38Diabète & Obésité • Février 2012 • vol. 7 • numéro 56
INTERSPÉCIALITÉS
L’ALBUMINURIE :
DÉTERMINANT
MAJEUR DU RISQUE
CARDIOVASCULAIRE,
ET DE SA RÉPONSE
AU TRAITEMENT
De façon similaire à ce que nous
rapportions ci-dessus pour le
risque d’insusance rénale dans
l’étude RENAAL, la mise en rela-
tion de la protéinurie et du risque
cardiovasculaire (le risque de pa-
thologies ischémiques type infarc-
tus du myocarde, mais aussi l’in-
susance cardiaque par exemple)
dans l’étude RENAAL, nous ap-
prend, d’une part, que la protéinu-
rie à l’inclusion est un facteur pro-
nostique indépendant et, d’autre
part, que la réponse au traitement
(jugée sur le niveau de protéinu-
rie à 6 mois) a aussi une valeur
pronostique indépendante. La
relation est un peu moins étroite
cependant pour le risque cardio-
vasculaire, une réduction de 50 %
de la protéinurie se traduisant par
une diminution d’environ de 20 %
du risque d’évènements cardiovas-
culaires. La situation est donc très
parallèle entre risque rénal et car-
diovasculaire, suggérant que «les
racines du mal» sont communes.
LA PROTÉINURIE
N’EST PAS TOUT
Le débit de filtration glomérulaire
est un facteur indépendant de
risque rénal, mais aussi du risque
cardiovasculaire.
Il y a deux ans, Perkins a collecté les
données individuelles de patients
diabétiques de type 1 de la Joslin
Clinic, à Boston, à partir de la mise
en évidence de la microalbumi-
nurie (2), afin de valider l’histoire
naturelle décrite par Mogensen. Si
certains sujets suivaient en eet la
séquence installation de la protéi-
nurie/déclin progressif de la fonc-
tion rénale, ce n’était pas du tout
systématique
(Fig. 4)
. En faisant la
revue de la littérature, on réalise que
la probabilité pour un patient mi-
croalbuminurique de le rester ou de
régresser vers la normoalbuminurie
est même deux fois plus élevée que
le risque de devenir protéinurique.
Mais ceci ne protège pas complè-
tement sa fonction rénale : en col-
ligeant de nombreuses études, de
type 1 comme de type 2, il apparaît
que la proportion des patients avec
une fonction rénale modérément
altérée (débit de filtration estimé
< 60 ml/min/1,73 m2) sans être
protéinurique est considérable, de
l’ordre de la moitié des patients! Il
faut donc nous habituer à ce nou-
veau (au moins dans sa reconnais-
sance) diabétique néphropathe :
l’insusant rénal pauci-albumi-
nurique. Dire que les insusants
rénaux modérés risquent plus de
devenir des insusants rénaux sé-
vères relève de la lapalissade. En
revanche, et l’on retrouve que les
facteurs de risque sont décidément
communs, on a moins conscience
que le débit de filtration est aussi un
facteur de risque cardiovasculaire.
Certes, mais via l’hypertension ar-
térielle ? Pas seulement, sa valeur
pronostique est indépendante des
facteurs de risque classique, et sa va-
5 10 15 20 25
Années après le diagnostic du diabète
Prévalence de la protéinurie (%)
100
80
60
40
20
Type II
Type I
30
25
20
15
10
5
0
< 0,5 0,5-1,5 1,5-3,5 ≥ 3,5
HR relatif par rapport au taux le plus bas
de protéinurie dans le gourpe placebo
ESRD
Albuminurie au départ (g/g) Albuminurie à 6 mois (g/g)
Losartan
Placebo
30
25
20
15
10
5
0
< 0,5 0,5-1,5 1,5-3,5 ≥ 3,5
ESRD
Losartan
Placebo
Figure 2 - La prévalence de la protéinurie survient dans les mêmes proportions et sous
les mêmes délais, quel que soit le type de diabète.
Figure 3 - A gauche : le risque de survenue d’une insuffisance rénale terminale (ESRD,
End-Stage Renal Disease) est croissant avec la protéinurie à l’inclusion dans l’essai
de prévention secondaire de la néphropathie diabétique dans le diabète de type 2
RENAAL. A droite : le risque de survenue d’une insuffisance rénale terminale dans
RENAAL est également directement proportionnel à l’albuminurie à 6 mois. Autrement
dit, la réponse au traitement, jugée sur la protéinurie à 6 mois de l’initiation du traite-
ment, nous prédit le niveau de la protection conférée.