grands thèmes qui jalonnent nos existences. Il s’agit alors de les accompagner
dans leur questionnement et faire apercevoir la complexité humaine et ses
nuances. Cela permet de construire son propre savoir, de produire un savoir non
constitué d’emblée. Cette façon d’aborder le savoir pour les élèves est assez
inédite et instaure un autre rapport au savoir.
2. 4. Un autre rapport au savoir.
Il faut rappeler que les jeunes que nous avons rencontrés tout au long de
l’année, ont un parcours scolaire difficile. Pour eux l’accès au savoir, aux
apprentissages s’est trouvé souvent empêché au cours de leur histoire. L’école, le
savoir, ce n’est pas trop leur « truc ». Ils se vivent souvent comme « nuls ».
Ici dans l’atelier le savoir apparaît tout autre, car il n’est pas dans un schéma
vertical du maître à l’élève, il n’est pas représenté par quelqu’un. Ici, chacun y va
de son bout de savoir à lui pour essayer de penser des questions sur l’existence.
Le savoir n’est pas détenu par l’enseignant ou les autres adultes. Dans cet
espace, ils sont à la fois élèves mais aussi sujets auxquels qui il est proposé de
produire leur propre savoir. C’est d’ailleurs assez déroutant pour eux et difficiles
de découvrir, accepter qu’il n’y a pas de bonnes ou mauvaises réponses.
Pour illustrer ce qui a pu se passer dans cet atelier, et comment il fonctionne,
je me souviens d’un jeune garçon qui râlait beaucoup, critiquait tout, se met à dire
un jour : « C’est nul votre truc et de toute façon on apprend rien ! ».
J’ai trouvé ça formidable et je me suis immédiatement saisie de cette parole
pour lui faire entendre son désir d’apprendre. De là, s’en est suivi le thème de la
rencontre suivante : « Qu’est ce qu’apprendre ? »
Conclusion et piste de réflexion :
Concernant la pratique des ateliers philosophiques avec des adolescents, je
laisserais de côté une approche qui laisserait penser que cela aurait des effets
thérapeutiques. En effet, il y a une pente actuelle au fourre-tout thérapeutique,
ainsi fleurissent les programmes de développement personnel pour retrouver
confiance en soi, les thérapies par le rire, les massages….
L’approche du philosophe, de l’enseignant fait valoir l’exercice de la pensée
rationnelle, de la volonté, la dimension inconsciente en est radicalement écartée.
Que peut elle donc dire et traiter de la névrose, de la psychose, que peut-elle dire à
celui qui souffre ?
Je ne sais pas si ces ateliers soignent quelque chose de l’âme de ces jeunes
sujets, en tout cas ils permettent de se rencontrer autour de la parole adressée à
quelqu’un. Je choisis pour parler de ce qui s’y passe, de rencontre avec son lot
d’effet dans le court, moyen ou long terme. Dans cet espace collectif, on peut
parler à mon sens de rencontre avec l’autre et la parole qui peut s’avérer le point
de départ possible pour qu’émerge du transfert, à savoir une demande. Ce travail
ne s’inscrit pas dans une démarche thérapeutique, même si il y a des jonctions
possibles. Je pense en effet que, en dehors des aspects strictement pédagogiques et
éducatifs qui ont toutes leurs pertinences et intérêt, c’est de cela dont il peut
s’agir : susciter du transfert.
D’avoir été entendu, faire l’expérience de cela pourra être de nature à
épauler un travail psychothérapeutique, pourra participer à l’émergence d’une
demande, et ainsi participer du processus thérapeutique, mais n’est pas
thérapeutique en soi. Ce dispositif particulier, organisé autour de la parole, ne