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Chapitre 2 : Vivre sur notre planète
Un développement soutenable est possible
Le développement soutenable consiste à répondre aux besoins actuels
sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à
leurs propres besoins (World Commission on Environment and Deve-
lopment). Un IDH de 0,8 représente la limite minimale pour « répondre
aux besoins actuels », tandis qu’une Empreinte écologique individuelle
inférieure à 1,8 hag — déterminée par la biocapacité de la planète et la
population humaine — xe une limite maximale pour vivre en deçà de
la capacité écologique de la planète, sans « compromettre les généra-
tions futures ».
Ensemble, ces indicateurs forment un « cadre de soutenabilité »
qui dénit les critères qui doivent être respectés pour obtenir une
société soutenable à l’échelle mondiale. En 2007, seul le Pérou se situait
dans ce cadre, avec un IHD de 0,806 et une Empreinte écologique
individuelle d’à peine plus de 1,5 hag. Cuba se trouvait dans le cadre les
années précédentes (WWF 2006b) mais, avec une Empreinte écologique
de 1,85 hag en 2007, le pays a légèrement dépassé la limite inférieure. La
Colombie et l’Équateur sont également juste au-delà de la limite établie
pour l’Empreinte écologique.
Ces exemples prouvent qu’il est possible pour les pays de ré-
pondre à des critères minimum de durabilité. Cependant, il convient de
garder à lesprit que cette analyse n’est effectuée qu’au niveau national et
ne prend pas en compte les changements et les répartitions socio-éco-
nomiques, ni les niveaux de développement civique et démocratique à
l’échelle dun pays. L’un des indices portant sur l’inégalité du revenu les
plus largement utilisés est le coefcient Gini, qui attribue aux pays un
score allant de 0, lorsque le revenu est parfaitement réparti entre les in-
dividus, à 100, lorsque le revenu est réparti de façon totalement inégale
(c’est-à-dire lorsqu’une personne dispose de l’ensemble des revenus).
Le Pérou afche un coefcient Gini relativement élevé (49,8 en
2007), qui indique que la distribution du revenu nest pas équitable sur
son territoire. Il est dès lors très important d’utiliser plus d’un indica-
teur pour évaluer de façon complète les multiples aspects de la soutena-
bilité sociale, environnementale et économique.
Comme mentionné précédemment, la biocapacité individuelle
disponible n’est pas xe mais diminue avec l’augmentation de la popu-
lation humaine, comme on a pu le constater sur la Figure 30. Lorsque la
population était considérablement moins élevée en 1961, la biocapacité
individuelle disponible était près de deux fois plus importante quelle ne
l’est actuellement. Le cadre de soutenabilité évolue donc en permanence
et à moins que l’homme ne découvre le moyen d’augmenter la biocapaci-
té, les pays auront de plus en plus de difcultés à entrer dans ce cadre.
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90
Figure 31: PIB par
habitant et espérance de
vie (années à la naissance)
(UNDP, 2009b)
Afrique
Asie
Europe
Amérique latine et
Caraïbes
Amérique du Nord
Océanie
gende
Espérance de vie (années à la naissance)
Produit Intérieur Brut par habitant (PIB exprimé en dollar US)
Au-delà du PIB
Le PIB (Produit Intérieur Brut) a longtemps été utilisé comme
indicateur général du progrès. Bien que le revenu constitue une
facette importante du développement, tout ne se résume pas
à cela : le bien-être comprend également des éléments sociaux
et personnels qui, ensemble, élargissent les choix qu’ont les
individus pour mener une vie qui leur plaît. De plus, à partir
d’un certain niveau de revenu, certains indicateurs primaires et
secondaires du bien-être humain, par exemple, l’espérance de
vie, n’augmentent plus en cas d’augmentation supplémentaire du
revenu par habitant (Figure 31).
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L’Indice Planète Vivante par groupe de revenu
Les analyses de l’IPV (Indice Planète Vivante) présentées précédem-
ment dans ce rapport montrent de fortes différences géographiques
dans la perte de biodiversité entre les régions tropicales et tempérées,
ainsi qu’entre les différents domaines biogéographiques. An de mon-
trer que ces différences ne sont pas nécessairement géographiques ou
biophysique par nature, nous avons réparti les données sur les popula-
tions despèces (à l’exception des espèces marines qui ne peuvent être
attribuées à un pays particulier) dans trois groupes selon le revenu du
pays (voir Encadré : Catégories de revenu des pays).
L’IPV pour les pays à revenu élevé montre une augmentation de
5 % entre 1970 et 2007 (Figure 32). Par contre, l’IPV des pays à revenu
moyen a diminué de 25 %, tandis que l’IPV des pays à faible revenu
a chuté de plus de 58 % au cours de la même période. Cette tendance
dans les pays à faible revenu est particulièrement alarmante, non
seulement pour la biodiversité, mais aussi pour les citoyens de ces pays.
Si nous dépendons tous des services écologiques et des biens naturels,
et donc de la biodiversité, l’impact de la dégradation de lenvironne-
ment affecte particulièrement les personnes les plus pauvres et les plus
vulnérables, qui sont traditionnellement les plus dépendantes des res-
sources naturelles. Sans acs à de leau propre, à des terres, à une ali-
mentation appropriée, à du combustible et des matériaux, les personnes
vulnérables ne peuvent pas sortir de leur état de pauvreté et prospérer.
BIODIVERSITÉ ET
REVENU NATIONAL
Carte 9: Pays à revenu
élevé, moyen et faible
(selon la classification de
la Banque Mondiale, 2007:
World Bank 2003)
Chapitre 2 : Vivre sur notre planète
Catégories de revenu des pays
La Banque Mondiale classe les économies selon le Revenu National
Brut (RNB) par habitant de 2007, calculé en utilisant la méthode de
l’Atlas de la Banque Mondiale et le facteur de conversion de l’Atlas
(Banque Mondiale, 2003). Le facteur de conversion de l’Atlas a pour
fonction de réduire l’impact de la uctuation des taux de change lors
de la comparaison du revenu national de différents pays. Les seuils
des catégories pour 2007 étaient les suivantes :
Revenu élevé : supérieur ou égal à 11 906 $ US de RNB par personne
Revenu moyen : de 936 à 11 455 $ US de RNB par personne*
Faible revenu : inférieur ou égal à 935 $ US de RNB par personne
*combine les catégories de revenus « moyenne inférieure » et « moyenne supérieure »
de la Banque Mondiale
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1,4
1970 1980 1990 2000 2007
Figure 32: L’Indice
Planète Vivante par
groupe de revenu par
pays. L’indice montre une
augmentation de 5 % dans
les pays à revenu élevé,
une diminution de 25 %
dans les pays à revenu
moyen et une chute de
58 % dans les pays à faible
revenu entre 1970 et 2007.
(WWF/ZSL, 2010)
Revenu élevé
Intervalle de conance
Revenu moyen
Intervalle de conance
Faible revenu
Intervalle de conance
gende
Indice Planète Vivante (1970=1)
Année
0
1
2
3
4
5
6
7
1961 1971 1981 1991 2001 2007
Figure 33: Évolution
de l’Empreinte
écologique
individuelle dans
les pays à revenu
élevé, moyen et faible
entre 1961 et 2007.
La ligne en pointillés
représente la biocapaci
moyenne de la planète en
2007 (Global Footprint
Network, 2010)
Revenu élevé
Revenu moyen
Faible revenu
gende
Empreinte Ecologique (hag par personne)
Année
Biocapacité mondiale moyenne par personne en 2007 (1,8 hag)
Tendances de l’Empreinte écologique par groupe de revenu
L’Empreinte écologique individuelle des pays à faible revenu a
diminué entre 1970 et 2007, tandis que celle des pays à revenu
moyen a augmenté légèrement. L’Empreinte écologique des pays à
revenu élevé a non seulement augmenté de façon signicative mais
éclipse celle des deux autres groupes de revenu (Figure 33).
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Flux commerciaux
Comme nous l’avons vu, de nombreux facteurs menant à la perte de
biodiversité proviennent de la production et de la consommation
d’aliments, de bres, de matériaux et d’énergie. Les analyses de
l’Empreinte écologique montrent que la consommation est bien
plus élevée dans les pays à revenu élevé que dans les pays à revenu
moyen et faible, ce qui suggère que la perte de biodiversité dans les
pays à revenu moyen et faible est, en partie, liée à l’empreinte des
personnes vivant dans les pays à revenu élevé.
Cette constatation soulève la question suivante : comment
la consommation dans un pays peut-elle être liée à la perte de
biodiversité dans un pays situé loin de là ? Une des explications
provient de la mondialisation des marchés et de la facilité de
mouvement des biens à travers la planète, qui permettent aux
pays de répondre à leur demande en ressources naturelles, pour la
transformation ou la consommation nale, grâce à des importations
en provenance d’autres pays. Le bois d’œuvre du Brésil par exemple,
est exporté dans un grand nombre de pays et les exportations de
bois d’œuvre éclipsent ainsi le commerce domestique (Carte 10).
Ces cartes de ux de services fournissent un aperçu du commerce
international, dont les chiffres réels sont probablement plus élevés
que les chiffres ofciels en raison de l’existence d’un commerce
illégal pour de nombreux produits d’origine sauvage.
La dépendance croissante des nations envers les ressources
naturelles et les services écologiques d’autres pays pour répondre
à leurs modes de consommation préférés fournit des opportunités
signicatives pour améliorer le bien-être et la qualité de la vie des
nations exportatrices. Cependant, sans une gestion appropriée des
ressources naturelles, cette situation peut mener à une exploitation
non durable des ressources et à la dégradation de l’environnement.
Si la situation est aggravée par un manque de gouvernance adaptée,
de transparence dans les revenus et d’acs équitable aux terres et
aux ressources, le développement et la prospérité ne se matérialisent
pas non plus.
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