
Procès d’institutionnalisation de l’économie sociale au Québec /1
INTRODUCTION
Des pratiques d’économie sociale existent depuis plus d’un siècle au Québec; les premières
sociétés de secours mutuel, par exemple, ont été créées au milieu du 19e siècle. Cependant,
jusqu’en 1995, le terme d’économie sociale n’était à peu près jamais utilisé (Malo, 1991;
Lévesque et Malo, 1992). Il commencera à l’être en 1995, au moment où le gouvernement
québécois répond à la revendication féministe d’infrastructures sociales par la mise sur pied d’un
comité d’orientation et de concertation sur l’économie sociale et de comités régionaux.
Notre définition de l’économie sociale
Après d’autres, notamment le Centre de recherche sur les innovations sociales dans l’économie
sociale, les entreprises et les syndicats (CRISES) et le Laboratoire de recherche sur les pratiques
et les politiques sociales (LAREPPS), nous postulons que l’économie sociale est un secteur
spécifique qui fait depuis peu, au Québec, l’objet d’une reconnaissance étatique formelle. Pour
tenter d’en identifier les frontières, voyons ses composantes (Desroche, 1983; D’Amours et
Malo, 1999) :
• les divers types de coopératives constituées en vertu de la Loi sur les caisses d’épargne et de
crédit et de la Loi sur les coopératives, qu’elles appartiennent à l’ancienne économie sociale
(caisses populaires et caisses d’économie, coopératives agricoles, coopératives forestières,
coopératives d’alimentation, coopératives scolaires et funéraires) ou à la nouvelle économie
sociale (coopératives d’habitation, coopératives de travail, coopératives de services à
domicile, qu’elles soient composées de travailleurs ou d’usagers, et coopératives de
solidarité);
• une composante mutualiste incluant les mutuelles qui ont conservé les caractéristiques de
décision par les membres;
• une composante associative regroupant les organismes à but non lucratif (OBNL) qui
produisent :
• soit des biens ou des services marchands, c’est-à-dire qui font l’objet d’une vente ou
d’une tarification,
• soit des biens ou des services non marchands, c’est-à-dire dont le financement “ n’est pas
assuré par un prix de marché destiné à couvrir au moins le coût de production, mais plutôt
par des contributions obligatoires (impôts) et/ou volontaires (dons, cotisations, etc.) ”
(Defourny, 1994: 84).
Ces composantes, qui définissent l’économie sociale, permettent d’englober dans le tiers
secteur tant les OBNL qui vendent leurs services (garderies, associations d’aide domestique,