les capteurs à fibre optique mesurent aussi les contraintes

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MESURES MÉCANIQUES
Les capteurs à fibre
optique mesurent
aussi les contraintes
Longtemps sers à des marchés de niche, les capteurs à fibre optique s’impo-
sent désormais dans de multiples applications industrielles. Un secteur en parti-
culier profite de cet essor : la mesure de contraintes. Dans ce domaine, les fibres
optiques nont plus rien à envier aux jauges métalliques. La technologie, bien que
relativementcente, offre de multiples avantages. On connaît son insensibilité
aux champs électromagtiques et la possibilité de réaliser des mesures à grande
distance. Mais elle permet aussi de mesurer les contraintes sur toute la longueur
dune fibre. De quoi ouvrir encore un champ d’applications déjà très large.
Parce qu’elle peut conduire la lu-
mière et transmettre des données
sur de très longues distances, la
fibre optique est devenue incon-
tournable dans un grand nombre d’applica-
tions. Les communications, la médecine,
linformatique, l’imagerie, ou encore l’éclai-
rage, profitent de ce
composant extrême-
ment mince, capable
de sister aux envi-
ronnements difficiles,
et d’assurer un débit
de transmission large-
ment supérieur à celui
d’un câble coaxial…
Mais la fibre optique
nest pas qu’un simple
moyen de transmettre
des signaux. Dans cer-
tains cas, elle peut aussi
constituer l’élément
sensible d’un capteur.
La température, la
pression, l’accéléra-
tion, la contrainte -
canique… bref, tout
phénomène capable
de modifier la propa-
gation du signal lumineux au ur de la
fibre, peut ainsi être mesu.
Les capteurs à fibre optique connaissent ac-
tuellement un essor important. Grâce à la
baisse du coût des composants optiques, ils
rivalisent avec les technologies de mesure
habituelles.
« Leur heure est arrivée ! Après avoir
été longtemps réservés à des applications à haute
valeur ajoutée, ils sont désormais appelés à se démo-
cratiser dans l’industrie »
, annonce Moha-
med Bouamra, gérant et directeur technique
de la société
LGS
. C’est le cas en particulier
dans la mesure de contraintes. Au cours de
ces dernières années, plusieurs fabricants
spécialisés dans l’instrumentation indus-
trielle, comme
HBM
(avec ses “jauges opti-
ques) ou
Scaime
(avec le système AdvOptics),
ont élargi leur offre avec une gamme de cap-
teurs de contraintes à fibres optiques. me
tendance chez les fournisseurs de solutions
de mesures optiques tels qu
Optoprim
ou
Photon Lines
. Du des acteurs de la sur-
veillance des structures tels que
Sites
ou
Osmos
,
les fibres optiques se sont aussi imposées.
Il faut dire que par rapport aux jauges de
contraintes ou aux extensomètres utilis
habituellement, les capteurs à fibre optique
offrent de nombreux avantages. Ce qui les
distingue en premier lieu, c’est leur compor-
tement dans les environnements difficiles.
Comme ils exploitent la lumière guie dans
la fibre pour réaliser les mesures, les capteurs
sont insensibles aux perturbations électro-
magnétiques. Ils peuvent aussi être utilisés
dans les milieux corrosifs ou humides, les
environnements cryogéniques, ainsi que
dans les zones à risque d’explosion (milieux
instables, inflammables, etc.). On les re-
trouve ainsi dans de multiples applications
difficiles à mettre en œuvre avec des capteurs
à jauges de contraintes : caténaires, centrales
nucaires, construction navale, installations
portuaires (grues), industrie pétrolière, etc.
Grâce à leur petite taille et à leur re, ils
conviennent aussi aux mesures dans des en-
droits difficiles d’acs, et ils ne modifient
pas le comportement des structures sur les-
quelles ils sont fixés. Comme les jauges, ils
sont vissés ou cols sur les structures, mais
on peut également les enfouir dans le ton,
le ciment ou les composites pour aliser des
mesures au cœur des mariaux.
Un capteur “inscrit” dans la fibre
L’autre avantage bien connu des capteurs à
fibre optique est leur capacité à véhiculer la
lumière avec de très faibles pertes. On peut
donc déporter les mesures à très grande dis-
tance (sur plusieurs kilotres). En termes
de tenue à la fatigue, les capteurs à fibre oti-
que supportent un nombre de cycles plus
éle que les jauges de contraintes classiques,
et ils disposent dune plus longue durée de
vie.
« Les industriels peuvent ainsi surveiller des
structures en continu durant plusieurs années »
,
indique Patrick Rey, chef produit fibres op-
tiques chez
Scaime
.
Les capteurs à fibre optique offrent aussi la
possibilité de réaliser des mesures simultaes
Les capteurs à fibres
optiques remplacent
avantageusement les jauges
de contraintes dans
les environnements difficiles.
Il existe différents principes
qui offrent chacun
des avantages spécifiques.
Les capteurs à réseaux
de Bragg mesurent
des contraintes en plusieurs
points de la fibre optique.
Avec la trodiffusion
Brillouin, les mesures sont
alisées en continu, tout au
long de la fibre.
Les jauges de contraintes
restent privilégiées dans
les applications courantes.
L’essentiel
à plusieurs endroits dune me fibre, et
donc en plusieurs points dune structure. On
obtient alors tout un réseau de capteurs -
portés à grande distance. Contrairement aux
jauges de contraintes (qui nécessitent chacune
un câblage à deux ou trois fils), les difrents
“capteurs” dispos en rie sur une fibre
n’occupent quune seule voie de mesure. On
parle de capteurs partis” ou distribués.
Pour mieux comprendre cette particularité,
il faut revenir au principe physique qui est
mis en œuvre. Les capteurs à fibre optique
distribs sont basés sur la technologie des
réseaux de Bragg.
« Il s’agit actuellement de la
technique la plus utilisée pour mesurer les contrain-
tes à l’aide de fibres optiques »
, souligne
Mohamed Bouamra (
LGS
). Le réseau de
Bragg est une structure formée par des ma-
riaux dotés d’indice de fraction diffé-
rents. Il fonctionne comme une sorte de
filtre de longueur donde que l’on “inscrit”
au ur de la fibre optique par photogra-
vure. En traversant ce seau, une partie du
faisceau lumineux est réfchi à une lon-
gueur d’onde spécifique. Sous l’effet dune
contrainte ou dun changement de tempé-
rature, le pas du seau varie, et avec lui la
longueur d’onde du faisceau réfléchi. En
étudiant cette variation, on en déduit la con-
trainte à laquelle la fibre a ésoumise à
lendroit où se situe le réseau.
« Il suffit ensuite
d’insérer dans une même fibre plusieurs réseaux de
Bragg pour réaliser des mesures de contraintes à
différents endroits »
, explique Patrick Robert,
responsable marketing et communication
chez
HBM
. Comme les faisceaux lumineux
sont fléchis à des longueurs d’ondes carac-
téristiques (propres à chaqueseau), il est
possible de situer l’endroit où la variation de
contrainte a eu lieu. Ce principe autorise
linscription d’un grand nombre de réseaux
de Bragg sur la me fibre optique. Dans les
applications les plus courantes, cependant,
une dizaine de réseaux suffisent.
Les réseaux de Bragg ne sont pas la seule
technologie utilisée pour aliser des mesu-
res locales de contraintes. On peut aussi
employer certains types de capteurs bas
sur un principe interrotrique. Les mo-
les SOFO proposés par la société
Sites
, par
exemple, sont basés sur linterférotrie de
Michelson. Ces capteurs sont composés
d’une fibre de mesure et dune fibre de -
rence. La première est liée à la structure
par des points de fixation, alors que la se-
conde est reliée aux mêmes points avec un
montage “libre”, flottant dans le corps du
capteur. Chaque fibre est parcourue par une
me onde lumineuse. Des miroirs situés
aux points de fixation renvoient cette onde
vers un coupleur, qui recombine les fais-
ceaux déphas et les dirige vers un analy-
seur. Celui-ci mesure alors le déphasage
obtenu pour en déduire la déformation lo-
cale de la structure. Avec cette méthode, les
capteurs de
Sites
mesurent les placements
relatifs entre deux points distants de 20 cen-
titres à 10 mètres, avec une précision de
l’ordre de 2 micromètres. Comme les -
seaux de Bragg, la technique interférométri-
que a fait ses preuves depuis plusieurs années
dans la mesure de contraintes. Elle convient
aux mesures de haute précision sur tout type
de structure ou d’équipement.
Exploiter chaque centimètre
de la fibre
Les capteurs à réseaux de Bragg (comme
certains capteurs de type interrotrique)
se limitent cependant à la mesure de con-
traintes locales, à des endroits précis d’une
structure. Mais d’autres principes offrent la
possibilité de aliser des mesures en con-
tinu, sur toute la longueur de la fibre optique
(on parle de capteurs “contiment distri-
bs”). C’est le cas en particulier de la dif-
fusion Brillouin stimulée (SBS ou
Stimulated
Brillouin Scattering
). Contrairement aux
techniques pdentes, on exploite ici une
propriété intrinsèque du mariau consti-
tuant la fibre optique. L’interaction entre
Les capteurs à fibre optique
s’imposent désormais dans
de multiples applications.
C’est le cas en particulier dans
la mesure de contraintes.
Pour surveiller des ouvrages
de génie civil, des engins
de levage, des coques
de navires ou encore des pales
d’éoliennes, ils remplacent
avantageusement
les traditionnelles jauges
de contraintes.
Scaime
HBM
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la lumière et les ondes acoustiques pré-
sentes dans le milieu (sous l’effet de varia-
tions de température ou d’une excitation
magnétique) re une onde optique -
trodiffusée (l’onde de Stokes). Lors de sa
gération, cette onde subit un décalage de
fréquence qui dépend de multiples facteurs.
Parmi eux, les variations de température et
de contraintes appliqes à la fibre optique.
La méthode présente plusieurs avantages. Elle
utilise tout dabord une fibre standard, sans
qu’il soit nécessaire de la modifier ou d’y
inrer un seau optique. Mais surtout, cha-
que centimètre de la fibre optique constitue
un élément sensible. Il est possible, par
exemple, de mesurer et de localiser les con-
traintes ou les températures subies par un
câble de haute tension sur toute sa longueur.
Plusieurs fibres peuvent être connectées à
une seule unité de lecture afin de surveiller
l’ensemble d’une structure, sur plusieurs
milliers de points. Un analyseur permet en-
suite de visualiser le comportement de cha-
que fibre pour comprendre ce qui se passe
tout au long de celle-ci.
La technologie est moins éproue que les
réseaux de Bragg ou les techniques interfé-
rométriques, mais elle suscite un intérêt
croissant. Contrairement aux deux techno-
logies précédentes, elle n’oblige pas à con-
naître les zones critiques qu’il faut instru-
menter : les problèmes potentiels sont
localis et identifs, sans que l’on sache par
avance lendroit ils sont susceptibles de
se manifester. Restent deux limites : la durée
d’un cycle de mesure est plus longue que
dans lesthodes précédentes, et la préci-
sion est (pour l’instant) moins élee. La
méthode ne convient donc pas à la détection
deffets rapides, ni à une localisation précise
des contraintes, mais plut à un suivi global
de structures de grandes dimensions sur une
longue riode. En exploitant la totalité de
la fibre optique, la méthode est promise à un
bel avenir. Elle peut aussi concurrencer
d’autres principes de mesures globales” qui
sont parfois délicats à exploiter (on songe
notamment aux systèmes de surveillance
bas sur une modulation d’intensité du si-
gnal lumineux).
Et les jauges de contraintes ?
Avec leurs différentes technologies et les
avantages certains qu’elles procurent, peut-
on penser que les fibres optiques remplace-
ront les jauges de contraintes utilisées
aujourd’hui dans la grande majorité des ap-
plications ? Pour les fournisseurs que nous
avons interrogés, ce n’est pas lobjectif. Les
capteurs à fibre optique répondent plut à
des besoins différents.
« On ne réalise pas tout
à fait le même type de mesures,
confirme
Frédéric Bouyon, chef des ventes France
chez
Scaime
.
Pour surveiller des structures ou des
équipements en continu pendant plusieurs années, ou
réaliser des mesures dans des environnements diffi-
ciles, les capteurs à fibre optique ont toute leur place.
Mais sur des applications “classiques”, il n’y a pas
un grand intérêt à remplacer des jauges de contrain-
tes qui répondent au besoin, et auxquelles les utili-
sateurs sont habitués »
. Sur des applications
spécifiques, la technologie gagne incontes-
tablement du terrain.
« C’est le cas, par exemple,
dans le génie civil l’on apprécie la robustesse et
la durée de vie de ces capteurs »
, indique Patrick
Rey (
Scaime
). On peut aussi intégrer directe-
ment les fibres dans le ton pour former
une sorte de structure “intelligente sur-
veillée à distance.
Du fait qu’elles permettent de réduire consi-
dérablement les câblages, les fibres optiques
sont aussi privilégiées lorsque le nombre de
capteurs à mettre en œuvre est très impor-
Les avantages
Insensibiliaux champs électromagnétiques ;
Résistance à la corrosion, aux chocs et
aux vibrations (pas d’élément mécanique
mobile), utilisation en zone explosive,
en environnement cryogénique, etc. ;
Mesures possibles au cœur des matériaux ;
Faible encombrement, légèreté ;
Mesures déportées à longue distance
(plusieurs kilomètres) ;
Haute tenue en fatigue ;
Plusieurs principes offrant des intérêts
différents, suivant les besoins de l’application ;
Possibilité d’utiliser plusieurs “capteurs”
en série sur une même fibre ou de mesurer
les contraintes tout au long de la fibre ;
Mise en œuvre relativement simple ;
Longue durée de vie.
Les applications typiques
Mesures déportées pour la surveillance
des infrastructures et des ouvrages d’art ;
Applications en milieu humide, maritime
(coques de navires, installations
portuaires, etc.) ;
Mesures en présence de champs électroma-
gnétiques (production et distribution de
l’énergie électrique, sidérurgie, voies
ferrées, etc.) ;
Environnements à risque d’explosion
(industries chimiques, pétrochimiques, etc.).
Les capteurs à fibre optique, en bref
tant. Il y a également une question de coût.
Pour de petites installations, les jauges de
contraintes et l’électronique associée restent
moins coûteuses. Mais
« dès que l’application
nécessite un grand nombre de capteurs, les solutions
basées sur des fibres optiques sont plus avantageu-
ses »
, note Mohamed Bouamra (
LGS
).
Dautres crires font débat. C’est le cas par
exemple de la précision des capteurs. Pour
certains, elle est tout à fait comparable à celle
des jauges de contraintes. Pour d’autres, il y
a encore du chemin à faireEn fait, tout
dépend du principe utili. Certains capteurs
basés sur un principe interférométrique, par
exemple, sont plus précis que les capteurs à
rétrodiffusion Brillouin ou les modèles bas
sur des seaux de Bragg.
Autre crire de comparaison, la sensibilité à
la temrature. Il est certain que les principes
explois pour réaliser des mesures de con-
traintes à l’aide de capteurs à fibres optiques
sont fortement influencés par les variations
de temrature. Mais cet inconvénient n’en
est pas vraiment un… Dans la plupart des
cas, les capteurs disponibles sur le marché
mesurent à la fois les contraintes et les tem-
pératures. Les variations thermiques sont
donc prises en compte lors de la mesure de
contraintes. Dans une installation de capteurs
à réseaux de Bragg, par exemple, un réseau
est situé dans une zone qui n’est pas soumise
aux contraintes. Il sert de “rérence et four-
nit la mesure de température. me débat
avec la fragilité de la fibre optique par rap-
port à celle des jauges métalliques. Pour les
fabricants de capteurs à fibre optique, cette
caractéristique n’est pas vraiment probma-
tique. Il y a toujours des solutions pour pro-
téger correctement la fibre optique (on
trouve des gaines blindées avec des ma-
riaux spécifiques, des fibres noes dans des
supports particulrement rigides, etc.).
Bien sûr, les capteurs à fibre optique restent
encore relativement cents et moins éprou-
s que les jauges que l’on utilise depuis
plusieurs dizaines dannées dans la mesure
de contraintes. Il y a aussi moins de choix
dans les équipements disponibles sur le mar-
ché, et moins de fournisseurs… Mais cela
pourrait très vite changer.
« Nous avons installé
des capteurs à fibre optique sur des marchés où, il y
a encore cinq ans, la technologie était inenvisagea-
ble ! Je pense par exemple aux fibres optiques instal-
lées sur des grues dans les ports. Il y a quelques
années, la solution était trop coûteuse pour ce type
d’applications »
, indique Mohamed Bouamra
(
LGS
). La technologie peut par ailleurs en-
core progresser.
« Avec le “lab on chip” et le dé-
veloppement des MEMS optiques, par exemple, les
boîtiers actuels seront bientôt remplacés par de sim-
ples puces ! Cela contribuera à réduire encore l’en-
combrement et le coût des solutions »
, prévoit
Mohamed Bouamra (
LGS
). Une chose est
sûre, les capteurs à fibre optique ont encore
de beaux jours devant eux.
Marie-Line Zani-Demange
Les capteurs à fibre optique sont souvent préférés aux jauges
métalliques pour leur insensibilité aux champs électromagnétiques.
Il existe différents principes conduisant à la mesure de contraintes par des capteurs à fibres optiques. Ici c’est un capteur basé
sur l’interférométrie de Michelson qui mesure les déformations d’ensemble d’un bossage en béton armé.
Les capteurs à fibres optiques ne mesurent pas que les contraintes. Ils sont sensibles à la température,
à la pression… et même aux chocs. C’est le cas ici, avec un capteur destiné à la détection d’intrusion.
Avec les capteurs à réseaux de Bragg, il est possible de constituer une “chaîne optique” en insérant plusieurs
éléments sensibles sur chaque fibre optique. Les contraintes sont ainsi mesurées en différents points de la fibre.
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