LINGUISTIQUE ET
PHITOSOPHIE DU TANGAGE
Depuis ses origines grecques, la philosophie est très concernée par les
problèmes de langage. on appelle traditionnellement philosophie du langage un
domaine de la philosophie qui choisit de s'intéresser aux problèmes généraux posés
par Ie langage. Mais, dans certains de ses développements, la philosophie du langage
porte aussi sur une investigation < interne r du langage. Elle rejoint alors directement
certaines questions que se pose la Iinguistique.
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& [e questionnement sur le langage
Le langage a posé un problème à la philosophie dès que celle-ci s'est pensée
comme une réflexion sur le vrai et sur l'être. Platon, dans le Théétète et le
Sophiste, s'aperçoit que le fait d'articuler, dans une phrase, un nom et un verbe
permet de dire le faux, de parler de ce qui n'est pas. Dès lors, toute l'histoire de
la philosophie est marquée par des interrogations sur le rapport entre le langage
e^t la réalité, entre le langage et la véité. Cette question se retrouve au Moyen
Age*, à l'époque classique*, et au xx" siècle.
La philosophie du langage se pose des questions telles que : qu'est-ce que le
langage ? De quoi parle le langage ? Quels sont les rapports entre le langage et
la pensée ? Par exemple, à la question : de quoi parle le langage ? la philosophie
propose plusieurs types de réponses. On peut répondre tout d'abord : le langage
parle du monde (lorsque j'emploie le mot table,je parle de quelque chose dans le
monde qui s'appelle table). On peut répondre aussi : le langage parle de nous-
mêmes, car lorsque nous parlons, nous nous exprimons. Enfin, on peut
répondre : le langage ne parle de rien, le langage parle, c'est tout. Entre ces
réponses radicales, le questionnement peut naturellement être riche et varié.
gB
ffi [a philosophie du langage comme remède à la philosophie
) La philosophie du langage s'est beaucoup développée au xx" siècle, et son
développement est curieusement parallèle à celui de la linguistique. En 193 I, le
philosophe autrichien Rudolf Carnap publie un essai intitulé < Le dépassement
de la métaphysique dans 1'analyse logique du langage >. pour le philosophe
autrichien plus tard installé à cambridge Ludwig wittgenstein, beaucoup des
prétendus < problèmes > que pose la philosophie doivent leur caractère < profond >
au fait que la philosophie utilise des particularités du langage ordinaire.
) La philosophie du langage doit donc s'efforcer d'être une analyse du langage
destinée à débarrasser la philosophie de certaines préoccupations métaphysiques
totalement factices. Lorsque la philosophie aborde la pensée, par exemple, elle
conceptualise un verbe, le verbe penser, en supposant que tous ses emplois
convergent vers un concept. Mais le verbe penser a-t-il véritablement un sens*?
N'est-il pas plutôt le lieu de divers < jeux de langage >), pour reprendre
I'expression de Wittgenstein, c'est-à-dire de diverses situations il peut jouer
avec un autre mot? Pour Wittgenstein, les mots n'ont pas de sens, ils n'ont que
des emplois, des usages.
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& o"s recherches parfois parallèles
) À partir des années 30, les idées de Wittgenstein vont exercer une grande
influence, autant en philosophie du langage que dans certaines branches
naissantes de la linguistique, comme la pragmatiquex. En philosophie, on parle
d'école d'Oxford ou de philosophie analytique. Le fondateur de la pragmatique,
l'Anglais John L. Austin, appartient à ce courant. De I'idée de Wittgenstein selon
laquétte les mots et les phrases n'ont pas de sens en dehors du contexte ils
sont prononcés, il va tirer la notion d'acte de langage*. Plus généralement, la
prise en compte de la situation d'énonciationx le langage est produit va
modifier sensiblement la manière dont les rapports entre le langage et la Éalité
sont perçus. Certains concepts clés de la linguistique d'aujourd'hui apparaissent,
comme le concept de référence*.
) Pourtant, la philosophie du langage et la linguistique restent des disciplines
relativement séparées. La philosophie du langage estime ne pas devoir s'occuper
de ce que les langues naturelles comportent de codes. De son côté, la linguistique
se propose d'être une discipline infiniment plus pratique et concrète. Elle se veut
d'abord une étude des langues* plutôt que du langage. Si elle utilise des concepts
dont le sens est parfois mis au point par la philosophie du langage, l'essentiel,
pour elle, est dlen tirer des applications pratiques dans l'étude de telle
configuration linguistique ou de telle situation de parole.
ffi Uorientation théorique de la linguistique
) Depuis les années 60, de nombreuses théories linguistiques se sont appuyées sur
unè phitosophie plus ou moins explicite du langage. Le cas le plus frappant est
celui de la-grammaire générative*. S'aidant de 1'héritage de philosophes
des siècles passés, comme Withelm von Humboldt (voir xtx" siècle*), et des
recherches menées dans d'autres disciplines que la linguistique, son fondateur,
Noam Chomsky, a donné à cette théorie une orientation qui re.lève autant de la
philosophie du langage que de la linguistique.
) Par ailleurs, on peut dire que certaines des recherches menées actuellement dans
des domaines ta hnguistique comme Ia sémantique* sont difficiles à classer.
et rejoignent aisément la philosophie du langage. Le dialogue est donc plus que
;amàis ouvert entre ces deux disciplines qui se sont parfois méfiées I'une de
I'autre.
De par ses objectifs et ses méthodes comme de par son histoire, Ia linguistique
n'est pas Ia phitosophie du langage. Cependa'itt, on peut dire que le temps la
linguistique s'occupait essentiellement d'études très détaillées sur Ie fonctionnement
cles langues naturelles n'est plus. Au cours du xx" siècle, la linguistique a pris
beaucoup d'options théoriques qui l'ont rapprochée de Ia philosophie du langage.
Cette évolution a fait que certaines des recherches Ies plus intéressantes menées
actuellement se situent véritablement au carrefour des deux disciplines.
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