La philosophie de l`histoire - Le Prix des Lecteurs

Le Livre de Poche vous propose quelques extraits de
LA PHILOSOPHIE DE LHISTOIRE
G. W. F. HEGEL
ÉDITION RÉALISÉE SOUS LA DIRECTION
DE MYRIAM BIENENSTOCK
TRADUCTION FRANÇAISE DE MYRIAM BIENENSTOCK, CHRISTOPHE
BOUTON, JEAN-MICHEL BUÉE, GILLES MARMASSE ET DAVID WITTMANN
APPAREIL CRITIQUE DE NORBERT WASZEK
La Pochothèque
LE LIVRE DE POCHE
SOMMAIRE
PRÉSENTATION, par Myriam Bienenstock ................................. 9
LES INTRODUCTIONS MANUSCRITES DE HEGEL ........................... 37
En 1822 (texte revu en 1828) ............................................... 39
En 1830-1831 .......................................................................... 52
TRANSCRIPTION DU COURS DE 1822-1823 .................................. 111
Introduction ........................................................................... 113
Le parcours de l’histoire mondiale ....................................... 206
Le monde oriental ............................................................. 206
La Chine ......................................................................... 208
L’Inde .............................................................................. 242
La Perse ........................................................................... 298
L’Égypte .......................................................................... 327
Le monde grec ................................................................... 366
Le monde romain .............................................................. 429
Le monde germanique ...................................................... 469
DOSSIER. ....................................................................................... 539
I. Textes complémentaires de Hegel. Sources et modèles.. 541
Dans l’Antiquité ................................................................. 541
Dans la Bible ...................................................................... 542
Histoire moderne ............................................................... 544
Hume .............................................................................. 544
Schiller ............................................................................ 546
Herder et Montesquieu ................................................. 547
Principes de la philosophie du droit.
L’histoire mondiale ........................................................ 550
À propos de la France et de la Révolution française
(cours de 1831) ............................................................... 559
Sur la philosophie de la religion (cours de 1831 : extrait) 565
II. Débats d’époque ................................................................ 572
Lessing : L’Éducation du genre humain (1780 ; extraits) 572
Kant : Idée d’une histoire universelle (1784 ; extraits) .... 575
Fichte : La Destination de l’homme (1800 ; extraits) ...... 582
Schelling : Système de l’idéalisme transcendantal
(1800 ; extrait) ............................................................... 589
Doctrine de Saint-Simon. Exposition (1829 ; extrait) ......... 592
III. Trois grands critiques au XIXe siècle .............................. 593
Kierkegaard : Post-scriptum aux Miettes philosophiques (1846)
.............................................................................. 593
Marx : L’Idéologie allemande (1845 ; extraits) ................. 600
Introduction, Critique de l’économie politique (1859)… 605
Nietzsche : Seconde Considération inactuelle
(1874 ; extrait) ............................................................... 607
IV. Quelques positions contemporaines .............................. 611
Joachim Ritter : Hegel et la Révolution française ([1957], 1970)
............................................................................... 611
Norbert Waszek : Histoire, société civile et processus de civilisation
(1998) ...................................................... 614
Christophe Bouton : Le Procès de l’histoire (2004) ............. 616
Bernard Bourgeois : Hegel et la déraison historique (1989) .. 618
APPAREIL CRITIQUE ...................................................................... 621
Liste des abréviations ........................................................ 623
Notes ................................................................................... 631
Index nominum ................................................................. 751
PRÉSENTATION (Extraits)
par Myriam Bienenstock
La philosophie de l’histoire qui fut, longtemps, le grand titre de gloire de
Hegel, semble en être devenue aujourd’hui le talon d’Achille. On se
défend de pratiquer une telle matière, on la dissimule, on traite d’autre
chose, même lorsqu’il s’agit d’étudier Hegel et pourtant nous savons
bien qu’en fin de compte cet auteur est jugé, dans une large mesure, en
fonction de cette discipline : si la philosophie de l’histoire est rejetée, la
philosophie de Hegel l’est elle aussi. Lorsque, au contraire, cette
discipline intéresse, c’est d’abord à Hegel que l’on pense, tant il est vrai
que, aujourd’hui, la philosophie de l’histoire elle-même est presque
identifiée, en tant que discipline, à Hegel. Force est bien de constater
aussi que, envers et par-delà toutes les critiques, elle continue à exister :
elle suscite, encore et toujours, de l’intérêt, en tout cas dans le grand
public. Hegel n’eut-il pas raison d’affirmer qu’elle ne disparaîtrait
jamais ? Si philosopher, c’est penser, penser avec la raison, alors, disait-
il par exemple en 1830-1831, dans l’introduction au tout dernier cours
qu’il donna sur le sujet (infra, p. 52) –, philosopher sur l’histoire, c’est
tout simplement considérer celle-ci par la pensée ; et cela, aucun être
humain ne peut cesser de le faire, si ce n’est au risque de perdre ce qui
fait de lui, justement, un humain. Le spectacle de l’histoire, qui se
renouvelle sans cesse les guerres et leur alternance de victoires
éclatantes et de défaites retentissantes, mais aussi le déchaînement des
passions humaines qui animent les unes comme les autres , provoque la
pensée, donc la philosophie. En ce sens très général, mais fondamental,
la philosophie de l’histoire se poursuivra, sans doute.
Mais telle est justement la thèse qui suscite la réticence, voire
l’opposition des lecteurs : dans la philosophie de l’histoire, il s’agit de
considérer l’histoire par la pensée, par la raison. Hegel lui-même savait
déjà combien cette prétention suscite de réticences. Voilà pourquoi, dans
l’introduction à ses cours sur la philosophie de l’histoire, il insiste :
Pour connaître la raison dans l’histoire, ou bien pour connaître rationnellement
l’histoire, il faut, à dire vrai, apporter la raison avec soi, car la façon dont on
considère l’histoire et le monde est aussi la façon dont elle vous considère…
(infra, p. 127).
Si vous considérez le monde rationnellement, lui aussi vous considérera
rationnellement, il y a là une détermination réciproque. (infra, p. 56).
Celui qui aborde l’histoire avec la raison, l’histoire le lui rend : la phrase
revient, presque comme un leitmotiv, tout au long des cours de Hegel
sur ce sujet. Mais c’est dans la toute première version, celle de 1822-
1823, que sa signification apparaît le plus clairement ; car en 1822-1823
Hegel explique non pas seulement ce qu’il veut dire, mais aussi contre
qui contre quels adversaires, et dans quel contexte il le dit :
Récemment, après que l’on eut trouvé la connaissance du monde et l’expérience
de la vérité très difficiles, comme on souhaitait avoir des idées, on s’est tourné
vers l’histoire. De l’histoire, on s’est promis toutes sortes d’éclaircissements sur
la nature de l’esprit, sur la nature du droit, etc. Mais elle est vide ; il n’y a rien à
apprendre d’elle si l’on n’apporte pas avec soi la raison et l’esprit (infra, p. 127).
Elle est vide : cela, Hegel le disait d’abord à ceux d’entre ses
contemporains qui en appelaient à un « esprit du peuple » enraciné dans
le passé, donc à l’histoire, comme à la source de toute légitimité et, en
cette période de montée rapide du romantisme politique et du
nationalisme que fut en Allemagne le premier quart du XIXe siècle, ceux-
ci étaient fort nombreux. Nous nous trouvons ici aux origines du
nationalisme allemand avec toutes ses ambiguïtés et les menaces qu’il
recèle. Il se renforça surtout après la défaite de la Prusse à Iéna et
Auerstaedt (en octobre 1806), qui suscita beaucoup de ressentiment
contre Napoléon. Nombreux furent ceux qui, alors, s’engagèrent pour le
nationalisme : des universitaires (Fichte, Luden), mais aussi des poètes
et des écrivains (Arndt, Körner, Eichendorff) et surtout des idéologues,
comme Jahn, le père d’une pratique sportive paramilitaire très populaire
et d’une propagande incendiaire, gallophage et raciste.
L’exaltation des anciens Germains – souvent dénommée Deutschtümelei
se fait alors plus prononcée. Elle devient nationaliste, avec des
consonances xénophobes et antisémites ; préfigurant déjà sur bien des
points les positions et les accents mêmes qu’elle prendra, un siècle plus
tard, dans l’idéologie national-socialiste. Entre cette idéologie-là et la
philosophie de Hegel, on ne peut trouver aucun lien ni aucune affini:
dans toute son oeuvre et dans tous ses cours, Hegel s’opposa toujours de
façon décidée et sans ambiguïté aucune aux partisans de la
Deutschtümelei 1. En cette matière, il ne changea ni n’évolua jamais : on
ne trouve chez lui aucune tentative de réhabilitation des anciens
Germains, ni bien sûr des anciens Celtes. Ceux-ci comme ceux-là sont
pour lui des « Barbares » ; et de la notion et du qualificatif de «
Barbares », Hegel fait un usage extrêmement péjoratif, celui-là même
qui était commun à son époque et qui l’est d’ailleurs aujourd’hui encore.
Chez lui, l’usage est fondamentalement héri d’Aristote. Des «
Barbares », c’est-à-dire de ceux qui ne sont pas Grecs, Aristote disait en
effet, par exemple dans sa Politique, que, n’étant pas citoyens, ils sont
assimilables à des esclaves et dépourvus de toutes les qualités propres
aux membres d’une communauté politique dépourvus même de logos,
c’est-à-dire incapables d’user du langage mais aussi de la raison 2.
Hegel, lui aussi, assimile régulièrement le « Barbare » à celui qui n’est
pas cultivé, celui qui ne sait pas même lire ou penser. Sur cette question,
il cite Voltaire : comme Voltaire, il rejette explicitement l’examen
constamment invoqué, à son époque, comme référence des « origines »
des nations, qu’elles soient chrétiennes, barbares ou romaines. Il pense
sans aucun doute, comme Voltaire 3, que « toutes les origines des
nations sont l’obscurité même » ; et que, ces origines étant par leur
nature même condamnées à rester obscures, ce serait perdre son temps
que de chercher à les clarifier. Dans tous les écrits de Hegel, Hegel ne
trouve pratiquement aucun texte consacré à cette question.
Lorsque, dans ses cours sur la philosophie de l’histoire, Hegel traite du
« monde chrétien germanique », il note plutôt que, dans ce cas comme
dans bien d’autres, c’est la « migration des peuples » (Völkerwanderung)
qui en fait le début (infra, p. 474).
1 / 14 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !