Direc t i on d e s S c ienc e s de l a Ma t i ère
Dépa r t e men t d e R e c he r che F o ndam e n tal e s ur l a M a t i ère Conde n s ée
Ser vic e de P h ysi q ue S t ati s t ique , Mag n é tis m e e t Sup r a c onduc ti vit é
Sujet n° 4 : Transitions de phase magnétiques induites sous champ dans des
systèmes de spins quantiques : Etude par diffusion neutronique et mesures
macroscopiques.
Les systèmes à basse dimension de spins antiferromagnétiques (AF) présentent un
grand nombre de propriétés physiques intéressantes, en particulier des phénomènes quantiques
remarquables. Les systèmes de chaînes de Haldane (spins entiers), chaînes alternées ou
frustrées de spins 1/2, échelles de spins, dimères, … présentent un gap d’énergie finie en champ
nul entre l’état fondamental S = 0 et le premier état excité (S = 1).
Dans un tel système, l’application à très basse température d’un champ magnétique
conduit à de nouveaux comportements, encore mal compris, au-dessus du champ critique HC1
pour lequel le gap se ferme (suite au «splitting» Zeeman de l’état S = 1), tels que l’apparition d’un
ordre AF induit sous champ, en présence de faibles couplages inter-chaînes ou inter-dimères, et
de nouvelles excitations magnétiques. Cette transition serait une réalisation expérimentale d’une
condensation de Bose-Einstein des magnons (bosons) dans l’état fondamental, associée à la
présence d’un mode de Goldstone (sans gap) entre HC1 et le champ à saturation. Cependant, la
présence d’anisotropie par exemple peut créer un gap dans la phase induite sous champ, pour
donner lieu à de nouvelles excitations magnétiques, et il est important de comprendre ce
phénomène. C’est précisément ce qui a été observé dans la phase induite sous champ du
composé Cs3Cr2Br9 (voir figures 1 et 2), système de dimères de spins 3/2 [1]. L’application d’une
pression ou le dopage en impuretés joue dans bien des cas un rôle similaire à celui du champ
magnétique. Un tel effet de la pression ou du dopage (en substituant une partie du brome par de
l’iode) est précisément attendu dans le composé Cs3Cr2Br9, puisque le composé isostructural
Cs3Cr2I9, avec des distances plus courtes entre les dimères (et donc des couplages inter-dimères
plus forts) est sans gap et présente un ordre AF en champ nul.
Dans d’autres cas, l’application d’un champ magnétique peut conduire à un
comportement nouveau : l’apparition de plateaux dans la courbe d’aimantation M(H) pour des
valeurs fractionnaires de la valeur à saturation. Ce phénomène a été observé récemment dans
l’azurite Cu3(CO3)2(OH)2, première réalisation expérimentale d’une chaîne diamant de spins ½,
pour laquelle la frustration (impossibilité de satisfaire tous les échanges magnétiques
simultanément) joue un rôle important.
Le point fort du SPSMS, autour de ce programme de recherche très actif, est le couplage
entre la synthèse des monocristaux, les mesures macroscopiques (susceptibilité magnétique,
chaleur spécifique sous fort champ magnétique et microcalorimétrie sous pression) et la théorie,
au CEA, et les mesures microscopiques de diffusion neutronique à l’ILL, dans des conditions
extrêmes de température, champ magnétique et pression. Ces techniques constituent un outil
privilégié pour étudier les propriétés statiques et dynamiques de ces nouvelles phases. Cette
thématique, largement présente à Grenoble, mais aussi sur le plan international, fait l’objet de
collaborations étroites avec différents groupes grenoblois et japonais (RMN, RPE, théorie,
synthèse d’échantillons, …).