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ELECTRONIQUE
S
- N°37 - Avril 2013
ACTUALITÉ PRODUCTION
GRAVURE
Un procédé pour le 20 nm et en deçà
La technologie Alde mise au point par Nanoplas est un procédé de gravure plasma révolutionnaire à très grande sélectivité.
Il permet de résoudre le problème de gravure et d'élimination des spacers des transistors en 20 nm et en deçà.
N
anoplas, spécialiste fran-
çais des équipements
dédiés aux nouvelles
générations de circuits intégrés
(technologies 20, 14, 10 nm…),
révolutionne la gravure en annon-
çant une technologie à très forte
sélectivité. Rappelons que la gra-
vure cible un matériau particulier
(nitrure de silicium, par exemple).
Et la sélectivité est définie comme
étant la capacité de ciblage de
cette gravure, c'est-à-dire la capa-
cité de celle-ci à ne pas interférer
avec les autres matériaux. Dans
la pratique, une sélectivité de 10
pour 1 pour le nitrure de silicium,
par exemple, signifie que si on
grave 10 nm de nitrure, on grave
aussi 1 nm des autres matériaux.
A noter que cette sélectivité est
liée à la vitesse de gravure : l’ac-
tion sur un matériau se caracté-
rise en effet par la rapidité de
gravure de ce matériau (10 nm
par minute, par exemple) ainsi
que par la moindre action sur les
autres matériaux (gravure de
seulement 1 nm par minute, par
exemple) ; dans le cas exposé, on
aura une sélectivité de 10:1 (10
pour 1). Donc, plus la sélectivité
est importante, moins il y a de
gravures « parasites ». Actuelle-
ment, la fabrication des transis-
tors en technologies évoluées
(20 nm et en deçà) se heurte à la
difficulté de gravure ou d’élimina-
tion sélective des spacers ; il est
en effet difficile de retirer ceux-ci
sans affecter les matériaux envi-
ronnants. D’où un amoindrisse-
Nanoplas
GILLES BAUJON,
Pdg de Nanoplas
“ Outre les nœuds
20 nm et en deçà, le procédé
Alde intéresse le 28 nm
qui présente des problèmes
de rendement. ”
ment des caractéristiques de ces
transistors. Cela provient d’une
sélectivité insuffisante.
« Aujourd’hui, la sélectivité
atteint ses limites dans le cas de
la gravure humide [gravure
chimique dont un inconvénient
est d’être isotropique] », rappelle
Gilles Baujon, président de Nano-
plas. Et les alternatives que
représentent les solutions de gra-
vure par plasma RIE (gravure
ionique réactive), qui permettent
de graver dans une direction (de
façon anisotropique, donc) ne
permettent pas de dépasser les
50:1. « Alors qu’Intel réclame du
200:1 et Samsung, du 100:1 »,
remarque M. Baujon. Avec sa
technologie Alde (Atomic-
Layer Downstream
Etching), Nanoplas résout
ce problème. Et si actuel-
lement cette technologie
concerne la gravure du
nitrure de silicium, Nano-
plas étudie son extension
aux oxydes et au polysili-
cium. « Ce procédé bre-
veté est le fruit de deux
années de travail », pré-
cise M. Baujon. Dans la
pratique, la PME greno-
bloise a mis au point cette
technologie dans le cadre d’un
partenariat avec un grand fabri-
cant japonais d’équipements de
production. Des machines
incluant des modules Alde seront
en Bêta-test cette année, dans
des centres de production de cir-
cuits intégrés à partir de techno-
logies avancées. Et l’exclusivité
à laquelle est soumise Nanoplas
dans le cadre de son accord avec
le groupe japonais devant arriver
à échéance à la fin 2013, la PME
française envisage d’étendre la
commercialisation de son pro-
cédé à d’autres fournisseurs
d’outils de production. C'est heu-
reux car le procédé Alde ne laisse
pas indifférent : « plusieurs utili-
sateurs ont pris contact avec
nous pour se faire expliquer son
fonctionnement », nous a ainsi
déclaré le président de Nanoplas.
Dans la pratique, cette technolo-
gie utilise non pas une, mais plu-
sieurs sources plasma… « ce qui
facilitera l’extension du procédé
Alde aux tranches de 450 mm »,
remarque M. Baujon.
Des partenariats
avec le Leti et l’Imec
Spécialiste des solutions plasma
à destination de la nanoélectro-
nique, Nanoplas est également à
l’origine d’une technologie dite
HDRF (High Density Radical Flux)
dédiée notamment au nettoyage
des Mems, des Led et des com-
posés III-V. La source plasma à
couplage inductif utilisée génère
mille fois plus de radicaux électri-
quement neutres que ceux pro-
duits par les sources tradition-
nelles. C’est cette concentration
en radicaux neutres qui améliore
grandement l’efficacité du net-
toyage des wafers. En effet, les
particules chargées sont, pour
leur part, lentes et émettent
beaucoup de chaleur en entrant
en collision avec les surfaces à
nettoyer. Dans la pratique, Nano-
plas a réalisé et commercialise
des appareils de nettoyage à
chargement manuel ou automa-
tique. L’entreprise a vendu 25 de
ces machines.
La PME grenobloise poursuit
aussi des recherches dans le
cadre de partenariats technolo-
giques. Avec le CEA-Leti, elle a
un contrat d’une durée de 4 ans
pour des travaux portant sur les
transistors FD-SOI (Fully Deple-
ted - Silicon on Insulator) ; le
financement global de ce pro-
gramme atteint 14 millions d’eu-
ros. L'entreprise coopère égale-
ment avec l’Imec belge à des
études sur la gravure sur tranche
de 450 mm. « Une première
machine sera livrée en 2015 »,
annonce M. Baujon.
DIDIER GIRAULT
UNE LEVÉE DE FONDS POUR CHANGER D’ÉCHELLE
> Ayant vu le jour en 2006, Nanoplas, qui se définit
comme un spécialiste des machines dédiées
aux nouvelles générations de circuits intégrés,
s’appuie aujourd’hui sur 15 personnes basées à Grenoble.
La société dispose également d’une filiale aux Etats-Unis.
> Dans la pratique, Nanoplas se charge de la conception
des matériels et fait appel pour la fabrication de ceux-ci,
à un sous-traitant grenoblois. Elle a réalisé, l’an passé,
un chiffre d’affaires de 3,5 millions d’euros et prévoit,
pour 2013, entre 5 et 6 M€. Avec la mise au point
de la technologie Alde de gravure à haute sélectivité,
l’entreprise compte démarrer une activité de cessions
de licences. «
Nous prévoyons d’embaucher une quinzaine
de personnes dans les 18 mois à venir et visons
les 50 M€ de chiffre d’affaires en 2016
», indique
Gilles Baujon, son président.
> Pour aborder cette nouvelle étape de son histoire,
Nanoplas, qui est déjà soutenu par des
business angels
,
a prévu de lever de nouveaux fonds. «
Outre pour
les nœuds 20 nm et en deçà, il y a un marché pour
le 28 nm qui affiche des problèmes de rendement
»,
constate M. Baujon.