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SURVEILLANCE DE LA QUALITÉ DE LAIR EN ILE -DE-FRANCE
La qualité de l’air
dans le vent
De la rue à la planète, à tous les niveaux,
pollution atmosphérique et météo forment
un duo inséparable
AIRP RIF
Actualité
Chiffre :
D’un jour à l’autre, les niveaux de
pollution peuvent être multipliés par 5
en fonction de la météo
N°31 - juillet 2008
Airparif
La région est favorisée par un
climat océanique qui tend à
disperser les grandes quantités
de polluants émis.
2
Météo de l’Ile-de-France
Réchauffement et hausses
d’ozone à prévoir.
3
Échelle globale
Une dispersion
plus ou moins
importante de
la pollution
le long des rues.
8
Échelle locale
La qualité de l’air se dégrade
fortement en cas d’inversion de
température.
6 et 7
Échelle régionale
Particules et ozone ne connais-
sent pas les frontières.
4 et 5
Échelle continentale
ozone
AirparifAirparif
3
Juillet 2008 - AIRPARIF Actualité N°31
2003 : une année météo
très atypique
Interview
EE EEEEÉchelle planétaireClimat & Météo FFFFFF
M. Frédérik Meleux
« Le réchauffement entraînera
une hausse des niveaux d’ozone »
Depuis quand étudiez-vous
l’impact du réchauffement
climatique sur la pollution ?
C’est un sujet assez nouveau,
qui a principalement émergé
au début des années 2000. La
recherche sur les relations entre
le climat et la qualité de l’air
débute donc.
Vous avez plus particuliè-
rement étudié les effets du
changement climatique sur
les concentrations d’ozone.
Quelle a été votre approche ?
Notre objectif était d’identifier
l’impact du changement
climatique à l’échelle de l’Eu-
rope. L’étude était effective-
ment focalisée sur les teneurs
en ozone. Nous avons effectué
deux simulations sur des
périodes de 30 ans. Une simu-
lation sur une période actuelle
(1960-1990) et une autre sur
une période future (2070-2100),
grâce aux outils de modélisa-
tion numérique. Nous avons
ensuite comparé les résultats
afin d’analyser l’impact des
conditions futures par rapport
à ce que nous observons
actuellement.
Quelles sont les évolutions
climatiques prévues d’ici la
fin du siècle en Europe ?
Plus de soleil, moins de nuages
et de pluie en période estivale…
Nous avons regardé un scéna-
rio d’évolution climatique
défini par le GIEC (Groupe
d’experts intergouvernemental
sur l’évolution du climat). Ce
scénario implique une
augmentation des températu-
res, avec des conditions anti-
cycloniques plus marquées
entraînant une plus faible
dispersion des polluants dans le
futur.
Pouvez-vous préciser les
conséquences d’un tel scéna-
rio sur la qualité de l’air?
En imaginant que les rejets de
polluants restent à leur niveau
actuel, on prévoit une aug-
mentation des concentrations
d’ozone à l’avenir. Nos résul-
tats montrent en effet une haus-
se des réactions chimiques qui
conduisent à la formation de
ce polluant. Ce phénomène est
notamment en lien avec la di-
minution de la couverture nua-
geuse. Sans cette protection,
l’énergie solaire favorable à la
production d’ozone sera moins
atténuée.
Vu le processus de formation
de l’ozone (voir encadré p.4),
les campagnes sont plus
touchées par cette pollution
que les agglomérations. Cela
va-t-il durer?
Oui, ce phénomène pourrait
même s’accentuer. En effet,
l’évolution du climat induirait
une augmentation des rejets de
composés organiques volatils
d’origine naturelle, les hydro-
carbures émis par les plantes,
qui sont des précurseurs
importants de l’ozone.
Tout le monde garde en
mémoire la canicule de 2003
(voir encadré ci-contre). Est-
ce que ce type d’événement
risque de se répéter à
l’avenir ?
Les estimations sont même
pires qu’un simple risque de
répétition : au niveau des
concentrations d’ozone attein-
tes et de la durée des épisodes,
l’été 2003 pourrait être un été
commun à la fin de ce siècle.
On prévoit une réelle augmen-
tation des événements extrê-
mes type 2003. En terme de
valeurs, nos modèles montrent
par exemple une augmentation
des pics journaliers d’ozone de
20 µg/m3entre les deux pério-
des dans certaines régions fran-
çaises, en prenant le scénario
climatique le plus pessimiste.
Quelle orientation vont
prendre vos recherches ?
On va maintenant s’intéresser
à une période moins lointaine
(2020-2050), avec un projet eu-
ropéen de trois ans, intitulé
Citizen, qui commencera en
septembre 2008. Il s’agira cette
fois d’étudier l’impact des méga
cités sur la qualité de l’air, en
prenant en compte l’évolution
du climat et des rejets de pol-
luants. On étudiera l’ozone mais
aussi les particules. L’explora-
tion ne fait que commencer.
Peu de vent, pas de nuages et
du soleil... S’il fait beau, c’est
plutôt mauvais signe pour la
qualité de l’air ! En effet, en
présence d’une situation
anticyclonique persistante,
accompagnée d’une absence
de vent au sol ou d’une inver-
sion de température (voir p.6),
on observe une accumulation
La qualité de l’air est liée aux rejets de polluants dans l’atmosphère. La météo a ensuite un
impact déterminant sur la dispersion de ces polluants ou leur transformation chimique.
La hausse des températures due au réchauffement climatique aura un impact significatif
sur les niveaux de pollution. Et la probabilité plus grande d’épisodes météo extrêmes, comme
les canicules, risque d’augmenter les niveaux d’ozone. Les niveaux records atteints en 2003
seront peut-être beaucoup plus communs à la fin du XXIème siècle. Précisions de Frédérik
Meleux, chercheur à l’Ineris (Institut national de l’environnement industriel et des risques).
progressive des polluants et le
soleil accélère leur transfor-
mation chimique. Par contre,
en présence d’un temps
perturbé, c’est-à-dire pluvieux
ou venteux, la pollution est
balayée et lessivée.
La qualité de l’air résulte d’un
équilibre complexe entre les
rejets directs de polluants, et
Le rôle de la météo,
dispersif ou aggravant Une vague de chaleur, exception-
nelle par sa durée et son intensi-
té, a frappé une grande partie de
l’Europe de l’Ouest pendant la
première quinzaine d’août. Vents
faibles et fort ensoleillement ont
favorisé la formation de pol-
luants photochimiques comme
l’ozone et donc d’épisodes de
pollution. Ces épisodes ont été
exceptionnels par leur répétition
et leur persistance, plus que par
leur intensité, puisque le record
d’ozone de 1998 en Ile-de-
France n’a pas été atteint.
Les conséquences sanitaires de
cette vague de chaleur estivale
ont été catastrophiques : un
excès de 70 000 décès en
Europe dont près de 20 000 en
France dont 5 000 en Ile-de-
France (projet européen Canicule
coordonné par l’Inserm, 2007).
Quant à l’impact sanitaire propre
à l’ozone pendant la canicule, il a
été évalué par l’Institut national
de veille sanitaire pour neuf villes
françaises dont Paris, à près de
400 décès anticipés.
Mais au-delà des quinze pre-
miers jours d’août, les périodes
anticycloniques ont été tout au
long de 2003 anormalement lon-
gues et la moyenne des tempéra-
tures a été une des plus élevées
depuis 50 ans (Météo-France).
La durée d’ensoleillement en Ile-
de-France a été de 20 à 30 %
supérieure à la moyenne des dix
dernières années et les pluies
nettement inférieures à la nor-
male régionale sur les trente
dernières années. Ces facteurs
météorologiques atypiques ont
été défavorables à la dispersion
des polluants toute l’année, et
donc à la qualité de l’air avec un
nombre record d’épisodes de
pollution mais aussi des concen-
trations moyennes annuelles en
hausse pour plusieurs polluants
majeurs : ozone, dioxyde d’azote
et particules.
Pour mieux comprendre la météo
et son impact sur la qualité de
l’air, les scientifiques utilisent des
outils informatiques, les modèles
numériques. Les modèles météo
permettent d’effectuer des prévi-
sions qui alimentent les modèles
de pollution atmosphérique. Ils
décrivent en termes mathéma-
tiques le déplacement de l’air et
la stabilité de l’atmosphère. La
précision de ces outils est adap-
tée en fonction de la taille du
domaine étudié : plus la zone est
petite, plus les points de calcul
sont proches. On distingue ainsi
quatre échelles d’analyse.
L’échelle globale prend
en compte la planète
entière. Elle est
notamment adaptée
pour étudier l’effet de
serre et le réchauffe-
ment climatique.
L’échelle continentale permet
d’observer le déplacement
des masses d’air et la
transformation chi-
mique des polluants
au niveau d’un conti-
nent (anticyclone,
dépression). Ces mouve-
ments ont des conséquences sur
la dispersion des polluants et sur
leurs transferts sur de longues
distances.
L’échelle régionale montre plus
les circulations d’air
engendrées par
la géographie
(relief, pré-
sence d’une
grande ville ou
de la mer...), ainsi
que les phénomènes
d’import et d’export en fonction
des trajectoires des masses d’air
et l’effet direct global des rejets
de polluants.
Al’échelle locale, on s’intéresse
aux flux de pollution engendrés
par un bâtiment ou par une rue.
En effet, les différents types de
rues ou de bâtiments entraînent
des modifications sur
les écoulements
des flux d’air et
peuvent notam-
ment contra-
rier la disper-
sion (effet rue
canyon).
La météo
à différentes échelles
Par sa densité de rejets de polluants, par son
climat tempéré et son relief plat,
l’agglomération parisienne est comparable à
celle de Londres. Avec 11 millions d’habitants
pour une superficie de 12 000 km2, l’Ile-de-
France est en effet une région très densément
peuplée. Cette densité, au niveau des transports
et des activités urbaines, entraîne de forts rejets
de polluants. Le trafic routier est notamment
la première source de pollution. Heureusement,
le climat y est tempéré, plutôt pluvieux et
venteux, et le relief plat du Bassin parisien
est favorable à la dispersion de la pollution.
Les vents sont de dominante sud-ouest, en
particulier en période hivernale où ils sont
associés à des régimes océaniques perturbés.
Une dominante nord-est est quant à elle obs-
ervable environ un quart de l’année, surtout lors
des situations anticycloniques qui accentuent
la pollution.
En Ile-de-France,
un climat plutôt dispersif
Ozone (O3)Dioxyde d’azote (NO2)
Zone
concernée par l’épisode
toute la région
mais surtout les zones rurales l’agglomération parisienne
Période de l’année
la plus problématique en été toute l’année
Période de la journée
où le risque d’épisode est le plus fort
l’après-midi,
quand l’ensoleillement est maximum
le matin ou le soir,
quand le pic de trafic correspond à
l’inversion de température
Conditions météorologiques
propices aux épisodes - températures supérieures à 30°C
- fort ensoleillement
- vent faible
- vent faible ou absent
- inversion de température avec la
formation d’un couvercle d’air chaud
au-dessus de l’agglomération parisienne
toute une série de phénomènes
physiques dans l’atmosphère :
transport, dépôts secs et
humides, et enfin transforma-
tions chimiques. D’un jour à
l’autre, même si les rejets sont
identiques, les niveaux de pol-
lution peuvent ainsi varier
considérablement suivant les
conditions météo.
2AIRPARIF Actualité N°31 - Juillet 2008
Temps anti-cyclonique
absence de vent
+ soleil
+ pas de nuages
+ fortes émissions
accumulation de polluants
et transformation chimique
=
on respire mal
Temps perturbé
pluie ou neige
+ vent
+ nuages
La pollution est balayée
et lessivée
=
on respire mieux
Airparif
5
Juillet 2008 - AIRPARIF Actualité N°31
4AIRPARIF Actualité N°31 - Juillet 2008
Les principaux polluants migrateurs sont l’ozone
et les particules. « Tout simplement parce qu’ils
ont une durée de vie plus longue que les autres
en altitude », explique Matthias Beekmann,
chercheur au Lisa (Laboratoire interuniversitaire
des systèmes atmosphériques). Le transport de
la pollution entre les pays dépend essentielle-
ment du temps de vie des substances et de la
vitesse moyenne du vent. « Par exemple, l’ozone
a une durée de vie moyenne de plusieurs jours
en basse couche atmosphérique. Mais à des
altitudes plus élevées, il peut avoir une durée
de vie de deux ou trois mois et peut se déplacer
loin des sources d’émission sur plusieurs cen-
taines, voire plusieurs milliers de kilomètres »,
précise Matthias Beekmann.
Zoom sur l’europe
Le transport de l’ozone peut s’effectuer sur plusieurs centaines, jusqu’à quelques milliers de kilomètres
Un outil informatique, le modèle Chimere, est
utilisé depuis 1997 pour mieux comprendre ces
transferts de pollution. « Notre travail de
modélisation a commencé avec Airparif qui a
tout de suite utilisé le modèle Chimere pour ses
prévisions », explique Matthias Beekmann.
Chimere prend en compte les rejets de pol-
luants, les mécanismes de transformation, de
transport et de dépôt des polluants, selon les
conditions météo et les types de sol. « Après dix
ans de pratique, on obtient de très bons résul-
tats pour la prévision des niveaux d’ozone en
Europe », se réjouit Matthias Beekmann. Par
contre, les particules posent encore des diffi-
cultés. Le projet européen Megapoli, qui sera
mené de 2008 à 2011 en collaboration avec
Airparif, permettra aux chercheurs de mieux éva-
luer les sources de particules. Des campagnes
de mesure sur le terrain, notamment en Ile-de-
France, serviront à améliorer les outils
numériques.
La pollution
franchit les frontières
L’ozone est le plus connu de la famille des polluants
secondaires qui comprend les aldéhydes, les cétones ou
encore une partie des particules. Il n’est pas directement
rejeté dans l’atmosphère mais se forme notamment à
partir des oxydes d’azote (émis par les gaz d’échappe-
ment, les centrales thermiques et les procédés indus-
triels) et des hydrocarbures (que l’on trouve dans l’essen-
ce, les peintures, les colles, et les solvants industriels ou
domestiques). L’ozone est un polluant photochimique,
car il est créé sous l’action du rayonnement UV du soleil et
de la chaleur. Ses niveaux sont donc élevés essentielle-
ment en été, pendant des périodes d’ensoleillement
intense et de vent faible. C’est pourquoi les niveaux les
plus élevés d’ozone sont enregistrés dans l’après-midi,
lorsque l’ensoleillement est maximal.
La formation des polluants secondaires nécessite un certain
temps. Comme les masses d’air chargées en précurseurs
d’ozone se déplacent, les concentrations d’ozone peuvent
ainsi atteindre au bout de quatre heures environ leur maxi-
mum dans des régions rurales qui sont sous le vent d’une
agglomération et de son panache de pollution. A l’inverse,
l’ozone est peu présent à proximité du trafic où il est trans-
formé par réaction chimique en dioxyde d’azote.
D’une région à l’autre, on observe des phénomènes d’import
d’ozone, mais aussi d’export. Par exemple, le 8 août 2003,
lors du pic de pollution le plus intense enregistré durant la
canicule, on mesurait un maximum de 282 µg/m3en Ile-de-
France (Rambouillet), tandis qu’en Eure-et-Loir, les teneurs
toujours influencées par les rejets de l’agglomération
parisienne atteignaient 325 µg/m3(à Oysonville).
La formation de l’ozone
En avril 2007, tout le nord de l’Europe
concerné par la pollution
Simulation des concentrations d’ozone en France, et dans
les pays voisins, le 8 août 2003 à 16h (journée ayant
enregistré l’épisode de pollution le plus intense de la
période de canicule en Ile-de-France), grâce à l’utilisation
du système PREV’AIR développé par le CNRS et l’INERIS
Source : IPSL (Institut Pierre Simon Laplace)
Le mois d’avril 2007 a été exceptionnellement chaud et ensoleillé
dans plusieurs pays européens. Le 15 avril par exemple, la tem-
pérature approchait 27°C à Paris, tandis que la barre des 30°C
était atteinte en Belgique. La masse d’air en provenance de
l’Atlantique est d’abord passée au-dessus de l’ Angleterre, puis de
l’Allemagne et l’Europe de l’Est avant de se rabattre sur la France.
Sur un très large quart nord-est du pays, on a ainsi observé ce
jour-là de fortes concentrations de particules, de l’ordre de 70 à
110 µg/m3en moyenne sur la journée. Cette météo exceptionnel-
le en début de printemps a favorisé le transport à l’échelle du
continent de particules volatiles qui pourraient être liées aux
épandages d’engrais effectués au même moment.
Un modèle pour prévoir les transferts
de pollution
Arpège
Rétrotrajectoire des masses d’air le 15 avril 2007
Le vent peut apporter
un air dégradé
situation est inversée, avec un vent d’est en
ouest (flux continental). « Ce vent apporte en
France un air déjà chargé en pollution venant
de l’Allemagne ou du Benelux », souligne
Matthias Beekmann.
Mais le vent n’est pas le seul paramètre météo
à intervenir dans les transferts de pollution.
Température, humidité au sol et précipitations
ont également un rôle non négligeable. Notam-
ment pour les particules qui sont surtout éliminées
par lessivage grâce à la pluie. Enfin, les rayon-
nements solaires sont déterminants : ils favori-
sent les réactions chimiques et la formation de
polluants secondaires (voir encadré). Les pires
situations sont observées quand tous ces para-
mètres s’accumulent. Par exemple, en situation
anticyclonique estivale, toutes les conditions
sont souvent réunies pour l’accumulation de la
pollution : vent faible, température forte,
rayonnement solaire intense, peu d’humidité, pas
de précipitation. «Ce fut le cas de manière
spectaculaire en 2003, se souvient Matthias
Beekmann. Avec un blocage des masses d’air
qui tournaient d’un pays à l’autre, dans toute
l’Europe de l’Ouest, de la France à l’Allema-
gne, en passant par l’Italie et le Benelux ».
Le vent est donc un critère majeur dans les
transferts de pollution continentaux. La plupart
du temps en Ile-de-France, on observe un courant
d’ouest en est, venant de la mer (flux océa-
nique). Mais en cas de météo anticyclonique, la
EE EEEEÉchelle continentaleÉchelle continentale FFFFFF
Transportés au gré des vents et des conditions
météo, certains polluants peuvent voyager
d’un pays à l’autre.
Un nuage de poussières sahariennes
Dans la nuit du 12 au 13 février 2002, les concentrations en
particules PM10 (particules inférieures à 10 µm), et elles seules,
ont soudain quintuplé sur l’ensemble du réseau de surveillance
d’Airparif. Cet épisode de courte durée (de l’ordre de 6 heures) a
pu être observé avec un petit décalage horaire sur toute une partie
du territoire français : Pays de la Loire, Centre, Auvergne et Ile-de-
France.
A l’origine de ce phénomène: le passage de masses d’air en
provenance des régions sahariennes. Des vents localement forts
sur les régions sèches du nord de l’Afrique, chargés de particules
en suspension d’origine naturelle (sables, particules de terre...)
ont abordé le territoire français par sa façade atlantique après
avoir contourné la péninsule ibérique. De tels transports à longue
distance de particules d’origine naturelle impliquent en priorité
une large proportion de particules de diamètre supérieur à
2,5 microns, contrairement aux particules d’origine urbaines
majoritairement très fines.
Airparif
7
Juillet 2008 - AIRPARIF Actualité N°31
6AIRPARIF Actualité N°31 - Juillet 2008
En moyenne jusqu’à 10 km d’altitude, l’air est
plus chaud au niveau du sol et sa température
diminue avec l’altitude. On compte une baisse
moyenne de 0,6°C tous les 100 m. Néanmoins,
dans des conditions de ciel clair, ce phénomène
thermique peut être inversé.
En effet, une fois le soleil couché et en l’absence
d’une couverture nuageuse, le sol se refroidit
alors plus rapidement que l’atmosphère : au
contact du sol, il se forme des couches d’air plus
froides qu’en altitude. Cet air froid se trouve alors
bloqué sur quelques centaines de mètres
d’altitude sous une couche d’air plus chaud. Ce
qui favorise l’accumulation de la pollution sous
cette cloche d’air chaud infranchissable.
Sous l’effet des rayonnements solaires,
l’inversion thermique est généralement rom-
pue au cours de la journée : le couvercle s’ouvre
et l’air peut à nouveau s’élever normalement.
En hiver en particulier, si le rayonnement solaire
ou le vent sont trop faibles, l’inversion peut se
reformer le soir. Parfois même, la rupture peut
ne pas se produire du tout de la journée (voir
l’exemple de Noël 2007). L’heure de formation
de l’inversion et de sa rupture, ainsi que son
intensité sont déterminantes sur les niveaux de
pollution, notamment par rapport aux pics de
trafic du matin et du soir. Ces inversions de
température peuvent se produire tout au long de
l’année, surtout en hiver ou en demi-saison.
Zoom sur l’ile-de-france
Inversion de température :
un couvercle pour la pollution
Prévoir la qualité de l’air
en fonction de la météo
Tout au long de l’année, un ingénieur, un technicien et un
informaticien d’Airparif effectuent une astreinte : ils prévoient la
qualité de l’air du jour même et du lendemain en s’appuyant sur
les informations de qualité de l’air du réseau et sur les prévisions
météo. Explications croisées de Bruno Lossec, chef du service de
prévision de la région Ile-de-France à Météo France, et de Hélène
Marfaing, responsable de l’astreinte à Airparif.
Hélène Marfaing,
responsable de l’astreinte à Airparif
Les informations les plus importantes
pour estimer les niveaux de pollution
sont les vitesses de vent, les inversions
de température (surtout pour le dioxyde
d’azote), l’ensoleillement et les tempé-
ratures (essentiellement pour l’ozone). Nous avons besoin de pré-
visions très précises, particulièrement en cas de météo stable.
Car c’est le cas de figure où la qualité de l’air risque d’être dégra-
dée. Cela peut paraître subtil, mais une vitesse de vent d’1 m/s ou
de 2 m/s peut avoir un impact complètement différent sur les
niveaux de pollution, alors qu’il s’agit de vents faibles. Le problè-
me est le même pour la prévision des inversions de température et
de leur rupture. En période estivale, la prévision de l’heure d’arri-
vée d’un orage est également déterminante. Une perturbation qui
arrive en début ou en fin d’après-midi n’a pas du tout le même
impact, notamment sur les niveaux d’ozone.
Un bulletin quotidien spécifique, réalisé
par Météo France, est transmis à
Airparif. Il comprend les observations
pour la veille, l’estimation pour le jour
même, et les prévisions pour le lende-
main. Ces données sont issues des modèles numériques de
météo, elles sont ensuite supervisées par le prévisionniste. Le bul-
letin produit pour Aiparif est très différent des informations que
l’on délivre habituellement. Nous sommes en train d’affiner nos
modèles numériques pour répondre à l’exigence de précision
nécessaire pour évaluer la pollution. Nous allons ainsi améliorer
la qualité de nos prévisions d’ici fin 2008. Cette amélioration
concerne notamment les inversions de température, dont l’évolu-
tion au fil des heures est difficile à anticiper. La prévision des
vitesses de vent devrait également être améliorée grâce au nou-
veau modèle Arome qui prendra en compte les spécificités liées à
l’agglomération et aux élévations de température dues à l’urbani-
sation (l’îlot de chaleur).
EE EEEEÉchelle régionaleÉchelle régionale FFFFFF
La qualité de l’air se dégrade fortement en cas d’inversion de température, phénomène qui
empêche l’air de se disperser.
+ chaud+ froid
+ froid + chaud
Airparif
Épisode de pollution dû au dioxyde d’azote et aux particules le 24 décembre 2007 (vue depuis le 3ème étage de la tour Eiffel)
Airparif
Lors d’une inversion de température, les températures en altitude sont plus élevées que celles au
niveau du sol, ce qui créé un couvercle d’air chaud sous lequel les polluants s’accumulent
Qualité de l’air très mauvaise, indicateurs au rou-
ge. Du 19 au 24 décembre 2007, des niveaux
records ont été atteints pour deux polluants : le
dioxyde d’azote et les particules. Les 23 et 24
décembre, l’indice de qualité de l’air ATMO a
même atteint 10/10, son maximum !
D’une part, à cause du trafic, mais aussi du
chauffage individuel ou collectif, les rejets de
polluants étaient particulièrement élevés. La
combustion du bois est à ce titre un mode de
chauffage particulièrement émetteur de parti-
cules. En règle générale, son usage par les
particuliers est de plus en plus répandu en France
et en Europe. D’autre part, à l’occasion de cet
épisode anticyclonique froid, les conditions
météorologiques ont été très défavorables à la
bonne dispersion des polluants. Les fortes
inversions de température observées étaient
liées à un important refroidissement des tem-
pératures au sol (gelées jusqu’à -9°C dans l’ex-
trême sud-est de la région Ile-de-France) avec
un ciel sans nuages, et un vent quasi nul en
surface et en altitude. Les températures restant
faibles la journée, ces inversions de tempéra-
ture se sont prolongées. Elles ont favorisé la
stagnation des polluants émis au niveau du sol.
Des transports de pollution interrégionaux ont
aussi contribué à aggraver la situation. La forêt
de Fontainebleau présentait notamment des
niveaux de particules élevés. Plusieurs régions
françaises et européennes ont été touchées
simultanément.
L’exemple de Noël 2007 :
une inversion de température prolongée
Bruno Lossec,
responsable prévision à Météo France
8AIRPARIF Actualité N°31 - Juillet 2008
Le financement d’Airparif est assuré par des subventions de l’État, des collectivités territoriales, des industriels au titre de la TGAP et des prestations d’expertise
Échelle locale FFFFFF
SURVEILLANCE DE LA QUALITÉ DE L’AIR EN ILE-DE-FRANCE
association type loi de 1901
à but non lucratif
7 rue Crillon 75004 PARIS
01.44.59.47.64
Courriel : demande@airparif.asso.fr
Directeur de publication : J.F. Saglio
www.airparif.asso.fr
Des mesures en soufflerie complétées
par des simulations numériques
« Une rue très polluée peut augmenter
les niveaux des rues voisines »
Zoom sur un quartier
Ce phénomène local est particulièrement étudié
par le laboratoire de mécanique des fluides de
l’École centrale de Lyon. La structure dispose
en effet d’une soufflerie de 24 m de long, avec
une maquette de ville. Les bâtiments sont sché-
matisés par des blocs rectangulaires, équipés de
capteurs de mesure. L’écoulement d’air
symbolise le vent. Et entre les blocs, des émet-
teurs de gaz permettent de représenter les rejets
de polluants comme les oxydes d’azote.
« Notre soufflerie est très précieuse pour mieux
comprendre le transport et la dispersion de la
pollution, souligne le chercheur Lionel Soulhac.
On peut plus facilement contrôler la vitesse du vent
et les quantités de polluants émises que dans la
réalité ».
Dans les rues étroites et encaissées, la pollution
peut se trouver confinée entre les bâtiments car
la vitesse du vent est plus faible. C’est l’effet
« rue canyon », bien connu depuis les années
80. Les rejets de polluants dans des rues peu
ventilées entraînent une accumulation de la
pollution qui ne peut s’évacuer par le haut.
Les résultats obtenus sur maquette sont ensui-
te utilisés pour valider les simulations numériques
des modèles. Les chercheurs lyonnais utilisent
en effet un modèle appelé Sirane, qui permet de
représenter la dispersion de la pollution à
l’intérieur d’une rue et dans le quartier avoisi-
nant. Comme dans la soufflerie, les bâtiments
sont représentés par des blocs rectangulaires et
les quartiers par des rues perpendiculaires. Le
modèle effectue un bilan entre la pollution qui
entre et qui sort de chaque rue. Il calcule ensuite
les écarts d’une rue à une autre, prenant en
compte les phénomènes particuliers dus aux
intersections et au transport des polluants par-
dessus les toits. « On se rend ainsi compte
qu’une rue très polluée peut augmenter les
niveaux des rues voisines », explique Lionel
Soulhac.
En partenariat avec les réseaux de surveillance
de la qualité de l’air comme Airparif, les cher-
cheurs travaillent actuellement à l’amélioration
de Sirane. L’idée est notamment de mieux
prendre en compte la géométrie des rues et les
différences de hauteur entre les bâtiments.
L’effet « rue canyon »
Les chercheurs étudient l’impact du vent et des courants d’air turbulents, pour mieux com-
prendre comment la pollution se disperse dans les rues.
l’influence du vent dans le quart sud-est de paris
Dans le cadre d’une étude sur la pollution à proximité du trafic, Airparif a utilisé le modèle
Sirane à l’échelle d’un quartier situé entre Paris et le Val de Marne. La zone d’étude
comprenait le quart sud-est de Paris, avec deux axes majeurs : l’autoroute A4 et le
Boulevard périphérique.
Les cartes ainsi obtenues les 5 et 6 mars 2008 illustrent l’influence de la météo à l’échelle
d’un quartier. En effet, entre ces deux journées, le vent est passé de 4,2 m/s (15 km/h) à
1,4 m/s (5 km/h) et il a changé de direction (vent de nord puis vent d’ouest). Ces
changements de vent ont entraîné une plus mauvaise dispersion de la pollution dans les
rues le 6 mars.
Journée du 6 mars 2008
Airparif
Journée du 5 mars 2008
Autoroute A4 Autoroute A4Boulevard périphérique
Airparif
École centrale de Lyon
Soufflerie avec une maquette de quartier
Imprimé par : compédit beauregard
PEFC/10-31-1268
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