1 THÈSE D'EXERCICE / UNIVERSITÉ DE RENNES 1 FACULTÉ DE MÉDECINE sous le sceau de l’Université Européenne de Bretagne THÈSE EN VUE DU DIPLÔME D'ÉTAT DE DOCTEUR EN MÉDECINE présentée par Lucie QUENTIN née le 05 Décembre 1985 à Saintes « Influence de l’information médicale sur les pratiques des médecins généralistes: Exemple à un an d’une étude de dépistage des anévrismes de l’aorte abdominale, chez les hommes de plus de 65 ans, de l’agglomération de Lorient. » Thèse soutenue à RENNES le 15 Janvier 2016 devant le jury composé de : Professeur Jean-Philippe VERHOYE PU-PH chirurgie thoracique et cardiovasculaire, CHU Rennes / Président Professeur Erwan FLECHER PU-PH chirurgie thoracique et cardiovasculaire, CHU Rennes / Juge Docteur Guillaume MAHE MCU-PH chirurgie vasculaire, médecine vasculaire, CHU Rennes / Juge Docteur Marie-Pierre LECOSSEC Médecin généraliste, Riantec / Membre invité Docteur François GERARD Chirurgien vasculaire, clinique Mutualiste Lorient / directeur de thèse 2 - PRATICIENS HOSPITALIERS PROFESSEURS DES UNIVERSITES NOM Prénom AFFECTATION ANNE-GALIBERT Marie Dominique Laboratoire de Biochimie et biologie moléculaire BELAUD-ROTUREAU Marc-Antoine Service de cytologie génétique et biologie cellulaire BELLISSANT Eric Pharmacologie BELLOU Abdel Fédération d'accueil et de traitement des urgences BELOEIL Hélène Anesthésiologie et Réanimation Chirurgicale, médecine d'urgence BENDAVID Claude Laboratoire de Biochimie et biologie moléculaire BENSALAH Karim Service d'Urologie BEUCHEE Alain Pédiatrie Génétique Médicale BONAN Isabelle Médecine physique et de réadaptation fonctionnelles BONNET Fabrice Département de médecine de l'adulte - Service d'endocrinologie BOUDJEMA Karim Département de chirurgie viscérale BOUGET Jacques Fédération d'accueil et de traitement des urgences BOURGUET Patrick Service de Médecine Nucléaire - CRLCC BRASSIER Gilles Neurochirurgie BRETAGNE Jean-François Service des maladies de l'appareil digestif BRISSOT Pierre Service de maladies du foie BRISSOT Régine Médecine physique et de réadaptation CARRE François Médecine du Sport CATROS Véronique Biologie cellulaire CHALES Gérard Rhumatologie CORBINEAU Hervé Chirurgie Thoracique et Cardio Vasculaire - C.C.P. CUGGIA Marc Biostatistiques, Informatique Médicale et technologies de la communication DARNAULT Pierre Anatomie Organogénèse DAUBERT Jean-Claude Cardiologie DAYAN Jacques (professeur associé des universités) Pédopsychiatrie - Centre Médico-Psychologique 154 rue de Chatillon Rennes DAVID Véronique Laboratoire de génétique moléculaire et hormonologie DE CREVOISIER Renaud Cancérologie et Radiothérapie - CRLCC. DECAUX Olivier Médecine Interne ; gériatrie et biologie du vieillissement DELAVAL Philippe Pneumologie 3 DESRUES Benoît Pneumologie DEUGNIER Yves Service des maladies du foie DONAL Erwan Département de cardiologie et maladies vasculaires DRAPIER Dominique Psychiatrie d'adultes DUPUY Alain Dermatologie DUVAUFERRIER Régis Département de radiologie et d'imagerie médicale ECOFFEY Claude Service d'Anesthésie-Réanimation Chirurgicale II EDAN Gilles Clinique Neurologique FERRE Jean Christophe Service de radiologie et d'imagerie médicale FEST Thierry Laboratoire d'Hématologie biologique et Immunologie FLECHER Erwan Service de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire FREMOND Benjamin Chirurgie Infantile GANDEMER Virginie Service de médecine de l'enfant et de l'adolescent GANDON Yves Département de radiologie et d'imagerie médicale GANGNEUX Jean-Pierre Parasitologie et Zoologie appliquée GARIN Etienne Service de médecine nucléaire - CRLCC GAUVRIT Jean-Yves Service de radiologie et d'imagerie médicale GODEY Benoit O.R.L. et Chirurgie Maxillo-Faciale GROSBOIS Bernard Département de médecine de l'adulte GUGGENBUHL Pascal Rhumatologie - Pôle Orthopédie, traumatologie, rhumatologie GUIGUEN Claude Parasitologie GUILLÉ François Directeur du CRLCC Centre Anti-Cancéreux GUYADER Dominique Hépatologie, Gastro-Entérologie HOUOT Roch Hématologie, Transfusion option Hématologie HUSSON Jean Louis Chirurgie Orthopédique et Traumatologique HUTEN Denis Fédération de chirurgie orthopédique JEGO Patrick Médecine Interne ; gériatrie et biologie du vieillissement JEGOUX Franck O.R.L. et Chirurgie Maxillo-Faciale KAYAL Samer Bactériologie-Virologie KERBRAT Pierre Cancérologie et Radiothérapie - CRLCC. 4 LAMY Thierry Hématologie Clinique CRLCC LAVIOLLE Bruno Pharmacologie fondamentale; Pharmacologie clinique LE BRETON Hervé Département de Cardiologie et Maladies Vasculaires LE GUEUT Maryannick Service de Médecine Légale et de médecine pénitenciaire LE TULZO Yves Réanimation Médicale LECLERCQ Christophe Département de Cardiologie et Maladies Vasculaires LECLERCQ Nathalie née RIOUX Anatomie et Cytologie Pathologiques - Pôle cellules et tissus LEGUERRIER Alain Département de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire LEJEUNE Florence Biophysique et Médecine Nucléaire LEVEQUE Jean Gynécologie et Obstétrique MABO Philippe Département de Cardiologie et Maladies Vasculaires MALLEDANT Yannick Anesthésie-Réanimation I - SAMU 35 MEUNIER Bernard Chirurgie digestive MICHELET Christian Clinique des Maladies Infectieuses et Réanimation Médicale MOIRAND Romain Unité fonctionnelle d'Addictologie - Service d'hépato-gastroentérologie MORANDI Xavier Anatomie - Service de Neurochirurgie MORTEMOUSQUE Bruno Ophtalmologie MOSSER Jean Biochimie et Biologie Moléculaire MOULINOUX Jacques Histologie-Embryologie-Cytogénétique MOURIAUX Frédéric Service d'ophtalmologie ODENT Sylvie Service de Génétique Médicale OGER Emmanuel Pharmacologie Clinique PERDRIGER Aleth Rhumatologie PLADYS Patrick Pôle médico-chirurgical de pédiatrie et de génétique clinique POULAIN Patrice Département de Gynécologie-Obstétrique et Reproduction Humaine RAVEL Célia Nadège Cytologie et Histologie - Pôle cellules et tissus RIFFAUD Laurent Neurochirurgie ROBERT-GANGNEUX Florence Laboratoire de parasitologie et mycologie ROUSSEY Michel - (Professeur émérite) Pédiatrie Génétique Médicale SAINT-JALMES Hervé PRISM 5 SEGUIN Philippe Anesthésiologie et Réanimation Chirurgicale Pôle anesthésie réanimation - SAMU SEMANA Gilbert INSERM 4917 SIPROUDHIS Laurent Service des maladies de l'appareil digestif SOMME Dominique Service de médecine gériatrique LA TAUVRAIS TARTE Karin INSERM 4917 TATTEVIN Pierre Maladies infectieuses, maladies tropicales THOMAZEAU Hervé Chirurgie Orthopédique et Traumatologique TORDJEMANN Sylvie née LUBART VERHOYE Jean-Philippe Pédopsychiatrie - Centre Médico-Psychologique 154 rue de Chatillon Rennes Département de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire CCP VERIN Marc Neurologie VERGER Christian - (Professeur émérite) Médecine et Santé au travail - Centre antipoison VIEL Jean-François Epidémiologie, économie de la santé et prévention VIGNEAU Cécile Service de néphrologie VIOLAS Philippe Chirurgie Infantile Pôle pédiatrique médico-chirurgical et génétique clinique WATIER Eric Chirurgie Plastique, Reconstructrice et Esthétique; Brûlologie WODEY Eric Service d'Anesthésie-Réanimation chirurgicale II MAITRES DE CONFERENCES DES UNIVERSITES - PRATICIENS HOSPITALIERS 6 NOM Prénom AFFECTATION AMIOT née BARUCH Laurence Hématologie BARDOU-JACQUET Edouard Gastroentérologie ; Hépatologie BEGUE Jean-Marc Physiologie Médicale CABILLIC Florian Biologie cellulaire - Pôle cellules et tissus CAUBETAlain Médecine et Santé au Travail DAMERON Olivier (Maître de Conférence) Laboratoire d'Informatique Médicale DE TAYRAC Marie Biochimie et Biologie moléculaire DEGEILH Brigitte Parasitologie et Mycologie DUBOURG Christèle Biochimie et Biologie moléculaire DUGAY Frédéric Histologie-Embryologie et Cytogénétique EDELINE Julien Cancérologie ; Radiothérapie GUILLET Benoit Département d'Hématologie Immunologie HAEGELEN Claire Anatomie Service de neurochirurgie HUGÉ Sandrine née LAFAYE (professeur associé des universités de Médecine Générale) Département de Médecine Générale JAILLARD Sylvie Cytologie et Histologie JOUNEAU Stéphane Pneumologie LAVENU Audrey (Maître de Conférence) Biostatistique Laboratoire de pharmacologie LE GALL François Département d'Anatomie et Cytologie Pathologiques LE RUMEUR née FERRET Elisabeth Physiologie Médiale MAHÉ Guillaume Service d'Imagerie médicale MASSART née LE HERISSE Catherine Biochimie générale et enzymologie MENARD Cédric Immunologie MENER Eric (maître de conférences associé des universités de Médecine Générale à mi-temps) Département de Médecine Générale MILON née LE GUENJoëlle Anatomie Organogénèse MOREAU Caroline Biochimie et biologie moléculaire MOUSSOUNI Fouzia INSERM U 49 (Maître de Conférence) MYHIE Didier (maître de conférence associé des universités de Médecine Générale) Département de Médecine Générale PANGAULT Céline Hématologie ; Transfusion 7 RENAUT Pierric (maître de conférences associé des universités de médecine générale Département de Médecine Générale à mi-temps) REYMANN Jean-Michel Pharmacologie RIOU Françoise Département de Santé Publique ROPARS Mickaël Anatomie Organogénèse SAULEAU Paul Neurologie 5ème étage TADIÉ Jean Marc Réanimation médicale, Médecine d'urgence TATTEVIN-FABLET Françoise (maître de conférences associé des universités de Médecine Générale) Département de Médecine Générale THOMAS Patricia née AMÉ Micro Environnement et Cancer - Immunologie TURLIN Bruno Département d'Anatomie et Cytologie Pathologiques VERDIER-LORNE Marie clémence Pharmacologie VINCENT Pascal Bactériologie-Virologie 8 SERMENT D’HIPPOCRATE Au moment d’être admis à exercer la médecine, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité. Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux. Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité. J’informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences. Je ne tromperai jamais leur confiance et n’exploiterai pas le pouvoir hérité des circonstances pour forcer les consciences. Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire. Admis dans l’intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés. Reçu à l’intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers et ma conduite ne servira pas à corrompre les mœurs. Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. Je préserverai l’indépendance nécessaire à l’accomplissement de ma mission. Je n’entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés. J’apporterai mon aide à mes confrères ainsi qu’à leurs familles dans l’adversité. Que les hommes et mes confrères m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses; que je sois déshonoré et méprisé si j’y manque. 9 REMERCIEMENTS A Monsieur le Professeur Verhoye, Merci de votre disponibilité et de me faire l’honneur de présider ce jury de thèse. Je vous prie de croire en l’expression de ma profonde et respectueuse reconnaissance. A Monsieur le Professeur Flécher, Merci de votre intérêt porté à cette thèse et de votre enthousiasme quant à votre présence au sein de mon jury. Soyez assuré de mon profond respect. A Monsieur le Docteur Mahé, Merci d’avoir accepté de juger mon travail et de votre présence. A Madame le Dr Lecossec, Je te remercie chaleureusement pour tout ce que tu m’as transmis en tant que maitre de stage, de ta confiance lors de mes débuts autonomes et pour ton soutien dans l’initiation de ce travail. A Monsieur le Dr Gérard, Merci de ton écoute et de ton accueil dans l’initiation de ce projet; de m’avoir guidé et soutenu afin de faire taire ce Verlaine qui sommeille en moi. A mes Parents, Pour leur amour et leur soutien quotidien depuis 30 ans. Tous aussi farfelus que soient mes projets, votre confiance me porte à aimer la vie chaque jour. A mon frère, Notre complicité m’est essentielle, en cultivant nos belles différences. A ma famille, pour leur présence et leur soutien. A mes amies d’enfance, Chloé et Laure, le temps passe et renforce nos liens. 10 A mes amis de faculté, devenus mes compagnons de route, dans la galère, dans le meilleur, dans nos soirées. Elo, Pat, Polo, Julot, Pauline, Pierre, Jojo, Mélinda. Vous participez au praticien que je deviens, et à celle que je suis. Votre amitié est précieuse. A ma famille d’adoption rennaise, Bertille, Céline, Mik, Clémence, Delphine, Emilie, Manem, Amélie pour ces belles années d’internat, qu’elles continuent au-delà de notre formation, au-delà de la médecine. A mes coloc, Bruno, Loulou, Olivier, FLR, pour leur bienveillance, leur bonne humeur, leurs petits plats, dans la maison du bonheur. Bruno, merci pour ton indispensable soutien. Alois, depuis ce jour d’accueil breton, en continuant d’écarter les tragédies grecques à coup de fou rire et de projets. Merci. Aux professionnels de santé médicaux et paramédicaux qui ont su me transmettre l’envie de persévérer, leur confiance et la force de leur engagement. A ceux que je ne cite pas, mais qui sont là qu’importe d’où qu’ils nous regardent. Aux patients, passés et futurs. 11 TABLE DES MATIERES INTRODUCTION ................................................................................................................................... 12 Epidémiologie des anévrismes de l’aorte abdominale ...................................................................... 12 Rôle du médecin généraliste ............................................................................................................. 12 Etude de la clinique mutualiste de Lorient ......................................................................................... 13 Justification de l’étude ....................................................................................................................... 14 MATERIEL ET METHODE.................................................................................................................... 15 Type d’étude ...................................................................................................................................... 15 Population étudiée ............................................................................................................................. 15 Conception et recueil des données .................................................................................................. 15 Méthode d’analyse des données ....................................................................................................... 16 RESULTATS ......................................................................................................................................... 17 Echantillon ......................................................................................................................................... 17 Caractéristiques de la population ...................................................................................................... 18 Connaissances et formation .............................................................................................................. 19 Pratiques actuelles des médecins généralistes ................................................................................ 20 Connaissance de l’étude de la clinique de Lorient ............................................................................ 22 Formation médicale souhaitée .......................................................................................................... 23 DISCUSSION ........................................................................................................................................ 24 Interprétation des résultats ................................................................................................................ 24 Limites et biais ................................................................................................................................... 25 CONCLUSION ...................................................................................................................................... 26 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................................ 28 ANNEXE 1 ............................................................................................................................................. 31 ANNEXE 2 ............................................................................................................................................. 32 ANNEXE 3 ............................................................................................................................................. 37 12 INTRODUCTION Epidémiologie des anévrismes de l’aorte abdominale L’anévrisme de l’aorte abdominale (AAA) est une dilatation permanente et localisée de l’aorte abdominale, avec une perte de parallélisme de ses bords. Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), la définition la plus consensuelle est un diamètre antéro-postérieur supérieur à 30 mm ou une dilatation de plus de 50% par rapport au diamètre de l’aorte abdominale sus-jacente. Les AAA sont majoritairement localisés au niveau de l’aorte sous-rénale. Ne seront traités dans ce travail que les AAA sous-rénaux. La prévalence des anévrismes de l’aorte abdominale (AAA), résumée dans une revue de littérature internationale, semble plus importante en Australie qu’en Amérique et en Europe (1). Cependant à l’échelle nationale française, la prévalence des AAA dans la population générale est méconnue. Elle est estimée à 0,87 % dans la population âgée de plus de 60 ans (2) et comprise entre et 3,7% et 5,9% dans la population masculine à haut risque cardiovasculaire (3). L’incidence des cas diagnostiqués et opérés était comprise entre 6 000 et 7 000 AAA/an en 2009-2010 (4). La mortalité liée aux AAA rompus est élevée : 80 % des sujets décèdent avant hospitalisation ou en péri-opératoire (5), alors que la mortalité des interventions programmées est inférieure à 5%. Malgré la nette diminution des AAA rompus, leur persistance laisse à penser que certains AAA sont encore diagnostiqués de manière tardive. L’ampleur des AAA non dépistés est impossible à chiffrer, étant donné l’absence de données épidémiologiques. Les essais randomisés de dépistage (dépistage unique chez les hommes âgés de 65 à 75 ans) concordent tous vers une réduction significative de la mortalité spécifique à moyen et long terme. Ces essais ont donné lieu à trois méta-analyses publiées par Lindholt et al. en 2008 (6), le groupe Cochrane en 2007 puis 2011 (5) et Takagi et al. en 2007 (7). Sur le plan international, plusieurs pays recommandent le dépistage des AAA (Etats-Unis, RoyaumeUni, Canada, Espagne) mais seuls les deux premiers ont mis en place un programme de dépistage (Etats-Unis en février 2006 (8), Royaume-Uni en janvier 2008 (9,10)). Rôle du médecin généraliste Le médecin généraliste intervient en amont de la prise en charge thérapeutique globale. Il identifie les sujets à risque d’une population ciblée au sein de la population générale. La Haute Autorité de Santé a publié en novembre 2012 (11) un rapport dédié aux médecins traitants, aboutissant à la recommandation du dépistage unique ciblé et opportuniste des AAA chez les hommes ayant au moins un des facteurs de risques suivants : - âge compris entre 65 et 75 ans et tabagisme chronique actuel ou passé ; - âge compris entre 50 et 75 ans et antécédents familiaux d’AAA (1 er degré). 13 Le moyen de dépistage de l’AAA est effectué par l’échographie-doppler, examen rapide, non invasif, reproductible et peu onéreux avec une bonne performance. La revue de la littérature, publiée en 2006 par la Société Française de Médecine Vasculaire (12), précisait que la sensibilité et la spécificité de l’échographie avoisinaient 100 %. La prise en charge thérapeutique est pluridisciplinaire et globale. L’approche curative fait intervenir le chirurgien vasculaire, quand l’AAA atteint le stade d’intervention, et est réalisée par voie chirurgicale ou endo-vasculaire. Les critères interventionnels sont : le diamètre du sac anévrismal (>50mm), la vitesse de croissance de l’anévrisme (>10mm/an), une symptomatologie fissuraire. La technique choisie se fait en fonction de l’anatomie et des comorbidités du patient. Une surveillance par échographie-doppler de la croissance et du diamètre est réalisée pour les AAA compris entre 30 et 50mm de diamètre. L’approche globale relève du médecin généraliste dans la prise en charge et le contrôle des facteurs de risque cardiovasculaires : arrêt du tabac, contrôle de la tension artérielle, réduction de l’hypercholestérolémie, contrôle du diabète si préexistant, prise en charge d’un surpoids et incitation aux mesures hygiéno-diététiques. Le but de cette dernière approche est double : réduire les facteurs de risque d’AAA et les comorbidités du patient influençant l’espérance de vie et le risque opératoire. La mortalité importante imputée aux ruptures d’AAA est à l’origine même de l’idée du dépistage. Cependant seulement 15% des AAA se rompent et 85% des patients porteurs d’un AAA décèdent des autres comorbidités cardiovasculaires (12,13,14). Etude de la Clinique Mutualiste de Lorient C’est dans ce contexte qu’une étude a été menée par le service de chirurgie vasculaire de la Clinique Mutualiste de la Porte de l’Orient de juin 2013 à février 2014. Les objectifs de cette étude étaient d’obtenir une prévalence des AAA sur un échantillon de population et de rechercher des facteurs de risque supplémentaires à ceux déjà établis par la littérature (11,12,15). La portée attendue était de cibler le dépistage et d’en réduire le coût. Tous les médecins généralistes de l’agglomération de Lorient ont été préalablement informés par courrier postal de l’étude et de son intentionnalité. Dans un premier temps, l’échantillon était constitué de 1426 hommes lorientais de plus de 65 ans, tirés au sort parmi les 13110 hommes de plus de 65 ans recensés sur l’agglomération de Lorient (soit 10,9%). Un questionnaire leur a été adressé par voie postale, évaluant la présence de facteurs de risque d’AAA et cardiovasculaires (annexe 1). Les facteurs de risques choisis étaient : - Age des patients (65-69ans, 70-75ans, >75ans) - Présence ou non d’AAA - Antécédents familiaux d’AAA 14 - Prise de traitement antihypertenseur - Suivi médical pour artérite des membres inférieurs - Prise d’un traitement hypolipémiant - Tabagisme actuel ou passé - Pathologie cardiaque - Sensation d’une masse battante péri-ombilicale Une seule réponse positive (hors traitement hypolipémiant seul) au questionnaire entrainait la réalisation d’une échographie abdominale. Le taux de participation était de 60,8% (867 questionnaires retournés). Parmi les 730 patients présentant au moins un facteur de risque d’AAA, 424 échographies abdominales ont été effectuées et retournées avec un compte rendu complet. Il a été observé : - 9 anévrismes de 30 à 39 mm de diamètre (2,1%) - 4 anévrismes de 40 à 49 mm de diamètre (1%) - 11 anévrismes ≥ 50 mm de diamètre (2,4%) dont 8 opérés avant dépistage, 2 opérés suite au dépistage, 1 en exploration. Chez les patients dépistés, les facteurs de risque d’AAA suivants ont été retrouvés statistiquement significatifs: le tabagisme, la prise d’un traitement hypolipémiant, la prise d’un traitement hypotensif, la présence d’une maladie cardiaque, la présence d’une artérite des membres inférieurs. Justification de l’étude Considérés comme les principaux acteurs du dépistage, il semble intéressant de présenter aux médecins généralistes les résultats de l’étude de Lorient. Quelle peut être l’influence de cette information sur leur pratique quotidienne ? L’objectif principal de ce travail est de mettre en évidence une différence de pratique entre les médecins généralistes de Lorient sensibilisés au dépistage de l’AAA, par rapport aux médecins généralistes non informés spécifiquement. Le critère de jugement principal est défini par la proposition du dépistage des AAA par les médecins traitants à leurs patients. Ce dépistage est actuellement controversé par le manque de données statistiques. Les objectifs secondaires sont de recueillir les opinions et attentes des médecins à ce propos. 15 MATERIEL ET METHODE Type d’étude Il s’agit d’une étude quantitative par questionnaire informatisé. Population étudiée Afin de comparer l’influence de l’information locale, deux groupes comparatifs ont été constitués selon l’agglomération d’exercice. Le groupe étudié était représenté par les médecins généralistes de l’agglomération de Lorient. Ces derniers avaient tous été informés de l’étude de dépistage de l’AAA par la clinique mutualiste en juin 2013. Cependant, de par la randomisation des patients, seule une partie d’entre eux ont eu une patientèle concernée. Le groupe contrôle était constitué par les médecins généralistes de l’agglomération adjacente de Vannes paraissant comparable en terme de proposition de soins. Ces médecins n’avaient pas reçu l’information de l’étude, et bénéficiaient de l’information médicale commune à tout médecin généraliste. Conception et recueil des données Un questionnaire anonyme a été conçu via l’outil Google Documents Drive® (annexe 2) comprenant vingt questions courtes. De par sa simplicité, il a permis de recueillir un nombre de réponses acceptable avec une forte précision. Dans un premier temps, il était demandé aux médecins des informations générales concernant leur sexe, leur âge, le nombre d’années d’installation, leur type et spécificité d’exercice, leur agglomération. La seconde partie du questionnaire concernait les connaissances des recommandations HAS, la formation médicale continue, la réalisation de ce dépistage, l’inclusion ou non dans l’étude lorientaise, le suivi des patients, les opinions, les attentes des médecins généralistes. Ce questionnaire a été transmis à tous les médecins généralistes installés du département du Morbihan (Bretagne) possédant une adresse électronique répertoriée auprès du Conseil Départemental de l’Ordre des Médecins et de l’Union Régionale des Professionnels de Santé de Bretagne. Parmi les 686 médecins généralistes recensés, 404 possédaient une adresse électronique professionnelle (41%). Un premier envoi a été fait le 04 juin 2015 au moyen de la mailing-liste du Conseil Départemental de l’Ordre des Médecins du 56 (soit 404 courriels). Une relance a été réalisée le 06 juillet 2015 selon la même procédure, et une seconde relance, le 27 aout 2015 au moyen de la mailing-liste de l’Union Régionale des Professionnels de Santé de Bretagne (298 courriels). 16 L’ensemble des données a été compilé en format Excel© par le logiciel. La date de clôture des réponses a été fixé à un mois de la dernière relance soit le 27/09/15. Méthode d’analyse des données Une analyse descriptive globale de la population a été réalisée. Les variables qualitatives sont exprimées en nombres et pourcentages et les variables quantitatives en moyenne. Les analyses comparatives ont été réalisées à l’aide du test de Chi² pour les variables qualitatives, notée (p)*, ou du test exact de Fisher si nécessaire, noté (p)**. La différence est considérée comme significative pour des valeurs de p < 0,05. 17 RESULTATS Echantillon Sur les 404 mails diffusés, 78 médecins généralistes ont répondu au questionnaire (taux de réponse de 19,3%). Le panel retenu, après exclusion des médecins hors agglomérations concernées, est constitué de 56 médecins, 32 pour le groupe contrôle (Vannes) et 24 pour le groupe étudié (Lorient). (Figure 1.) 686 médecins généralistes Départements Morbihan 404 médecins généralistes ayant une adresse mail 78 retours de questionnaires 1 réponse non localisée 77 réponses analysées 24 médecins de Lorient Groupe étudié. 32 médecins de Vannes Groupe contrôle. Figure 1. Diagramme de flux. Constitution de l’échantillon de l’étude. 21 médecins des autres agglomérations du Morbihan 18 Caractéristiques de la population Les caractéristiques de l’échantillon étudié sont résumées dans le Tableau 1. Sexe : Homme Médecins Médecins généralistes de généralistes de Lorient (E+) Vannes (E-) 14 (58,3%) 20 (62,5%) Total Significativité 34 (60,7%) P = 0,97* Sexe : Femme 10 (41,7%) 12 (37,5%) 22 (39,3%) P = 0,97* Exercice Rural 2 (8,3%) 11 (34,3%) 13 (23,2%) P = 0,02* Exercice Semi 10 (41,7%) 14 (43,7%) 24 (42,9%) P = 0,02* rural Exercice Urbain 12 (50%) 7 (21,9%) 19 (33,9%) P = 0,02* Tableau 1. Descriptif de l’échantillon (n=56). *test Chi² Il n’y a pas de différence significative entre le groupe étudié et le groupe contrôle au niveau du ratio hommes/femmes (p=0,97)*. En revanche, il existe une différence significative entre ces deux groupes concernant le milieu d’exercice avec une sur-représentativité de l’exercice urbain dans la population lorientaise et semi-rural chez les médecins vannetais (p=0,02)*. Spécificité d’exercice : La majorité des médecins sondés n’a pas de formation complémentaire spécifiant leur pratique (87,5%), autre que la médecine générale. Une formation complémentaire est réalisée par 12,5% des médecins (un médecin lorientais et six médecins vannetais). Il s’agit de l’ostéopathie, homéopathie, urgences, gériatrie, hypnose médicale, acupuncture, médecine du sport, expertise. Nombre d’années d’installation : Le nombre moyen d’années d’installation est de 19 ans pour les médecins lorientais, et de 16 ans pour les médecins vannetais. Seulement 16,6% des médecins lorientais sont installés depuis moins de 10 ans, contre 31,2% des médecins vannetais. Cependant cette différence n’est pas statistiquement significative (p = 0,35)**. 19 Connaissances et formations La majorité des médecins généralistes interrogés (80,4%) n’a pas connaissance de la dernière recommandation HAS « Fiche médecin traitant, dépistage et prévention des anévrismes de l’aorte abdominale » qui leur est dédiée. Celle-ci date de novembre 2012. Les médecins lorientais connaissent d’avantage cette recommandation (33,3%) en comparaison aux médecins vannetais dont 90,6% l’ignorent (p=0,04)**. Concernant la formation médicale continue (FMC) sur ce sujet, seul 14,5% du panel a participé à une formation, qu’elle soit récente ou non. Aucun des médecins vannetais n’a participé à une formation datant de moins de 3 ans. Au sein des médecins lorientais, 75% n’ont jamais assisté à une formation médicale concernant ce sujet. Sur les 25% ayant répondu affirmativement, 8% des formations sont récentes, postérieures aux recommandations de l’HAS. Au sein du panel vannetais, 93,5% des médecins déclarent ne pas être formés à ce sujet. Une réponse étant manquante, le calcul est basé sur un effectif de 55 médecins. Il n’y a pas de différence statistiquement significative entre le fait d’avoir participé à une FMC ou non, entre les deux groupes comparés (p=0,06)**. Les trois principales sources de formations des médecins généralistes sont les revues médicales de médecine générale (75%) ; les soirées de formation de FMC (66,1%) et les recommandations de la HAS (41,1%). Figure 2. Sources de formation des médecins généralistes revue médicale médecine générale 75 soirée FMC 66,1 recommandations HAS 41,1 sites internet médicaux 30,4 congrès 21,4 groupe de pairs 16,1 publications scientifiques 14,3 e-formation, e-learning 10,7 représentants laboratoire 10,7 sites internet grand public 7,1 autres 7,1 0 10 20 30 pourcentage de médecins Figure 2. Sources de formation générales des omnipraticiens. 40 50 60 70 80 20 On note des similitudes entre le groupe étudié et le groupe contrôle. En effet, 75% des médecins de chaque groupe s’informent par les revues de médecine générale, et 41% au moyen des recommandations HAS. En revanche, 83,3% des médecins lorientais assistent à des soirées de formation, contre 53,1% des médecins vannetais. Cette différence est significative entre les médecins de Vannes et Lorient (p=0,02)** OR=4,29 IC à 95%[1,0892-21,2425]. Les autres sources de formation sont constituées par les groupes qualités, les comptes-rendus de chirurgie vasculaire des patients, et les journées post-universitaires. Pratiques actuelles des médecins généralistes Suivi des AAA Au total, 87,5% des médecins suivent de patients présentant un AAA. La majorité des médecins généralistes déclarent suivre entre 2 et 5 patients présentant un AAA et ce, en proportion quasi similaire dans les deux groupes (45,8% Lorient et 43,8% Vannes), sans différence statistiquement significative (p=0,90*). En revanche, 40,6% des médecins vannetais suivent moins de 2 patients contre 25% des médecins lorientais (p=0,33*). Ces derniers sont majoritaires quant au suivi de plus de 5 patients (16,7%) (p=0,15*). Le nombre de médecins déclarant ne suivre aucun patient présentant un AAA, est proportionnellement égal dans les deux groupes (12,5%) (p=1)**. Proposition du dépistage de l’anévrisme de l’AAA. Proposez-vous le dépistage de l'AAA? 25 nombre de médecins 20 20 18 15 9 10 5 4 2 3 0 0 0 jamais parfois Lorient souvent Vannes Figure. Proposition de dépistage par les médecins à leur patient. systématiquement 21 Le dépistage est proposé par 76,8% des médecins interrogés. Les médecins de Lorient proposent d’avantage le dépistage des AAA que leurs confrères vannetais (respectivement 83,3% versus 71,9% p=0,36**). Dans les deux groupes, la fréquence de dépistage majoritaire est « parfois » (75% pour Lorient versus 62,5% pour Vannes). Aucun médecin ne propose systématiquement le dépistage. Le dépistage de l’AAA n’est jamais proposé par 23,2% des médecins généralistes, minoritairement à Lorient (16,7%). Dans 76,8% des cas, ce dépistage, lorsqu’il est proposé au patient, répond à la présence de facteurs de risque identifiés par le médecin. Les principaux facteurs de risques retenus par les médecins généralistes sont décrits dans la figure 4. hypertension artérielle 71,4 antécédents familiaux AAA 48,2 age > 65 ans 41,1 tabagisme 39,3 sexe masculin 26,8 dyslipidémie 14,3 cardiopathies 14,3 diabète 10,7 0 10 20 30 40 50 60 70 80 pourcentage de médecins Figure 4. Facteurs de risques identifiés par les médecins justifiant le dépistage des AAA. On note que le principal facteur de risque identifié par les médecins généralistes est l’hypertension artérielle, et ce pour 79,2% des médecins lorientais et 65,6% des médecins vannetais (p=0,52)*. Les cinq autres facteurs de risques motivant la recherche d’un AAA, sont les antécédents familiaux d’AAA, l’âge supérieur à soixante-cinq ans, le sexe masculin et le tabac. Pour aucun de ces facteurs il n’y a de différence statistiquement significative entre les groupes vannetais et lorientais. 22 Parcours de soins et difficultés rencontrées Pour une majorité des médecins du panel, l’interlocuteur privilégié est l’angiologue (69,8%), dont 70% à Lorient et 69,5% à Vannes. Le second interlocuteur est l’échographiste (39,5%), dont 50% à Lorient et 30,4% à Vannes. La connaissance du réseau de soins est un facteur limitant pour 13,5% des médecins interrogés. La principale contrainte rencontrée par les médecins généralistes afin de proposer ce dépistage est le manque de formation ou d’information médicale à ce sujet (59,6%). Viennent ensuite, le temps médical insuffisant consacré au dépistage ainsi que l’indisponibilité des spécialistes qui représentent 17, 3% des réponses. Le refus du patient n’est pas un argument massivement retenu par les médecins avec seulement 11,7% des médecins sondés. En analysant plus particulièrement les réponses des médecins ne réalisant pas le dépistage, les raisons principales évoquées sont la formation médicale insuffisante (84,6%), le temps médical insuffisant (15,4%) et le réseau de soin non connu (7,7%). Connaissance de l’Etude de la Clinique Mutualiste de Lorient Inclusion des patients On note que 16,1% des médecins interrogés pensent avoir un patient inclus dans l’étude. Concernant l’agglomération lorientaise, 33,3% des médecins déclarent avoir un patient inclus dans l’étude. Concernant l’agglomération vannetaise, un seul médecin a exprimé une réponse positive. Celle-ci pourrait correspondre, de par le schéma de l’étude, à un patient résident au sein de l’agglomération de Lorient, dont le suivi médical est réalisé par un médecin installé dans l’agglomération de Vannes. Retour des patients concernant l’étude Les patients ayant été inclus dans l’étude ont, pour la moitié d’entre eux, retourné leur expérience à leur médecin lorientais, initiant un échange au sujet du dépistage. En proportion similaire, il y a eu autant de participation sans suite. Aucun retour ni échange n’a été rapporté par le médecin de Vannes. Sensibilisation des médecins Sur les 16,1% des médecins traitants concernés par l’étude de Lorient via l’inclusion de leurs patients, 55,6% disent avoir été sensibilisés au dépistage des AAA, tous exerçant à Lorient. 23 Intérêt pour les résultats de l’étude Les médecins interrogés souhaitent à 80,4% avoir accès au résultat de l’étude menée par la clinique de Lorient (annexe 3), dont 83,3% des médecins lorientais et 78,1% des médecins vannetais. Il n’y a pas de différence significative entre les deux groupes (p=0,74)**. Formation médicale souhaitée Les médecins interrogés sont majoritairement enthousiastes pour une formation médicale continue à ce sujet (89,3%) dont 95,8% des médecins lorientais et 65,6% des médecins de Vannes (p=0,008 ; OR=11,6 IC à 95% [1,46-539,1]. Les modalités appropriées seraient, selon 60,7% des médecins une soirée dans la semaine ou pour 25% d’entre eux, un après-midi indemnisé en semaine. Concernant les médecins non intéressés par une formation (21,4%), les principales raisons sont : leur manque de temps disponible et une absence de formation proposée (30%). Il n’y a pas de différence entre les deux groupes. On note que 20% des médecins déclarent ne pas être motivés dont un ne se sentant pas concerné par la question du dépistage des AAA. Parmi les autres raisons évoquées, on note un sentiment de non priorité face aux autres préoccupations médicales préventives des médecins généralistes, une controverse parue dans la revue Prescrire (16), un médecin s’estimant être suffisamment au fait sur le sujet. 24 DISCUSSION Interprétation des résultats Au sein du panel, 87,5% des médecins déclarent suivre des patients présentant un AAA. Cette proportion rend donc non négligeable la problématique des AAA en médecine générale. Le dépistage est proposé par 76,8% des médecins interrogés, majoritairement à la fréquence « parfois ». Il est réalisé, pour plus des trois-quarts d’entre eux, lors de l’identification de facteurs de risque chez le patient. Les médecins de Lorient tendent à proposer plus fréquemment le dépistage (83,3%) que ceux de Vannes (71,9%) cependant sans différence statistiquement significative. L’information locale, représentée par la communication de l’étude de Lorient, semblerait donc influencer les pratiques des médecins généralistes. Cette tendance est confortée par l’affirmation des médecins concernés (55,6%), d’avoir été sensibilisé au dépistage via l’inclusion de leur patient. Concernant les objectifs secondaires de l’étude, malgré une connaissance modeste des recommandations de la HAS (19,6% du panel) (11), on note un intérêt des médecins pour ce sujet. Ils seraient, pour 89,3% d’entre eux, favorables à une formation sur le dépistage des AAA, majoritairement à Lorient, lors d’une soirée en semaine ou d’une après-midi indemnisée. L’absence d’information ou de formation est retenue comme principale contrainte à la réalisation du dépistage. De plus, 80,4% du panel a souhaité connaitre les résultats de l’étude de la Clinique de Lorient témoignant de leur intérêt. Les mêmes facteurs de risques d’AAA ont été identifiés dans les deux groupes avec, de manière surprenante, l’hypertension artérielle comme principal facteur recherché (72,7%). L’étude de la Clinique de Lorient, conclut également comme significative la présence de l’hypertension artérielle comme risque prédisposant à l’AAA. Ce facteur n’est pourtant pas mentionné dans le rapport de la HAS qui constitue le troisième support de formation médicale continue pour 41,1% des médecins interrogés. Il conviendrait donc de poursuivre les études épidémiologiques afin de préciser les associations de facteurs de risque dans le but de cibler le dépistage. Le faible nombre d’AAA découvert de novo lors de l’étude de la clinique de Lorient laisse supposer que le dépistage, même s’il n’est pas appliqué selon la HAS, est réalisé au décours du suivi médical des patients à haut risque cardiovasculaire. Cependant, l’organisation de celui-ci n’est pas standardisée actuellement. En effet, il pourrait être envisagé au décours d’une consultation spécialisée et combiné à la prise en charge des autres facteurs de risque cardiovasculaires (angiologue, cardiologue…). Il s’avérerait ainsi moins contraignant pour les professionnels, car réalisé en un seul temps de consultation. Pour les patients, la proposition serait cohérente car associée à la prise en charge globale de leurs facteurs de risque cardiovasculaires. Cette proposition est avancée par la Société Française de Cardiologie (18), sous réserve d’une évaluation complémentaire des facteurs de risque associés aux AAA. 25 Dans un tout autre scénario, ce dépistage pourrait être réalisé par les médecins généralistes, dans le cadre d’une consultation médicale préventive dédiée, moyennant : une formation sur le sujet, une formation à l’échographie (19), un cadre juridique précis, et une reconnaissance par la cotation des actes de la Classification Commune des Actes Médicaux. Cette hypothèse a été évaluée lors d’un précédent travail de thèse (20), avec une conclusion encourageante quant à la motivation des médecins, mais conditionnée par le manque de données sur le sujet. L’interlocuteur principal lors de la proposition de ce dépistage au patient est identique pour les deux groupes, avec 69,8% des médecins ayant recours à l’angiologue. La demande d’échographie auprès du médecin radiologue est réalisée dans 39,5% des cas, majoritairement par les médecins lorientais. Ce manque d’homogénéité s’expliquerait-il par la disponibilité du réseau de spécialistes à l’échelle locale ? Le parcours de soins devrait être clarifié au niveau local puisqu’il représente un frein à la pratique du dépistage pour 12% des médecins interrogés. Les revues médicales de médecine générale sont la principale source d’information des médecins généralistes (75%). Selon la revue Prescrire (16,17), le dépistage des AAA aurait une balance bénéficerisque favorable mais les résultats hétérogènes interrogent sur la reproductibilité des systèmes de dépistage. Cette parution pourrait participer au nombre important de non-réponses, ou en tout cas, à la faible adhésion quant à la proposition du dépistage. Cette référence est d’ailleurs évoquée par un médecin ne souhaitant pas de FMC à ce sujet. Limites et biais Il existe, dans cette étude, un biais d’admission inhérent au mode de sélection des médecins généralistes. En effet, le questionnaire étant envoyé par mail, il fut adressé aux 404 médecins généralistes possédant une adresse électronique. De ce fait, n’ont pas été pris en compte 41% des médecins généralistes répertoriés par le Conseil Départemental de l’Ordre des Médecins du Morbihan n’ayant pas d’adresse électronique professionnelle. De plus il existe un biais d’auto sélection, engendré par la réponse volontaire du médecin au questionnaire. Il y avait 327 non-répondants. Les médecins ayant consacré leur temps à répondre à ce questionnaire sont-ils d’avantage sensibilisés ou intéressés par cette pathologie ? Il existe également une limite dans la comparabilité des groupes. En effet, on note une différence significative quant au mode d’exercice des médecins lorientais et vannetais. Ces derniers ont un mode d’exercice majoritairement semi-rural, alors que les médecins lorientais exercent plutôt en urbain. Cette différence pourrait interagir avec le type de pratique médicale et avec l’accès à la formation médicale continue. Enfin, il existe un manque de puissance corrélée aux faibles effectifs de l’étude. 26 CONCLUSION Dans un contexte où l’information médicale est disponible sous de multiples formes et sources, où le temps de consultation est souvent trop court et où la prévention n’est pas valorisée, les pratiques médicales s’en trouvent deshomogénéisées. Les recommandations de bonnes pratiques ont parfois des champs d’application discordants de la réalité de la pratique de la médecine générale quotidienne. Le cadre de réalisation du dépistage pourrait être spécifié afin d’en améliorer l’adhésion. Il semblerait que l’information à l’échelle locale influence la pratique des médecins. Cette tendance montre l’importance des réseaux de soins, de la communication entre médecins généralistes et spécialistes, permettant une meilleure prise en charge des patients, ce qui reste l’objectif primaire des soins médicaux. 27 28 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Li X, Zhao G, Zhang J, Duan Z, Xin S. Prevalence and trends of the abdominal aortic aneurysms epidemic in general population--a meta-analysis. PLoS ONE. 2013;8(12):e81260. 2. Haute Autorité de Santé. Pertinence de la mise en place d’un programme de dépistage des AAA en France. Novembre 2012. Panel LDP–Cegedim concernant la patientèle des médecins généralistes en 2006-2007. 3. 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Formulaire anonyme. 20 questions. 1/ Etes-vous: o un homme o une femme 2/ Exercez-vous en milieu: o rural o semi-rural o urbain 3/ Depuis combien d'années êtes-vous installé en cabinet libéral? 4/ Avez-vous une spécificité d'exercice? si oui, précisez dans "Autre"? o non o oui o Autre : 5/ De quelle agglomération dépendez-vous? o Lorient o Vannes o Autre communauté de commune: Pontivy, Redon... 6/ Avez-vous pris connaissance des recommandations HAS, novembre 2012 intitulées "Fiche médecin traitant, dépistage et prévention des anévrismes de l'aorte abdomninale"? o oui o non 33 7/ Avez-vous participé à une formation médicale continue (FMC) concernant l'anévrisme de l'aorte abdominale et son dépistage? si oui, par quelle équipe de formation (précisez dans "Autre") o oui, datant de plus de 3 ans. o oui, datant de moins de 3 ans. o non o Autre : 8/ Quelles sont vos principales sources actuelles de formations? o Publications scientifiques o revue médicale de médecine générale o recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) o soirée de formation médicale continue (FMC) o sites internet grand public o sites internets médicaux o e-formation sur e-learning o congrès o groupe de pairs o visites de représentants pharmaceutiques au cabinet o Autre : 9/ Suivez-vous des patients présentant un anévrisme de l'aorte abdominale? o non o oui, moins de 2 patients. o oui, entre 2 et 5 patients. o oui, plus de 5 patients. 10/ Proposez-vous le dépistage des anévrismes de l'aorte abdominale à vos patients? o jamais o parfois o souvent o systématiquement 34 11/ Dans quelle situation proposez-vous le dépistage d'anévrisme de l'aorte abdominale? o jamais, je ne le propose pas. o à la demande du patient. o en présence de facteurs de risque. 12/ Quels facteurs de risque susciteraient votre attention quant à la réalisation du dépistage? 4 réponses maximum. o tabagisme o hypertension artérielle o antécédents familiaux d'anévrisme de l'aorte abdominale o dyslipidémie o âge > 65 ans o diabète o sexe masculin o cardiopathie 13/ Vers quel(s) spécialiste(s) adresseriez-vous votre patient pour ce dépistage? o cardiologue o échographiste o angéiologue o chirurgien vasculaire 14/ Quelles sont pour vous les principales contraintes à la réalisation de ce dépistage? o temps médical insuffisant. o information/ formation médicale insuffisante. o indisponibilité des spécialistes. o réseau de soin non connu. o refus du patient. 35 15/ Pensez-vous avoir des patients inclus dans l'étude de dépistage des anévrismes de l'aorte abdominale menée en 2012 par l'équipe de chirurgie vasculaire de la clinique mutualiste de Lorient? o oui o non 16/ Avez-vous eu des retours de patients ayant participé à cette étude, initiant un échange sur le thème du dépistage des anévrismes de l'aorte abdomninale? o je n'ai pas de patient inclu. o j'ai des patients inclus, je n'ai pas eu de retour de leur part. o j'ai des patients inclus, j'ai eu des retours de leur part. 17/ Pensez-vous avoir été sensibilisé à ce dépistage des anévrismes de l'aorte abdominal via l'inclusion de vos patients? o oui o non o je n'ai pas de patient inclu 18/ Quel type de formation médicale continue souhaiteriez-vous concernant ce thème? o non, je ne suis pas intéressé par une formation sur ce thème. o une soirée en semaine o une après midi de semaine indemnisée o un samedi après midi ou soirée 19/ Si vous ne souhaitez pas participer à une formation sur ce thème, pourquoi? o je suis intéressé. o manque de temps o manque de motivation o absence de propositions de formation actuelle o cela ne concerne pas le médecin généraliste o Autre : 36 20/ Souhaiteriez-vous obtenir les résultats synthétisés (3 diapos) de l'étude réalisée par la clinique mutualiste de Lorient? https://docs.google.com/presentation/d/1bupVSlgJ2EYhx2ImLxL3KuJgOAAzna1YSmSFze1xTE/edit?usp=sharing o oui, cliquer sur le lien ci dessus. o non o 37 ANNEXE 3 : résumé de l’étude de Lorient joint au questionnaire. Justification-méthodologie. Diagramme de de Flux. 38 Résultats. Résultats. U.F.R. DE MEDECINE DE RENNES 39 N° QUENTIN Lucie Influence de l’information médicale sur les pratiques des médecins généralistes : Exemple à un an d’une étude de dépistage des anévrismes de l’aorte abdominale, chez les hommes de plus de 65 ans, de l’agglomération de Lorient. 39 feuilles, 3 Figures, 1 tableau, 30 cm, Thèse : Médecine ; Rennes 1; 2016. RESUME Contexte : La Haute Autorité de Santé (HAS) invite les médecins généralistes au dépistage ciblé des anévrismes de l’aorte abdominale (AAA). Une étude menée par le service de chirurgie vasculaire de la Clinique Mutualiste de Lorient, a eu pour objectifs d’obtenir une prévalence des AAA sur un échantillon de population et de rechercher des facteurs de risque associés à ceux déjà retrouvés dans la littérature. Les médecins généralistes de l’agglomération ont été sensibilisés au dépistage des AAA. Objectif : Quelle est l’influence de l’information médicale locale sur les pratiques des médecins généralistes concernant la proposition de dépistage des AAA à leur patient ? Secondairement, quelles sont les connaissances et attentes des médecins à ce sujet ? Méthode : Les médecins généralistes installés, de l’agglomération de Vannes (groupe contrôle) et de Lorient (groupe étudié), ont été interrogés par questionnaire informatisé, de juin à septembre 2015. Résultats : Le taux de réponse est de 19,3%. Les médecins de Lorient tendent à proposer plus fréquemment le dépistage des AAA. L’information locale semblerait influencer leurs pratiques. Il ressort également que les médecins de Lorient ont une connaissance accrue des recommandations de la HAS et une réelle motivation pour une formation médicale continue. Les contraintes à la réalisation de ce dépistage sont un manque de formation, de temps médical, et un parcours de soins insuffisamment clarifié. Conclusion : Une valorisation des échanges locaux entre médecins généralistes et spécialistes, une formation médicale dédiée et une standardisation du dépistage amélioreraient les pratiques au service du patient. ABSTRACT Background: The Haute Autorité de Santé (HAS) recommends the abdominal aorta aneurysm (AAA) ‘s screening by the general practitioners. A study about prevalence and risk factors of AAA has been conducted by the Lorient Clinic’s departement of vascular surgery. It has made aware the general practitioners of this screening. Objective: What is the influence of the local medical information about the pratices of general practitioners concerning the AAA screening ‘s proposal to their patient? Secondarily, what are the knowledge and expectations of the practitioners about this topic? Method: The general practitioners working in Vannes’s area (control group) and in Lorient (studied group) were asked by computererised questionnaire, in june to september 2015. Results: The answer rate is 19,3 %. The Lorient’s general practitioners are more likely to propose the AAA’s screening frequently. The local information seems to influence their practices. It also emerges that the Lorient’s practitioners have a greater knowledge of the HAS recommendations and are looking for some continuing medical training. The constraints to realize the screening are a lack of formation, and medical time, and an insufficiently clarified healthcare pathway. Conclusion: A development of local exchanges between general practitioners and specialists, a dedicated medical training and a standardization of screening would improve the practices for a better medical care. Rubrique de classement : ÉPIDÉMIOLOGIE Mots-clés : Anévrisme aorte abdominale Dépistage Médecine générale Mots-clés anglais MeSH : Abdominal aorta aneurysm Screening General medecine JURY Monsieur le Professeur Jean-Philippe VERHOYE Président : Assesseurs : Adresses de l’auteur : Monsieur le Professeur Erwan FLECHER Monsieur le Docteur Guillaume MAHE Monsieur le Docteur François GERARD (directeur) Madame le Docteur Marie-Pierre LECOSSEC 2 avenue Léon Bernard, Université de Rennes 1, 35000 Rennes