Nouméa 7 février 2014 Communiqué « Droits des peuples autochtones : lecture juridique et anthropologique » Marid 11 février 2013 à 18h Grand Amphithéâtre du Campus de Nouville Par Isabelle Schulte-Tenckhoff, Professeur à l’Institut de Hautes Études Internationales et du Développement, Genève (Suisse). La Déclaration sur les droits des peuples autochtones (http://www.un.org/esa/socdev/unpfii/documents/DRIPS_fr.pdf), adoptée en septembre 2007 par l'Assemblée générale des Nations Unies, marque l'aboutissement d'un long processus de revendications engagé par les mouvements autochtones dès les années 1970. Elle n'en soulève pas moins un certain nombre de questions, dont deux seront abordées lors de cette conférence. La première a trait à l'éternel problème de ce qu'il faut entendre par "peuple autochtone", notamment en l'absence d'une définition des bénéficiaires de la Déclaration. Cette question sera abordée en tenant compte spécifiquement du sens à donner aux droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. A ce propos, le glissement sémantique de cette dernière notion (retenue dans le projet initial de la Déclaration de 1993) et celle d'autodétermination, que l'on retrouve dans le texte final de 2007, mérite d'être considéré de plus près. La seconde question concerne l'articulation des catégories de droits énoncés dans la Déclaration (droits de l'Homme, droits minoritaires, droits dits de groupe), leurs recoupements et leurs écarts. Ce qui relie ces deux, c'est le problème plus large d'une "culturalisation", c'est-à-dire la réduction des revendications autochtones à des demandes de reconnaissance de la différence culturelle. Du coup, les effets de l'usurpation des territoires et des ressources des peuples autochtones se trouvent évacués d'emblée. Contacts Service communication Joana BELO – Tél. : 29 00 51 Soazig Le Mouellic– Tél. : 29 00 52 [email protected] Nouméa 7 février 2014 PRESENTATION DE L’INTERVENANTE Isabelle Schulte-Tenckhoff est professeur d’anthropologie à l’Institut de Hautes Études Internationales et du Développement (IHEID), à Genève (Suisse). Elle est titulaire d'un doctorat en Anthropologie et Sociologie de l’Université de Lausanne, ainsi que d'une Habilitation à diriger des recherches de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, à Paris. En dehors de questions relatives aux préoccupations plus classiques de l'anthropologie, ses intérêts de recherche portent principalement sur les droits des peuples autochtones et des minorités, selon une approche informée par l'anthropologie et l'histoire du droit international. Elle suit de près, depuis une bonne trentaine d'années et à divers titres, les débats sur la question autochtone aux Nations Unies. Pendant les années 1990, elle a été la consultante du Rapporteur spécial de l'ONU sur les traités entre peuples autochtones et Etats. En parallèle, elle a effectué des recherches sur la situation des peuples autochtones au Canada où elle a travaillé pendant une dizaine d'années, tant dans le domaine universitaire (elle a notamment été professeur associé à l'Université McGill) qu'au sein de plusieurs communautés autochtones au Québec et dans l'Ouest du Canada, pour lesquelles elle a réalisé des mandats sur la gouvernance, le rôle des traités historiques et la signification locale des normes internationales relatives aux droits des peuples autochtones. Depuis son retour à Genève, en 2003, ses recherches dans ces domaines ont pris une tournure plus historique. Elle explore actuellement la question des souverainetés contestées dans le cadre de la Société des Nations tout en revisitant, à travers les sources d'archive, les récits de la célèbre initiative du chef iroquois Deskaheh auprès de la SdN, en 1923. Elle s'intéresse par ailleurs au cas des Maori et spécifiquement au Traité de Waitangi, ainsi qu'à celui des Mapuche au Chili et aux accords que ceux-ci ont conclus avec la Couronne espagnole, puis le gouvernement chilien. A l'IHEID, elle a récemment créé un cours d'anthropologie du droit international qui aborde, en dehors de la question autochtone, d'autres thématiques appelant une approche bi-disciplinaire critique, telles les droits de l'Homme, la justice transitionnelle et les droits dits culturels - les rapports complexes entre droit(s) et culture étant au cœur de ses préoccupations théoriques. Isabelle Schulte-Tenckhoff est l’auteur de nombreux travaux sur les droits des peuples autochtones et des minorités. Parmi ses ouvrages, on peut mentionner La question des peuples autochtones (Bruylant/LJDG, 1997) auquel fait suite une Introduction au droit des peuples autochtones (Bruylant, à paraître en 2014). Elle a dirigé par ailleurs le recueil Altérité et droit (Bruylant 2002) et contribué un chapitre sur les minorités en droit international à l'ouvrage collectif Le droit et les minorités: analyses et textes (Bruylant, 2e éd. en 2000). En outre, avec Geneviève Koubi, elle a cofondé et codirige la collection "Droits, Territoires, Cultures" chez Bruylant, qui propose des ouvrages (onze à date) invitant à repenser les systèmes de droit et leurs rapports avec leur environnement social et politique.