Décalage Doppler des ondes de spin induit par un courant électrique

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Décalage Dopplerdesondes
de spin induitpar uncourant
électrique
Article proposé par:
MatthieuBailleul,bailleul@ipcms.u-strasbg.fr
V.Vlaminck ,vlaminckv@yahoo.fr
Institut de Physique etChimie desMatériaux de Strasbourg, UMR 7504, CNRS/Univ.Strasbourg, Strasbourg
Danslestaux ferromagnétiques, cesontlesmêmesélectronsquiconduisentle courantélectrique etportent
le magnétisme. Nous crivonsiciune exrience qui illustre directementcette notion de magnétisme dit
« itinérant». Lexrienceconsisteàmesurerlapropagation de vibrationsmagnétiques(lesondesde spin) à
laide de signaux hyperfréquencescirculantdansdesconducteurs submicrométriques.Lorsqu’uncourant
électriquetraverse le métal ferromagnétique,on observeun décalage de lafréquence desondesde spin qui
s’identifie àun effetDopplerinduitparle mouvementdesélectrons.Ceteffet s’interprète naturellementdans
le cadre du transfert de spin,un desdomainesphare de lélectronique de spin actuelle.
électroniqueconventionnelle utilise deschamps
électriquespour manipulerlesélectronsquisont
transportés,ralentis, accélérésouaccumusdans
desmatériaux plus oumoinsconducteurs.Danscecas,
cest la charge de lélectron quicode linformation. Or,
depuislesbuts de lacanique quantique,on saitque
lélectron possède une autrecaractéristique qui est son
momentcinétique intrinsèqueappelé spin. Ce degré de
liberté interne aplusieurs caractéristiquesimportantes:
(i )saprojection sur unaxe donné ne peut prendre que
deux valeurs :+h /2, auquel cason parle de spin-up,ou
h /2, auquel cason parle de spin-down;( ii)ce moment
cinétique est assocàun momentmagnétique, ce qui
permetde voirle spin de lélectron comme une petite
aiguille de boussole susceptible dêtre manipulée simple-
mentpar unchamp magnétique extérieur.Tout lenjeude
lélectronique de spin,une discipline née il yaune ving-
taine dannées,est l’utilisation du spin en supplémentde
la charge pour coderlinformation.
Le magnétisme itinérant
Lesmatériaux de base de lélectronique de spin sont
lestaux ferromagnétiques,principalementle fer,le
cobalt,le nickel etleurs alliages.Lesproprtésélectroni-
quesde cesmatériaux sontcritesparlathéorie des
bandes:lesélectrons serépartissent sur un quasi-conti-
nuum détats appelésorbitalesformantdesbandes
dénergie, à raison d’un électron parétaten vertu duprin-
cipe dexclusion de Pauli. Cesétats sont remplisjusqu’à
une énergie EFdite énergie de Fermi. Danslesmatériaux
non magnétiques,on alesmêmesbandesdénergie pour
lesétats de spin up etdown. Parconséquent,ladensité
délectrons spin-up etdown est lamême etle moment
magnétiquerésultantest nul. Alinverse,dans un métal
ferromagnétique,larépulsion électrostatique entre élec-
trons tend àfavoriser un décalage en énergie Δentre les
états spin-up et spin-down 1 .Il en résulteun moment
magnétique global important.Ce décalage peut se
comprendre de lafon suivante:lorsque deux électrons
de spinsopposésoccupentdesétats orbitaux identiques,
ils sontprochesdanslespace, ce qui provoqueune forte
répulsion électrostatique. Lestaux ferromagnétiques
sontdesmatériaux danslesquelscetterépulsion est suffi-
sammentforte pour quelesystème préfère décaler ses
bandesdénergie de manièreàréduire le nombre délec-
tronsde spinsopposés setrouvantdansle même état
orbital. Puisque lesétats de lathéorie desbandes sontdes
états quise propagentdans tout le matériau, cetype de
magnétisme est dititinérant.
Sicette image qualitative est assez simple,le détail
lest beaucoup moins:lesinteractionsentre électrons
sontimpossiblesàtraiterexactementpuisqu’ellesdépen-
dentdesétats électroniquesoccusquiàleur tour
dépendentde linteraction entre électronsDescalculs
nuriquesde théorie desbandesontanmoinspermis
de reproduire laplupart desproprtésdestaux ferro-
magnétiques,sibien que le modèle dumagnétisme itiné-
L
1. Onadopterala convention suivante:les spin-up (resp. spin-down)
aussiappelésmajoritaires(resp. minoritaires)sontceux dontle
momentmagnétique est parallèle (resp. antiparallèle) aumoment
magnétique global dumatériau.
Décalage Dopplerdesondesde spin induitpar uncourantélectrique
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rantest relativementbien admisdepuis une trentaine
dannées.Cependantdansle passéce modèle étaiten
concurrenceavecun modèle localisé,danslequel lesélec-
trons responsablesdumagnétisme sont supposéspeu
mobiles(localisation sous leffetde larépulsion électrosta-
tique entre électrons) etlesélectrons responsablesde la
conductions sont supposéspeumagnétiques.Dansle
cadre de cettecontroverse,lesphysiciensdu solide recher-
chaientdesexriences susceptiblesde faire pencherla
balance dans unsensoudanslautre.
AinsiPascalLedereretDouglasMills,dulaboratoire
de physique des solidesà Orsay, avaientproposé en 1966
d’utiliserlesondes relativesau système magnétique,
appeléesondesde spin (voirencadré1 ),etdétudier
linfluence qu’uncourantélectrique pouvaitavoir sur
elles.Dans un modèle entrementlocalisé dumagné-
tisme,leffetdevraitêtre extrêmementpetit.Alinverse,
dans un modèle itinérant,le mouvementdesélectrons
assocaucourantélectrique devrait setraduire par un
effetDopplerpour lesondesde spin, cest-à-direun déca-
lage de leur fréquence.
Pour expliquerceteffet, considérons un modèle sim-
ple du transport électrique danslequel le système délec-
tronsest assimilé àun gazhomogène. Dansce modèle,
lapplication d’unchamp électriquesur le matériau setra-
duitpar un déplacementde tous lesélectronsàlamême
vitesse. Onsupposeraégalementquecettevitesse est la
même pour lesélectrons spin-up et spin-down. Cette
vitesse,ditevitesse de dérives’écritoùJest
ladensité ducourantélectrique,nest ladensité électroni-
que eteest la charge de lélectron. Considérons une
onde de spin de vecteur donde kportée parcesélectrons
(oùλest lalongueur donde de londe de spin).
Dansle référentiel lié aux électrons, cette onde de spin
aune pulsation ω(oùfest lafréquence) donnée
parlarelation de dispersion de londe (voir
encadré1 ). Supposonsque lon détectecette onde dansle
référentiel dulaboratoire (voirlafigure2). Cette onde
seramesurée avecune pulsation ,où
.(1)
s’interprète naturellementcomme le décalage
Dopplerinduitparle mouvementdesélectrons2 .Ceteffet
est tout àfaitanalogueàleffetDoppler relatif aux ondes
sonoresoulumineuses.
LeffetDopplerest en fait une méthode trèsgénérale
pour terminer une vitesseàdistance (radar routier,
échographie Doppler…). Le mesurer sur desondesde
spin pourraitdoncpermettre de sonderle mouvement
des spinsélectroniquesdansle métal ferromagnétique.
Nous allonsmaintenantcrire lexrience qui nous a
permisdobserverceteffet.Ensuite nous réinterpréterons
le décalage Dopplerdondesde spin comme une manifes-
tation élémentaire duphénomène de transfert de spin
que nous définironsplus loin.
Observation ducalage
Dopplerdesondesde spin
Afin de rendre le décalage en fréquencesuffisamment
grand pour être mesurable,il nous faut travailler sur des
ondesde spin présentantdes vecteurs donde ksuffisam-
mentélevés, cest-à-dire deslongueurs dondesλsuffisam-
mentcourtes.Pour cela, nous avons utilisé latechnique de
spectroscopie dondesde spin propagatives(voirencadré2 )
en miniaturisantlesantennesàondesde spin. Un échan-
tillon typique est représentésur lafigure3 .Onydistingue
unruban horizontalconstitué d’unalliage de 80% de nic-
kel et 20 % de ferappelé permalloy.Ceruban est relié àdes
pistes servantàinjecterle courantélectriquecontinuI dc
pour mettre en mouvementlesélectronsdupermalloy.Au
dessus de ceruban,on distingue deux serpentinsquiser-
Figure 1 – Densité détats électroniquesen fonction de lénergie pour (a)un
tal non magnétique (b)un métal ferromagnétique. Onareprésenté le cas
simplifié d’une seule bande parétatde spin. Δest le décalage en énergie
entre lesbandes spin-up et spin-down.
vJen
d=/()
k=2/
πλ
e
ωπ
=2f
ωω
=()k
e
=+
ωω ω
Δ
Figure2Référentiels utiliséspour crire leffetDopplerdonde de spin.
Leréférentiel est lié au réseaudutal ferromagnétiquesupposé
immobile dansle laboratoire. Leréférentiel est lié aux électronsquisont
misen mouvementàlavitessev dpar unchamp électrique. Lesystème
délectronsest le siège d’une onde de spin (précession desmoments magné-
tiquesdesélectrons)àlapulsation ω .
2.On peut facilement retrouverlarelation (1) en écrivantle signal
donde de spin dansle référentiel puisen
effectuantle changementde variable pour passerdans
le référentiel .
e
e
Δ
ω
:(,)(–)
mxt eiwt kx
=+xxvt
d
e
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Décalage Dopplerdesondesde spin induitpar uncourantélectrique
ventdantennespour lémission etlaréception desondes
de spin quise propagentle long du ruban. Chaqueantenne
est constituée d’unconducteur central pour larrivée du
couranthyperfréquencei ( ω ) etdeux conducteurs latéraux
pour le retour.Ce motif est replié cinq fois sur lui-même de
manièreàrendre le courantexcitateur quasimentriodi-
que dansladirection du ruban. Ceci permetde définirpré-
cisémentlalongueur donde de londe de spin (en
loccurrenceλ /2 =0,4µ m , correspondantàlécartement
entre deux pistesadjacentes,voirlencadré2). Aune extré-
mité de lantenne lapistecentrale etlespisteslatérales sont
court-circuitées.Lautre extrémité est reliée àdespistes
plus larges,elles-mêmesconnectéesàun dispositif de
mesure hyperfréquenceappelé analyseur de réseaux vecto-
riel. Lensemble est placé dans un électro-aimantfour-
nissant unchamp magnétiqueB 0de lordre de 1 Tesla
orienté perpendiculairementau ruban de permalloy.Lana-
lyseur de réseaux permetdinjecter uncourantde
Lesondesde spin
Encadré 1
Lesmatériaux magnétiques sontle siège
de vibrations un peuparticulièresappelées
ondesde spin. Cesondes sontdesexcitations
magnétiquesélémentairesquise décrivent
comme desondesplanesde précession de la
direction de laimantation.
Considérons un matériaumagnétique
aimanté de manièreuniforme en luiappli-
quant unchamp magnétique extérieur .Si
on écarte laimantation de cette position
déquilibre,elle entame un mouvementcircu-
laireautour duchamp magnétique, comme le
faitlaxe d’une toupie miseenrotation sur
elle-même quand on lécarte de laverticale. Ce
mouvement, appelé précession, a une fré-
quencebien précisef 0qui dépend duchamp
(typiquementpour des
champsde lordre duTesla),il est critpar
léquation de Landau-Lifshitz:
(4)
oùγest le rapport gyromagnétique et
est unchamp magnétique effectif qui
comprend B 0maiségalement touteslesinter-
actionsmagnétiquesactivesdansle système.
<
B 0
<
B 0
f0160=,GHz
=
<<<
M
tMH
eff
γµ
0
µ
0
<
Heff
Imaginonsmaintenantque laperturbation de laiman-
tation ne soitplus uniforme sur tout léchantillon mais soit
locale :on écarteseulementen un pointde lespace laiman-
tation de saposition déquilibre. Sous leffetdesinteractions
magnétiques, cette perturbation se propage de proche en
proche. Cette propagation prend laforme d’une onde plane
appelée onde de spin qui est une solution propre de léqua-
tion (4). On définit une relation de dispersion qui lie lapulsa-
tion de londe ()àson vecteur donde (où
λest lalongueur donde). Cetterelation de dispersion reflète
lesinteractionsmagnétiquesdansle matériau.Avecteur
donde nul,on retrouve le phénomène de précession uni-
forme àlafréquencef 0.Apetit vecteur donde (cest-à-direà
grande longueur donde),ladispersion est régie parlinter-
action àlongue portée de lamagnétostatique (chaque point
dumatériauagitcomme un dipôle qui engendreunchamp
sur lesautrespoints de léchantillon). Agrand vecteur donde
enfin,ladispersion est dominée parlinteraction déchange
de lacanique quantique,quitend àuniformiserladirec-
tion de laimantation sur quelquesdistancesatomiques.
Cesdifférentesondesde spin peuventêtrecrééesde
plusieurs fons.En premierlieuparlesfluctuations
thermiques: à une températureT,lesdifférents modes
dondesde spin sontpeuplésjusqu’àune énergie seuil
égale àkBT(oùkBest la constantedeBoltzmann). Ces
ondesde spin thermiques(souventappeléesmagnons,par
analogie aveclesphononscrivantles vibrationsdu
réseau)sont responsablesd’une diminution de laimanta-
tion àsaturation dumatériau.En deuxième lieu,on peut
sonderlesondesde spin en étudiantleur interaction avec
desparticules:photons,électronsouneutrons.En mesu-
rantcombien de quantité de mouvementetdénergie sont
transréeslorsquecesparticules sontdiffuséespar une
onde de spin,on peut déduire ladispersion desondesde
spin. Enfin,on peut exciterdesondesde spin grâceàun
champ magnétique oscillantdansle tempsetriodique
danslespaceaveclesbonnesfréquence etlongueur
donde. Avecteur donde nul,on parle de résonance ferro-
magnétique etàvecteur donde non nul,on parle de spec-
troscopie dondesde spin.
ωπ
=2f
k=2/
πλ
FigureE1 – (a)Instantané de ladistribution de laimantation dans une onde de spin. (b)Relation
de dispersion typique pour lesondesde spin. f 0 (B 0 ) est lafréquence de larésonanceuniforme
( k=0). Onareprésenté de manièreschématique linteraction magnétostatique (en bleu) etlinte-
raction déchange (en rouge) qui dominentladispersion respectivementà basetàhaut vecteur
donde. Pour donner un ordre de grandeur,on a converti léchelle de fréquence en énergie eten
température (échellesde gauche).
Décalage Dopplerdesondesde spin induitpar uncourantélectrique
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fréquencevariable (quelquesGHz) dans une antenne etde
mesurerle signal hyperfréquencetransmisàlautre
antenne. On peut ainsi extraire lesinductancesmutuelles
entreantennes( L 21etL 12 ) quicaractérisentlapropagation
desondesde spin (voirencadré2). Touteslesmesures sont
réaliséesàtempératureambiante.
La figure 4amontre les signaux de propagation dondes
de spin mesuréspour uncourantélectriquecontinu
circulantdansle ruban. La courberouge (resp.
bleue) est le signal dinductance mutuelle correspondantà
une propagation de lantenne 2 vers lantenne 1 (resp. de
lantenne 1 vers lantenne 2). Onreconnaîtclairement un
calage de fréquence denviron 18 MHz:le signalcorres-
pondantàdesondesde spin se propageantdansle même
sensque le flux délectrons(cest-à-direàlencontre ducou-
rantélectrique,serappelerque la charge de lélectron est
négative) est àplus haute fréquence que le signalcorres-
pondantàdesondesde spin se propageantàlencontre du
flux délectrons.Cettetendanceseretrouve lorsqu’on
Spectroscopie dondesde spin propagatives
Encadré 2
La technique de spectroscopie donde
de spin propagativeaété largementve-
loppée danslesannées1970.Alépoque,
lobjectif étaitd’utiliserlesondesde spin
circulantdansdesmatériaux magnéti-
quesisolants pour traiterle signal hyper-
fréquence danslesapplications radars.
Danscettetechnique,on utilise des
lignesconductricesplacéesàproximité
d’un film ferromagnétique. Ceslignes
vontagircomme des«antennes»à
ondesde spin :en faisantpasser uncou-
ranthyperfréquencei (
ω
) dans une de ces
antennes,on crée unchamp magnétique
(loi dAmpère) h 1( ω ). Cechamp magnéti-
que entraîne localement une perturbation
de laimantation duferromagnétique.
Cette perturbation se propage de proche
en proche sous laforme d’une onde de
spin m ( ω ,k ). Loscillation de laimanta-
tion danscette onde de spin induitàson
tour un flux magnétique oscillant
danslesantennes, ce qui entraîne lappa-
rition d’une différence de potentiel V ( ω )aux bornesde cel-
les-ci (loi de Faraday). On mesurece flux magnétiqueàla
fois sur lantenne démission et sur ladeuxième antenne.
Dansle cas représentésur lafigureE2 , chaqueantenne
est constituée de deux pisteshyperfréquences,une pour
larrivée et une pour le retour ducouranthyperfréquence.
Chaque piste produit unchamp magnétique orthoradial qui
circule autour de lapiste,le sensde circulation étantter-
miné parle signe ducourant.Ainsi, à un instantdonné dans
le cycle hyperfréquence,on aunchamp positif sous lapiste
de gauche etnégatif sous celle de droite. Lesondesde spin
générées sontcellesdontle profil spatials’adapteà cette exci-
tation,le couplage optimalcorrespondantàune demi-
longueur donde de londe de spin égale àlécartemententre
lesdeux pistes( figureE2b ). De fon générale,le vecteur
donde desondesde spin émisesest toujours terminé par
laforme de lantenne excitatrice 1.Ainsi,dansle dispositif de
lafigure3 ,lesantennesàondesde spin sontconstituées
d’une succession de 15 pistesportant uncourantorienté
alternativementdanslesdeux sens.On obtientainsiune
excitation quasimentriodique danslespace, ce qui per-
metde définirprécisémentle vecteur donde.
Dansle principe,lexrience est similaireàune mesure
magnétique inductivestandard( figureE2c ):tout se passe
comme sionavaitdeux bobines(lesantennes) enroulées
autour d’uncœur magnétique (le film ferromagnétique). La
fonction de réponse que lon utiliseraseralinductance,
cest-à-dire le rapport entre le flux magnétique etle courant.
Lauto-inductance de lantenne démission ()
nous renseigne sur lafon dontlesondesde spin sont
excitées ; elle présenteun picde résonancecentrésur lapul-
sation de cesondesde spin ω ( k )( figureE2d ). Linductance
mutuelle desdeux antennes()nous renseigne
sur lapropagation de cesondesde spin ;en effet,lesondes
de spin arrivent sur lantenne de réception avecuncertain
retardtemporel. Dansnotre exrience,qui est réalisée en
régime harmonique en balayantlafréquence, ceretardtem-
porel setraduitpar une modulation sinusoïdale dontla
riode en fréquence est linverse du retard( figureE2d ).
Cest cecomportementoscillantqui permetde caractériser
lapropagation de londe de spin etdansnotrecasdextraire
le décalage Dopplerdesondesde spin ( figure 4a,b).
1. On peut montrerque lamplitude du signal donde de spin àun
vecteur donde kest proportionnelle aucarré de latransformée de
Fourierde ladistribution spatiale ducourant.
Φ ()
ω
ik
E ()
Li
11 11
/
Li
2121
/
FigureE2(a)Schémade principe de latechnique de spectroscopie dondesde spin propagatives
(voirlesnotationsdansle texte.) (b)Profil spatial duchamp magnétiqueh 1créé parlantenne 1 et
de laimantation hyperfréquencemde londe de spin qui est excitée le plus efficacement(seulesles
composantes selon xontétéreprésentées). (c)Enroulementde deux bobinesautour d’un noyau
magnétique. (d) Fonctionsde réponsetypiquesmesuréesen spectroscopie dondesde spin
propagatives: auto-inductancesur lantenne 1 ( L 11) etinductance mutuelle de lantenne 1 à
lantenne 2( L 21 ) (par souci de simplification,on nareprésenté que lapartie imaginaire de ces
deux quantités).
ImA
dc=+6
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Décalage Dopplerdesondesde spin induitpar uncourantélectrique
change le signe ducourantélectrique(figure 4b): cest
maintenantla courberouge qui est calée de 18,5MHz
plus haut en fréquence que la courbebleue. Ce décalage
constitue lamanifestation exrimentale de leffetDoppler
induitpar uncourantélectrique. Nous avonspulobserver
pour différentes valeurs ducourantélectrique,pour diffé-
rentes taillesde ruban etpour différentes taillesdantennes
(cest-à-dire différents vecteurs donde de londe de spin).
Onareporté lensemble de ces résultats sur lafigure 4c .
Conformémentàlarelation (1),le rapport Δ f/kest propor-
tionnel àladensité de courantélectriqueJ .Ilreste mainte-
nantàinterpréterlasignification précise ducoefficientde
proportionnalité. Pour cela, nous allons retourneràlathéo-
rie de lélectronique de spin. Nous crironsdabord le
modèle du transport électrique ditàdeux courants avant
dintroduire le conceptde transfert de spin etde lappliquer
aux ondesde spin.
Une interprétation en terme
de transport polarisé en spin
Comme évoquéaupremierparagraphe, à énergie
donnée,lesétats électroniquesd’un métal ferromagnéti-
quesontdifférents entrespin-up et spin-down. Cecise
traduitpar uncourantélectrique différententre lesdeux
populationsde spin. Cette idée est le fondementdu
modèle àdeux courants (Mott 1936),quisuppose que les
deux populationsde spin interagissent suffisammentpeu
pour que lon puisse définirdeux canaux de conduction
(voirlafigure 5a ). Chacun de cescanaux est caractérisé
par une résistivité etquirend compte desproces-
sus de diffusionsélectroniques.En effet,daprèslathéo-
rie desbandes,un électron est diffusé d’un étatorbital
vers unautre lorsqu’il rencontreun défaut de lariodi-
cité ducristal. Parmi ces sourcesde diffusion on peut
citerlesimpuretés,lesphonons(cest-à-dire les
vibrationsdu réseauquitendentàdéplacerlesions
ducristal par rapport àleur position déquilibre)
ouencoreune interfacerugueuse. Lecourantélec-
triqueseradautantplus petit(larésistivité
dautantplus grande) quecesprocessus de diffu-
sion serontfréquents.Dans un métal ferromagné-
tique,les résistivitéset sont trèsdifférentes
(le plus souvent). Le matériauagitdonc
comme un filtreàspin. Lidée phare de lélectroni-
que de spin aété de combinerdeux couchesde
taux ferromagnétiques(cest-à-dire deux filtres)
pour former uncomposant.Cest le principe de la
magnéto-résistance géante,couverteàlafin des
années1980parAlbert Fert etPeterGnberg,et
maintenantcouramment utilisée dansles têtesde
lecture desdisquesdurs.
Ilyaune dizaine dannées,les théoriciensJohn
Slonczewski etLuc Bergerontprédit un mécanisme
de transfert de spin constituanten quelquesorte la
réciproque duphénomène de magnéto-résistance.
Puisqu’un métal ferromagnétique filtre le spin,un
courantélectrique porte doncun flux de momentmagnéti-
que (on parle de courantde spin). Sil est suffisamment
important, ce flux peut entraîner un mouvementde
laimantation (laimantation,notée se définitcomme la
densitévolumique de momentmagnétique dansle maté-
riau,sanorme M sappelée aimantation àsaturation étant
une constante dumatériau). Ce phénomène apuêtre
observé dansdesnanopiliers comprenantplusieurs cou-
chesde métaux ferromagnétiques.Dansces systèmes,un
courantélectriquesuffisammentfort peut retourner
laimantation d’une descouches.Ce phénomène est parti-
culièrementprometteur dupointde vuetechnologique
puisqu’il donne lapossibilité décrire linformation sur des
supports magnétiquesàlaide d’une simple commande
électrique. Ils’avère que le transfert de spin est un phéno-
mène général quise produitégalementdansle volume
d’un métal ferromagnétique. Considérons un matériaufer-
romagnétique présentant une configuration daimantation
variantcontinûmentdanslespace (sur une échelle
largement surieureaux distancesinter-atomiques).
Lorsqu’une densitédecourantélectriqueJcircule àtravers
une telle configuration daimantation,une certaine quan-
tité de momentmagnétique est transrée entrezones
adjacentes, ce quisetraduitpar un mouvementde laiman-
tation3 .Pour quantifierceteffet,effectuons unbilan de
momentmagnétique pour un élémentde volume de sec-
tion Aetde longueur dxetpour un intervalle de tempsdt
(voirlafigure 5b). Onsupposeraque les spinsdesélectrons
portésparle courant sontalignésaveclaimantation locale
.Lecourantde spin s’écritalors ,où
ρ
ρ
3.Citonsle casdesparoismagnétiques, cesfines zonesfaisantla
transition entre desdomainesoùlaimantation pointe dansdes
directionsdifférentes.Ilaété observé que desparoismagnétiques
pouvaient se déplacer sous leffetd’uncourantélectrique
suffisammentfort.
ρ
ρ
ρρ
}
<
M
<
Mx()
<
M
<<
JxMx
MPJ
e
ssB
() ()
=
µ
Figure3Image aumicroscope électroniqueà balayage d’un dispositif réalisé pour
lobservation ducalage Dopplerdondesde spin. Onreconnaîtle ruban horizontal de
permalloy(épaisseur 20 nm) etdeux serpentinsen aluminium quiconstituentlesanten-
nesàondesde spin.
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