La maladie chronique de l’enfant et la place des parents Historique, état des lieux et perspectives Sylvie Robillard Chercheure – Formatrice - Infirmière Paris 8 – UCP Formation • Présentation de l’objet de recherche • Introduction – Maladies chroniques (définition) – Maladies chroniques de l’enfant (spécificités) • Place des parents auprès de leur enfant porteur d’une maladie chronique – – – – • • • • Historique Encadrement réglementaire à ce jour Questionnements autour de la place des parents Le parent partenaire ? Apprentissages, savoirs et compétences des parents Echange de savoirs Faciliter le parcours des santé incluant une éducation thérapeutique Conclusion - Améliorer la relation de soins enfant-parents-soignants - Réfléchir à d’autres formes d’éducation thérapeutique Salon Infirmier 2016 – Sylvie Robillard - Recherche en sciences de l’éducation - Education, formation et intervention sociale - Éducation tout au long de la vie - Intérêt pour l’objet de recherche vient de : - ma pratique professionnelle d’infirmière - ma pratique professionnelle de formatrice - de la découverte de la recherche au décours d’une reprise d’études - Recherche multiréférentielle et qualitative - Recherche impliquée et/ou praticienne chercheure Salon Infirmier 2016 – Sylvie Robillard 15 millions de personnes atteintes plus ou moins sévèrement soit 20% de la population française. • 7,5 millions de ces personnes disposent d’une prise en charge en ALD (les plus gravement atteintes). s’inscrivant dans le temps • Avec l’allongement de la durée de souvent évolutives vie, la plupart de ces maladies sont en augmentation constante. pouvant entraîner une invalidité • Elles représentant un défi pour sujettes à des complications. notre système de santé et notre société, et sont à l’origine de 60 % des décès dont la moitié survient avant l’âge de 70 ans. Le retentissement d’une • Leur évolution et leurs maladie chronique sur la vie conséquences restent largement quotidienne d’une personne tributaires de l'accès des patients à une information et à une prise en est considérable Salon Infirmier 2016 – Sylvie Robillardadaptée. charge Les maladies chroniques d’après l’OMS sont des maladies : ! ! ! ! • Les maladies chroniques de l’enfant " Un million et demi à quatre millions de personnes de moins de vingt ans seraient atteints par une maladie chronique. " Aucun plan de santé publique n’est dirigé spécifiquement en leur direction et en celle de leurs familles. " La Commission nationale de la naissance et de la santé de l’enfant a publié en 2015 un document intitulé « Parcours de soins des enfants atteints de maladies chroniques ». " L’approche « maladie » prime généralement sur l’approche « populationnelle » et c’est pourquoi nous ne disposons pas de chiffres précis sur l’ensemble des maladies chroniques chez l’enfant. " La maladie chronique de l’enfant « nécessite la mise en œuvre d’un accompagnement pluridisciplinaire de l’enfant atteint, impliquant une coordination efficace des professionnels de santé qui devront être formés. " L’intérêt porté à ce suivi, dès le plus jeune âge, permet une adaptation précoce à un vécu particulier relatif à la maladie chronique et favorise l’absence de rupture dans le suivi des soins à l’adolescence. " Cela passe par la définition d’un parcours de santé incluant une éducation thérapeutique évolutive spécifique à l’enfant et à l’adolescent ainsi qu’à sa famille complétant un programme personnalisé de soins dont l’objectif est d’améliorer la qualité de la vie ». Salon Infirmier 2016 - Sauf cas particulier, un enfant ne vient pas seul à l’hôpital. Il est accompagné par ses parents ou une personne de référence. Soigner un enfant en pédiatrie implique donc obligatoirement d’être en rapport avec ses parents. - L’histoire et l’évolution de la pédiatrie sont en lien direct avec la manière dont l’enfant est perçu, les connaissances sur l’enfant influençant cette perception. - Les premiers hôpitaux pour enfants voient le jour au début du dixneuvième siècle. - La politique concernant la présence des parents, au demeurant la mère, auprès de l’enfant est plutôt restrictive, même si une certaine libéralité prévaut en lien avec les nécessités de l’allaitement. Les médecins et pédiatres sont assez favorables à cette présence maternelle qui présente pour eux un double avantage : « assurer la pérennité de l’allaitement maternel […] et surveiller le travail des infirmières.» (Mougel). C’est aujourd’hui un des reproches faits aux parents : « contrôlerSalon » leInfirmier travail soignants !. 2016des – Sylvie Robillard • La révolution pasteurienne, à partir des années 1880 a mis en évidence l’importance de l’hygiène, du lavage des mains et de la lutte contre les infections. La peur des infections qui découle de cette évolution incite les hôpitaux à restreindre les heures d’ouverture des services de manière drastique. • La mise en place de la sécurité sociale et les ordonnances Debré de 1958 signent le début du mouvement d’humanisation des hôpitaux. • Les travaux de René Spitz sur « l’hospitalisme » et de John Bowlby sur la « carence maternelle » vont être déterminants : la présence régulière d’un des parents auprès de l’enfant a une influence positive sur son état psychologique et contribue à la réussite de son hospitalisation. En France, Françoise Dolto, Serge Lebovici, Mélanie Klein, ou encore Ginette Raimbault poursuivent et relayent ces travaux qui suscitent de grands débats. La Grande-Bretagne, les Etats unis ouvrent les services de pédiatrie aux parents. Ce n’est pas encore le cas en France . Il faudra attendre mai 1968 (grèves etSalon pénurie Infirmier de 2016personnel) pour que la Les circulaires • Circulaire de1983 – Texte relatif à l’hospitalisation des enfants – Recommandations, préconisations et conseils pour accueillir l’enfant et ses parents. – Termes intéressants quant au regard porté sur les parents • Circulaire de 1998 Les chartes • Charte du patient hospitalisé – 1995, puis 2006 – Article 9 concerne l’enfant • Charte de l’enfant hospitalisé – 1988 – renforce celle de 1983 sans – Norme2004 non: opposable Circulaire SROS enfant et pour autant revenir sur certains adolescent termes contestables. Circulaire 2004 : cancérologie – Insiste sur le droit de visite des pédiatrique parents Salon Infirmier 2016 " La place des parents auprès de l’enfant malade est reconnue dans les textes. Leur coopération est recherchée. L’instauration d’un partenariat entre familles et soignants est souhaitée. " Mais, en pratique, dans la réalité, qu’en est-il ? " Même si les parents sont plutôt satisfaits, subsistent des problèmes accentués par une discordance importante entre les soignants et les parents quant à leur place dans les services de pédiatrie. " Les soignants souhaitent la présence des parents mais considèrent qu’ils une source de Salon Infirmier 2016 –sont Sylvie Robillard • Les parents restent des visiteurs, ils ne sont pas considérés comme des partenaires ou pouvant l’être. • La participation des parents est recherchée pour les soins de maternage mais il a été demandé à la moitié d’entre eux de sortir de la chambre pour les soins techniques et /ou douloureux. • Les trois-quarts des soignants considèrent que les parents les aident à mieux comprendre l’enfant mais seulement un tiers pense que les parents peuvent les aider à faire évoluer leurs pratiques. Plus d’un quart des parents déclarent n’avoir jamais été sollicités sur les habitudes, le caractère ou le comportement habituel de leur enfant. • Les avancées sont positives ; les efforts faits par les soignants sont réels mais ne sont ni systématisés, ni formalisés et il perdure une hétérogénéité entre services ou au sein d’une même spécialité. • «Un partenariat est une association entre deux ou plusieurs entreprises ou entités qui décident de coopérer en vue de réaliser un objectif commun ». Cela pourrait tout à fait s’appliquer au partenariat parents – soignants. Ici, l’objectif commun serait de tout mettre en œuvre pour le bien de l’enfant dans le cadre des soins en lien ou pas avec sa maladie Salon Infirmier 2016 – Sylviechronique. Robillard • La Commission nationale de la naissance et de la santé dans le document concernant le parcours de soins des enfants atteints de maladies chroniques, après avoir fait quelques rappels conceptuels (maladies chroniques et parcours de soins), détaille plus d’une vingtaine de préconisations générales et spécifiques au déroulé du parcours de soins de ces enfants. • Dans les intitulés de ces préconisations, seules deux intègrent la famille : – favoriser une prise en charge globale de la santé de l’enfant et de la famille – prise en compte de l’environnement et de sa famille pour l’autre. Salon Infirmier 2016 • L’intégration de la famille dans la mise en place du parcours de soins me paraît indispensable • Pourtant les familles et les parents ne font a priori pas partie des acteurs de la prise en charge de la maladie. • Mais alors, quid de l’ETP ? Selon l’Organisation mondiale de la santé, « l’éducation thérapeutique du patient vise à aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique ». Ce programme personnalisé d’ETP doit aider le malade à acquérir et maintenir des compétences en tenant compte de son expérience et Salon Infirmier 2016 – Sylvie Robillard de sa gestion de la maladie. Résultats de la recherche Bien que ce soit les parents qui connaissent le mieux leur enfant, pour faire face à la maladie de leur enfant, ils sont dans l’obligation d’apprendre, acquièrent des savoirs et développent des compétences. Quelques exemples : • Le vocabulaire • La connaissance de la maladie • Le fonctionnement du matériel • Regard clinique • Se positionner Salon Infirmier 2016 – Sylvie Robillard Les parents ont à apprendre des soignants Les soignants ont autant à apprendre des parents Les parents doivent s’organiser et le travail de parent d’enfant malade est une véritable activité Le travail des soignants est également une activité Pourquoi ne pas échanger autour de l’activité de soins ? Le soignant est un expert (généraliste) dans son domaine Le parent est un expert (singulier) de la maladie de son enfant Salon Infirmier 2016 • « L’expert se définit par ses compétences : il ne se définit pas par le savoir, mais par un savoirfaire ou, mieux, par un savoir-agir qui le distingue des autres sur une question ou dans un domaine donné. Ce n’est pas celui qui sait, mais celui qui sait faire ou comment faire en situation. » (Lenoir, 2004, p.14) Salon Infirmier 2016 – Sylvie Robillard • Et puis un parent qui a un enfant qui a un cancer et un parent qui a un enfant qui a une maladie génétique, c’est pas le même parent. • C’est pas un parcours facile, ce n’est pas simple, c’est semé d’embuches comme dans tout parcours d’apprentissage d’ailleurs. De toute façon, même pour ceux qui ne veulent pas devenir expert, je pense qu’il y a obligatoirement des apprentissages. • Mais, pourquoi ils expliquent pas plus. Faut avoir envie d’apprendre quand on a un enfant malade, c’est moi qui vous le dis. (Anita) • Je cherche de l’information, j’observe, je fais des liens. (Cécile) • Et puis, la famille, c’est pas simple parce que quand elle est dans le cadre d‘une hospitalisation, elle est un petit peu, elle ne peut pas dire vraiment, exactement ce qu’elle pense et Infirmier 2016 –est Sylvie liée, Robillard il y a la crainte de ce ce qu’elle a envie deSalon dire. Elle • Pour Hugo, j’en sais beaucoup, oui… Autant qu’une infirmière. Ouais, même plus, en tout cas même autant, pareil, c’est sur. (Stéphanie) • Avant la maladie, je pensais pas que j’étais capable de faire autant de choses. Mais quand Ilies il est devenu malade, j’ai su que j’étais capable. J’en vois plein des parents quand je viens ici qui croient qu’ils sont pas capables mais moi je leur dis : « si vous pouvez, faut apprendre au fur et à mesure. Regardez tout ce que vous faites déjà. Ah ! Alors vous voyez ». (Zohra) • Ben nous, cela nous a soudés la maladie. Du coup, on est un couple, une famille, on a une vie normale quoi, la plus normale possible. Enfin, la plus normale possible, pour nous. Oui, la plus normale possible… Il faut arriver à trouver un équilibre avec la maladie et la vie quotidienne, un équilibre avec la maladie dans la vie quotidienne, un équilibre entre la surveillance de la maladie, les conditions de vie, les activités et bien sur l’école. (Sophie) • C’est quoi ? Vous croyez quoi ? Vous faites des heures, ben l’infirmière aussi elle fait des heures et moi aussi je fais des heures. Vous avez des gardes. Ben ouais. Nous, on est là sept jours sur sept, vingt quatre 2016 – Sylvie Robillard heures sur vingt-quatre.Salon Ok,Infirmier on compare pas ce qui n’est pas comparable mais ils se rendent pas compte. (Mélanie) • Améliorer la qualité des soins et l’accompagnement de l’enfant en : – Tenant compte des connaissances et compétences de ses parents – En acceptant d’apprendre d’eux – En les incluant et en faisant de véritables partenaires • Ce qui faciliterait : – la définition d’un parcours de santé incluant une ETP spécifique à l’enfant et à sa famille. – Cette ETP compléterait ainsi un programme personnalisé de soins dont l’objectif est d’améliorer la qualité de la vie Salon Infirmier 2016 – Sylvie Robillard • Avoir une posture réflexive quant à ses pratiques professionnelles • Posture éducative de l’infirmier et écoute active • Améliorer la relation de soins enfant-parents-soignants • Prise en compte des besoins de l’enfant et de ses parents • Réfléchir à d’autres formes d’éducation thérapeutique • Réflexion autour de la place des parents dans les soins que ce soit en hospitalier, en ambulatoire ou à domicile • Réflexion autour de l’organisation des soins avec les parents et les enfants • Transmettre tout l’intérêt qu’il y a à apprendre des parents Salon Infirmier 2016 – Sylvie Robillard