monde. Les chercheurs progressent rapidement dans la compréhension du changement climatique, et comme leurs travaux ont de formidables répercussions politiques et socio-économiques, le Groupe d’experts intergouvernemental OMM-PNUE sur le changement climatique fait périodiquement le point sur l’état des connaissances dans ce domaine. P Le fait de savoir qu’il existe une forte probabilité que la saison de la mousson s’accompagne de précipitations faibles, moyennes ou élevées peut aider les agriculteurs et les distributeurs d’eau et d’électricité à planifier leurs activités. Même s’il ne peut pas anticiper avec précision, au-delà de quelques jours à l’avance, la formation d’un ouragan, typhon ou autre perturbation tropicale, le prévisionniste peut toutefois favoriser la prévention et contribuer à sauver des vies humaines en établissant des probabilités à propos du nombre de tempêtes à venir, de leur trajectoire et de leur intensité. modèles se basent sur ces «conditions initiales» pour calculer les valeurs futures. Pour anticiper la saison à venir en revanche, il est nécessaire de modéliser les interactions dynamiques entre toutes les composantes du système terrestre, par exemple la manière dont la température des océans et des terres influe sur la température de l’air. Quant à la prévision infrasaisonnière, elle fait la jonction entre ces deux échéances: autrement dit, elle porte sur la période intermédiaire, entre la prévision à dix jours et celle à trois mois. À elles seules, les conditions initiales ou les conditions en surface ne suffisent pas pour établir une prévision infrasaisonnière. Or il est essentiel d’assurer la jonction pour fournir un véritable continuum de prévisions météorologiques et climatiques. VER HI En approfondissant leur connaissance du phénomène ENSO et de ses téléconnexions avec les fluctuations climatiques observées ailleurs dans le monde, les scientifiques ont ouvert la voie à la prévision climatique saisonnière et à plus longue échéance. Les prévisionnistes peuvent d’ores et déjà fournir des informations utiles sur le climat, en particulier dans certaines régions pour la saison à venir, et leurs compétences dans ce domaine ne cessent de progresser. Avenir de la prévision L’observation et la prévision du temps ont fait des progrès remarquables au cours du dernier demi-siècle. C’est l’un des tours de force de la science parmi les plus spectaculaires qui soient, et les 50 prochaines années s’annoncent tout aussi passionnantes si ce n’est plus. Les météorologues continueront d’améliorer les produits d’information en les ciblant plus précisément sur des secteurs d’activité comme l’agriculture, les ressources en eau, la santé publique et l’urbanisme. Ces progrès seront motivés par la nécessité de répondre à des impératifs de sécurité toujours plus exigeants, tandis que l’impact du changement climatique nous obligera à rechercher les moyens d’accroître les capacités d’adaptation au temps et au climat. Les progrès de la météorologie et de la climatologie aideront les responsables politiques à promouvoir le développement durable et contribueront à concilier ce dernier avec la protection de l’environnement malgré la croissance économique et démographique. L’amélioration des prévisions permettra par exemple de gérer plus efficacement l’utilisation de l’eau, de rationaliser la consommation d’électricité grâce à une planification optimale de la production d’énergie renouvelable et de mieux répartir les ressources entre les secteurs de l’agriculture, de la construction et des transports. Des prévisions plus ciblées et plus fiables aideront ceux qui s’occupent de gérer les ressources et, d’une manière générale, les différents responsables à prendre des décisions pour l’immédiat et à concevoir des stratégies à plus long terme en toute connaissance de cause. De meilleures prévisions météorologiques permet tront aux agriculteurs de s’adapter plus rapidement à un déficit ou à un excédent pluviométrique, et de meilleures prévisions climatiques les guideront dans leur choix des variétés culturales les mieux adaptées aux conditions attendues pour la saison à venir. De leur côté, les responsables de la gestion des catastrophes seront mieux à même d’organiser les ressources dont ils disposent devant l’imminence d’une tempête ou d’une inondation. Enfin, les équipes de santé publique pourront choisir le meilleur moment pour lancer des campagnes de vaccination efficaces contre les maladies liées aux conditions météorologiques ou climatiques. procédures d’évacuation en seront facilitées, de même que la gestion des systèmes d’alimentation en eau et en énergie, des réseaux d’égouts, des transports souterrains et autres structures exposées aux intempéries. Pour apprendre aux intéressés à exploiter les prévisions de demain, il faudra leur inculquer les connaissances requises et renforcer les moyens dont ils disposent. Il s’agit en effet de faire en sorte que les décideurs et, d’une manière générale, le grand public puissent tirer tout le parti possible des informations et des prévisions très complexes auxquelles ils auront accès. Ils devront se familiariser avec les techniques d’interprétation des prévisions probabilistes, par exemple pour comprendre de quoi il s’agit lorsque «la probabilité que le printemps soit plus chaud et plus sec que la normale est de 70 %». Évaluer des statistiques, et notamment l’incertitude, ne va pas toujours de soi, mais on ne saurait en faire l’économie sinon les modèles météorologiques et climatiques les plus perfectionnés n’apporteront pas les avantages escomptés. Pour que ces remarquables avancées puissent déboucher sur des résultats tangibles, gouvernements et chercheurs du monde entier devront collaborer encore plus étroitement pour toutes les questions relatives au temps, au climat et à l’eau. Il leur faudra investir dans de nouveaux instruments afin d’améliorer l’observation des variables traditionnelles et aussi pour détecter des variables qui ne sont pas encore mesurées, tels les flux de carbone provenant des océans et des forêts. C’est de cette façon que la communauté internationale pourra véritablement concrétiser les immenses espoirs placés dans la science et la technique afin de relever certains des plus grands défis auxquels l’humanité est confrontée. La croissance des mégapoles sera, pour le prévisionniste, un facteur déterminant dans les années à venir. Pour aider les centres urbains, particulièrement vulnérables, à mieux anticiper les phénomènes extrêmes, de nombreux Services météorologiques s’attacheront à densifier leurs réseaux d’observation dans les villes et à renforcer les capacités d’adaptation de celles-ci par la fourniture de prévisions personnalisées intégrant des données sur le temps et le climat et des données socio-économiques. Les 11 SHUTTERSTOCK.COM Pour de plus amples informations, veuillez vous adresser à: Organisation météorologique mondiale 7 bis, avenue de la Paix – Case postale 2300 – CH 1211 Genève 2 – Suisse Tél.: +41 (0) 22 730 83 14 – Fax: +41 (0) 22 730 80 27 Courriel: [email protected] www.wmo.int P-CER_1312 Bureau de la communication et des relations publiques