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De mon enfance sur ma colline, je me souviens que je tendais
la main pour y accueillir un papillon. La prairie était encom-
brée de couleurs et d’ailes qui furetaient de partout. Entouré d’un
orchestre champêtre où oiseaux et grillons rivalisaient avec les bour-
dons et les abeilles, mes oreilles bourdonnaient de musique sous le
soleil éblouissant.
Sur ma colline du Mormont, depuis le chalet de mes grands-pa-
rents, un chemin blanc de poussière coupait les champs. Il montait
raide sous le cimetière, puis continuait vers la lisière de la forêt où je
n’osais m’aventurer, près du sommet.
Par endroits dans les champs, la roche calcaire afeurait et refu-
sait la charrue, endroit colonisé par l’aubépine et de nombreuses
vipères.
Dans l’après-midi, les chars de foin puis en n d’été les chars de
blé tirés par les chevaux redescendaient de la colline chargés des
parfums des champs. Quelquefois, c’était la voiture noire et eurie
qui précédait tous les hommes silencieux. Elle montait au cimetière
sur ma colline aux papillons.
La prairie enchantée des
eurs qui volent...