Rapport Brundtland
Chapitre 2
Introduction
I. La notion de développement durable
II. Équité et intérêt commun
III. Les impératifs stratégiques
1. Reprise de la croissance
2. Modification de la qualité de la croissance
3. Satisfaction des besoins essentiels
4. Maîtrise de la démographie
5. Préservation et mise en valeur de la base de ressources
6. Réorientation des techniques et maîtrise des risques
7. Intégration des considérations économiques et environnementales dans
la prise de décisions
IV. Conclusion
Notes
Introduction
Le développement durable est un développement qui pond aux besoins
du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre
aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion :
* le concept de « besoins », et plus particulièrement des besoins essentiels des
plus démunis, à qui il convient d’accorder la plus grande priorité,
* l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation
sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins
actuels et à venir.
Ainsi, les objectifs du développement économique et social sont définis
en fonction de la durée, et ce dans tous les pays développés ou en
développement, à économie de marché ou à économie planifiée. Les
interprétations pourront varier d’un pays à l’autre, mais elles devront comporter
certains éléments communs et s’accorder sur la notion fondamentale de
développement durable et sur un cadre stratégique permettant d’y parvenir.
Le développement implique une transformation progressive de
l’économie et de la société. Cette transformation, au sens le plus concret du
terme, peut, théoriquement, intervenir même dans un cadre sociopolitique rigide.
Cela dit, il ne peut être assuré si on ne tient pas compte, dans les politiques de
veloppement, de considérations telles que l’accès aux ressources ou la
distribution des coûts et avantages. Même au sens le plus étroit du terme, le
développement durable présuppose un souci d’équité sociale entre les
générations, souci qui doit s’étendre, en toute logique, à l’intérieur d’une même
génération.
I. La notion de développement durable
Le principal objectif du développement consiste à satisfaire les besoins
et aspirations de l’être humain. Actuellement, les besoins essentiels de quantité
d’habitants des pays en développement ne sont pas satisfaits : le besoin de se
nourrir, de se loger, de se vêtir, de travailler. Qui plus est, au-delà de ces besoins
essentiels, ces gens aspirent et c’est légitime à une amélioration de la qualité
de leur vie. Un monde la pauvreté et l’injustice sont endémiques sera
toujours sujet aux crises écologiques et autres. Le développement durable
signifie que les besoins essentiels de tous sont satisfaits, y compris celui de
satisfaire leurs aspirations à une vie meilleure.
Un niveau supérieur au minimum vital serait envisageable à la seule
condition que les modes de consommation tiennent compte des possibilités à
long terme. Or, nombre d’entre nous vivons au-dessus des moyens écologiques
de la planète, notamment en ce qui concerne notre consommation d’énergie. La
notion de besoins est certes socialement et culturellement déterminée ; pour
assurer un développement durable, il faut toutefois promouvoir des valeurs qui
faciliteront un type de consommation dans les limites du possible écologique et
auquel chacun peut raisonnablement prétendre.
Pour répondre aux besoins essentiels, il faut réaliser tout le potentiel de
croissance ; le développement durable nécessite de toute évidence la croissance
économique ces besoins ne sont pas satisfaits. Ailleurs, développement et
croissance économique sont compatibles, à condition que le contenu de celle-ci
respecte les principes que sont la durabilité et la non-exploitation d’autrui. Mais,
à elle seule, la croissance ne saurait suffire. En effet, une forte productivité peut
tout à fait coexister avec la plus grande indigence, et l’environnement ne peut
qu’en pâtir. Ainsi, pour que le développement durable puisse survenir, les
sociétés doivent faire en sorte de satisfaire les besoins, certes en accroissant la
productivité, mais aussi en assurant l’égalité des chances pour tous.
Il se peut que l’accroissement démographique intensifie les pressions qui
pèsent sur les ressources et ralentisse l’amélioration du niveau de vie dans les
régions où la pauvreté est endémique. S’il est vrai qu’il ne s’agit pas uniquement
d’une question démographique mais aussi de répartition des ressources, le
développement durable n’est possible que si l’évolution démographique
s’accorde avec le potentiel productif de l’écosystème.
Une société peut, de diverses manières, compromettre sa capacité de
satisfaire les besoins de ses membres – en surexploitant les ressources, par
exemple. Dans l’immédiat, le développement technologique peut certes résoudre
certains problèmes, mais il peut quelquefois en créer d’autres plus graves. Le
développement inapproprié peut en effet marginaliser des portions entières de la
population.
L’agriculture sédentaire, le détournement des cours d’eau, l’extraction
minière, l’émission de chaleur et de gaz toxiques dans l’atmosphère,
l’exploitation commerciale des forêts, les manipulations génétiques, sont des
exemples de l’intervention de l’homme dans les écosystèmes à l’occasion
d’activités de développement. Il y a peu de temps encore, ces interventions
étaient encore limitées, tant dans leur ampleur que dans leurs effets.
Aujourd’hui, elles sont plus draconiennes, et plus menaçantes aussi localement
et mondialement. Mais ces menaces ne sont pas inévitables. Au strict minimum,
le développement durable signifie ne pas mettre en danger les systèmes naturels
qui nous font vivre : l’atmosphère, l’eau, les sols et les êtres vivants.
Sur le plan démographique ou celui de l’exploitation des ressources, il
n’existe pas de limite fixe dont le dépassement signifierait la catastrophe
écologique. Qu’il s’agisse de l’énergie, des matières premières, de l’eau, du sol,
ces limites ne sont pas les mêmes. Elles peuvent en outre se manifester autant
par une augmentation des coûts et une baisse de la rentabilité que par la
disparition soudaine d’une base de ressources. L’amélioration des connaissances
et des techniques peut permettre de consolider la base de ressources. Cela dit, les
limites existent tout de même et il faudrait, bien avant que le monde n’atteigne
ces limites, qu’il assure l’équité dans l’accès à ces ressources limitées, qu’il
réoriente les efforts technologiques afin d’alléger les pressions.
La croissance économique et le développement entraînent
inévitablement des modifications dans les écosystèmes. On ne peut en effet
maintenir intact chacun d’entre eux. Une forêt peut fort bien être épuisée en un
endroit d’un versant et très dense en un autre ce qui n’est pas forcément un
mal, si l’on a procédé avec méthode et tenu compte des effets sur l’érosion du
sol, les régimes d’eau et l’éventuelle disparition d’espèces. De manière générale,
les ressources renouvelables telles les forêts ou les bancs de poissons peuvent ne
pas s’épuiser, à condition que le rythme de prélèvement ne dépasse pas la
capacité de régénération et d’accroissement naturel. Cela dit, la plupart des
ressources renouvelables font partie d’un écosystème fort complexe et il faut
définir un seuil maximum d’exploitation, en tenant compte des effets de
l’exploitation sur l’ensemble du système.
Quant aux ressources non renouvelables comme les combustibles
fossiles et les minerais, leur utilisation réduit de toute évidence le stock dont
disposeront les générations à venir ce qui ne signifie nullement qu’il ne faut
pas les utiliser. Il convient toutefois de tenir compte de l’importance critique de
la ressource, de l’existence de techniques permettant de minimiser l’épuisement
et de l’éventualité de trouver un produit de remplacement. Ainsi, il importe de
ne pas épuiser les sols au-delà de toute récupération possible. Quant aux
minerais et aux combustibles fossiles, il faut surveiller le rythme d’épuisement
et introduire des méthodes de recyclage et d’économie pour faire en sorte que
les ressources ne disparaissent pas avant que l’on ait trouvé des substituts
convenables. Dans l’esprit du développement durable, il importe au plus haut
point que le rythme d’épuisement des ressources non renouvelables
compromette le moins possible l’avenir.
La pratique du développement a tendance à appauvrir les écosystèmes et
à réduire la diversité des espèces. Or, une fois éteinte, une espèce ne se
renouvelle plus jamais. La perte d’espèces végétales et animales peut
singulièrement limiter les possibilités desnérations à venir ; le développement
durable exige donc leur conservation.
Les biens soi-disant gratuits tels l’air et l’eau sont eux aussi des
ressources. Les matières premières et l’énergie utilisées dans la production ne
sont que partiellement transformées en produits utiles. L’autre partie est faite de
déchets. Le développement durable exige donc que les effets nuisibles sur
l’air, l’eau et les autres éléments – soient réduits au minimum, de façon à
préserver l’intégrité globale du système.
Dans son esprit même, le veloppement durable est un processus de
transformation dans lequel l’exploitation des ressources, la direction des
investissements, l’orientation des techniques et les changements institutionnels
se font de manière harmonieuse et renforcent le potentiel présent et à venir
permettant de mieux répondre aux besoins et aspirations de l’humanité.
II. Équité et intérêt commun
C’est de manière plutôt générale que nous venons de décrire le
développement durable. Comment peut-on persuader ou obliger concrètement
les individus à agir pour le bien de tous ? La réponse se trouve partiellement
dans l’éducation et le développement des institutions, mais aussi dans
l’application sévère de la loi. Cela dit, nombre des problèmes d’épuisement des
ressources et d’agressions contre l’environnement sont dus aux inégalités du
pouvoir économique et politique. Une entreprise industrielle peut fort bien se
permettre de polluer l’air ou les eaux de manière inacceptable, simplement parce
que les gens qui en souffrent sont trop démunis pour intenter une action en
justice. On pourra détruire entièrement une forêt en abattant tous les arbres,
simplement parce que les habitants n’ont pas d’autres solutions ou encore parce
que les entreprises sont plus influentes que les habitants des forêts.
Les interactions écologiques ne respectent ni la propriété privée ni les
découpages politiques. Ainsi :
* Sur un versant quelconque, la façon dont un agriculteur travaille la terre en
amont affecte le ruissellement sur les terres en aval.
* Les pratiques d’irrigation, les pesticides et les engrais utilisés par une
exploitation peuvent avoir des effets sur la productivité des exploitations
voisines, notamment quand il s’agit de petites exploitations.
* Le rendement d’une chaudière détermine le taux d’émission de suie et de
produits chimiques nuisibles, affectant ainsi tous ceux qui vivent et travaillent
près de l’usine en question.
* L’eau chaude qu’une centrale thermique rejette dans un fleuve ou dans la
mer a des effets sur les prises des pêcheurs locaux.
Certains systèmes sociaux traditionnels reconnaissaient certains aspects
de cette interdépendance et intervenaient dans les pratiques agricoles, assurant
l’exercice de droits traditionnels sur l’eau, les forêts, la terre. Ce respect de
« l’intérêt commun » ne compromettait d’ailleurs pas forcément la croissance et
l’expansion, encore qu’il ait pu limiter l’acceptation et la diffusion de certaines
innovations techniques.
En fait, l’interdépendance locale n’a fait que croître, et ce en raison des
techniques utilisées dans l’agriculture et la production modernes. Mais,
parallèlement à cette vague de progrès techniques, l’accessibili réduite aux
terres collectives, la perte de droits traditionnels sur la forêt et les autres
ressources, la poussée de la production commerciale, ont arraché le pouvoir de
décision aux groupes comme aux individus. Cette évolution est encore en cours
dans de nombreux pays en développement.
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