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Résumé : Normand Bianchi, http://novabec.com/contact.html
Livre étudié :
Social-démocratie 2.0
Le Québec comparé aux pays scandinaves
Stéphane Paquin, Collectif , Pier-Luc Lévesque
Collection « Politique mondiale », PUM, 2014
Chapitre 1 La social-démocratie en crise ? Quelle crise ?
Résumé
Quels pays semblent le mieux correspondre au modèle type de la social-
démocratie ? Pour y répondre, il faut d’abord définir l’étiquette « social-
démocrate». Selon, l’auteur, c’est sur le plan de l’économie politique qu’on peut y
arriver
L’étiquette « social-démocrate
Trois caractéristiques précises définissent le modèle social-démocrate des pays
scandinaves.
a) D’abord, tous les individus qui composent le peuple ou la société, quelles que
soient leurs origines, doivent avoir accès à un ensemble de droits sociaux, à certains
types de services et à un support économique. Ces programmes ne sont donc pas
destinés uniquement aux populations vulnérables et aux minorités, mais à toutes les
sphères de la société. On y retrouve des programmes universels classiques
comme le système de santé public, les allocations universelles aux enfants,
l’éducation publique gratuite, les soins destinés aux personnes âgées, et un
régime fiscal où presque tous contribuent.
Très différentes des politiques sociales et des systèmes fiscaux « ciblés » que
l’on peut observer dans des pays tels que le Royaume-Uni et les États-Unis. Dans
une assez large mesure, le modèle social-démocrate est également très différent du
système d’assurance sociale, qui est sans doute l’un des traits distinctifs de
plusieurs États-providence européens.
On y retrouve l’idée que tous doivent payer et que tous peuvent bénéficier des
mêmes programmes, considérés comme des «biens primaires», ce qui les
distingue des régimes où l’on compense les perdants et où l’on punit les
gagnants.
On remarque que ces pays sociaux-démocrates figurent parmi les plus dépensiers
pour les dépenses sociales, mais que le niveau des transferts directs aux familles
est plus bas en Suède, au Danemark et en Norvège, même si les politiques
sociales de ces pays prévoient des allocations pour toutes les familles avec enfants.
En revanche, ils dépensent beaucoup plus que les autres en matière de services de
garde et d’éducation préscolaire. La social-démocratie équivaut à une certaine
forme de communautarisme, qui met l’accent sur la solidarité sociale et qui
reposait sur des politiques renforçant l’unité sociale et la solidarité. Par
conséquent, cette idée fait en sorte que même les classes les plus aisées de la
société doivent bénéficier des programmes sociaux. La solidarité sociale en arrive
ainsi à signifier solidarité de l’ensemble du peuple et non seulement de la classe
ouvrière. On n’est pas ici dans un contexte de lutte des classes.
b) Ensuite, le modèle social-démocrate s’engage à limiter les effets négatifs de
l’économie de marché sans la remplacer ou sans tenter de la contrôler. On a donc
une attitude positive à l’égard du libre-échange et de la libre entreprise avec le
constat qu’une économie de marché efficace doit également être encadrée par
certaines régulations publiques pour fonctionner adéquatement. Contrairement au
populisme, la social-démocratie n’entreprend pas de redistribuer la richesse en la
prélevant directement des riches pour la donner aux pauvres.
c) Enfin, la social-démocratie s’est engagée à adopter des politiques sociales
progressives. Cela veut dire qu’on ne tente pas de maintenir les sociétés dans un
état d’équilibre idéal ou de stabilité. Au contraire, les politiques sociales-démocrates
ont toujours été implantées avec l’intention explicite de faire évoluer les sociétés.
Que ce soit en matière de droits des femmes, de droits des travailleurs ou de droits
des enfants. Les pays scandinaves se distinguent des autres modèles d’États-
providence par le fait que l’État est un agent de changement social explicite.
État-providence et social-démocratie : deux réalités différentes
Le modèle social-démocrate se distingue des autres modèles par sa structure plus
que par le niveau relatif des dépenses publiques. Par exemple, le régime
d’imposition et de taxes est relativement « plat » ou uniforme d’une catégorie de
revenus à l’autre par opposition à des systèmes de taxation très progressistes.
Pareillement, lorsque l’on compare le modèle social-démocrate avec les États-
providence des États-Unis ou du Royaume-Uni, on peut remarquer la rareté des
programmes d’aide ciblée conçus pour permettre aux plus pauvres d’améliorer leur
situation.
Comme autres traits particuliers du modèle social-démocrate, ces pays conservent
un haut niveau de taxation ; un haut niveau de dépenses sociales – à l’intérieur
desquelles un haut pourcentage des dépenses va aux familles et aux jeunes, plutôt
que seulement aux retraités et aux pensionnés ; un bas niveau des dettes publiques
et de faibles déficits budgétaires ; de fortes dépenses en éducation et en soins de
santé ; un haut niveau d’égalité sociale ; un haut niveau d’égalité des sexes ; un
haut niveau d’investissement privé ; des citoyens très éduqués.
Conséquemment, on y retrouve un meilleur niveau de confiance interpersonnelle ;
une corruption faible ou absente ; des populations en meilleure santé, ainsi que des
individus qui se disent en moyenne plus heureux.
Les pays scandinaves figurent parmi les meilleurs du monde à bien des égards si on
utilise une série d’indicateurs de bien-être tels que l’état de santé des populations, la
satisfaction moyenne des individus par rapport à leur vie, différents indicateurs de
progrès humains et d’égalité économique, l’absence de corruption et la richesse
économique moyenne. Les indicateurs du modèle social-démocrate offrent une
performance générale moyenne supérieure à celle des pays dont les politiques se
rapprochent davantage du modèle conservateur ou néolibéral. En matière de
compétitivité économique, les pays sociaux-démocrates se retrouvent toujours en
tête des palmarès et dépassent parfois même les pays néolibéraux, et ce non
seulement en matière d’égalité économique et sociale, mais aussi en ce qui
concerne la plupart des indicateurs de développement, de santé et de bien-être
général, malgré une fiscalité lourde et un haut niveau de dépenses publiques.
L’État-providence universel social-démocrate : quatre erreurs communes
Lorsqu’on considère le modèle social-démocrate de pays scandinaves l’erreur la plus
commune (a) veut que l’État-providence social-démocrate soit très coûteux et que
son haut niveau de taxation nuise grandement à la croissance économique. Hors les
indicateurs de croissance économique montrent le contraire.
Ce type d’État-providence est justifié non seulement en raison de son objectif de
redistribution, qui peut être ou non partagé par certains groupes de la population,
mais également parce qu’il fait des choses que le marché laissé à lui-même ne ferait
pas ou ferait de manière inefficace, en raison des coûts d’information
assymétriques. Ces coûts sont moindres en raison de l’universalité des
programmes sociaux.
La composante principale des programmes sociaux n’est pas l’aide directe aux
pauvres. Des assurances sociales et des programmes sociaux universels (tels que le
système de santé, les pensions, le support aux familles avec enfant et l’éducation)
bénéficient à de larges segments ou à l’ensemble de la population. Ces biens sont
demandés par presque tous les citoyens et les recherches indiquent que le fait de
combler ceux-ci dans le cadre d’un système public est plus efficace économiquement
ou coûte moins cher. Les systèmes universels offrent un meilleur rapport coût-
bénéfice pour la simple raison que les risques sont partagés par l’ensemble de la
population et que les incitatifs à la surfacturation ou à la prescription de traitements
inutiles sont très bas.
b) Deuxième préjugé souvent mentionné, c’est qu’on retrouve dans les pays sociaux-
démocrates scandinaves, une bureaucratie imposante, un gouvernement
paternaliste et l’absence de liberté de choix en matière d’accès aux services.
L’auteur affirme qu’au contraire, les pays scandinaves sont aussi les champions du
libéralisme, en terme de liberté de choix des citoyens.
Il donne comme exemple le monde de l’éducation. Les écoles publiques sont en
compétition avec les écoles privées à charte qui sont opérées grâce aux fonds
publics qu’elles reçoivent et qui doivent accepter d’opérer sur la base des mêmes
régulations que les écoles du réseau public. Elles doivent notamment accepter les
candidatures de tous les étudiants indépendamment de leur capacité d’apprendre, ce
qui contraste évidemment avec les procédures d’entrée et les batteries de tests qui
sont exigées par les écoles privées américaines.
c) Un autre argument néolibéral soutient que de lourdes dépenses publiques sont
nécessairement un obstacle à une croissance économique élevée.
Lorsque l’on compare les États riches, on ne peut tout simplement pas confirmer cet
argument. Cela s’explique par le fait que les dépenses publiques permettent
généralement d’acheter des biens qui sont essentiels à la croissance économique et
que le marché fournit moins bien en raison des problèmes d’information, i.e. de
coûts d’information assymétriques, mentionnés précédemment.
d) D’autres voudraient que l’aide directe aux pauvres soit le meilleur moyen de
réussir la redistribution économique.
L’auteur nous fournit un modèle «idéalisé» qui prouve le contraire. Ici, nous avons
trois classes sociales dans lesquelles les revenus sont distribués de 1 à 10. En
d’autres termes, les individus les plus pauvres ont un revenu avant impôts qui s’élève
à 1 unité et les individus les plus riches ont un revenu avant impôts de 10 unités.
Suivant une logique d’un taux d’imposition parfaitement uniforme (le même pour tous
les individus) et d’un État-providence purement universel, on voit que la distribution
des revenus passe d’un écart de 1 à 10 à un écart de 1 à 3,7. (Voir ce tableau dans
le livre)
Comme le montre ce modèle, un système fiscal parfaitement uniforme et des
services purement universels semblent plus en mesure d’assurer une redistribution
de la richesse que les systèmes d’aide ciblée que l’on trouve dans de nombreux
pays.
Les dépenses publiques ne sont pas nécessairement néfastes pour l’économie parce
qu’elles peuvent servir à acheter des biens tels que l’éducation ou les infrastructures
et parce que les dépenses sociales peuvent être considérées comme une sorte
d’assurance. Les assurances limitent les risques individuels dans un environnement
dynamique, ce qui peut contribuer à l’innovation et à la productivité. Un haut
niveau d’égalité est fortement corrélé avec un haut niveau de confiance sociale, ce
qui permet de diminuer les coûts de transaction dans l’économie sociale. Les
systèmes qui sont en mesure de réduire ces coûts de transaction disposent de
nombreux avantages compétitifs.
Pourquoi la social-démocratie fonctionne-t-elle?
La clé du succès social-démocrate aura été un équilibre entre l’équité, une approche
inclusive et le libre choix personnel ou la liberté. La conséquence de telles politiques
est que les coûts de transactions dans les relations économiques et sociales sont
davantage réduits qu’ils ne l’auraient été autrement.
On peut voir que les dépenses des pays anglophones, dont les États-providence qui
fonctionnent sur le principe d’aide directe aux pauvres, sont plus élevées que celles
des pays sociaux-démocrates où les politiques ciblées sont moins importantes.
Les États-providence universels ont souvent bâti des programmes sociaux très
larges et très chers, mais ils se sont montrés largement plus efficaces que les «
États-pensions » d’Europe. Ainsi, la différence la plus importante entre les États-
providence de redistribution classique et la socialdémocratie est que cette dernière
adopte des politiques clairement universelles, alors que les pays d’Europe
continentale et du monde anglo-saxon privilégient les programmes ciblés.
Un soutien continu aux principes fondateurs
Certains pourraient croire que l’élection de coalitions de centre droit dans des pays
tels que la Suède est un signe du déclin de la social-démocratie. Mais malgré ce
phénomène récent, les principes fondateurs de la social-démocratie sont très
populaires dans les pays nordiques. En d’autres termes, ce serait un suicide politique
pour ces gouvernements de centre droit que de procéder au démantèlement de
l’État-providence social-démocrate. En effet, des sondages montrent que les
populations scandinaves sont prêtes à payer davantage de taxes pour financer les
programmes sociaux qu’elles souhaitent préserver.
Les partis de centre droit ont dû s’adapter. Leur changement de discours a permis de
compléter l’intégration idéologique de la classe moyenne au régime d’État-
providence en place. La base électorale d’une hypothétique résistance contre la
fiscalité trop lourde ou contre les dépenses sociales importantes semble désormais
complètement érodée. Alors que le Parti social-démocrate connaît des difficultés,
l’État-providence social-démocrate suédois triomphe.
À gauche ou à droite?
Une des composantes essentielles de l’État-providence social-démocrate est son
caractère universel. Selon l’auteur, deux menaces principales pourraient
éventuellement compromettre cet élément fondamental du modèle social-démocrate.
Curieusement, ces menaces proviennent aussi bien de la gauche que de la droite
dans les pays scandinaves
La première embûche pour le modèle social-démocrate provient du développement
d’un sentiment « anti-immigration » dans plusieurs de ces pays. Certains partis de
droite ne sont pas hostiles à l’État-providence et aux programmes sociaux, mais
bien aux immigrants qui les utilisent.
Malgré un haut niveau d’immigration, en particulier en Suède et au Danemark, le
niveau de confiance sociale demeure élevé et stable. Des immigrants provenant de
pays où la confiance sociale est très basse sont souvent capables d’augmenter
considérablement leur niveau de confiance sociale parce qu’il perçoit qu’il a été
traité de façon juste et impartiale par l’État de son pays d’accueil.
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