Organisée par l`Association des Historiens du Cambodge

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Journée commémorative du 150ème anniversaire des relations franco-cambodgiennes
Organisée par l’Association des Historiens du Cambodge
Phnom Penh, le 11 août 2013
De gauche à droite :
1. Prof. Dr. Prum Moal, Conseiller auprès du Gouvernement du Cambodge,
2. S.E. Ieng Mouly, Ministre d’Etat et Conseiller de l’Association des
Historiens du Cambodge,
3. Prof. Dr. Sorn Samnang, Président de l’Association des Historiens du Cambodge,
4. M. Dominique Mas, Chargé d'affaires de l’Ambassade de France au Cambodge.
5. Prof. Dr. Thuy Chanthourn, Vice-Président de l’Association des Historiens
du Cambodge,
6. Prof. Vong Sotheara, Vice-Président de l’Association des Historiens du Cambodge.
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Le Chargé d'affaires M. Dominique Mas
au milieu des Cambodgiens, intellectuels et historiens
Prof. Dr. Sorn Samnang
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Perception du moment colonial par un historien cambodgien
Par Prof. Sorn Samnang, Président de l’Association des Historiens du Cambodge
Excellences, Mesdames, Messieurs,
La Journée commémorative du 150ème anniversaire des relations franco-cambodgiennes est un
« Forum universitaire et historique » ayant pour but de faire connaître le passé du Cambodge,
afin de contribuer à la paix, à la prospérité et au progrès.
Comme vous le savez, le Cambodge a sa culture et sa tradition bi-millénaires. A l’époque de sa
plus brillante civilisation, du 10ème au 14ème siècle, il fut un vaste empire de la richesse et de la
puissance duquel les temples d’Angkor portent un témoignage impérissable. La période post-
angkorienne depuis le 15ème siècle fut marquée par une suite de troubles politiques, de guerres
trop fréquentes qui ont gravement affaibli le pays.
La première moitié du 19ème siècle compta parmi les années les plus sombres de l’histoire du
Cambodge, bloqué entre l’Annam et le Siam. Le roi Ang Duong (1848-1860) à qui était parvenu
l’écho de l’intervention française à propos des persécutions de prêtres catholiques perpétrées en
Annam, décida de proposer une alliance à l’Empereur Napoléon III.
Monseigneur Jean Claude Miche, missionnaire catholique français qui parlait le khmer et
entretenait d’excellentes relations avec le roi Ang Duong, apportait une précieuse contribution à
l’établissement des liens juridiques unissant le Cambodge et la France. Le protectorat français,
instauré par le traité du 11 août 1863, « intervint à un moment crucial de l’histoire du
Cambodge».
Le prince Norodom Sihanouk, dans son ouvrage intitulé « La monarchie cambodgienne et la
croisade royale pour l’indépendance » écrit que « le traité de 1863 était, en son temps, très
acceptable car libéral ». Le traité du 11 août 1863 entre l’Empereur des Français et le Roi du
Cambodge établissant le Protectorat de la France sur le Cambodge fut signé au palais royal de
Oudong. L’article premier disposait que « S.M. l’Empereur des Français accorde sa protection à
S.M. le Roi du Cambodge ». Selon son article 16, « S.M. l’Empereur des Français, reconnaissant
la souveraineté du Roi du Cambodge, s’engage à maintenir dans ses Etats l’ordre et la
tranquillité, à le protéger contre toute attaque extérieure, à l’aider dans la perception des droits de
commerce et à lui donner toute facilité pour établir une communication entre le Cambodge et la
mer ».
Rappelons qu’en vertu de l’article additionnel au traité du 11 août 1863, l’Empereur des Français
donna au Roi du Cambodge un bâtiment à vapeur, dont le capitaine, les mécaniciens étaient
Français. Le Roi du Cambodge pouvait disposer de ce bâtiment pour tous les services.
Politiquement, la Convention du17 juin 1884 entre Thomson et Norodom marqua le début d'une
période de colonisation. Mais il fallut attendre l'année 1897 pour assister à la prise de la totalité
des pouvoirs par les Français. La colonisation a mêlé inséparablement colonisateurs et colonisés
dans l’affrontement comme dans une inévitable cohabitation. Le Protectorat a réussi à tenir entre
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ses mains le souverain khmer. Selon le prince Norodom Sihanouk, de 1884 à 1945, les rois du
Cambodge étaient des « machines à signer ».
Se cachant derrière les ordonnances royales, le Protectorat pratiqua une politique fiscale de plus
en plus dure à partir du début des années 1920 qui irait entrainer une « ruine totale des
contribuables » dans la période de pleine crise économique (1931-1937).
Or « coloniser c'est tout à la fois donner et prendre ». D'un côté, des initiatives furent prises par
les colonisateurs au détriment des Cambodgiens. Mais d'un autre côté, le Protectorat français a
apporté à l'Etat protégé les bienfaits de sa civilisation.
La survie nationale khmère est due à une étroite coopération entre l’Etat protecteur et l’Etat
protégé et surtout aux efforts déplos par la France concernant ces cinq domaines : la marine,
l'armée de terre, l’administration, la diplomatie et l’intelligentsia.
1-Rôle de la marine française
Pour le Cambodge, l’amiral De la Grandière et le lieutenant de Vaisseau Doudart de Lagrée
jouèrent un rôle essentiel. Sur l’initiative de Doudart de Lagrée, l’amiral de la Grandière signa
avec le roi du Cambodge un traité qui plaçait le pays sous protectorat de la France en 1863, un
moment crucial de l’histoire du Cambodge.
2-Rôle de l'armée de terre française
Rappelons que l'actuelle province de Mondolkiri, anciennement gion duHaut Chhlong
(Chhlong Loeu) est la région la moins peuplée du Cambodge. Les populations de la haute région
(Mondolkiri et Rattanakiri) ayant une origine commune avec les Khmers de la plaine sont
appelés les Khmers Loeu (Khmers de la haute gion).Entre 1866 et 1875 le Roi Norodom
entreprend la consolidation de l'autorité khmère dans le Haut Chhlong et en 1884un Gouverneur
khmer s'installe à Srè Khtum. En cette seconde moitié du19ème siècle, les Siamois continuent
leurs exactions dans la région nord (Rattanakiri).
L'histoire du recul siamois est l'un des épisodes les plus extraordinaires de cette période. Un chef
militaire siamois commandant une troupe imposante de 370 Laotiens, 22 Siamois, 14 éléphants,
s'installe à Bandon (à 30 kilomètres à l'Est de l'actuelle frontière de Mondolkiri) en février 1890.
Le capitaine français Cupet, accompagné d'un soldat cambodgien est envoyé pour lui barrer la
route. Avec hauteur, il enjoint au Siamois de rebrousser chemin, et le Siamois obéit, se replie
vers Stung Trèng harcelé par les villages qui n'ont pas oublié la brutalisiamoise, et en 1893
repasse définitivement le Mékong.
Cette solidarité franco-khmère a continué particulièrement pendant la première guerre mondiale.
A l’appel de volontaires pour aller combattre en France, des proclamations sont affichées dans
tous les villages. Les moines sont mis à contribution comme lors des opérations de recrutement
ordinaire et le roi lui-même se déplace dans les circonscriptions promettant distinctions
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honorifiques, fonction dans l’administration et au palais royal, à ceux qui accompliront des
actions d’éclat. Après trois mois, 1.008 hommes sont reconnus aptes au service armée. Un
monument aux morts pour la France à Phnom Penh fut inauguré en février 1925.
Il faut rappeler également que le Lieutenant-colonel Bernard, président de 1a Commission
française de délimitation de la frontière entre le Cambodge et le Siam a fait d’énormes efforts
pour l’intérêt du Cambodge. D’après son rapport du 12 janvier 1907, il a parcouru depuis
Siemreap toute la zone frontière, la région entièrement dépourvue de moyens de communications
réguliers qui s'étend au Sud des Dangrek.
Quant au commandant Etienne Lunet de La Jonquière, il a fait dès 1901 l’inventaire descriptif
des monuments du Cambodge. Dans son rapport sommaire sur une mission archéologique, 1907-
1908, il écrit : «L’ancien royaume cambodgien est actuellement divisé entre deux puissances : le
Cambodge, placé sous le protectorat de la France, et le Siam ».
3-Rôle de l’administration française
Dans la seconde moitié du 19ème siècle, les administrateurs français, en dehors de leurs tâches
administratives, ont déployé de grands efforts pour une meilleure compréhension du passé du
Cambodge en vue de la « conquête des cœurs et des esprits ». Etant considéré comme un bon
administrateur en pays de protectorat, Adhémar Leclère, est surtout connu pour sa contribution à
la connaissance de la société khmère qu’il côtoya pendant plus d’une vingtaine d’année de 1886
à 1910.
En publiant les Codes cambodgiens en 1898, Adhémar Leclère écrit que ses chefs, M. Doumer,
Gouverneur général de l’Indochine française, qui a bien voulu prendre cette publication sous ses
auspices, M. Ducos, Résident supérieur de la République française au Cambodge, qui s’y est
intéressé, - et ses collègues qui « sont chargés de relever ce peuple, de le galvaniser et de
l’avancer dans la voie de la civilisation ». Adhémar Leclère a tenté ses efforts « pour faire de
mieux en mieux connaître une nation qui fut un grand peuple et qui mérite notre admiration pour
ce qu’elle a fait dans le passé, et notre aide pour ce qu’elle est encore capable de faire dans
l’avenir si nous savons la bien gouverner, la bien diriger après l’avoir bien comprise ».
Dans la première moitié du 20ème siècle, les efforts déployés par les administrateurs français
portent sur l’établissement des institutions publiques pour promouvoir le développement du
Cambodge dans plusieurs domaines. L’Institut bouddhique de Phnom Penh fut inauguré en mai
1930 en présence du roi Sisowath Monivong, du Résident supérieur Lavit et du Gouverneur
général Pierre Pasquier. Ce dernier adressa alors ses souhaits : « A l’Institut bouddhique, fleur de
sagesse d’Asie, épanouie sous un regard de France, son fondateur reconnaissant ».
Le Résident supérieur Thibaudeau, lors de l’inauguration de la nouvelle Ecole de Russey Kèo le
21 octobre 1939, souligna ainsi dans son discours : « La race qui a élevé à la force du muscle les
montagnes de pierre d’Angkor, et qui, de nos jours, continue à cultiver vaillamment de ses
mains les rizières et les champs de maïs du Royaume, a démontré qu’elle est aussi capable d’un
effort physique que toute autre race ».
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