L
E
D
ISCOURS DE LA
P
HILOSOPHIE
ou
P
HILOSOPHIE EN
C
OURS
(Abrégé)
Sommaire
Présentation : Philosophie et Langage
Introduction : Qu'est-ce que la Philosophie ?
I. C
OSMO
-L
OGIE
1. Mathématique
2. Physique
3. Biologie
II. P
SYCHO
-L
OGIE
4. Anthropologie
5. Psychologie
6. Éthique
III. T
H
É
O
-L
OGIE
7. Art
8. Religion
9. Philosophie
Conclusion : Qu'est-ce que la Philosophie ?
1
P
RÉSENTATION :
P
HILOSOPHIE ET
L
ANGAGE
Notre propos vise à définir et à exposer la Philosophie, soit à en élucider le concept ou l'idée.
Tentant de philosopher sur la philosophie, il tourne infailliblement dans un cercle épistémologique.
Loin de discréditer celui-ci, en le taxant de cercle vicieux, on voudra bien y lire la marque de la nature
réfléchie du Langage qui délimite la sphère du dicible - pensable et auquel rien par principe n'échappe.
La discipline que nous avons en vue se résume-t-elle à autre chose qu'à un Méta-Discours ?
Que la Philosophie (ne) soit (qu') une modalité du Discours ressort du simple fait qu'elle se donne
dans et par les mots, seuls instruments au demeurant de la connaissance ou révélation. Nul « objet » ne
saurait en effet exister pour nous tant qu'il n'a pas été appréhendé ou identifié par un sujet, id est nous,
ce qui implique qu'il ait été d'abord nommé, sinon on ne pourrait rien en dire et encore moins en
constituer une science quelconque, faute de savoir de quoi l'on parle au juste et de pouvoir le qualifier.
Être c'est être dit, telle est l'unique prémisse de toute parole et donc du Verbe philosophique.
Celui-ci s'inscrit néanmoins dans un registre discursif privilégié, dans la mesure il va tirer toutes
les conséquences de cette proposition liminaire. Puisque rien ne préexiste au Langage, il est vain de
chercher un sens dans le rapport entre les vocables et des choses, ce dernier ne s'originant que de
la relation entre les termes eux-mêmes ou de leur lien interne. L'expérience la plus ordinaire
du dictionnaire, qui confronte le sujet, parti à la recherche d'une signification, au perpétuel renvoi des
expressions les unes aux autres, sans nul recours externe, illustre ce point. Partant pour atteindre un
Sens plein, il faut parcourir le Logos en son entier, sous peine de se condamner à du non-sens, ou, ce
qui revient au même, à un sens seulement partiel ou partial. Pour dire l'Être il importe de dire le Tout.
On n'a rien dit, tant que l'on n'a pas tout dit, tel est le corollaire du postulat linguistique et
conséquemment philosophique. L'objectif de la Doctrine de la Sagesse n'a-t-il pas toujours été
d'articuler l'intégralité de l'intelligible, soit de former le Système de la Science humaine et de dire ainsi
la Vérité, le Vrai ou mieux le Véri-dique ?
Encore convient-il de s'accorder sur le contenu du mot « Totalité » qui s'avère pour le moins ambigu.
Selon qu'on en retient une notion extensionnelle ou compréhensive, on dessinera une tout autre figure
de la Langue et/ou Philosophie. Suivant la première il suffirait d'additionner les différentes
significations possibles pour obtenir un savoir intégral ou total. Mais, outre qu'une pure sommation
d'éléments ne produit jamais un ensemble, les diverses parties retenues ne méritent l'appellation de
significations que si elles recèlent déjà un lien, conformément à leur statut. Aussi un authentique Tout
doit se concevoir, d'après la seconde acception de ce terme, sous la forme d'une Relation a priori entre
tous les sens découlant eux-mêmes directement de l'affirmation ou position du Discours même ;
ce n'est qu'ainsi qu'il a la moindre chance de témoigner de l'absoluité, autonomie ou systématicité
du Langage - Pensée et/ou du Philosopher en particulier.
Or celui-ci, méconnaissant toute extériorité, ne profère finalement et exclusivement que soi-même.
Le propre du dire, philosophique surtout, est d'être fondamentalement auto-référentiel ou sui-réflexif.
De sorte qu'une étude qui prétend à la conscience exhaustive de l'exprimable (signifiable) présentera
nécessairement une figure circulaire ou cyclique. Véritable Encyclopédie, le Texte du Philosophe
épousera donc les contours du procès discursif effectif, signant par là-même son caractère véri-dique.
Loin de faire nombre avec les autres discours possibles ou de proposer une vérité inédite ou originale,
la science philosophique se contente de les englober tous et de réfléchir du coup rétrospectivement
la vérité, à la fois profonde et banale, du Langage -Parole et Écriture indistinctement- en général.
En quoi elle correspond à notre « vocation » d'Homo loquens et/ou sapiens.
Plutôt que d'ouvrir à des mystères insondables, la Philosophie nous délivre un message clair et
pourtant fréquemment oublié, qu'il n'y a pas d'autre secret que celui que suscite notre parole.
Reconduisant nos interrogations à leur lieu de naissance -origine, elle démontre leur unité et solubilité.
Quel sens aurait du reste une question sans une réponse adéquate ou, mais c'est la même chose, que
voudrait dire une recherche qui ignorerait tout de ce qu'elle cherche ? Pour le vérifier, engageons-nous
derechef dans le philosopher, son cheminement - méthode nous révélera de lui-même ce dont il s'agit.
On n'en trouvera ici qu'un abrégé, son exposé complet étant réservé à la Philosophie en Cours.
2
I
NTRODUCTION
Qu'est-ce que la Philosophie ?
3
L'initiation à la philosophie exige la réponse à l'interrogation Qu'est-ce que la Philosophie ?
-soit que l'on brosse au préalable le portrait du Philosophe (Platon
1
)-, sous peine de ne point
savoir à quoi l'on entend s'introduire. Et puisque cette question est déjà une question
philosophique et même la première d'entre elles, celle qui prédétermine les autres, en
s'engageant dans son étude, on se trouve pris d'emblée dans un cercle inévitable qui revient à
philosopher sur la philosophie. Loin de constituer cependant un cercle vicieux, le retour
originaire de la philosophie sur elle-même témoigne de son statut réflexif
2
, à l'image de celui
du Discours dont le propre réside précisément dans sa capacité de se signifier soi-même.
Ne forme-t-elle pas d'ailleurs une modalité privilégiée, nous le verrons, du Langage ?
Au point de départ cette discipline se résume du reste à un nom -" ce mot de philosophie "
(Descartes
3
)-, terme d'origine grecque, Philo-Sophia (Amour de la Sagesse), et forgé par un
mathématicien hellène du VIè siècle av. J.C., Pythagore.
" Ce sont donc bien les Grecs qui créèrent la philosophie, dont le nom, au surplus, ne sonne pas étranger. (...)
Le terme de « philosophie » est une création de Pythagore." (Diogène Laërce
4
)
Or les Hellènes apparaissent comme les fondateurs de la science mathématique –le premier
théorème mathématique date de Thalès, un penseur du VIIè siècle originaire de la Grèce
d'Asie mineure, et le manuel instaurateur de la discipline remonte aux Éléments d'Euclide, un
mathématicien de la Grèce hellénistique du IIIè siècle- et du régime démocratique, fût-il
partiel, qui date de l'Athènes des VIè et siècles. Et leurs deux découvertes présentent un
lien intime irrécusable, à l'argumentation ou à la démonstration de l'une répond le débat ou le
raisonnement de l'autre : un même principe les ordonne, l'obligation de justification ou de la
preuve rationnelle et partant de la mise en commun, et donc égale, du savoir ou du pouvoir.
Issue du même « esprit », la philosophie ne saurait échapper à cette règle, ce que confirme sa
mise en forme paradigmatique, celle de Platon, auquel on doit sa véritable naissance,
Pythagore lui-même et Socrate n'ayant jamais rien écrit, quant aux présocratiques en général,
leur oeuvre demeurant trop proche de la littérature. Et l'auteur de la République et du Timée
a affiché clairement sa volonté « scientifique » et/ou pédagogique dans sa « Dialectique ».
"
La
philosophie
proprement
dite
commence
pour
nous
en
Grèce (...).
Avec
Platon
commence
la science philosophique
en tant que science." (Hegel
5
)
Aussi ce n'est qu'improprement que l'on parle aujourd'hui de la philosophie orientale.
Son appellation confirme pleinement ce point. Ainsi aimer (philein) veut dire demander ou
désirer une chose, une personne ou une idée, ce qui présuppose que l'on manque de ces objets.
En tant qu'être aimant, le philo-sophe débute par l'épreuve du manque. A l'encontre de
l'affirmation de la certitude immédiate (opinion), de la pseudo-science (technique) ou de
l'habilité politique, la conscience philosophique démarre par l'aveu de son ignorance/inscience
et conséquemment par le doute, l'examen ou l'interrogation. Seul un sujet sceptique peut
au demeurant s'adonner à une authentique recherche, libre qu'il se trouve de tout préjugé.
A l’instar de la science, la philosophie prend sa source dans l’étonnement/ l’émerveillement.
"
Car
cet
état
qui
consiste
à
s’émerveiller
est
tout
à
fait
d’un
philosophe
;
la
philosophie
ne
débute en effet pas autrement,
et il semble bien ne pas s’être trompé sur la généalogie, celui qui dit que Iris [déesse messagère des dieux,
symbole de la Sagesse] est la fille de Thaumas [même racine en grec qu’émerveillement]." (Platon)
Remettant en cause toutes les évidences naturelles, la connaissance effective s'amarre au
questionnement : pourquoi le monde est ce que et comme il est et non autre ou autrement ?
1
cf. Le Politique 257 a et Le Sophiste 254 b
2
vide I. Thomas-Fogiel, Référence et Autoréférence (Vrin 2006)
3
Principes de la philosophie, Lettre-Préface p. 557
4
Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres, Introd. pp. 40-42 ; cf. égal. Cicéron, Tusc. V. III. 7-9
5
H.Ph. Introd. IV. App. 2. p. 331 et Platon p. 389
4
Autrement dit la philosophie ne commence pas par le dogmatisme (dogma : opinion) mais par
le scepticisme (skepsis : examen). De ce moment les Dialogues platoniciens, dont la forme
inscrit
d’emblée la « discussion » au cœur de leur contenu et induit le "doute" ou "l’embarras"
6
chez les interlocuteurs et le lecteur, ainsi que les Méditations cartésiennes, qui s'ouvrent par
"Des choses que l’on peut révoquer en doute", représentent une illustration exemplaire.
Par delà le pyrrhonisme et sa suspension du jugement (epokhê), le scepticisme bien compris
constitue la première étape, le stade initial -" le premier degré vers la philosophie (...)
un moment de la philosophie elle-même " (Hegel)-, ou du savoir en général.
Mais si la philosophie débute bien par l'interrogation, il s'en faut qu'elle finisse par elle :
celle-ci
n'en
est
que
le
point
de
départ.
Car
si
la
question
ouvre
bien
la possibilité de la connaissance,
elle n'en fournit pas cependant la teneur. Pour savoir, il est nécessaire de questionner,
mais cela ne saurait suffire, encore faut-il que le questionnement se résolve en réponses.
Une
question
aurait-elle
au
demeurant
simplement
un
sens
sans
au moins l’espoir d’une réponse
?
L’émerveillement réduit à lui seul risquerait fort de tourner en stupeur. Le philosophe ne peut
se
contenter,
comme
on
l’affirme
parfois,
d’interroger,
il veut
également
des
réponses
et
s’oblige à
en proposer, sous peine de faillir à sa tâche. Plus : il présuppose nécessairement des réponses,
sinon qu’aimerait / rechercherait-il, dès lors qu’il est vain de re-chercher quelque chose,
si l’on ne sait pas même ce que l’on re-cherche ?
Ainsi s'interroger sur la philosophie implique bien qu'on ne sache pas ce qu'elle est ;
pourtant il n'en demeure pas moins vrai qu'une telle étude suppose qu'on puisse se mettre
d'accord sur son essence, c'est-à-dire qu'on sache, au moins tacitement, en quoi elle consiste,
sous peine de s'engager dans une réflexion oiseuse, sans objet. Avec le Philosophe
on postulera donc la possibilité réelle de la ré-solution de toutes les interrogations, soit la
conjonction de principe entre rationalité et réalité.
" Ce qui est rationnel est réel, et ce qui est réel est rationnel." (idem
7
)
Toute autre hypothèse contrevient à l’existence même de la recherche et / ou de la science,
celle-ci ignorant par définition l’irrationnel (le mystère) et une question sans réponse y
signifiant simplement une question mal posée voire une question qui ne se pose même pas,
ses termes recelant des présupposés inadmissibles.
L’amour philosophique, sauf à imaginer qu’il soit une demande ou un désir vide, tend
obligatoirement vers quelque chose dont celui qui en est habité a une certaine idée, fût-elle
implicite et qu’il lui appartiendra ensuite d’expliciter. Il en va de la philo-sophie comme de
n’importe quel autre amour. Il est intermédiaire entre le fait de n’avoir ou de n’être pas ...
encore, sinon on ne désirerait pas, et celui de posséder déjà, sinon que ou qui désirerait-on ?
La philosophie participe à la fois du manque et du plein. D’où il suit que ni " les Dieux ", qui
sont censés déjà tout avoir/ être, ni " les ignorants " ou les sots, qui n’ont/ne sont rien, tout en
s’imaginant avoir/être déjà tout et se prennent ainsi pour Dieu, ne peuvent philosopher
8
.
Philosopher est ainsi une pratique propre aux hommes normaux ou ordinaires. Précisons
cependant
que,
chez
les humains, nul n’est sot au point de ne rien désirer du tout. Un tel état est
réservé
aux
bêtes
qui n’ont elles pour seul souci que leur subsistance, qu’elles n’ont pas à aimer
puisqu’elle leur est imposée par le besoin. Chaque homme est un tant soit peu philosophe,
dès
lors
qu’il
est
hanté
par
la
question, celle que l’on pose dans l’amitié ou l’amour le plus banal
:
m’aimes-tu ? et qui veut dire en fait : suis-je digne d’être aimé par toi ? et plus radicalement :
qui suis-je ou qu’est-ce que je vaux ?, soit ma vie vaut-elle réellement la peine d'être vécue ?
6
Théét. 155 d (cf. égal. Aristote, Méta. A. 2. 982 b 12) ; Mén. 80 a-e et Théét. 149 a
7
R.S.Ph. p. 52 - H.Ph. Le Scepticisme, p. 776 et E. I § 6 R. ; cf. égal. Ph.D. Préf. p. 55
8
vide Platon, Banquet 203 e-204 a
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