Sujet 5-Partie a Formation de la précipitation: De la neige aux orages Mouvement Vertical Orographique La surface de la Terre offre un moyen pour produire assez de mouvement vertical mécanique pour déclencher de l'instabilité latente. Un exemple se trouve dans la figure 5-1 où la topographie force l'air à monter. Donc, dans les régions montagneuses, on trouve souvent beaucoup plus de nuages d'instabilité (cumulus, strato-cumulus, cumulonimbus) que dans les plaines. Figure 5-1 Lorsque la terre est assez penchée dans la direction du vent (comme les prairies canadiennes), un mouvement vertical de plus grande échelle peut se produire. Un exemple se trouve sur la figure 52. L'intensité du mouvement vertical dépend de la vitesse du vent et de la pente de la surface de la Terre dans la direction du vent. 1000 km Figure 5-2 Mouvement vertical associé aux dépressions et fronts Il existe aussi des grandes nappes de nuages qui se forment en réponse au mouvement vertical relié aux dépressions et fronts. Ce mouvement vertical est produit par la convergence sur le plan horizontal du vent dans les basses couches. La convergence (divergence) horizontale existe lorsque, sur le plan horizontal, il y a plus d'air qui entre (sort) dans une région que d'air qui en sort (entre). 5-1 Vent Nord Exemple de la convergence sur le plan horizontal Figure 5-3 Si la convergence horizontale se produit dans la couche près du sol, l'air ne peut pas descendre dans le sol et doit sortir vers le haut (loi de conservation de la masse) comme dans la figure 5-4. Vers le haut Vent Exemple de la convergence horizontale près du sol qui produit le mouvement vertical Figure 5-4 Si la convergence sur le plan horizontal se produit en altitude, étant donné que la masse est conservée (Loi de conservation de la masse), la masse doit sortir vers le haut ou vers le bas (divergence sur le plan vertical) comme dans la figure 5-5. 5-2 Vers le haut Vent Exemple de la convergence horizontale associée avec la divergence verticale Figure 5-5 Figure 5-6: Exemple d'une zone de convergence en surface qui produit du mouvement ascendent. En résumé, le mouvement ascendant qui produit les nuages de grande échelle est causé par les vents, soit en interaction avec la topographie, soit par convergence. Il faut donc comprendre comment les vents se forment. Il sera question de ceci dans le prochain sujet. 5-3 source: Anthes 1992 p.89 Figure 5-7: (a) Convergence et divergence d’un disque d’air. (b) Patron de convergence et de divergence de grande échelle associé avec les anticyclones (H) et les dépressions (L). Les hydrométéores: la pluie, la neige et autres formes de précipitation. Hydrométéore est le nom générique pour désigner toutes les particules qui forment des nuages et de la précipitation, c'est-à-dire que le mot hydrométéore englobe les gouttelettes d'eau ainsi que les particules de glace dans l'atmosphère. Lorsqu'un hydrométéore atteint des tailles telles que sa vitesse de chute est supérieure à la vitesse d'ascension de l'air, on dit qu'il y a formation de la précipitation. Si la précipitation atteint le sol sous forme liquide on a de la pluie. Si on la reçoit au sol sous forme solide, on peut avoir de la neige ou de la grêle ou encore d'autres types de précipitation (voir la liste sur les pages 4-21à 423). Les raisons de la formation des différents types de précipitation seront traitées plus loin. Maintenant on va essayer de comprendre un des nombreux mystères de la nature: comment les gouttelettes de nuage se transforment en gouttes de pluie. Cette question semble dépourvue de 5-4 sens! Puisque les gouttelettes de nuage se forment par condensation de la vapeur d'eau sur les noyaux de condensation, la goutte de pluie n'est-elle pas une conséquence logique de la croissance continue ce cette même gouttelette? Nous verrons que ce n’est pas le cas. Nous avons vu que les nuages se forment dans la nature dès que le seuil de saturation de l'air en vapeur d'eau est légèrement dépassé; cela résulte du grand nombre de noyaux de condensation présents dans l'atmosphère. Le diamètre habituel d'une goutte de nuage est de 20 micromètres, alors que celui d'une goutte de pluie peut atteindre 5 millimètres (soit un facteur plus grand de l'ordre de la centaine en taille et de l'ordre des millions en masse). Au début, les gouttelettes d'eau dans le nuage sont nombreuses et de tailles presque égales. Leur croissance se fait par condensation de vapeur sur leur surface. Mais le nombre de gouttelettes est très élevé (1 million de gouttelettes par litre de nuage) et la compétition pour le partage de la vapeur d'eau disponible est féroce. On a démontré depuis longtemps, aussi bien par le calcul que par les expériences de laboratoire, que dans les nuages naturels, la condensation seule ne peut ammener le passage de la gouttelette de nuage à la goutte de pluie. Pour une température donnée, la vitesse d'accroissement d'une gouttelette de nuage est proportionnelle au taux de saturation du milieu ambiant et inversement proportionnelle à la surface de la gouttelette (c'est-à-dire au carré de la taille). Des calculs numériques ont montré que, sans d'autre mécanisme que la condensation, dans une ascendance de cumulus, il faut environ 5 minutes pour que les gouttes atteignent la taille de 20 micromètres de diamètre et plusieurs heures pour arriver à 40 micromètres. Un autre mécanisme doit intervenir dans la formation de la pluie puisque certains cumulus parviennent au stade précipitant en moins de 15 minutes. On connaît deux processus principaux permettant de produire les précipitations; ils agissent à des degrés différents dépendant du type de nuage: Le processus de Bergeron. Historiquement, le processus de Bergeron fut découvert et étudié pour la première fois en Suède, à partir de 1930. Ce processus est relié a deux propriétés de l'eau. Premièrement, les gouttelettes ne se solidifient pas à 0°C comme on pourrait le croire. L'eau pure en suspension (gouttelettes de nuage) ne se solidifie spontanément qu'à des températures inférieures à -40°C. On dit que le nuage est en état de surfusion. L'eau surfondue gèle facilement quand elle est en présence de noyaux de congélation (une particule qui aide des molécules d'eau de s'arranger en forme de cristal) ou quand il y a un phénomène qui perturbe des gouttelettes surfondues (par exemple, le passage d'un avion). Les noyaux de congélation sont rares dans l'atmosphère et sont actifs (c-a-d initient la congélation) seulement à des températures inférieures à -10°C. Ainsi dans l'intervalle de températures de 0°C a 10°C, les nuages sont constitués de gouttelettes surfondues, entre -10 et -20°C les gouttelettes d'eau et les cristaux de glace coexistent et en bas de -20°C les nuages sont entièrement formés de cristaux de glace. La deuxième propriété de l'eau est qu'il est plus facile pour les molécules de s'échapper d’une surface liquide que d’une surface solide. Cette différence est due au fait que les cristaux de glace sont à l'état solide et les liens entre leurs molécules sont plus forts que les liens entre les molécules d'eau liquide. Donc, lorsque l'air est saturé en présence de glace (100% de saturation par rapport d'un plan de glace), il y a moins de molécules de vapeur d'eau que lorsque l'air est saturé en présence de l'eau. . Ceci explique la différence entre le nombre de molécule de vapeur d'eau (la pression partielle de vapeur d'eau) au voisinage des gouttelettes d'eau et celui au voisinage des cristaux de glace (voir la figure 5.8). 5-5 Par conséquent. . Ainsi, quand l'air est saturé (revoir la notion de saturation aux pages4-3 à 4-6) par rapport aux gouttelettes d'eau, il est sursaturé par rapport aux cristaux de glace (voir tableau 51). Tableau 5-1: Humidité relative par rapport à la glace lorsque l’humidité relative par rapport à l’eau est 100%. source: Lutgens et Tarbuck 1986 p.127 Lorsque de la glace et de l'eau co-existent, il y a une migration (due aux mouvements aléatoires des molécules-diffusion moléculaire-) de l'excès de molécules de vapeur d'eau vers les cristaux de glace. Cet effet augmente le nombre de molécules de vapeur d'eau autour la glace. Cet air devient sursaturé par rapport à la glace et il y a plus de molécules qui se déposent sur les cristaux que de molécules qui en quittent. Les cristaux croissent donc. Dans le tableau 5-1 on voit que si l'humidité relative de l'air est de 100 % par rapport à l'eau (l'air saturé par rapport à une surface liquide) à -10°C, elle est de 110% par rapport à la glace (l'air est sursaturé par rapport à une surface de glace). Nous pouvons maintenant expliquer comment les particules de nuages grandissent par le processus de Bergeron et produisent de la précipitation. Pour déclencher ce processus, quelques cristaux de glace et un grand nombre de gouttelettes en surfusion doivent cohabiter dans le nuage à une température assez basse (figure 5-8). Cette cohabitation est fréquente en particulier aux latitudes moyennes où la température d'une partie des nuages est souvent entre -10 et -20°C. Dans un milieu qui comporte beaucoup d'eau liquide et peu de glace comme dans la figure 5-8, la pression partielle de vapeur d'eau dans le nuage est à sa valeur saturante par rapport à l'eau. La sursaturation par rapport à la glace peut donc devenir importante et les quelques cristaux présents grossiront rapidement par déposition. Notez aussi que cet écart s'accroît à mesure que la température diminue (voir tableau 5-1). Dans un nuages de gouttelettes d'eau à -15°C, dans laquelle quelques flocons gèlent autour des noyaux de congélation, on peut obtenir donc assez facilement, en quelques dizaines de minutes, des cristaux de glace d’environ un millimètre de diamètre. Un cristal hexagonal de cette taille a une masse équivalente à celle d'une goutte de bruine de 200 micromètres de diamètre. Ce cristal a une vitesse de chute suffisante (quelques dizaines de centimètres par seconde) pour collecter par collision des gouttelettes et d'autres cristaux au cours de sa descente et atteint, un fois fondu dans l'air plus chaud près du sol, ainsi la masse d'une goutte de pluie moyenne. Pour déclencher le processus de Bergeron, il suffit de moins d'un cristal par litre pour produire des précipitations qui arrivent au sol. Par ce mécanisme, des nuages froids produisent très facilement de la précipitation 5-6 source: Lutgens et Tarbuck 1986 p.127 Figure 5-8: Le processus de Bergeron. Les cristaux de glace croissent aux dépens des gouttelettes de nuage jusqu’à ce qu’ils soient assez gros pour tomber. La taille des particules montrées a été très exagérée. Aussi les mouvements turbulents de l'air peuvent briser les cristaux et les fragments peuvent entre en contact avec autres gouttelettes d'eau et servir comme noyaux de congélation qui produisent la congélation à des températures plus chauds (entre 0 et -10°C) que les noyaux qui se trouvent dans l'atmosphère. Ainsi se développe une réaction en chaîne qui donne origine à un grand nombre de cristaux qui, par accrétion (collection), forment les flocons de neige. Quand la neige chute et se trouve dans un milieu où la température est supérieure à 0°C, les flocons de neige fondent en général et continuent leur chute comme de la pluie. Même une pluie d'été peut commencer comme une averse de neige au sommet du nuage. L'ensemencement des nuages pour augmenter la précipitation (ce qu'on appelle "pluie artificielle") ou de prévenir la formation de la grêle utilise le processus de Bergeron. En additionnant des noyaux de congélation aux nuages surfondus il est possible de changer l'évolution de ces nuages. On discutera de ceci plus tard. Lorsque l'eau surfondue des gouttelettes arrive en contact avec les cristaux, elle gèle immédiatement: c'est le givrage du flocon. On observe de tels cristaux givrés dans le nuage où se produit le processus de Bergeron. En plus, lorsque l'eau surfondue des gouttelettes arrive en contact avec les avions, le givrage sur les ailes (très dangereux) peut rendre l'avion instable et produire des écrasements. Collision - coalescence: On a cru pendant longtemps que le processus de Bergeron suffisait à expliquer la formation des précipitations. Cependant, des observations plus récentes, notamment dans les régions tropicales, 5-7 ont montré que la pluie apparaissait dans les cumulus dont le sommet se trouvait à une température positive. Dans un tel nuage, la croissance des hydrométéores doit nécessairement se faire par coalescence, c'est-à-dire par agglutination de gouttelettes. La coalescence exige d'abord que les gouttelettes entrent en contact (collision), puis qu'elles s’unissent pour former une goutte plus grosse (coalescence). Les gouttelettes de nuage ont une vitesse qui est proportionnelle à leur rayon. Cette vitesse est d'environ un centimètre par seconde pour une goutte de 20 micromètres de rayon et de 30 centimètres par seconde pour une goutte de 50 micromètres de rayon. Au-delà de cette taille la vitesse de chute augmente moins vite avec l'augmentation de taille. Les grosses particules ont, bien entendu, tendance à rattraper les plus petites; cependant, le fait qu'une petite goutte se situe sur la trajectoire d'une plus grosse n'implique pas nécessairement que les deux gouttes fusionnent. En effet, la chute d'une grosse goutte provoque le déplacement de l'air et si la deuxième goutte est trop petite, elle sera entraînée par l'écoulement de l'air autour de la grosse goutte. Cependant, si la goutte collectrice est suffisamment grosse, des tourbillons apparaissent dans son sillage et ceux-ci peuvent provoquer le contact entre les deux gouttes. (figure 5-9 Recherche) Figure 5 - 9 : LA CROISSANCE DES HYDROMÉTÉORES s’explique par deux mécanismes principaux. Lorsqu’un cristal de glace est entouré d’un grand nombre de particules liquides surfondues (à gauche), la pression partielle en vapeur d’eau du milieu est la pression de vapeur saturante de l’eau liquide Pl. Aux températures négatives, P l est supérieur à Ps, la pression de vapeur saturante au-dessus de la glace. On assiste donc à une forte diffusion de vapeur vers le cristal, ce qui contribue à le faire croître rapidement: c’est la croissance par effet de Bergeron, du nom du savant suédois qui décrivit ce processus. Cette croissance peut être accompagnée d’une évaporation des gouttelettes situées au voisinage du cristal; celles-ci deviennent alors plus petites. Plus la température est basse, plus la différence Pl - Ps est importante et plus la croissance du cristal est rapide. Quand la particule de glace a atteint une taille suffisante pour acquérir une vitesse de chute appréciable, la croissance se poursuit alors par agglutination d’autres particules plus petites, liquides ou solide, en suivant un processus similaire à la coalescence. La croissance par coalescence (à droite) nécessite des gouttes liquides de grande taille. Ces grosses gouttes ratrappent, au cours de leur chute, les gouttes plus petites et fusionnent avec elles lorsque certaines conditions sont remplies. Ces conditions sont encore imparfaitement élucidées; elles dépendent des tailles et des positions respectives des gouttes impliquées. En pratique, ces conditions ne peuvent être étudiées qu’expérimentalement, en raison notamment de la complexité des écoulements de l’air à cette échelle microscopique. 5-8 Par ailleurs, la coalescence ne se produit pas nécessairement quand deux gouttes entrent en collision. Si leur vitesse relative est trop faible, ou si le contact est tangentiel, les gouttes rebondissent l'une sur l'autre. Pour que le processus collision - coalescence soit efficace, il faut que quelques grosses gouttes initiatrices ou collectrices (de rayon supérieur à 40 micromètres environ) dont la vitesse de chute est supérieure à la vitesse des autres gouttes qui composent le nuage (qu'on appellera les gouttelettes collectées), parviennent à se former dans le nuage (environ une goutte par litre). Cependant, par condensation, les gouttelettes les plus petites grandissent plus rapidement que les gouttelettes de taille plus élevée, la tendance est d'avoir un spectre de gouttes de taille uniforme (gouttelettes qui se déplacent toutes à peu près à la même vitesse donc qui n'entrent jamais en collision). La théorie qui explique la formation de quelques gouttes de taille assez grande pour pouvoir déclencher le processus de collision - coalescence est la théorie de la goutte chanceuse ou de croissance statistique. On suppose que dans une distribution de gouttelettes initialement de même taille, un certain pourcentage de ces gouttelettes serait favorisé au cours de sa trajectoire par la rencontre de plus de gouttelettes avec lesquelles elles s'uniraient. Une fois que, dans le nuage, on trouve des gouttelettes de tailles assez différentes les processus de croissance collision coalescence commence (figure 5-10) Plus grande est l'épaisseur du nuage plus les gouttes collectrices ont le temps et l'opportunité de grandir par ce processus. Des forts courants ascendants peuvent aussi aider dans ce processus en faisant recycler les gouttelettes dans le nuage (la même gouttelette peut traverser le nuage plusieurs fois...) En plus, on possède maintenant d'autres éléments pour comprendre pourquoi les cumulus maritimes chauds précipitent plus facilement que les cumulus continentaux chauds. Cette différence semble liée principalement à la concentration en noyaux de condensation. Les masses d'air d'origine maritime contiennent moins de noyaux de condensation que les masses d'air provenant des continents où l'on trouve beaucoup plus de poussières. Il y a donc moins de gouttelettes dans les nuages maritimes (voir la figure 4-2) et moins de compétition entre gouttelettes pour le vapeur d'eau disponible. Les gouttelettes grandissent plus rapidement par condensation. On observe qu'elles ont des tailles assez différentes, donc des vitesses de chute différentes créant ainsi les conditions pour que les collisions se produisent plus facilement. Les formes de précipitation La neige et la pluie sont les formes de précipitation les plus communes. Mais d'autres formes doivent être mentionnées surtout à cause des inconvénients et des dégâts qu'elles peuvent causer. Au-dessus des tropiques la température de l'air est élevée et la pluie provient des nuages qui ne contiennent pas de glace. Les gouttelettes grandissent par collision - coalescence jusqu'à former les gouttes de pluie. Dans les nuages dits froids, la température est comprise entre -4 et -40°C. Dans ce cas c'est surtout le processus de Bergeron qui est à l'origine des particules (cristaux de glace, flocons de neige) qui précipitent. Généralement, ces flocons de neige commencent à fondre en traversant les couches plus chaudes. S'ils fondent entièrement c'est la pluie. S'ils ne fondent que partiellement c'est la neige fondante. Si pendant leur voyage ils ne fondent pas, ils arrivent intacts au sol: c'est la neige. 5-9