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La Syrie est en première ligne dans la confrontation avec Israël. En juin 1982,
Israël fait entrer son armée au Liban, pour en chasser l’OLP. La Syrie, qui a toujours
considéré le Liban comme sa chasse gardée, est également présente militairement. Le 9
juin 1982 les deux aviations s’affrontent au-dessus de la plaine de la Bekaa : F15 et F16
américains pour Israël, contre MIG 21 et MIG 23 soviétiques pour la Syrie. En deux
heures, l’aviation syrienne subit une sévère défaite et perd l’essentiel de ses appareils.
On peut expliquer la défaite par l’infériorité du matériel soviétique … ou par le fait que
l’URSS, qui reste dans une logique de détente Est – Ouest, n’a pas livré aux Syriens son
meilleur matériel. Qu’on retienne l’une ou l’autre hypothèse, la conclusion est la même :
l’alliance militaire avec l’URSS n’offre pas de protection absolue.
Enfin l’URSS de Gorbatchev (à partir de 1985) est plus préoccupée par ses
problèmes intérieurs que par de grands projets au Moyen-Orient. Elle fait savoir à la
Syrie qu’il faudra désormais payer les livraisons d’armes.
Tout ceci est balayé par la tornade de 1989 – 1991 : le mur de Berlin tombe, les
démocraties populaires s’écroulent en Europe, l’URSS disparait en décembre 1991. En
1992 il n’y a évidemment plus d’alliance soviétique au Moyen-Orient. Cela laisse-t-il la
place à un ordre entièrement organisé et contrôlé par les Etats-Unis ? Non, car un nouvel
acteur est apparu : l’islamisme.
2 Emergence d’un nouvel acteur : l’islamisme
Essayons une définition. L’islamisme ne se confond pas avec l’islam. C’est le
courant porté par les musulmans qui voient dans l’islam, non seulement une religion,
mais aussi un projet de société et un programme politique. Le slogan qui pourrait le
mieux les définir est celui des Frères musulmans (organisation fondée en Egypte en
1928) : « l’islam est la solution ».
Sur cette base s’est lentement construit un mouvement multiforme, dans lequel
on trouve des états, des forces politiques, des courants intellectuels, et aussi de larges
secteurs des sociétés musulmanes partageant plus ou moins l’idée que « l’islam est la
solution ». Un courant aussi large est forcément très diversifié. Il ne faut donc pas
s’étonner d’y trouver des positions très différentes, et parfois de violents conflits.
L’islamisme a longtemps cheminé de façon souterraine, avant de surgir
brutalement au grand jour au tournant des années 1970-80. On peut donner deux
explications à cela. En premier lieu il n’est pas surprenant qu’un héritage intellectuel
aussi riche que celui de l’islam ne se soit pas dissous dans la modernité sans donner son
avis sur l’avenir du monde. En second lieu, l’échec des autres projets de modernisation
(unité arabe, socialisme arabe …) était patent à la fin des années 70. Il y avait place pour
un nouveau porteur d’espoir. Ce fut l’islamisme.